Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
8 mai 2025 4 08 /05 /mai /2025 06:48

Pascal Levaillant, artiste-auteur, botaniste, mosaïste et plasticien présente ses installations de Cairns "in situ" à la Jaÿsinia au jardin botanique alpin de Samoëns du 6 au 8 juin 2025 dans le cadre des Rendez-vous aux Jardins 2025

 

Je tiens à dédier cette installation " In situ" à Raphaël Larrère, né en 1942 et décédé le 4 janvier 2025, ingénieur agronome et émérite  chercheur en éthique environnementale et plus largement au couple Larrère connu sous ce nom Catherine & Raphaël Larrère.

 

2012 - Larrère Raphaël - Le land art : une esthétique de la nature (article) :  "ce que l’on qualifie de Land Art, c’est-à-dire à des œuvres qui se font in situ, conçues et installées dans des paysages sauvages, en pleine campagne, ou bien dans des friches industrielles."

In : Imagination(s) environnementale(s), Raison publique, 2012,  n°17 Presse Universitaires de Rennes 

et à Alexandre Chollier, géographe, enseignant, chercheur et écrivain suisse ;

 

à Anne Cauquelin, Philosophe française, artiste plasticienne, romancière, historienne de l'art contemportain et des jardins, essayiste du 20e et du début du 21e siècle

et

à Siméon Levaillant, photographe français d'architecture, d'industrie, du patrimoine historique et de reportage corporate avec qui j'ai coproduit entre 2014 et 2017, la série de 24 photographies [Plus vraie que nature] La Seine normande 2017

 

 

Du vendredi 6 au

dimanche 8 juin 2025

Cairns "in-situ" à la Jaÿsinia
par Pascal Levaillant, Artiste botaniste plasticien

 

Ces sculptures de pierre, mosaïques verticales et éphémères invitent le spectateur à délaisser l’horizon et le panorama, en cela elles transforment notre perception du paysage nous permettant de nous l’approprier plus intimement. P.L.

A propos d'une installation en Seine normande coproduite avec Siméon Levaillant, travail artistique mené entre 2013 et 2017 et qui a trouvé un espace d'exposition à Rouen en 2017:


"Le caractère précaire, éphémère, de ces empilements de pierres fait contraste avec la placidité de la nature qui s’étend autour. À moins que ce ne soit justement l’inverse? On pourrait certainement voir dans ces constructions humaines "l'axe sur lequel tourne le monde", une métaphore de la manière avec laquelle l'homme juge ce qui l'entoure, d'après la logique et la vérité de sa seule nature : la logique de l'espèce humaine. Cette série photographique propose de s’interroger sur la notion de vérité, en particulier sur la capacité de la nature à nous apporter des réponses sibyllines, sur son existence et sur notre propre existence. Sommes-nous prêts à accepter que l'homme est bien un animal et que sa pensée est donc déterminée en conséquence : par les pulsions et les instincts, par sa volonté primitive et par une capacité de connaissance limitée? La Seine a peut-être quelque chose à nous offrir, au-delà de toutes ses vertus pratiques, ludiques, esthétiques: une réflexion sur nous-mêmes."
Siméon Levaillant, 2017, [Plus vraie que nature] la seine normande, coproduction avec Pascal Levaillant, artiste Land art.

Siméon Levaillant - Photographe professionnel depuis 2005, installé à Strasbourg, spécialisé en immobilier, hôtellerie, industrie, patrimoine historique et reportage corporate.

Faits d’éléments naturels, de simples pierres, ils sont pourtant une construction de l’Homme, construction érigée depuis au moins le néolithique qui produisent aujourd’hui un effet d’incongruité. Ces constructions davantage un prétexte pour proposer au spectateur une réflexion profonde sur le jardin botanique de la Jaÿsinia et une invitation au dialogue de sa nature en équilibre entre sauvage et ordonnancement.
La proposition est d'offrir au visiteur un instant déconnecté à ne plus subir l’accélération du monde, et réfléchir au sentiment de vérité que peut nous apporter la vision d’une nature sauvage, ou ordonnancée, mais pourtant si loin de notre quotidien frénétique."
P.L.

 

 

 

Pour les scolaires :
- le Vendredi 6 Juin 2025,
 

Pour tout public :
- le samedi 7 juin 2025 et le dimanche 8 juin 2025,
de 9h à 13h (réalisations des cairns en présence du public), et de 15h à 19h (visite commentée), le tout en présence de l'artiste Pascal Levaillant.

- Visites guidées par le responsable du jardin botanique alpin le samedi et le dimanche. Départs à 9h et à 14h30.

 

Une expérience immersive et une performance artistique au jardin botanique alpin de la Jaÿsinia à Samoëns - Haute-Savoie

 

Gratuit : entrées, animations, visites guidées

  • Jardin botanique alpin dit La Jaysinia
    40 rue du parc, 74340 Samoëns 74340 Samoëns
  • Du vendredi 6 au dimanche 8 juin 2025

 

LISTE DES JARDINS LABELLISÉS « Jardin remarquable » au 28 avril 2025

HAUTE-SAVOIE 74



74 : Samoens – La Jaÿsinia 
74 : Vaulx – Jardins secrets
74 : Yvoire – Jardin des Cinq Sens

 

DGPA/SDMHSP/BCMHI/MHB/28/04/2025/474 jardins

 

Description

"Aménagé sur une pente calcaire de 3,5 hectares, à 800 mètres d'altitude, la Jaÿsinia regroupe une riche collection de plantes de montagne. Plus de 8 000 plantes représentant 5 000 espèces provenant des zones montagneuses des cinq continents y sont répertoriées. Alliant découverte et plaisir, la Jaÿsinia invite le visiteur dans un décor naturel inspiré des jardins romantiques anglais. Petit ruisseau, cascades et sentiers en lacet traversent différents milieux naturels. Organisée en huit secteurs géographiques, la flore de l'Himalaya, de Chine, du Japon et de la chaîne alpine fait l'objet d'une attention particulière.

Historique

Le jardin doit son nom à sa créatrice Marie-Louise Cognac-Jaÿ, fondatrice avec son mari des grands magasins de la Samaritaine à Paris. Originaire de Samoëns, elle décide de bâtir, sur la colline où dit-on elle menait les chèvres étant enfant, un prestigieux jardin botanique alpin. En 1903 elle achète le terrain, consulte savants et botanistes dont Albert Kahn, et confie la direction des travaux à l'architecte paysagiste genevois Louis-Jules Allemand. En 1906, après trois années d'effort, le jardin est inauguré et offert au village de Samoëns.

Aujourd'hui le jardin est sous la direction du Muséum d'histoire naturelle de Paris.
"

In : https://www.parcsetjardins.fr/jardins/1235-jardin-botanique-alpin-de-la-jaysinia

Jardin sous la direction scientifique du Muséum National d'Histoire Naturelle

 

 

"On voudrait savoir marcher comme Richard Long, dressant à l’occasion des cairns comme lui. On aimerait perdre son temps, immergés dans un paysage, à composer pour soi des assemblages aussi délicats que ceux de Goldsworthy.

Toute la difficulté que ces artistes rencontrent, est d’inviter à partager leur expérience et leur amour de la nature, dans ce qu’elle a de banal et d’évanescent.

La nature, depuis des siècles, est vue avec les yeux de l’art.

Mais l’artiste qui veut initier à son respect, comme à sa beauté propre, doit faire en sorte que son artifice s’efface. Son art doit être visible, mais pas trop, et d’autant plus visible qu’il est moins évident, qu’il est plus naturel. Simple artifice de mise en scène, cet art est fait pour s’estomper.

Il n’invite plus à contempler le spectacle de la nature, mais à y pénétrer, à y participer. Pour y parvenir, il faut justement découvrir ce dont ne témoignent pas les photographies des œuvres du Land Art : l’expérience d’une immersion dans un environnement naturel que l’on met à distance en mobilisant toutes ses facultés de perception, tant pour s’y situer que pour parvenir à l’émouvante découverte de ce qui est « déjà là ». "

2012 - Larrère Raphael - Le land art : une esthétique de la nature (article) :  in : Imagination(s) environnementale(s), Raison publique, 2012, n°17 Presse Universitaires de Rennes 

 

Quelques repères 

L'artiste française Marinette Cueco est une pionnière du land art car depuis les années 1960 elle construit des oeuvres éphémères avec des matériaux trouvés dans la nature tout en privilégiant le végétal.

Source : https://www.galerieuniver.com/les-artistes-de-la-galerie/marinette-cueco/

L'anglais Richard Paul Long étudie la sculpture à la Saint Martin's School of Arts jusqu'en 1965. Il travaille déjà à l'échelle du paysage. Il fait ses premières œuvres en extérieur en 1967 et 1978, et voyage systématiquement depuis 1968 sur tous les continents, arpentant des sites naturels choisis.

Source in : Wikipédia

À partir de 1979, l'anglais Andy Goldsworthy commence à réaliser des sculptures naturelles éphémères, composées de sable, de neige, de pierres, de feuilles ou de glace.

Source in : Wikipédia et https://www.musee-gassendi.org/fr/accueil/art-contemporain-nature-pays-dignois/les-oeuvres/andy-goldsworthy-cairns-deau-water-cairns/

Dominique Bailly, l'artiste française du Land art depuis les années 1990 a créée : Spirale sonora, 2009, pierres sèches, longueur 50m, Hauteur 45cm, Parc de sculpture d’Arte Sella, Borgo Valsugana, Trento, Italie

L'artiste français Marc Pouyet créé avec et dans la nature depuis 2007, ses ouvrages témoignent notamment des ressources minérales qu'il deploie par le prisme des mandalas minéraux ...

L'anglais Richard Shilling s'exprime  depuis la fin des années 2000 avec notamment  des pierres, mineraux https ://www.richardshilling.co.uk/

 

 

La pratique artistique du cairn  

Une invitation au dialogue sensoriel avec la nature, l'environnement, la biodiversité et le paysage

 

Extraits de récits et d'observations notamment de

Jules Michelet, 1832 ;

Charles Flahault, botaniste en 1893 ;

Jack Kérouac, écrivain un ou le premier à avoir perçu en 1963, à propos du cairn, une dimension esthétique, décorative voire artistique comme vous le découvrirez plus loin...

 

Anne Cauquelin, historienne de l'art en 2000 et 2003

avec son aimable autorisation ; 

Alexandre Chollier, géographe en 2010,

avec son aimable autorisation ; 

Pascal Levaillant en 2010

en plus d'un siècle...

les premiers...

 

Un des premiers récits  de Petermann où figure la référence à l'usage du cairn.

 

Rencontres avec les cairns

tout d'abord en image et en archive 

1970

Cairn du Col du Carro (3149m) - Haute Maurienne - 

© Georgette Levaillant 1970-1972

Je me trouve en maillot, torse nu en altitude, en août 1970 devant le cairn du col frontalier avec l'Italie. ce fut mon premier "3000" à 13 ans

que j'ai refait en 1972 au départ des chalets de Trièves au-dessus du hameau de l'Echo à Bonneval-sur-Arc

 

En arrière fond le Grand Paradis.

--------------------------------

 

1974

Cairn du Lancebranlette - 2936 m

Sommet de Haute-Tarentaise avec une magnifique vue à 360 ° sur les massifs environnants et sur le Mont-Blanc, côté italien.

source image : https://retraite-savoyarde.over-blog.com/2016/08/lancebranlette-2936-m-adapar.html

 

 

1978

Cairn de La Belle Plinier (Modane-Fréjus),

grimpé avec les Chasseurs Alpins

Altitudes variables de 3086 à 3111 ou 3750 m

Cairn du Rateau d'Aussois - 3128 m  

image : https://decouvrirlesalpes.com/le-rateau-daussois-3128m

---------------------------------

2001

Le Puigmal (Pyrénées Orientales)

 

Cairn du Puigmal [d'Err] 2910 m - Pyrénées Orientales - © 2001 Levaillant

Je suis au sommet du Puigmal, sommet frontalier avec l'Espagne,  deuxième sommet après celui du Carlit (2921 m) étudié en cours de géographie au collège ;  en compagnie de mon fils Siméon et d'Hervé A.

Cairn du Buet - Haute Savoie - © 2005 Catherine Ernst

Depuis 1972, j'ai découvert l'oeuvre de Michel Butor grâce à "La Modification"  et plus tard en 2010, la  belle collaboration  de Catherine Ernst avec Michel Butot (Epîtres florales, Michel Butor, Catherine Ernst, Editions Slatkine, Genève, 2005, p. 71) d'après la vue : Le Buet, vue prise du Glacier du Tour où l'on discerne nettement un cairn, empilement de pierres, construction vernaculaire universelle. 

Catherine Ernst, peintre au talent exceptionnel a construit sa peinture autour de cette construction vernaculaire comme une toile de fond authentique et singulière, atypique sur lequel  sa peinture, son motif botanique s'est
 
appuyé.
 
 In : https://catherine-ernst.art
 
 
 

 

 

En Grêce, en Islande, en France : 

 

En Grèce antique, les hermès

(Source Haudry (2016) et Ropars (2016)

 

La forme la plus ancienne de son culte s'adressait à ses représentations dites hermai, en Arcadie ou en Attique, sous la forme de colonnes de pierre quadrangulaires surmontées d'une tête barbue, pourvue éventuellement d'un phallus et souvent accompagnées d'une inscription. Ces hermès se trouvaient au bord des routes, sur les frontières, aux croisements, aux portes des villes et des maisons, mais également sur les places, dans les gymnases, les bibliothèques, les sanctuaires. Ils constituent la base de son culte. Il était de coutume de placer des empilements de pierres en son honneur aux carrefours : chaque voyageur ajoutait une pierre à l'édifice. Ces tas de pierres ont été peu à peu supplantés par des bornes en pierre de forme phallique placées le long des routes, pour aboutir à la forme équarrie et quadrangulaire des hermès, surmontés de la tête du dieu et portant, en leur centre et en relief, ses attributs virils (voir le scandale de la mutilation des Hermès, Hermocopides, auquel fut mêlé Alcibiade).

In : Wikipédia - Jean Haudry, 2016, p. 465-466.

Hermès est aussi le « serviteur » qui se soumet à la volonté de Zeus, s’assimile à la « bouche de Zeus qui ne sait pas mentir 21 ». Devant cette avalanche de descriptifs, difficiles apparemment à regrouper logiquement, on a été tenté de privilégier tel aspect 22, et de faire d’Hermès, par exemple un dieu du cairn ou tas de pierres en bordure des chemins (herma) ; ou un dieu de la fécondité (le pilier hermaïque, ou hermès, est en effet orné d’un phallus) ; un dieu des voyageurs ; ou un dieu pastoral, gardien des troupeaux ; ou un dieu de la chance (l’hermaîon en grec, c’est la « trouvaille » ) ; ou un dieu de l’éloquence et de la raison ; ou un dieu « fripon » patron des voleurs, etc. ! […] Signalons le culte d’Hermès à Tégée en Arcadie 49 : Pausanias (VIII, 47, 4) y a vu un temple d’Hermès Aipytos, tandis que sur le mont Parnon (II, 38, 7) des hermès de pierre marquaient la frontière entre Lacédémone, Argos et Tégée. Or, selon Hérodote (I, 67-68), la Pythie aurait répondu aux Spartiates venus chercher les ossements du fils d’Agamemnon, Oreste.[…]

In : Le dieu Hermès et l’union des contraires [article] Jean-Michel Ropars, GAIA. Revue interdisciplinaire sur la Grèce ancienne.  Année 2016, 19 pp. 57-117

-----------------------

Au 9 et 10e sièles en Islande : les steinvarða

La construction de cairns est une activité importante en Islande depuis des siècles. Les cairns sont des aides à la navigation, des piles de pierres qui semblent aléatoires mais qui sont en réalité soigneusement placées. Rappelez-vous, même si nous nous fions aujourd'hui au GPS, cela n'a pas toujours été le cas. Pensez aux cairns d'Islande comme une forme ancienne de GPS pour les voyageurs solitaires et vous commencerez à comprendre pourquoi ils sont si importants.

Les premiers colons islandais ont placé ces steinvarða aux 9e et 10e siècles lorsqu'ils se sont lancés dans des expéditions d'exploration. Avec le temps, même certains noms de lieux en Islande les reflètent. Entre les glaciers Eyjafjallajökull et Mýrdalsjökull dans le sud de l'Islande, vous traversez Fimmvörðuháls, par exemple, qui se traduit par "Passage des cinq cairns".

In : https://www.reykjavikcars.com/fr/blog/culture-islandaise/construction-cairns-islande

 

La France du Haut Moyen-Âge, le "Montjoie"

 

MONTJOIE Prononciation : (t ne se fait pas entendre) nom féminin et interjection
Étymologie :12e siècle. Probablement issu du latin Mons Gaudii, « mont de joie », nom donné par les pèlerins au mont de Rama, au nord-ouest de Jérusalem. Parce que les pèlerins criaient « Montjoie » quand ils apercevaient la ville sainte, ce terme devint un cri de joie, puis un cri de guerre.


1.  N. f. Anciennement. Monceau de pierres, parfois surmonté d’une croix, qu’on élevait au bord des chemins pour rappeler une victoire, un évènement important.


2.  Interj. Cri de guerre usité autrefois parmi les Français dans les batailles. Montjoie Saint-Denis ! se disait par référence à la Mont-Joie-Saint-Denis, c’est-à-dire à la colline où saint Denis subit le martyre.

----------

 

Origine du Montjoie : « Camille Jullian et M. Albert Grenier ont déjà signalé l'importance et l'origine inexpliquée des montjoies. La forme la¬ tine mons gaudiï n'est qu'une mauvaise latinisation, en contradiction avec les textes qui offrent toujours des exemples féminins : la montjoie. L'étymologie germanique, mundgawi, proposée par M. Gamillscheg et adoptée avec quelques réserves par M. René Louis1, ne satisfait pas davantage. Qu'il s'agisse du germanique ancien ou de l'allemand moderne, Gau a toujours un sens très large, s'appliquant à de vastes terri » toires, et non pas à des districts restreints, dans des buts de surveillance stratégique ou commerciale ; il est, d'ailleurs, du masculin. On est également frappé par l'absence, en pays tudesque, de formes issues d'un hypothétique mundgawi ; le toponyme Mundschaü, près d'Aix-la-Chapelle, n'est qu'une germanisation du terme wallon. Les montjoies ne sont nulle¬ ment cantonnées aux frontières des provinces ; dans la région parisienne, on en trouve un peu partout en toponymie, à Bures, à Saint-Denis.

 

« L'examen des nombreux, noms de lieux révèle une assez grande uniformité, la faible fréquence des formes typiques picardes et provençales, une extension dans la France entière d'un toponyme qui semble avoir pris naissance entre Seine et Loire. « Montjoie apparaît fréquemment dans les chansons de geste, notamment dans la Chanson de Roland, sous la forme Monjou, comme cri de guerre des chevaliers français. [...]

Le nom commun est cité dans les textes du Moyen âge, montjoye, monjoye, mongoye, avec le sens initial de tas, de butte, de motte, en plein accord avec la plus ancienne définition du terme : quaedam congeries lapidum quae vocatur mons gaudii Dei. Il semble, d'ailleurs, que .la montjoye puisse être faite de différents matériaux, puisqu'on spécifie en général sa composition : une grosse mongoye de terre appellée la tumbelle, et qu'elle soit de dimensions très restreintes, puisqu'une tombelle est une grosse montjoie. Nous avons, en effet, de fréquents exemples de montjoies pour servir de limites aux champs, de repères aux voyageurs, aux pèlerins principalement ; les montjoies signalées par la toponymie aux abords des grands sanctuaires comme Vézelay, Compostelle, Rome et Jérusalem n'ont pas une autre origine. Un sens figuré, de profusion, de richesse, d'abondance, dont la langue du Moyen âge nous donne des exemples nombreux, explique peut-être le cri de guerre des chevaliers français.

« Parmi toutes les significations de montjoie, celle de tertre artificiel surmonté d'une croix pour indiquer la route ou commémorer une fête religieuse a fini par l'emporter ; elle s'est répandue dans le Midi sous une forme mount-joio qui ne saurait être régionale. Il nous reste à choisir, pour expliquer l'ori¬ gine du terme, entre des radicaux indiquant soit la forme et la nature de la montjoie (congeries terrae, lapidum, etc.), soit, au contraire, sa fonction (borne champêtre, routière, etc.). Manica, manche, présente des formes anciennes ou dialectales meinche, mainche, mance, menge, mange, monge qui pourraient éventuellement convenir. Un vieux glossaire donne à manica le sens de capulus, locus in quo mortui efferuntur ; il s'agit ici du tertre funéraire sous lequel est déposé le cercueil. Ce dérivé de manus, avant de se cristalliser dans les deux sensque nous lui connaissons aujourd'hui, n'aurait-il pas signifié, comme le classique manuciolum, une poignée de terre ou de cailloux ? L'ensemble des manicae aurait ainsi constitué une mongeoie. Dans ce cas, cependant, certaines formes qui ont conservé la gutturale excluent l'hypothèse d'un suffixe -eta, oie.
« L'utilisation routière des montjoies peut également orienter les recherches autour du verbe manere, avertir, qui n'a pas survécu à la domination romaine. La terminaison représente¬ rait dans ce cas, par suite de la fusion de la consonne initiale, les noms communs via, route, ou vice, succession, fois, étape. Pour trancher ce débat, il faudrait découvrir des textes beaucoup plus anciens, explorer les montjoies les plus célèbres. Alors seulement l'une de ces hypothèses peut devenir une réalité. »
M. René Louis, membre résidant, présente diverses observations et estime, d'accord avec M, Roblin, que l'on peut hésiter entre plusieurs étymologies, mais l'hypothèse de M. Gamillscheg lui paraît, jusqu'à nouvel ordre, plus vraisemblable que l'étymologie traditionnelle par montent gaudii.
M. Louis Chatelain, membre résidant, ajoute que le rite de jeter une pierre à l'endroit d'où l'on découvre un lieu de pèlerinage est encore en usage chez les Musulmans.
In : L'origine du mot montjoie, M.Roblin, Bulletin de la Société nationale des Antiquaires de France  Année 1950  1945-1947  pp. 45-47

-------------------------

Citations dans la littérature

Moyen-Âge - Roblin - « Le nom commun est cité dans les textes du Moyen âge, montjoye, monjoye, mongoye, avec le sens initial de tas, de butte, de motte.

In : L'origine du mot montjoie, M.Roblin, Bulletin de la Société nationale des Antiquaires de France  Année 1950  1945-1947  pp. 45-47

 

1535- 1600 - CNRL - Carn - Terme écossais, attesté au sens 1 sous la forme carne depuis le 16e siècle. (1535 ds NED), devenu cairne, cairn en écossais mod. (1600 ibid.), issu du gaélique carn « tas de pierre », auquel correspondent l'a. Irl., le kymr. Et le bret. Carn « id. », qui sont peut-être à rattacher à la racine i.-e. kar- « dur », v. caillou. In : www.cnrtl.fr/etymologie/cairn

1595-1597 – Petermann, 1872 -« Sur le rivage gisaient les débris de la charpente d’un navire ; ce qui conduisait à supposer que le navire en question avait fait naufrage sur ce point de la côte ; que ceux qui le montaient avaient construit la cabane, y avaient passé l‘hiver et étaient partis plus tard sur les embarcations. Le capitaine Carlsen fit élever un varde (cairn, pyramide) de pierre et de bois, placer à l’intérieur une bouteille de fer blanc renfermant le récit de la trouvaille, et dresser sur le tout une perche de 20 pieds de haut. L’observation donnait 76° 7’ lat. N. Cette latitude et l’examen des objets trouvés révélaient immédiatement l’origine de ces ruines. C’était là que les fameux navigateurs hollandais, Heemskerke et Barents avaient passé l’hiver 1596-97 dans leur voyage à la recherche du passage du Nord-Est. Ces ruines sont dignes de tout notre intérêt .

In : Extrait de Mittheitungen de Petermann, n°5, 1872) In : Découverte de la cabane d'hivernage de Barents et de ses compagnons [article] Le Globe. Revue genevoise de géographie Année 1872 Volume 11 Numéro 1 pp. 195-204.

1535- 1600 - Carn - Terme écossais, attesté au sens 1 sous la forme carne depuis le 16e siècle. (1535 ds NED), devenu cairne, cairn en écossais mod. (1600 ibid.), issu du gaélique carn « tas de pierre », auquel correspondent l'a. Irl., le kymr. Et le bret. Carn « id. », qui sont peut-être à rattacher à la racine i.-e. kar- « dur », v. caillou. In : www.cnrtl.fr/etymologie/cairn

 

1797 - Saint-Fond (de) - Carn « construction préhistorique, peut-être à usage funéraire. » in : (Faujas de Saint-Fond, Voyage en Angleterre, en Écosse et aux Iles Hébrides, t. 1, p. 343 ds Mack. t. 1, p. 189b)

1818 - Montémont Albert - « le 18, nous fîmes halte au second cairn (amas de pierres) du détachement, et nous y trouvâmes un billet qui nous annonçait qu’ils avaient été retardés par les maux d’yeux et de pieds. Le 20 juin nous campâmes près du troisième cairn, sur une pointe où il y avait quelques vestiges d’anciennes stations des naturels. Le lendemain nous trouvâmes le quatrième cairn, mais renversé et sans billet : nous pûmes cependant suivre leur route au moyen de pierres qu’ils avaient placées de distance en distance »

In: Bibliothèque universelle des voyages effectués par mer ou par terre dans les diverses parties du monde, depuis les premières découvertes jusqu’à nos jours - Albert Montémont, 1833, Armand-Aubrée, Editeurs, 222-223. Voyages en Amérique, XXème siècle, Ross, Voyages aux régions arctiques, (1818-1833) premier voyage (1818-1819). Cap Dudley-Digges Iles Browne, Région du Groenland. In https://books.google.fr/books ?

1832 – Michelet - « Les montagnards révèrent encore la pierre d’Ossian (Clachan Ossian) ; Ce fut un grand scandale quand le major Wade déplaça ce monument sacré, qui se trouvait dans la ligne d’une route militaire. Les montagnards indignés vinrent en grand nombre recueillir quelques ossemens et douze fers de flèches qu’on avait trouvés sous la pierre, Ils les emportèrent au son du piobrach, et les placèrent dans un cercle de larges pierres au sommet d’un roc, dans les déserts du Glen Ammon occidental. Au centre, ils dressèrent un roc énorme, un cairn (comme ils disent), et appelèrent le tombeau du barde, « cairn na huseoig », le cairn de l’hirondelle. »

In : Jules MicheletMonuments celtiques, in Revue des Deux Mondes, 1832)

1833 cairn (MicheletHist. de France, 1, 200 [1879] ds Quem.); 2. p. ext. 1860 « abri de pierre construit par les explorateurs polaires » (Tour du Monde, p. 23 ds Bonn.).

 

1837 – Thoreau - « Henri Thoreau nous conte la coutume groenlandaise qui veut qu’un simple caillou déposé sur un tas de bois flottés vaille pour prise de possession. Personne ne s’avisera d’y toucher par la suite. »
In : Thoreau H.D., journal 1837-1861, Les Presses d’aujourd’hui, 1981. In : Autour du cairn, Alexandre Chollier, Héros-limite /géographie(s), 2010.

 

1849 – Thoreau - « Les vestiges des routes militaires, des maisons, des cours et des thermes en mosaïque, la Nature n'a pas à rougir de ces reliques de ses enfants. Le cairn du héros, on se demande si ce sont ses proches ou la Nature elle-même qui ont élevé la colline. »

In : Une semaine sur les rivières Concord et Merrimack, 1849.

 

1893 - Flahault Charles « Le jour paraît à peine ; de pierre en pierre on saute le ruisseau et on commence à gravir les pentes du ravin qui nous conduit au col de Llo ou des Fenestrelles. Bientôt, on herborise, et comme voilà, là-haut, le col, avec sa petite pyramide de pierre, je laisse monter ceux qui préfèrent marcher lentement que d'avoir à s'arrêter. »

Charles Flahault, Herborisations en zigzag, journal d'un botaniste, Région méditerranéenne (1876 et 1887-1896), Perpignan, le 21 juillet 1893, p.118

1963 - Kerouac « À chaque bond, on pouvait distinguer quelque part en avant signe généralement deux pierres plates l'une sur l'autre, au sommet d'un rocher, et une pierre ronde par-dessus à titre décoratif. » 

jack, Les clochards célestes, 1963, Folio, Gallimard, p.104

"Tu ne vois pas un petit tas de pierres sur ce rocher, près du pin? C'est un repère construit par d'autres alpinistes qui sont passés par ici. Peut-être même l'un de ceux que j'ai placés en 1954, mais je n'en jurerais pas. Il nous faudra progresser de rocher en rocher maintenant, en guettant attentivement ces repères qui nous indiquent la bonne voie." 

Kerouac, Les clochards célestes, 1963, Folio, Gallimard, p.100

--------------------------------

 

1993 - 2012  - Tiberghien Gilles A. offre un aperçu des connaissances sur et autour du Land Art  dans son ouvrage « Land Art », réédité en 2.012,  il définit le Land Art comme une épure et l’ambition de se débarrasser de l’art du chevalet et des grands principes du modernisme et faire entrer l’art hors des musées et de le faire autrement que dans des expositions muséales. Travailler dans la nature devient la toile, la matière, l’opus.

Gilles A. Tiberghien, agégé de philosophie, enseigne l'esthétique à l'université de Paris 1 - Panthéon Sorbonne et intervient à l'école nationale du paysage de Versailles. Il est membre du comité de rédaction des Cahiers du musée d'Art moderne et des Carnets du paysage. Il a publié entre autres Nature, art, paysage (Actes Sud / ENSP, 2001) ; Notes sur la nature, la cabane et quelques autres choses (Le Félin, 2005) ; Dans la vallée (avec Gilles Clément, Bayard, 2009), L'art dans la nature ("Photopoche", Delpire/Actes-Sud, rééd. 2010), Petite bibliothèque de l'amoureux (Champs, Flammarion, 2013).

----------------------------------------------------------

2000 – Golworthy - « L’installation dans un « lieu » naturel, le bord de mer, la plage, le rocher, la clairière inscrit l’objet comme lieu rhétorique, comme topos il appartiendra désormais au glossaire paysager »

2000 - in Andy Golworthy, « beach cairn collected peebles », 1985, in Anne Cauquelin, L'invention du paysage, Editions Quadrige, PUF, Paris, 2000, p.153-154.

 

2000 – Cauquelin - « Les artistes du land art nous montrent le site qui est non site dans l'espace d'un territoire devenu œuvre »

2000 - In : Anne Cauquelin, le site et le paysage, p.16


2010-2025 – Levaillant - « Le cairn, si éphémère soit-il, posé dans son environnement est une fenêtre intime ouverte sur le monde devant lequel on peut s'arrêter momentanément le temps de le contempler et de le fixer dans un instant d'éternité pour témoigner de la présence humaine, que la photographie vient sacraliser et immortaliser. »


2010 - 2025 - Pascal Levaillant

 

 

2010 - Chollier - « L’architecture du cairn est élémentaire, si élémentaire qu’elle peut-être la toute première dans l’histoire de l’humanité qui ait été pensée et réalisée […] il suffit de se rappeler que la construction en pierre sèche s’oppose à la pérennité propre à la pierre » 

In : Chollier Alexandre, Autour du cairn, 2010, p.20

 

2011 – Williams - « Au début des années 1870, la renommée de Thoreau avait attiré un flot régulier de pèlerins à Walden. Ils ne trouvèrent que peu de traces de la vie de Thoreau jusqu'en juin 1872, lorsque Bronson Alcott, père de Louisa May, rendit visite à son amie Mary Newbury Adams et lui montra l'emplacement de la petite cabane. Constatant qu'il était regrettable que rien ne marque l'endroit, Adams suggéra de construire un cairn et « que tous ceux qui aimaient Thoreau y ajoutent ensuite une pierre ». Alcott, ami de longue date d'Henry, accepta et ajouta une pierre à celle laissée par Adams. Il nota dans son journal des 12 et 13 juillet : « La renommée d'Henry ne manquera pas de s'accroître avec les années, et ce lieu sera visité par des lecteurs admiratifs de ses œuvres. »

In : https://geologywriter.com/streetsmartnaturalist/stories-in-stone-blog/thoreaus-cairn/

 

2012 – Levaillant –  « J’ai créé l’acronyme C.A.I.R.N. en 2012 afin de situer mon travail artistique vis à vis de toutes ses perceptions, de ses représentations, de ses significations à travers le monde et les époques … »

Construction Artistique Incorporant des Roches Naturelles © Levaillant 2012

-----------------------------------------

 

2012 - Larrère Raphael - Le land art : une esthétique de la nature (article) :  "ce que l’on qualifie de Land Art, c’est-à-dire à des œuvres qui se font in situ, conçues et installées dans des paysages sauvages, en pleine campagne, ou bien dans des friches industrielles."

in : Imagination(s) environnementale(s), Raison publique, 2012, n°17 Presse Universitaires de Rennes 

 

 

 

 

Extraits d'Anne Cauquelin,

historienne de l'art contemporain

 

« L’installation dans un « lieu » naturel, le bord de mer, la plage, le rocher, la clairière inscrit l’objet comme lieu rhétorique, comme topos il appartiendra désormais au glossaire paysager »

2000 - in Andy Golworthy, « beach cairn collected peebles », 1985, in Anne Cauquelin, L'invention du paysage, Editions Quadrige, PUF, Paris, 2000, p.153-154.

 

« Les artistes du land art nous montrent le site qui est non site dans l'espace d'un territoire devenu œuvre »

2000 - In : Anne Cauquelin, le site et le paysage, p.16


« Le cairn, si éphémère soit-il, posé dans son environnement est une fenêtre intime ouverte sur le monde devant lequel on peut s'arrêter momentanément le temps de le contempler et de le fixer dans un instant d'éternité pour témoigner de la présence humaine, que la photographie vient sacraliser et immortaliser. »


2010 - 2025 - Pascal Levaillant

 

Ma connexion avec la Haute Savoie s’inscrit dans mon parcours de randonneur dans les Alpes en Savoie et en Haute Savoie depuis les années 1968. Depuis mon enfance je suis attaché à la montagne comme je peux l’être pour l’estran dans ma région la Normandie.

Mes diverses ascensions à proximité de la Vanoise ; en Tarentaise ;  en Maurienne ; en Chartreuse ;  en Bauges ;  en Bugey ;  dans la vallée de l’Arve m’ont amené durant des décennies à ériger des cairns et bien au-delà.

J’ai créé l’acronyme C.A.I.R.N. en 2012,

J’ai créé cet acronyme afin de situer mon travail artistique vis à vis de toutes ses perceptions, de ses représentations, de ses significations à travers le monde et les époques …

Construction Artistique Incorporant des Roches Naturelles © Levaillant 2012

 

Série  de 24 photographies de cairns par Pascal Levaillant et Siméon Levaillant photographe en 2015

 

"Les belles rencontres, Anne Cauquelin, 2021
 
Extrait du texte d'Anne Cauquelin inséré au catalogue de   l'exposition "Herbier contemporain délicieux" aux jardins de l'abbaye Saint-Georges de Boscherville organisée par le Conseil Départemental de la Seine-Maritime en 2021 (bicentenaire de la naissance de Gustave Flaubert).


"Des rencontres

 

Pascal Levaillant en est coutumier. Et d’abord, celle de la rivière Seine, ses bras, ses détours ses inflexions. Suivant ses rives, Levaillant lui fait l’offrande de quelques pierres ; à tel et tel lieu de son cours, il plante (car il s’agit bien de planter) ses modestes cairns. Ce sont des dons selon l’esprit des pèlerins cheminant vers Compostelle qui sur leur parcours déposaient des pierres en signe de vénération, repentance ou pour simples traces de leur passage.
Accomplissant ce geste, l’artiste reprend le chemin rituel, joint le médiéval au contemporain, et transforme les éléments naturels en ce qu’ils sont essentiellement ; l’eau vive du courant, retenue un moment par les pierres plantées, révèle sa nature rocheuse, tandis que la pierre, elle-même vibre d’une vie souterraine, frémissant sous sa carapace. Début d’une mythologie personnelle, qui s’enrichit de gestes en gestes et d’œuvres en œuvres, à mesure de la diversité des rencontres.
 


Changement de registre
 
Car il n’est plus question, pour lui, de fixer une pierre en pleine eau vive et courante, ce geste n’est plus de mise ici. 
C’est une action plus tranquille, quiète, respectueuse, que les prés et les vergers appellent ; la cueillette, le recueil, voisin du recueillement ; pratique lente, patiente, modulée par les saisons. 
Ce sont ces gestes de déposition et d’archivage que choisit Levaillant constituant ainsi un authentique reliquaire. […] pour Pascal Levaillant, la vénération le conduit au respect, et l’abondance des récoltes à la patience fertile. Son modèle serait à chercher du côté du vieillard de Tarente, décrit par Virgile dans les Géorgiques, ce paysan qui cultive calmement son lopin agreste jour après jour et dont le rythme temporel est celui du « Festina Lente ».
 
Festina lente (Hâte toi lentement)
 
Telle est la devise princeps du jardinier. Les herbiers contemporains de Pascal Levaillant répondent parfaitement à cette injonction. Car la vie cachée des herbes, sous forme de minuscules graines, est signe de naissances à venir, forme végétale du « festina lente » qu’elles incarnent. Tout vient en son temps, semblent-elles dire, et notre patience les accompagne.
Accrochées à la voûte de la chapelle Saint Georges, logées dans des boîtes transparentes, dites de Petri, elles sont traversées par la lumière, tels des vitraux vivants ; car la vie habite ces graines dont l’éclosion pourra nourrir hommes et bêtes. Le sens spirituel de cet accrochage ne peut échapper : la Providence veille du haut des cieux, à nourrir à la fois les corps et les âmes, tandis que les boites de Petri, translucides, sont l’image de la conservation et de la culture des organismes vivants, ce qui les absout de tout péché de scientisme.
Au dehors, tout le long du chemin qui traverse potager et verger, et comme produits d‘un Arte povera, des fumeroles aromatiques pendent à un fil dans leurs bouteilles tronquées. Cet accompagnement odoriférant prend la place de l’encensoir rituel, ajoutant sa touche à la célébration.
 
Du peu de choses,
de la vie

 
Les célébrations et offrandes de Pascal Levaillant sont des odes à la « nature naturelle ». Une nature telle que la décrivait Mikel Dufrenne, sous le nom de nature naturante, la distinguant ainsi de la nature naturée, celle qui, passée par des traitements de plus en plus industriels, se trouve transformée jusqu’en son capital génétique.
Le jardinier, le paysagiste, le poète ou le peintre sont proches de cette nature naturante ; ils captent la vie, de ce qui croît s’épanouit et meurt, en bref la phusis des anciens, bonne ménagère, économe et donnant à chacun selon le besoin. A tel ou tel moment et en tel ou tel lieu suivant le cas, « Ici et là » disait Flaubert qui faisait la part belle aux hasards.
Cependant cette nature naturante aime à se tenir cachée, tout du moins ne se montre pas avec évidence. Elle se donne à percevoir peu à peu et sans assurance de réussite. L’approcher exige patience, savoir-faire et obstination.
Les artistes contemporains sont nombreux actuellement à tenter une approche biosensible, soit en dénonçant l’exploitation des produits naturels par les industries agroalimentaires, sorte de transgénisme planétaire comme le fait Pat Badani avec son projet « Al grano », soit par une purification ou épuration du processus artistique lui-même, visant alors le peu, le presque rien, ou, à l’extrême, le vide.
Sans le dire, il semble que ce soit cette tendance que suit Pascal Levaillant. La vie sous forme de graines assemblées, des fumerolles s’évaporant dans l’air, des cailloux dans une rivière, choses de peu, sans ostentation."

 

 

Cairns "in situ", de-ci de-là

 

Cairn de  la Seine à Duclair - Seine-Maritime -  "in situ" © Pascal Levaillant 2010

Cairn du Marin - Finistère - "in situ" © Pascal Levaillant 2010

Cairn d'Hénouville - Seine-Maritime -  "in situ" © Pascal Levaillant 2010

Cairn de l'Ain - Ain - "in situ" © Pascal Levaillant 2011

Cairn du guetteur - Cancale - Ile-et-Vilaine -  "in situ" © Pascal Levaillant 2011

Cairn du Landin - Seine-Maritime - "in situ" © Pascal Levaillant 2011

Cairn de Robert Val - Seine-Maritime - "in situ" © Pascal Levaillant 2012

Cairn de Veules-les-Roses - Seine-Maritime "in situ" © Pascal Levaillant 2012

Cairn de la Montagne Noire - Aude -  "in situ" © Pascal Levaillant 2012 

 

Cairn du plateau de Beille - Ariège - "in situ" © Pascal Levaillant 2012

 

in : www.art-culture-france.com, extrait critique André Ruellan, critique d’art, 2014

« Au cours de ses cheminements, il en ponctue le parcours avec imagination et singularité par la grâce de ses fameux et fugaces C.A.I.R.Ns, œuvres d'équilibre et constructions artistiques incorporant des roches naturelles qui intriguent tant les promeneurs, sculptures spontanées et hélas éphémères […] issus de la nature et du "Land Art" que l'artiste déploie tout autant aux bords de mer qu'en montagne. »

Cairn du Menez Hom - Finistère - "in situ" © Pascal Levaillant 2013

Cairn de l'Ain[visible] - Ain - "in situ" © Pascal Levaillant 2013

3 cairns marins "in situ" © Pascal Levaillant 2013

3 cairns alpins - Ariège -  "in situ" © Pascal Levaillant 2012

 

Sentier d'Art de la Trinité de Réville - Eure - 2013

 

 

Cairn du phare de l'île de l'Aber-Wra'ch - Finistère - "in situ" © Pascal Levaillant 2014

et voici son prolongement dans un autre overblog, celui de miletune...en 2016

source image : Le blog de Pascal Levaillant artiste seinomarin 

https://miletune.over-blog.com/2016/06/sujet-semaine-23-2016.html

Avec l'autorisation de l'auteure, voici le texte de :

Terre de légende. de Jamadrou

Pascal est vaillant

Il avance bon an mal an

Les cailloux de son chemin

Ils les entassent si bien

Que la mer a dit à l’île de Sein

Que ses totems sont divins

Et qu’il faut respecter l’œuvre de chacun.

Gare au vilain démolisseur

Qui croulera sous les malheurs :

"Un matelot barbu l’emportera

Dans le phare de Tévennec le déposera

Le laissera là jusqu’à son repentir

Le Raz de Sein le verra vomir

Et c’est à Sein que les lapins

Ceux qui participent à l’érosion de l’île

Raconteront aux gentils hérissons

Que la baie des Trépassés

Est perpendiculaire à l’horizon

Depuis le jour mémorable

Où l’homme désespéré a cru

Qu’il deviendrait estuaire

En se jetant dans la mer."

Je lance cette légende toi tu l’as fait circuler

Ainsi les œuvres de Pascal

Du Finistère à l’autre bout de la terre

Seront par tous admirées et respectées.

Jamadrou

 

------------------------------------------

Voici un texte soumis et publié sur le site de Miletune.over-blog.com 

Sujet semaine 24/2016 - clic

 

Je me souviens du mois d'août 2014

Quelque part en Normandie,

Arrivés sur site à la mi-journée

Nous envisagions d'ériger un CAIRN 

En cette fin d'après-midi au bord du fleuve

À la confluence de l’Epte et de la Seine.

 

Nous avions choisi cette destination 

Aux confins de l'Ile de France et des Yvelines

À la porte du département de l'Eure 

Très exactement à Giverny en Normandie

 

Attendant nonchalamment l'instant photographique, 

De la prise de vue de cette construction éphémère

Dans le lit du fleuve

Nous décidons de visiter la Maison de Monet

Affublés de nos chapeaux de paille

Nous flânons dans les jardins ensoleillés,

Autour du bassin d’eau

Recouvert de nénuphars.

Pascal Levaillant, 2016

 

Ce fameux cairn de Giverny fut érigé dans le fleuve Seine en 2014 et fit l'objet d'un tirage pour notre exposition (mon fils Siméon Levaillant et moi) [Plus vraie que nature] la Seine normande dont les tirages furent exposés en intégralité dans la galerie de l'Hôtel de Ville de Rouen, puis à l'ESPE de Mont-Saint-Aignan et à la galerie de l'abbaye du Valasse.

implantation du cairn à Giverny © Credit photo Siméon Levaillant 2014

 

Localisation d'implantation plastique des cairns et des prises de vue pour cette série

1 - Giverny 
2 - Pressagny-l’Orgueilleux
3 - Courcelles
4 - Bernières-sur-Seine
5 - Saint-Pierre-du-Vauvray
6 - Amfreville-sous-les-Monts 
7 - Pont-de-l’Arche
8 - Saint-Pierre-lès-Elbeuf 
9 - Cléon 
10 - Belbeuf 
11 - Rouen
12 - Sahurs
13 - Bardouville, le bas
14 - Berville-sur-Seine
15 - Barneville-sur-Seine, le bas
16 - Le Landin
17 - Le Trait 
18 - Villequier 
19 - Petiville 
20 - Marais Vernier 
21 - Berville-sur-Mer
22 - Honfleur 
23 - Villerville 
24 - Sainte-Adresse 

Pascal et Siméon Levaillant - Exposition [Plus vraie que nature] La Seine normande -  Land art et photographies - Hôtel de Ville de Rouen -  galerie du 1er étage - du 22 juin au 31 août 2017

à cette occasion le mot du maire de Rouen, Yvon Robert, 2017

Pascal et Siméon Levaillant - Exposition [Plus vraie que nature] La Seine normande -  Land art et photographies - Hôtel de Ville de Rouen -  galerie du 1er étage - du 22 juin au 31 août 2017

 

In : https://levaillant-pascal.over-blog.com/2017/06/pascal-et-simeon-levaillant-exposition-plus-vraie-que-nature-la-seine-normande-land-art-et-photographies-hotel-de-ville-de-rouen-gal

--------------------------------

Cairn de Sainte-Honorine-des-Pertes - Calvados - "in situ" © Pascal Levaillant 2014

Cairn de Sainte-Adresse - Seine-Maritime - "in situ" © Pascal Levaillant 2014​​​​​​​

Cairn de la Dent du Chat - Savoie - "in situ" © Pascal Levaillant 2015

Cairn de la grotte d'Ambérieu - Bugey - "in situ" © Pascal Levaillant 2015

Cairn de la Caline - Bugey - "in situ" © Pascal Levaillant 2016

Cairn de Crozon - Finistère "in situ" © Pascal Levaillant 2017

 

Cairn du Cotentin - Manche -  "in situ" © Pascal Levaillant 2017

PS: il s'est produit une interruption entre 2018 et 2020 du fait de perte de fichiers images due à un problème infomatique.

 

Critique de Céline Allais, janvier 2019.

« La mosaïque, les cairns qu’il érige, l’amènent à entreprendre un vaste périple à pied dans la vallée de la Seine. Il écume tous les milieux naturels. »

Céline Allais, site du château de la Roche-Guyon : à l’occasion de laa résidence d’artiste de Pascal Levaillant au château de la Roche-Guyon entre 2017 et 2020, année de l’exposition de son herbier contemporain dans le cabinet de curiosités du 18e siècle du château de La Roche-Guyon du 7 mars au 30 août 2020.

 

Cairn du Cotentin - Manche - "in situ" © Pascal Levaillant 2021

Cairn de la Serra da Estrela - Portugal - "in situ" © Pascal Levaillant 2022

Cairn de Michelskopf - Bas-Rhin - "in situ" © Pascal Levaillant 2022

Cairn de Michelskopf - Bas-Rhin - "in situ" © Pascal Levaillant 2022

Cairn da barragem la Serra Malcata - Portugal - "in situ" © Pascal Levaillant 2023

Ci-dessous

Cairn do Vasco de Gama, Belém, Portugal "In situ" © Pascal Levaillant 2023

C.A.I.R.N : Construction Artistique Incorporant des Roches Naturelles

                                                                          -------------------------

Cairn de l'Orne - Clécy - Orne "in situ" © Pascal Levaillant 2023

Cairn de Chambon - Lac d'Eguzon - Indre - "in situ" © Pascal Levaillant 2023

Cairn de Atlantico - Peniche - Portugal - "in situ" © Pascal Levaillant 2024

Cairn de Finisterra - Galicia  - "in situ" © Pascal Levaillant 2024

Cairn de las cuevas - Llanes -  Asturias - Espagne  - "in situ" © Pascal Levaillant 2024

Cairn Arradon's Bay - Arradon -  Morbihan - France - "in situ" © Pascal Levaillant 2024

Cairn des foutues algues vertes bretonnes - Roaliguen -  Bretagne - France  - "in situ" © Pascal Levaillant 2024

Cairn du golfeur gaucho du Morbihan - Bretagne -  France - "in situ" © Pascal Levaillant 2024

Cairn de Kerouac à Locmiquel Larmor-Baden - Morbihan -  Bretagne - France - "in situ" © Pascal Levaillant 2024

Cairn de l'Esterel - Var - "in situ" © Pascal Levaillant 2025

Cairn de l'église Saint-Etienne de Gréolières - Alpes-Maritimes -

"in situ" © Pascal Levaillant 2025

Cairn du Drac - Aubessagne - "in situ" © Pascal Levaillant 2025

 

Cairn de la cigogne et le cigogneau- Oberbronn -  Bas-Rhin -

"in situ" © Pascal Levaillant 2025

Cairn de la descente du col de Sainte-Marie-des-Mines - 772 m  - Vosges - 

"in situ" © Pascal Levaillant 2025

Vue sur Saint-Dié-des-Vosges

Le 27 mai 2025 à la Roche-Guyon

 

Le cairn du canard de Seine - La Roche-Guyon - Val d'Oise

 "in situ" © Pascal Levaillant 2025

Le cairn de la duchesse d'Enville - La Roche-Guyon - Val d'Oise

 "in situ" © Pascal Levaillant 2025

 

Forts de mes précédentes expositions menées depuis 2011, j’ai pu concevoir et intégrer l’art du cairn dans le paysage, comme art éphémère et inscrit dans le Land Art.

Ma démarche minimaliste, à contrario de certains land artistes, a été encouragée en 2014 par l’historienne de l’art contemporain, Anne Cauquelin. 

Ma connexion avec la Haute Savoie s’inscrit dans mon parcours de randonneur dans les Alpes en Savoie et en Haute Savoie depuis les années 1968 : j'ai ainsi croisé des cairns au sommet de cols comme le massif cairn du col frontalier franco-italien Le Carro en Savoie.

Depuis mon enfance je suis attaché à la montagne comme je peux l’être  aussi pour l’estran dans ma région normande.

Mes diverses ascensions à proximité de la Vanoise ; en Tarentaise ; en Maurienne ; en Chartreuse ; en Bauges ; en Bugey ; dans la vallée de l’Arve m’ont amené durant des décennies à ériger des cairns et bien au-delà.

 

 

Pascal Levaillant, sculpteur de cairns

 

 

Mes principales expositions de cairns

 

Cairns à Sotteville-sur-Mer (exposition collective) en 2012

Sentier d’art à la Trinité de Réville dans L’Eure (exposition collective) en 2013

A l’abbaye du Valasse en Seine-Maritime (exposition personnelle) en 2015

A Rouen, Plus vraie que nature, la Seine normande en 2017 en coproduction avec Siméon Levaillant photographe professionnel en paysage, architecture  et patrimoine

 

Depuis 2018, j’ai réalisé des cairns en pleine nature à Lyon, dans l’Ain, en Savoie, en Isère, dans le Béarn, dans la Gironde, dans la Charente Maritime, en Bretagne, en Espagne, au Portugal, dans les Hauts-de-France, en Alsace, dans la Creuse, dans le Lot et le Quercy, en Allemagne dans les Montagnes Noires, dans les Vosges, dans les Alpes Maritimes…

Soit plus de 1200 cairns depuis mes premiers cairns érigés dans le Finistère.

Les deniers que j’ai érigés se trouvent dans l’Esterel, dans l’arrière-pays de Grasse en Alpes Maritimes, près de Gap et dans le Golfe du Morbihan au Roaliguen.

 

 

en 2010

en 2010

en 2011

en 2011

en 2012

en 2013

en 2014

en 2015

Puis c'est devenu difficile et délicat d'en ériger de-ci de-là ... à cause des interdictions compréhensibles à certains endroits en raison de trop d'insouciance.

Si trop de cairns nuisait au cairn.

Mais toutefois j'ai continué ici et là mais en faisant attention de remettre les pierres à leur place ou en prenant le soin d'obtenir une autorisation spéciale et circonstancielle en  quelques endroits.

 

Remerciements à Roselyne qui a toujours supporté mes élévations de cairns depuis mes débuts en 2010, à mes fils Siméon et Billal, à Alexandre Chollier et Anne Cauquelin, contributeurs textuels dans l'histoire de cet art ; à la Ville de Rouen et à Yvon Robert,  à K. Divernet ; à l'ESPE ( J.F. Brochec) ; à Caux Vallée de Seine (Mme Demunck et Mme Lopes) ; à Intercom Bernay, Terres de Normandie ; à Miletune (Overblog) ; à ma tante Georgette, la chambérienne, qui m'a montré la voie de la montagne, des Alpes et de la Vanoise et c'est ainsi que j'ai pris goût  aux carins et aux empilements de pierres depuis les années 1965.

Remerciements appuyés à Anne Cauquelin, l'historienne de l'art contemporain qui aura 100 ans en janvier 2026, et à Alexandre Chollier, spécialiste de l'histoire des cairns.

 Remerciements enfin à Paris-Normandie et au Courrier Cauchois qui ont relayé mon activité et tous les autres anonymes ; à tous les endroits de-ci de-là qui ont accueilli depuis 2010 mes cairns en exposition ou en catimini que seule la photographie ou la vidéo est venue conserver l'authenticité et la véracité des faits.

 

Rendez-vous aux jardins 2025 - Cairns "in-situ" au jardin botanique Alpin la Jaÿsinia

Tout l'agenda +

 
Samoëns07/06/2025Visites guidées
 
 

Dans le cadre des Rendez-vous aux Jardins 2025, organisés par le Ministère de la Culture du 6 au 8 juin 2025, le Jardin botanique alpin La Jaÿsinia accueillera Pascal Levaillant, artiste-botaniste plasticien.

  • Rendez-vous aux jardins 2025 - Samoëns - Mairie de Samoëns
    Crédit : Rendez-vous aux jardins 2025 - Samoëns - Mairie de Samoëns

Cairns "in-situ à la Jaÿsinia, par Pascal Levaillant, Artiste auteur
Ces sculptures de pierre, mosaïques verticales et éphémères invitent le spectateur à délaisser l’horizon et le panorama, en cela elles transforment notre perception du paysage nous permettant de nous l’approprier plus intimement.
Le caractère précaire, éphémère, de ces empilements de pierres fait contraste avec la placidité de la nature qui s’étend autour. Faits d’éléments naturels, de simples pierres, ils sont pourtant une construction de l’Homme, construction érigée depuis au moins le néolithique qui produisent aujourd’hui un effet d’incongruité. Ces constructions davantage un prétexte pour proposer au spectateur une réflexion profonde sur le jardin botanique de la Jaÿsinia et une invitation au dialogue de sa nature en équilibre entre sauvage et ordonnancement.
La proposition est d'offrir au visiteur un instant déconnecté à ne plus subir l’accélération du monde, et réfléchir au sentiment de vérité que peut nous apporter la vision d’une nature sauvage, ou ordonnancée, mais pourtant si loin de notre quotidien frénétique.

Informations pratiques

  • Date : samedi 07 juin
  • Lieu : Jardin botanique alpin "la Jaÿsinia" - Samoëns
  • Tarif : Entrée libre.
 
Quand ?
Du samedi 7 au dimanche 8 juin 2025, tous les samedis et dimanches.
Présence de Pascal Levaillant, artiste-botaniste plasticien :
> de 9h à 13h (réalisations des cairns en présence du public)
> de 15h à 19h (visite commentée)

Visites guidées par le responsable du jardin botanique alpin :
> 9h
> 14h30
Visite libre tout au long des journées.

Sous réserve de conditions météo favorables.
 

 

 

samoens.com /agenda

Partager cet article
Repost0
1 mai 2025 4 01 /05 /mai /2025 16:43

Chronique des Secrets du Plateau de Caux de l'année 2025 par Pascal Levaillant, 10 mai épisode 2 - Carville-Pot-deFer

Des bourgs et des villages...

Pascal Levaillant invité par le Plateau de Caux Tourisme raconte les secrets du Plateau par le prisme des talus et fossés de la masure cauchoise depuis l'âge des calètes qui ont préfigué ce théâtre d'agricuture en pays de Caux ...

que l'on nomme aujourd'hui clos-masure

 

Voici les rendez-vous d'avril à octobre 2025

De Saint-Martin-Aux-Arbres à Carville-Pot-de-Fer ; d'Anvéville  à Ouville-l'Abbaye ; de Gonzeville à Carville-Pot-de-Fer (La Mare aux Pommes)

Le second épisode  va se tenir à Carville-Pot-de-Fer  le samedi 10 mai 2025

je vous emmenerai dans le bourg à la recherche des secrets du village qui tiennent bon depuis les calètes, depuis les ivasionsn anglo-vikings, depuis la Réforme, depuis la main mise des Bourbons, depuis les campagnes militaires des ligueurs contre le roi Henri IV, depuis la Révoultion française et depuis l'unification avec Attemesnil au temps de l'activité tinctoriale sur les communes de Routes, Robertot et de Carville-Pot-de-Fer.

Beau programme en perspective et belle randonnée dans ce beau village méconnu.

Inscrivez-vous via le Plateau Caux Tourisme

 

Contact. 76560 CARVILLE-POT-DE-FER. 06 82 37 51 33 · Réserver · Plateau de Caux Normandie Tourisme. 2 place du Général de Gaulle BP35 - 76560 

 

à voir sur ce lien du Youtube de Michel Gilbert avec son aimable contribution et de aimable autorisation : https://www.youtube.com/watch?v=BHeSM0FIElM

 

Partager cet article
Repost0
28 avril 2025 1 28 /04 /avril /2025 17:06

 

« Animation offerte par le Département de la Seine-Maritime dans le cadre des sorties nature

sur les espaces naturels sensibles (ENS),

les forêts départementales,

le littoral de la Côte d’Albâtre

et les rivières ».

CD76  et ENS76

 

Pascal Levaillant, artiste plasticien botaniste, historien  du patrimoine végétal vous invite dans le cadre de l'ENS 76, sur les pas de Dambourney, à découvrir les plantes tinctoriales des Coteaux d'Orival dont la Garance voyageuse installée sous les arbres et près des ifs.

Balade à partir du Grand-Couronne vers la crête sommitale de la Roche Pignon afin de découvrir  des plantes tinctoriales normandes qui ont été inventoriées par L.A, Dambourney avant le Révolution Française sur les coteaux d'Orival à Oissel avant de teinter le fil de lin à Oissel et à Bapeaume.


 

Pour réserver aller obligatoirement sur le site de l'ENS : 

https://www.seinemaritime.fr/nos-actions/environnement/espaces-naturels/visites-des-espaces-naturels-sensibles/

Reconnaître les plantes tinctoriales
Dim. 11 mai 2025 de 14h00 à 17h00
Rue du Champ du Bois, Grand-Couronne, France
Sur les pas de Dambourney, un historien botaniste vous emmène découvrir les plantes tinctoriales des coteaux d'Orival, dont la Garance voyageuse installée sous les arbres et près des ifs. RDV parking au bout de la rue du Champ du Bois (entrée forêt) à Grand-Couronne. Prévoir appareil photo et jumelles.
Animée par Pascal Levaillant 06 98 44 34 64
 

 

Partager cet article
Repost0
13 avril 2025 7 13 /04 /avril /2025 14:48

Pascal Levaillant invité par le Plateau de Caux Tourisme raconte les secrets du Plateau par le prisme des talus et fossés de la masure cauchoise depuis l'âge des calètes qui ont préfigué ce théâtre d'agricuture en pays de Caux ...

que l'on nomme aujourd'hui clos-masure

 

Voici les rendez-vous d'avril à octobre 2025

De Saint-Martin-Aux-Arbres à Carville-Pot-de-Fer ; d'Anvéville  à Ouville-l'Abbaye ; de Gonzeville à Carville-Pot-de-Fer (La Mare aux Pommes)

Le premier fut à Saint-Martin aux Arbres le 12 avril 2025

retour en images grâce au reportage de Paris Normandie sous la plume et le regard de Mireille Loubet-Anquetil.

 

Extrait de son article publié le 12 avril à 18h02 :

Article signalé en page 8 selon la couverture du journal du dimanche 13 avril 2025


Suivre Pascal Levaillant dans une visite insolite du patrimoine et du paysage de la campagne cauchoise, c’est accepter de prendre les chemins de traverse. L’artiste plasticien botaniste, féru d’histoire locale cauchoise, véritable enquêteur hors du temps lancé sur les origines du cidre cauchois est maître dans l’art de la disgression. Mais, il tient en haleine le public par son érudition et sa connaissance du pays de Caux.

visite guidée du village de Saint-Martin-aux-Arbres

En chemins de traverse du bourg au hameau du Bout de Bas

 

 

 

 

Remerciement spécial à la météo très clémente et lumineuse et à  Mireille Loubet-Anquetil : vous pourrez retrouver sa vidéo en intégralité dans le PN du 12 avril 2025.

https://www.paris-normandie.fr/id623154/article/2025-04-12/une-visite-inedite-travers-les-secrets-de-saint-martin-aux-arbres-un-village-du PAYS  de CAUX

 

"Ceux qui ont vraiment résisté aux Romains, ce n’est ni Vercingétorix, ni Astérix, mais ce sont bien les Calètes"

Pascal Levaillant, guide et conteur

 

"L'insurrection des Caletes, des Veliocasses et des Aulerci Eburovices (51 av. J.-C.)

La défaite de Vercingétorix (52) ne mit pas un terme aux soulèvements de la Gaule. Certains peuples n'avaient pris aucune part à la grande guerre de 52, et leurs forces restaient intactes. Parmi ceux-ci, les Aulerci Eburovices, les Veliocasses et les Caletes. Or, de même que les peuples de l'actuelle Basse-Normandie subissaient l'attrait de la Confédération armoricaine, ceux-là gravitaient dans l'orbite du puissant peuple des Bellovaques (Beauvais).

L'hiver de 52-51 vit une vaste rébellion de tous les peuples compris, entre Evreux et l'actuelle frontière Belge ; les chefs en étaient le Bellovaque Correos et l'Atrebate (Arras) La conquête de la future Normandie par les Romains

Annales de Normandie, 1953  3-3-4  pp. 43-49 Persée https://www.persee.fr › doc › annor_0000-0002_1953_n..."
 

à lire aussi :

"Il y a deux mille ans vivaient sur le sol de la future Normandie plusieurs peuplades gauloises: sur le plateau cauchois, les Calètes ; à Rouen et ses environs, les Véliocasses; dans le Cotentin, les Unelli et les Abrincatui; en Basse-Normandie, les Bajocasses, les Viducasses, les Lexovii, les Aulerci Eburovices et les Sagii.

Lorsque leur sol national fut foulé par les bottes des légionnaires romains, les Celtes résistèrent farouchement : Calètes et Véliocasses s’allièrent aux Bellovaques de la région de Beauvais et aux Atrébates d’Arras. Ils opposèrent ainsi 10.000 combattants à César. Leur chef fut un certain Carréus. Il se battit jusqu’au bout, même après la soumission de Vercingétorix, et mourut héroïquement sur le champ de bataille en 52 avant Jésus-Christ."

in : La Normandie avant les normands -  René Streiff - Études Normandes  Année 1952  10  pp. 133-144

 

Remerciement au Plateau Caux Tourisme pour la création de son nouveau format "Secrets du Plaleau de Caux"

 

Ces visites guidées feront l'objet à terme de publications sur l'histoire de ces communes, en lien avec l'objet de ces "secrets du Plateau de Caux"

Partager cet article
Repost0
6 avril 2025 7 06 /04 /avril /2025 18:18

Pascal Levaillant invité par le Plateau de Caux Tourisme à conter les secrets du Plateau de Caux Tourisme et à revisiter un clos-masure avec le prisme du pommier, des talus et fossés de la masure cauchoise du 15e siècle.

Programme et rendez-vous pour vous inscrire sur la plateforme du Plateau de Caux Tourisme.

Voici les rendez-vous d'avril à octobre 2025

De Saint-Martin-Aux-Arbres, à Carville-Pot-de-Fer ; d'Anvéville à Ouville-l'Abbaye ; de Gonzeville à Carville-Pot-de-Fer (La Mare aux Pommes)

En premier : Les secrets du Plateau de Caux

sur 5 rendez-vous

Premier rendez-vous le samedi 12 avril à 14h30

De 14h30 à 16h00

Lieu de rendez-vous : parking de la mairie

 

Pascal Levaillant le 18 octobre 2025 est aussi dans la programmation de Clos-Masure Ouvre-toi!

 

 

 

Partager cet article
Repost0
3 avril 2025 4 03 /04 /avril /2025 20:22

Un véritable tour d'horizons de la nature des sols dits fertiles du pays de Caux.

 

 

Coupe chromatique des Terres de Caux,  on Cliffs of cliffs of the Pays de Caux on the Alabaster Coast

Le "pays" du ruissellement où le sous-sol se dévoile... par le prisme de ses falaises.

Le sol a ses couleurs que nous ignorons car  dissimulés sous  la litière  forestière, sous l'herbe des herbages et des prairies,  sous l'herbe des vergers, sous les jeunes pousses  des cultures céréalieres, sous les plantes techniques ... sous nos pieds comme nous le rappelle souvent Marc-André Selosse du MNHN suivant les pas de l'émerite Bernard Boullard, botaniste et pédobiologue de Bois-Guillaume, né en 1927 en Normandie à Annebault.

Le sous-sol en possède tout autant des couleurs, tant le minéral est représenté par sa biodiversité et selon le type de sol en présence : calcaire, schiste, granite, argile, sable, grés ...

Et l'humus, substrat si long à se génerer par l'effet de décomposition végétale biomécanique et organique et par l'effet des micro organismes, champignons et radicelles en action sous l'effet de la chaleur, de la pluie, du froid...

Ce flux permanet de haut en bas est necessaire et traverse de haut en bas du sol et sous-sol constituant ainsi les différents "horizons".

La dimension artistique vient souligner notre exploration et nos prélèvements en tous lieux représentatifs et repérés à l'œil nu.

Proposer une gamme chromatique et un extrait de la substance déshydratée sont au cœur de ce voyage non pas au centre de la Terre mais tout au plus en surface de la terre, qui est si proche de nous que nous la percevons plastiquement sous nos  pas sans trop y faire attention sauf quand la consistance change d'un milieu à un autre (d'un sol dur et sec à un sol spongieux, d'un sol mou sablonneux à un sol dur et caillouteux ; d'une terre compacte à une terre fraichement retournée ; d'une terre  sèche à une terre humide voire détrempée ou collante argileuse...)        

Le pays de Caux est un millefeuille exceptionnel de strates, visible à l'oeil nu et la meilleure façon de percevoir ce sol, ce sous sol est d'observer la hauteur des falaises du pays de Caux du Tréport au Cap de la Hève.

C'est au pied de la muraille que le sous sol du pays de Caux nous est dévoilé.

Il suffira d'aller le rechercher à l'intérieur du pays de Caux du Havre à Dieppe, de Dieppe vers  Cailly et redescendant vers  le Caux-Rouen pour revenir vers Le Havre en suivant les coteaux calcicoles de la Seine.

Les couches superficielles énoncent les humus, les limons, les argiles, le loess, l'argile à silex et ce qui coloré les pans de falaises comme sur la pointe de Caux comme ailleurs au Cap d'Ailly.

C'est un herbier végétal et minéral que nous allons vous proposer avec ces mélanges de terres vivantes, minérales enrichissant humus, tous horizons confondus en Terres de Caux.

Cette recherche a démarré en 1996 à Mormoiron dans le Vaucluse non loin des ocres-pigments de Roussillon puis en 2015 pour la phase de conception de l'expostion "Nature au crible" qui a été présentée à l'ESPE de Mont-Saint-Aignan et à l'abbaye du Valasse en pays de Caux : minéraux, échantillons de terre du pays de Caux, de sable en France, de coquillages...

Cet élan s'est prolongé au fil du temps avec les couleurs des sables jusqu'en 2023 lors de la conception de l'installation sur "Humus Miraculum" à Cahors  lors de l'édition Cahors Juin Jardins 2024.

De retour  en pays de Caux, c'est la nature du sol et du sous-sol du pays de Caux que nous voulons (le collectif Corblin-Levaillant) mettre en lumière aujourd'hui celui du côté de Canteleu, Maromme, Cideville, Saint-Martin-aux-Arbres, Carville-Pot-de-fer, Yvetot et prochainement sur l'ensemble du pays de Caux au fur et à mesure.

Sans oublier d'autres terroirs de France : Morvan, Dombes, Bugey, Bretagne, Marne, Lorraine, Brie, Aisne, Oise, Alsace, Vosges, Bourgogne, Alpes Varoises et Maritimes, Val-d'Oise ... voire de l'étranger : Portugal du côté de Peniché et Sintra ...

Qui sait si nous recueillerons un jour de la Terre de Caux (Hérault) car là-bas ce n'est pas du cidre qui coule des tonneaux mais du vin, en attendant nous avons déjà la terre du Salagou.

Seule la chromatique des couleurs des terres du sol nous anime pour peindre avec les "pigments naturels de l'humus et de la terre.

 

 

01 - Auvergne Rhône Alpes - Ain - Ambérieu ; Chatillon-sur-Chalaronne ; 

02 - Hauts de France - Aisne - Vic-sur-Aisne ; 

03 - Allier - 

04 - Alpes de Haute-Provence ; 

05 - Hautes-Alpes -

06 - Provence - Alpes - Côtes d'Azur - Alpes-Maritimes - Mons (4) ; 

07 - Ardèche - 

08 - Ardennes -

09 - Ariège - 

10 - Grand Est - Aube - Bailly-le-Franc ; 

11 - Aude - 

12 - Aveyron -

13 - Bouches-du-Rhône - 

14 - Normandie - Calvados - Moyaux (4) ; 

15 -

16 - 

17 - 

18 - 

19 -

20 - 

21 - Bourgogne Franche Comté - Côte-d'Or - Saulieu ;

22 - 

23 -

24 - 

25 - 

26 -

27 - Normandie - Eure - Giverny ; Pressagny-l'Orgueilleux ; Fresne-l'Archevêque ; Authevernes (Epte), Vézillon ; Hauville ; 

28 - Centre - Val-de-Loire - Eure et Loir - Ymonville ;  

29 -

30 - 

31 -

32 -

33 - 

34 - Occitanie - Hérault - Le Bosc (Salagou) ; 

35 - 

36 -

37 -

38 -

39 -

40 -

41 - 

42- 

43 - 

44 -

45 - Centre - Val-de-Loire - Loiret - Beaune-la-Rolande ;  

46 - Occitanie - Lot - Bouriane (3) ; 

47 - 

48 - 

49 - 

50 - 

51 - Grand Est - Marne -  Jonchery-sur-Vesle ; Les Petites Loges ; 

52 - Grand Est - Haute-Marne - Perthes ; 

53 - 

54 - Grand Est - Meurthe-et-Moselle - Anthelupt (aire) ;

55 - Grand Est -Meuse - Void ; 

56 - Bretagne - Morbihan - Plescop (2 ) ; 

57 - Grand Est - Moselle - Bouviller ; 

58 -

59 - 

60 - Hauts de France - Oise - Sacy-le-Grand ; 

61 - Normandie - Orne - Bellou-le-Trichard ; Chapelle-Souef (2) ; 

62 - 

63 -

64 -

65 - 

66 - 

67 - Grand Est - Bas-Rhin - Kleingoeft ; Oberbronn ; Col de Saverne ; 

68 - Grand Est - Haut-Rhin - Lièpvre ; 

69 - 

70 - 

71 - Bourgogne-Franche-Comté - Haute-Saône - Saint-Ambreuil ;

72 - Pays de la Loire - Sarthe - Loué ; 

73 - 

74 - Auvergne-Rhône Alpes - Haute Savoie - Samoëns - la Jaÿsinia ;

75 - 

76 - Normandie - Seine-Maritime ( Pays de Caux et Seine)

77 -

78 -

79 -

80 -

81 -

82 -

83 -

84 - Provence - Alpes - Côtes d'Azur - Vaucluse Roussillon (2)

85 -

86 -

87 -

88 - Grand Est - Vosges - La Salle ;  

89 -   Bourgogne-Franche-Comté - Yonne - Guillon-Terre-Plaine ; 

90 -

91 - 

92 - 

93 -

94 -

95 - Ile de France - Val- d'Oise - La Roche-Guyon ; Magny-en-Vexin

Outre-mer
971 Guadeloupe
972 Martinique
973 Guyane
974 La Réunion
976 Mayotte

UE - Portugal (Peniché)

 

à suivre bientôt sur le blog Corblin-Levaillant.

 

 

 

 

 

 

Partager cet article
Repost0
22 février 2025 6 22 /02 /février /2025 19:39

Le saviez-vous?

Je l'ai découvert à Chambéry aux Charmettes en 2020  grâce à Jean-Jacques Rousseau,  - moi qui croyait que seul Proust avait inventé-  ce concept dû au geste ou  à l'observation ...  à l'écoute... qui ont fait remonter chez ces auteurs, autrices  un souvenir ou une série de souvenirs déclenchant chez eux une forte charge émotionelle.

Proust fut le dernier de ces auteurs à témoigner du toucher et du goût, contrairement aux idées reçues

 

Analyse et synthèse proposée par Pascal Levaillant [2020-2025]

 

 

 

LA PERVENCHE de Rousseau en 1764

-

LA GRIVE de Chateaubriand en 1849

-

LA SOIE, la VERVEINE ET LE TABAC de Mme Bovary (Flaubert) en 1858

-

LA POMME de Lucie Delarue-Mardrus en 1902

-

LA MADELEINE  de Proust en 1913

-

 

On peu

On peut noter que pour se remémorer des jours heureux Jean-Jacques Rousseau a évoqué le premier une mémoire sensorielle par la seule vue de la pervenche, que Chateaubriand l’a traduite par l’ouïe - avec la grive – et que Proust l’a sublimée par le geste, le goût avec la madeleine.

Mais qu’en est-il du toucher ? Le toucher est à notre connaissance absent de la dimension mémorielle (mémoire implicite) et c’est donc peut-être à Flaubert que l’on pourrait attribuer cette dimension.

 

 

Le premier réveillant ses sens fut Rousseau avec la pervenche (vue) , le second fut Chateaubriand avec la grive (l'ouïe) , le troisième fut Flaubert avec la soie, la verveine et le tabac ( le toucher, l'odorat) et le dernier fut Proust avec sa madeleine (le geste et le goût) et enfin Delarue-Mardrus avec l'odeur de la Pomme.

Deux siècles séparent quasiment ces écrivains et cette écrivaine.

Redécouvrant Les confessions de Jean Jacques Rousseau, et deux autres de ses livres (Les rêveries du promeneur solitaire, Les lettres élémentaires sur la botanique ...), je me suis aperçu que Proust n'avait rien inventé sinon de répliquer l'idée de la  "pervenche" en "madeleine", passant de la dimension sensorielle de la vue (Rousseau) au goût grâce à sa madeleine.

Le premier fut donc Rousseau qui à la vue de la pervenche, chemin faisant, il se mit à se remémorer le souvenir heureux de la présence de Mme de Warens lorsqu'il vivait à ses côtés à Chambéry, aux Charmettes.

Le livre 6ème s’ouvre sur des citations allant toutes dans le même sens, qu’il reprend dans une phrase -  oh ! Combien connue :

« Ici commence le court bonheur de ma vie ».

 «Le premier jour que nous allâmes coucher aux Charmettes, Maman était en chaise à porteurs et je la suivais à pied. Le chemin monte, elle était assez pesante, et craignant de trop fatiguer ses porteurs, elle voulut descendre à peu près à moitié chemin pour faire le reste à pied. En marchant elle vit quelque chose de bleu dans la haie et me dit : « voilà de la pervenche » je ne me baissai pas pour l’examiner car j’ai la vue trop courte pour distinguer à terre les plantes de ma hauteur.
Je jetai seulement en passant un coup d’œil sur celle-là, et près de trente ans se sont passés sans que j’aie revu de la pervenche ou que j’y aie fait attention.

In : https://entre-semnoz-et-cheran.over-blog.com/article-la-pervenche-et-jean-jacques-rousseau-101054078.html

 

 

« En 1764 étant à Cressier avec mon ami M. Du Peyrou, nous montions une petite montagne au sommet de laquelle il a un joli salon qu’il appelle avec raison Bellevue. Je commençais à herboriser un peu. En montant et regardant parmi les buissons je pousse un cri de joie : Ah voilà de la pervenche ; et c’en était en effet. Du Peyrou s’aperçut du transport, mais il en ignorait la cause ; il l’apprendra, je l’espère, lorsqu’un jour il lira ceci. »

Les Confessions, Jean-Jacques Rousseau, 1764

« Le plus étonnant exempte, déjà proustien, du pouvoir de réminiscence contenu dans le symbolisme d'une image, est donné au Livre VI des Confessions : découvrant dans une promenade de la pervenche, Rousseau est envahi par le souvenir, vieux de trente ans, d'une promenade faite avec Mme de Warens, qui lui avait montré « de la pervenche encore en fleur ». L'herbier est une tentative pour capter ce pouvoir.»

In : Symboles de la nature dans les Rêveries de J.-J. Rousseau,  -    Année 1984  11  pp. 31-42

 

La pervenche aux Charmettes

 

Chez Proust la madeleine est connue pour raviver et se remémorer également un souvenir heureux.

"Il y avait déjà bien des années que, de Combray, tout ce qui n’était pas le théâtre et le drame de mon coucher, n’existait plus pour moi, quand un jour d’hiver, comme je rentrais à la maison, ma mère, voyant que j’avais froid, me proposa de me faire prendre, contre mon habitude, un peu de thé. Je refusai d’abord et, je ne sais pourquoi, me ravisai. Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines qui semblent avoir été moulés dans la valve rainurée d’une coquille de Saint-Jacques. Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d’un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j’avais laissé s’amollir un morceau de madeleine. Mais à l’instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d’extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m’avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. Il m’avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu’opère l’amour, en me remplissant d’une essence précieuse : ou plutôt cette essence n’était pas en moi, elle était moi. J’avais cessé de me sentir médiocre, contingent, mortel. D’où avait pu me venir cette puissante joie ? Je sentais qu’elle était liée au goût du thé et du gâteau, mais qu’elle le dépassait infiniment, ne devait pas être de même nature. D’où venait-elle ? Que signifiait-elle ? Où l’appréhender ? Je bois une seconde gorgée où je ne trouve rien de plus que dans la première, une troisième qui m’apporte un peu moins que la seconde. Il est temps que je m’arrête, la vertu du breuvage semble diminuer. Il est clair que la vérité que je cherche n’est pas en lui, mais en moi. Il l’y a éveillée, mais ne la connaît pas, et ne peut que répéter indéfiniment, avec de moins en moins de force, ce même témoignage que je ne sais pas interpréter et que je veux au moins pouvoir lui redemander et retrouver intact, à ma disposition, tout à l’heure, pour un éclaircissement décisif. Je pose la tasse et me tourne vers mon esprit. C’est à lui de trouver la vérité. Mais comment ? Grave incertitude, toutes les fois que l’esprit se sent dépassé par lui-même ; quand lui, le chercheur, est tout ensemble le pays obscur où il doit chercher et où tout son bagage ne lui sera de rien. Chercher ? pas seulement : créer. Il est en face de quelque chose qui n’est pas encore et que seul il peut réaliser, puis faire entrer dans sa lumière."

Du côté de chez Swann (1913), Marcel Proust

 

Me rendant aux Charmettes en 2019, à l'occasion d'un si bel automne, mon heureuse surprise fut de voir au jardin un carré de pervenche.

Poussant ma curiosité plus loin, je découvre dans une autre lecture avec bonheur la "grive" de Chateaubriand qui en l'écoutant  a réveillé chez Chateaubriand une émotion similaire.

« Je fus tiré de mes réflexions par le gazouillement d'une grive perchée sur la plus haute branche d'un bouleau. A l'instant, ce son magique fit reparaître à mes yeux le domaine paternel. J'oubliai les catastrophes dont je venais d'être le témoin, et, transporté subitement dans le passé, je revis ces campagnes où j'entendis si souvent siffler la grive. Quand je l'écoutais alors, j'étais triste de même qu'aujourd'hui. Mais cette première tristesse était celle qui naît d'un désir vague de bonheur, lorsqu'on est sans expérience ; la tristesse que j'éprouve actuellement vient de la connaissance des choses appréciées et jugées. Le chant de l'oiseau dans les bois de Combourg m'entretenait d'une félicité que je croyais atteindre ; le même chant dans le parc de Montboissier me rappelait des jours perdus à la poursuite de cette félicité insaisissable. Je n'ai plus rien à apprendre, j'ai marché plus vite qu'un autre, et j'ai fait le tour de la vie. Les heures fuient et m'entraînent ; je n'ai pas même la certitude de pouvoir achever ces Mémoires. Dans combien de lieux ai-je déjà commencé à les écrire, et dans quel lieu les finirai-je ? Combien de temps me promènerai-je au bord des bois ? Mettons à profit le peu d'instants qui me restent ; hâtons-nous de peindre ma jeunesse, tandis que j'y touche encore : le navigateur, abandonnant pour jamais un rivage enchanté, écrit son journal à la vue de la terre qui s'éloigne et qui va bientôt disparaître. »

Les Mémoires d'Outre-Tombe - Chateaubriand
Première partie - Livre troisième - Chapitre 1 - Promenade. - Apparition de Combourg, 1849.

 

En 2021, deux ans plus tard relisant Flaubert je m'aperçois que le toucher et l'odorat n'avait été interprété par un auteur : du geste à l'odeur

Le coffret à tabac en soie qui en le touchant libera chez elle un parfum et une sensation lui remémorant le souvenir de son amant.

« Souvent, lorsque Charles était sorti, elle allait prendre dans l’armoire, entre les plis du linge où elle l’avait laissé, le porte-cigares en soie verte.
Elle le regardait, l’ouvrait, et même elle flairait l’odeur de sa doublure, mêlée de verveine et de tabac. »

Mme Bovary, Flaubert, 1958

 

et l'odorat avec Delarue-Mardrus : la pomme, 

magnifique texte rendant hommage à la Normandie : 

de l'odeur au patrimoine

L’Odeur de mon pays

L’odeur de mon pays était dans une pomme.
Je l’ai mordue avec les yeux fermés du somme,
Pour me croire debout dans un herbage vert.
L’herbe haute sentait le soleil et la mer,
L’ombre des peupliers y allongeaient des raies,
Et j’entendais le bruit des oiseaux, plein les haies,
Se mêler au retour des vagues de midi…

Combien de fois, ainsi, l’automne rousse et verte
Me vit-elle, au milieu du soleil et, debout,
Manger, les yeux fermés, la pomme rebondie
De tes prés, copieuse et forte Normandie ?…
Ah! je ne guérirai jamais de mon pays!
N’est-il pas la douceur des feuillages cueillis
Dans la fraîcheur, la paix et toute l’innocence?

Et qui donc a jamais guéri de son enfance ?…

Lucie Delarue-Mardrus (Ferveur, 1902]

 

De mon expérience la vue rarissime d'une gentiane bleue ou d'un bleuet me rappelle des souvenirs heureux comme rarement le parfum d'une rose ancienne se diffusant à ma rencontre. De même la poire de coq au jus me procure le même effet ou l'écoute d'une chanson folk de Dylan, sur les ondes de FIP, la lumière dans les masures qui au soleil rasant de la fin de l'hiver ombre les herbages plantés de pommiers ou même l'odeur des foins tout graichement coupés et couchés séchant au soleil d'été. Ces endroits et circonstances me rappelant des sensations heureuses de mon enfance ou de ma jeunesse à l'endroit du pays de Caux ou du pays de Savoie.

 

 

 

 

 

 

 

 

ET VOUS,

Livrez votre expérience dans un commentaire ...

Partager cet article
Repost0
31 décembre 2024 2 31 /12 /décembre /2024 09:02

Grâce à mon histoire du patrimoine végétal de la ville d'Yvetot en cours, 

on connait désormais Yvetot, la cité des ifs,

Yvetot, la cité des pommiers et des pépiniers

 

mais aussi Yvetot, grâce à L.A. Beaucousin, J. Delamare, L. Abensur, D. Clatot et L. Lapert et R. Couasnon :

la cité meurtrie par la guerre, la cité des manufactures, des imprimeurs, des rois et princes.

 

 

Il faut souligner en avant-propos qu'avant l'apparition des innombrables jardins accessibles au plus grand nombre à la fin du 19e et surtout en 1914,  les jardins et potagers se dissimulaient derrières les maisons de rue comme on peut le lire dans "Yvetot au fil des patrimoines" (2013) 

"Derrière les façades de briques ou de colombages, le bord des rues ou des routes, rien ne laisse présager l'existanece de cours intérieures. Néanmoins, les anciens cadastres dévoilent l'existence de "fermes de subsistance" au coeur de la ville.

Elles comportent, pour les plus grandes d'entre elles : un potager, un verger, utile à la fabrication du cidre, et les bâtiments dispersés, destinés à accueillir le bétail, la bergerie et le poulailler. Vestiges d'une époque durant laquelle la campagne imprègne la ville, on croise ça et là, quelques pommiers faisant anciennement partie d'un alignement plus conséquent, ou des murs de clôture ceignant les jardins. Ce sont les dernières traces d'une organisqation agricole de la ville. Durant les deux dernières décennies, la construction de résidences ou de lotissements a réduit le nombre de ces cours intérieures, havres de paix au coeur d'Yvetot."

 

 

C'est pourquoi je vous propose aujourd'hui de vous conter

Yvetot, la cité des jardins

Yvetot Cité-Jardins

"Théâtre d'Agriculture Urbaine"

(1000 parcelles en 1947),

objet de cette recherche sur le patrimoine végétal de la ville d'Yvetot dont l'arrière des maisons vous sera conté prochainement dans un chapitre consacré à ce théâtre d'agriculture urbaine qu'a fait décrire en son temps Martin du Bellay en 1566 dans le terrier de sa principauté d'Yvetot.

Pascal Levaillant,

membre de la Société Centrale d'Agriculture depuis 2022, membre de Faire vivre le manoir du Fay depuis 2020, membre des vergers de Bremontier-Merval, du Vallon...

 

 

 

Localisation en 1947 des jardins privés, ouvriers et familiaux sur un fonds de carte de la ville (1898)

ADSM 76

De même la plupart des vergers se trouvaient en périphérie de la ville dans les cours, closages et masures.

quelques vergers subsistent chez les privés dont un des plus anciens de la ville  qui voisinne avec le Tennis Club coté du Court couvert...

 

Côté jardins et potagers, c'est sans compter de tous les jardins en arrière des façades des rues (Thiers, Etang, Calvaire, Bellanger, Carnot, Chouquettes, Niatel, mare Bridelle, Briqueterie ....) où se nichaient potagers et micros-vergers

Dans ce quartier Clos des Parts  en dehors de la "Pépinière" quelques lopins  de terre étaient loués à deux pas, Sente des Courses,  en majorité aux gendarmes d’Yvetot. Ces jardins étaient situés,  côté droit en remontant la sente des Courses à peu près au trois quart avant la longère où habitaient les Fessard et Mme Jousset-Lamontagne (mes aînés, petits, appelaient cette femme « la dame aux chats » car dans son enclos,  elle en possédait une bonne dizaine) non loin où j’habitais encore  la sente au 2bis de 1988 à 1998.

D'autres contenus vont bien sûr venir étoffer cet article.

Remerciements à Marc Benoist, M. Hauchard, la famille Hétru et Lemonnier pour la transmission d'archives depuis 2019.

 

Crédit photo Siméon Levaillant, 2006

Remerciement spécial à mon fils Siméon Levaillant, photographe professionnel  pour cette prise de vue dans les jardins ouvriers et familiaux  à Yvetot en 2006 à Yvetot en vue d'une exposition à Yvetot  en 2006-2007 : "Du théatre sans représentation" exposition montée par le Théâtre en Face dont j'ai été cofondateur en 1978 (Théâtre du Perce-Neige) et 1983 associativement Théâtre en Face.

Acteur-jardinier - Dominique Dehays, rue des Fonds Yvetot, avec son aimable autorisation.

 

 

ai"Denis Hauchard, président des Jardins Ouvriers et Familiaux, est inquiet pour l'avenir de la parcelle rue des Champs. Lui et les jardiniers craignent devoir quitter ce lieu, exploité depuis 63 ans" in : Le Courrier Cauchois du 20 12 2024

Intrigué par cette affaire relayée dans la presse locale je rencontre quelques jours après Denis Hauchard qui m'explique la situation et le contexte.


Stupéfaction !


Dans l'histoire du patrimoine végétal de la Ville d'Yvetot, j'avais prévu en temps et en heure de consacrer un grand chapitre aux jardins familiaux de la ville et des autres jardins privés qui en 1947 approchaient le millier de parcelles en périphérie de la ville.

Près de 400 parcelles par les JOF yvetotais et 600 parcelles sur des terrains privés de la rue Clos des Parts, à la route de Caudebec en passant par celles de la route de Doudeville...
C'étaient des jardins gérés et entretenus par les salariés des entreprises (entreprise Couturier, de la Gendarmerie (sente des courses), de la SNCF (le long de la voie ferrée) et d'autres loués par des privés comme ceux qui donnèrent place à la Compagnie Hangar route de Caudebec et la "pépinière" dans laquelle le père d'Annie Ernaux louait deux parcelles aux sœurs Valentin, rue Clos des Parts.

 

Alors à l'heure de la désartificialisation, du développement durable, de l'économie circulaire, sociale et solidaire, à  l'heure de l'écologie urbaine, de l'agriculture urbaine,  des circuits courts et de "la Terre à l'Assiette" :  Yvetot et sa Communauté de Communes  Y.N. semblent plus attirés à rogner sur des parcelles de jardiniers  au profit d'un projet de rond-point...! comme le font remarquer les jardiniers dans  l'article du 3 janvier 2025, dernière édition du Courrier Cauchois faisant suite à l'article du 20 décembre 2024.

ALORS sur un air de Nino Ferrer et de "la maison près de la fontaine"

 

"Les jardins près de la Moutardière
Couverts de légumes et de fleurs en été
Sentent bon l'compost, l''terreau et  l'humus,

L'histoire d' Yvetot et de sa postérité

Dedans il y a d'la biodiversité
Les jardiniers y sont du lundi au dimanche 
Arrosent les légumes de leurs potagers
Et leurs oripeaux écartent les oiseaux

Les jardins, près du château d'eau
Pourraient faire place à un rond-point
Qui ferait tache, bitume et Nature Morte
Sur l'hôtel du Progrés

C' n'est pas terrible !
C' n'est pas normal !
Est-c'la le progrès?"

 
 
 
P.L.2025

Moralité de la fable avec la rime :

en deux mille vingt-cinq,

qui trinque?

 


 

ant

Les premiers jardins non privés furent des jardins scolaires

 

1863, Fondation de la  Société d’horticulture de l’Arrondissement d’Yvetot.


Naissance des jardins scolaires. 

 

Le patrimoine  s’enrichit d’une nouvelle société dédiée à l’horticulture créée le 9 décembre 1863.

« Ayant pour objet l’horticulture, prise dans son acception la plus large et la plus générale : la taille des arbres, la culture maraîchère, la floriculture, la Société propage les espèces utiles, indigènes ou exotiques, et importe dans l’arrondissement les outils et les instruments perfectionnés.
Il est délivré aux instituteurs, admis à titre gratuit, des graines potagères ou des fleurs et quelques sujets d’arbres fruitiers, à la condition toutefois qu’ils justifieront des résultats obtenus.
Des jardins scolaires sont créés. Chaque élève du pensionnat d’Yvetot a la charge d’un petit jardinet.

L’enfant cultive à sa façon, rassemblant dans cet espace restreint, un ou deux sujets des plantes les plus utiles, et les classe par famille. Tous les ans, après un concours, la Société d’horticulture décerne des récompenses aux plus méritants. Ces jardins scolaires sont déjà imités dans plusieurs écoles rurales.


Un cours public et mensuel d’arboriculture fruitière est professé par M.Vilaire, au jardin de l’école-pensionnat d’Yvetot. La Société étudie par analyse et la culture, les meilleures variétés de fruits et les propage, notamment les pommes à cidre.»
 

  In : Bulletin de liaison du « Cercle d’Etudes  du Patrimoine Cauchois », Michel Traversat, la Gazette du patrimoine cauchois, n°  3 – 2ème Semestre 1994, p.8. et 5– 2ème Semestre 1995, p.21-22.

Voici l'histoire contemporaine d'Yvetot,

la Cité-Jardins

110 ans  déjà...

et voilà que dès 2025 des parcelles des JOF se voient demain menacées !!!

C'est bien dans le Nord que l'on a vu naître et se créer les jardins ouvriers qui, au fil du temps, sont devenus jardins ouvriers et familiaux et plus spécifiquement à Hazebrouck grâce à l'abbé Lemire en 1896.

L'abbé Lemire, Maire et député de sa ville Hazebrouck.

A la Chambre des députés il a cotoyé Ferdinand Lechevallier, maire et député d'Yvetot à la même époque.

Ferdinand Lechevallier a commencé à encourager la pratique du jardin et du potager  dès qu'il a pu l'organiser à Yvetot, lui-même Président de la Société Pratique d'Horticulture  de l'arrondissement d'Yvetot créée en 1863.

Les  talentueux pépiniéristes yvetotais y contribuaient comme Legrand, Dieppois, Mail, Acher, Valentin...

De leurs idées progressistes est née une amitié qui conduira  l'abbé Lemire à remettre l'extrème onction à son ami député Lechevallier à  Paris en 1905 losque celui y décéda subitement.

L'abbé Lemire a fondé  la « Ligue du coin de terre et du foyer ». Pour lui, « la terre est le moyen, la famille, le but ». La ligue qu’il a instituée a été reconnue d’utilité publique dès 1909.

En 1921 la « Ligue du coin de terre » devient la « Fédération nationale des jardins ouvriers de France ». La loi votée en janvier 1933 à l’initiative de Robert Thoumyre, vice-président de la ligue, favorise l’achat de terrains par l’accès aux prêts des jardins ouvriers. La loi du 7 mai 1946 constitue le véritable code des jardins ouvriers.

En 1952, le terme de « jardins ouvriers » est abandonné et la structure nationale devient la « Fédération nationale des jardins familiaux ».

En 1930, le principe d’une fédération départementale est mis en place et les statuts sont déposés.

La Seconde Guerre renforce le rôle de la fédération. Elle compte jusqu’à 200 groupements adhérents. À la fin du conflit le nombre de jardiniers diminue fortement. En 1949, la fédération départementale ne compte plus que 50 groupements. Une loi de novembre 1976 va favoriser le renouveau des jardins ouvriers.

Les jardins, une tradition ancienne des politiques d’intérêt général


La création des premiers jardins ouvriers par l’abbé Volpette à St Etienne en 1894, puis repris et très largement amplifiée par l’abbé Lemire à partir de 1896 était déjà une réponse sociale à une crise sanitaire cette fois ci, mais aussi économique. L’abbé Lemire (Cf. l’article du dossier « Un notaire et un prêtre à l’origine des jardins ouvriers et familiaux »poursuivait plusieurs objectifs au travers de ces jardins ouvriers. Ils donnaient l’accès à un air sain, au moins le dimanche, aux familles d’ouvriers vivant dans des taudis humides contaminés par la tuberculose. Ils amélioraient l’apport alimentaire. Une des intentions était «d’éduquer » les ouvriers pour qu’ils acquièrent des pratiques de « petits propriétaires », mais aussi, qu’ils évitent de fréquenter les bistrots. Il s’agissait de contribuer à la lutte contre l’alcoolisme, mais surtout d’atténuer la « contamination » des ouvriers par les idées modernes du syndicalisme ou du communisme. L’abbé Lemire, Député de la Nation, siégeait à gauche de l'assemblée certes, mais restait abbé….
 
Un complément de salaire


Ces jardins pouvaient voir le jour au côté des usines, non seulement grâce à la persuasion de ce personnage hors du commun, mais aussi à la contribution du patronat éclairé : c’est lui qui fournissait les terrains. Bien souvent, les « dames » patronnesses participaient à la gestion de ces jardins dans le cadre de démarche d’éducation populaire, tels des cours de tricot ou d’hygiène corporelle. Ces jardins permettaient de compléter les salaires des ouvriers sans apport numéraire supplémentaire. De plus, en maintenant les ouvriers sur place, les jardins facilitaient le regroupement familial. En ce temps, les ouvriers étaient souvent jeunes et célibataires. Ils prenaient facilement leur lundi à l’improviste pour aider leurs familles aux champs ou simplement retrouver leur dulcinée au village d’origine. Les jardins contribuaient donc à une bonne « gestion » de l’usine d’à côté.
 
in : https://www.jardinsdefrance.org/les-jardins-partages/

 

Les Jardins ouvriers

L'oeuvre des jardins ouvriers est peut-être la plus intéressante des oeuvres que peut créer la philanthropie. Elle est d'autant plus intéressante qu'elle est plus facile et moins coûteuse. Elle est, pour ainsi dire, gratuite. On loue un champ assez vaste que l'on divise en modestes fractions, dont on demande un prix de location proportionnel au prix du loyer total. Et si l'on veut aller plus loin, et donner à des malheureux la jouissance gratuite de ces lambeaux de terre, on se trouve décupler son aumône ; car cette aumône, confiée à la terre nourricière, fructifie rapidement.

In : Manuel pratique d'économie sociale : guide pour la formation et l'organisation de syndicats agricoles, associations, syndicats professionnels, sociétés coopératives (consommation, crédit, production), jardins ouvriers... / Léon de Seilhac, 1904
 

 

 

L'abbé Lemire - Jules Lemire fut un homme politique avant-gardiste. Il a défendu pour que les femmes ayant accouché puissent bénéficier d'une période de repos avant de reprtendre le travail ; pour qu'un ministère du travail  soit créé ; pour que la durée du travail hebdomadaire soit réduite ; pour que la journée de repos hebdomadaire se généralise ; pour que l'on interdise le travail de nuit des enfants ; pour que la peine de mort soit abolie... et pour que l'ouvrier bénéficie d'un logement décent et d'un coin de terre. 

In,  la brochure : L'abbé Lemire (1853-1928), témoin de la Gande-Guerre raconte [Malvache, Hazebrouck, 2018]

 

 

Dans les pas de l'abbé Lemire

 

Ferdinand Lechevallier 

 

Député Maire d'Yvetot entre 1871 et 1905

Président de la Société Pratique d'Horticulture  de l'arrondissement d'Yvetot

 

Il fut cet ancien maire et député d'Yvetot, né à Bolbec en 1840 et qui mourut à Paris au palais-Bourbon le 26 janvier 1905. Il fut d'abord conseiller municipal le 30 avril 1871 et industriel rue du Couvent puis maire en 1876 et député en 1881 jusqu'à sa mort (1905), soit 29 ans à la mairie d'Yvetot ce qui lui permit de lier amitié avec l'abbé Lemire, député d'Hazebrouck.

Je connais bien cette ville et le Musée de l'abbé Lemire à Hazebrouck car j'ai exposé à cinq reprises à la biennale de mosaiquenenord entre 2011 et 2020.

Ferdinand Lechevallier est député de Seine-Maritime de 1881 à 1905, siégeant chez les Républicains progressistes. Il est président et rapporteur de la commission de la comptabilité de 1895 à 1898, et questeur de la Chambre en 1898-1899 et de 1903 à 1905. Il est président fondateur de la Société de prévoyance mutuelle d'Yvetot.

Ferdinand Lechevallier œuvra pour la Société Pratique d'Horticulture de l'arrondissement d'Yvetot au temps de Hauchecorne, Legrand, Valentin, Mail, Dieppois, Varin célèbres pépiniers et horticulteurs.
Les premiers jardins sont à situer sur cette période même si leur rôle a été accentué grâce à Robert Lemonnier après la mort de M. Lechevallier (1905) mais en 1914 et développés en jardins ouvriers et familiaux par R. Lemonnier et Maurice Hétru (Après la seconde guerre mondiale).


Dans son portrait dépeint par Louis Lapert, journaliste et historien dans un article du Courrier Cauchois du 18 février 1978, il raconte ce fait qui explique bien des choses à propos des jardins ouvriers et familiaux impulsés à Yvetot grâce à Ferdinand Lechevalier en lien avec l'action de M. Lemonnier père et fils en 1914

En effet je cite : Le 27 janvier 1905, pris d'un malaise qui devait l'emporter peu après dans les couloirs du Palais-Bourbon, M. Lechevallier fit appeler un de ses collègues, l'abbé Lemire, député d'Hazebrouck, dont il reçut "les suprêmes consolations"
Ce premier fait qui parait anecdotique indique une amitié entre lui et L'abbé Lemire, le créateur des jardins familiaux : "Il fonde en 1896 la ligue du Coin de Terre et du Foyer qui a pour mission la mise en place des Jardins ouvriers". in : https://www.ville-hazebrouck.fr/decouvrir-hazebrouck/patrimoine/la-maison-musee-de-labbe-lemire/."


Ainsi sur cet héritage, sur cette amitié citoyenne en faveur des ouvriers, les jardins ouvriers sont nés.

Brève biographie réalisée par Pascal Levaillant 2024
 

u

Dans les pas de l'abbé Lemire

 

Robert Lemonnier, l'artisan créateur des premiers jardins ouvriers en 1914 à Yvetot


Le 16 mai 1970 a été publié au « Journal Officiel » la nomination au grade de chevalier dans l’ordre national du Mérite attribué à Robert Lemonnier pour « 55 ans d’activités sociales » par le décret du 14 mai 1970. Il l’apprit à la réception du courrier de M. Albin Chalandon, ministre de l’équipement et du logement.
Interviewé par le Courrier Cauchois, Robert Lemonnier déclara :
« 55 ans c'est peut-être un peu trop long […] car je suis né en 1893 et mes services à l'âge de 21 ans étaient tout de même assez modestes ; je m'occupais pourtant de la société d'horticulture et des jardins ouvriers"
Il a présidé durant 20 ans la société des H.L.M. D’Yvetot durant laquelle Yvetot lui doit une forte augmentation de sa population ; il fut secrétaire du Conseil d’administration de la société H.L.M. de la Seine Maritime. Il sera encore pendant plus d’une décennie président-fondateur du Comité du logement d’Yvetot et de sa région. Il fut également président de la Caisse d’Epargne et de Prévoyance d’Yvetot et membre du conseil d’administration de l’union des Caisses d’Epargne du Nord-Ouest. Il fut aussi membre du Conseil d’Administration de la société de crédit immobilier rural du département et président du Centre ménager des Dames-Blanches d’Yvetot. 
Auparavant en avril 1958, il avait reçu la rosette du Mérite social et la médaille de Vermeil de la Croix-Rouge.
Marié, il eut 9 enfants et 22 petits-enfants ce que le journal souligna dans cet article.
Parallèlement à ses « fauteuils » il présida près de quarante ans (35 ans en 1970) le Comité de la Croix-Rouge d’Yvetot. Il a participé aux secours de 40 militaires allemands et alliés abandonnés à leur sort à Yvetot à la Libération.
in : le Courrier Cauchois du 23 mai 1970
Brève biographie réalisée par Pascal Levaillant 2024

Complément biographique  :

 

Robert Lemonnier 1893- 1973


Robert Lemonnier amateur des arts a voué sa vie aux activités sociales, au service de sa ville. Il avait aussi le goût pour la botanique cultivé jeune, rue du Calvaire.
Robert Lemonnier est né le 19 octobre 1893 à Yvetot, rue du Calvaire. Son père était entrepreneur de travaux publics. 


Le 16 mai 1970 a été publié au « Journal Officiel » la nomination  au grade  de chevalier dans l’ordre national du Mérite attribué à Robert Lemonnier pour « 55 ans  d’activités sociales » par le décret du 14 mai 1970. Il l’apprit à la réception du courrier de M. Albin Chalandon, ministre de l’équipement et du logement.


Interviewé par  le Courrier Cauchois, Robert Lemonnier  déclara : « 55 ans c'est peut-être un peu trop long […] car je suis né en 1893 et mes services à l'âge de 21 ans étaient tout de même assez modestes; je m'occupais pourtant de la société d'horticulture et des jardins ouvriers"
Il est entré dans la « maison d’Yvetot » dans la classe enfantine de la « Sœur Dominique » pour n’en sortir qu’à la fermeture autoritaire d’août 1908.  » « Il termina ses études  secondaires à l’institution Saint-Joseph du Havre
Durant sa jeunesse il habitait rue de la République en face des Lefresnes qui possédait une belle propriété avec pelouses,  avec surtout cultures florales et potagères modèles. Ce voisin  amateur de botanique « initia  tant et si bien le jeune Robert, doué pour tous les arts, que cela se sût et valu au jeune clerc de notaire sa première Présidence à la tête de la Fondation des Jardins ouvriers, fondé à sa diligence  ».  Sa passion pour les rosiers reste dans les esprits de ses petits-enfants car Annick Nion, une de ses petites filles se rappelle de son talent pour greffer les rosiers. Robert Lemonnier qui avait le plaisir des arbres, des parcs et des fleurs dit un jour : « une rose d’automne est plus qu’une autre exquise » 
Dans le cadre de ses études à la Faculté de Droit de Paris, il fit son stage réglementaire à l’Etude de M. Achille Legrand. Il finit ses études en 1914 après avoir obtenu brillamment  sa licence. Destiné à être notaire le destin en décida autrement car il succéda a son beau-père, M. Rimbert avoué en 1921. Il transmit cette charge à son fils Jacques Lemonnier en 1949.
Il a donc commencé sa carrière comme Avoué au Tribunal Civil d’Yvetot au début des années 1920. 


Il fut conseiller municipal de 1935 à 1943.


Il a présidé durant 20 ans la société des H.L.M. D’Yvetot  durant laquelle Yvetot lui doit une forte augmentation de sa population ; il s’occupa des mal-logés : la Cité de l’Abbé Pierre fut sa première réalisation bien modeste en 1954. Il accompagnera le projet de création  des logements des Béguinages qui permirent aux personnes âgées de bénéficier du bien-être dans la sécurité . Il fut secrétaire du Conseil d’administration de la société H.L.M. de la Seine Maritime. Il sera encore pendant plus d’une décennie président-fondateur du Comité du logement d’Yvetot et de sa région. Il fut également président de la Caisse d’Epargne et de Prévoyance d’Yvetot  et membre du conseil d’administration de l’union des Caisses d’Epargne du Nord-Ouest. Il fut aussi membre du Conseil d’Administration de la société de crédit immobilier rural du département et président du Centre ménager des Dames-Blanches d’Yvetot, il fut membre du Conseil d’Administration du Centre de Rééducation Arcaux de Bois-Himont. 
Auparavant en avril 1958,  il avait reçu la rosette du Mérite social et la médaille de Vermeil de la Croix-Rouge.
Marié, il eut 9 enfants et 31  petits-enfants.
Parallèlement à ses  « fauteuils » il présida près de quarante ans (35 ans en 1970)  le Comité de la Croix-Rouge d’Yvetot. Il a participé aux secours de 40 militaires allemands et alliés abandonnés à leur sort à Yvetot à la Libération.
in : le Courrier Cauchois du 23 mai 1970

 

Rédaction Pascal Levaillant 2019-2024
 

Aux Jardins Ouvriers et Familiaux d’Yvetot depuis 1944 des yvetotais s’adonnent au jardinage

Yvetot 1944 :   


Naissance de M. Marc Benoist  
et

Création des Jardins Familiaux à Yvetot.

Les Jardins Familiaux d’Yvetot sont créés   alors qu’il existait auparavant d’autres jardins privés loués à des particuliers  à deux endroits d’Yvetot dont les terrains des sœurs Valentin et de M. His et sur le terrain actuel des cars Hangard, rue Ferdinand Lechevallier.


C’est à l’initiative de Maître Lemonnier, Avoué que ces jardins ont été créés,  rue des Fonds sur une première bande à l’emplacement du local actuel. Puis au fil du temps d’autres parcelles ont été attribuées  en prolongement de la première bande  et sur d’autres terrains rue du Champ de Courses et rue Rodin sur des terres agricoles acquises par la Ville et cédée en gestion à une association des jardins familiaux que préside M. Marc Benoist depuis 1983.


Quant aux jardins de la rue des Champs, ils sont  gérés par l’association toutefois ils appartiennent à l’Hôpital Local Asselin-Hédelin d’Yvetot.


L’association gère 400 parcelles sur ces quatre terrains, elle les loue aux propriétaires  (Ville d’Yvetot et l’Hôpital Local d’Yvetot) et les loue aux particuliers désireux de cultiver  une parcelle de 100 m2 et qui en avait la nécessité.


L’association compte aujourd’hui 190 adhérents. Quand on parle des jardins familiaux, ils sont associés à des jardins ouvriers car ils ont été créés  afin d’augmenter à cette époque en 1944 leur surface de production de légumes, eux-mêmes n’ayant pas des terrains suffisants.
L’association des jardins familiaux est sous l’autorité administrative et juridique du Ministère de l’Agriculture car ils sont considérés avant tout comme des jardins agricoles, à contrario des jardins partagés relavant d’une politique d’aménagement de la ville et des quartiers « où tout le monde cultive et se sert à sa guise » limite et différence soulignée par M. Marc Benoist, trésorier de la Fédération Départementale des jardins Familiaux de Seine-Maritime.
 
Aux jardins familiaux depuis 1944 à l’apparition du motoculteur le travail au jardin se faisait essentiellement à la bèche, à la fourche plate, l’entretien des parcelles se faisait au croc, à la binette et à la bataille (à plusieurs dents) aidant au sarclage et contribuant au maintien de l’humidité de la terre. On dit ici qu’un  bon sarclage vaut mieux qu’un arrosage. Le sarclage était effectué tous les deux jours ce qui permettait d’obtenir un jardin impeccable et propre.
La devise des Jardins Familiaux est de maintenir la propreté du jardin.
 
Cette époque ce fut la meilleure période pour ces jardins me confie Marc Benoist.
L’avènement du motoculteur et du brabant changea et modifia les pratiques, les usages et l’environnement et l’harmonie des jardins.
Travailler au jardin pour la plupart des jardiniers-ouvriers était exigeant et rude cependant c’est l’harmonie qui était à l’œuvre, l’échange, la solidarité entre copains et amis : le territoire des hommes. Aujourd’hui et récemment les femmes occupent des parcelles qu’elles entretiennent à la perfection.
Les ennemies du jardinier sont et restent : le liseron, la queue de rat, la poule grasse, l'ortie, le chardon, la dogue.
On y cultivait à cette époque entre 1944 et 1970 des oignons, des échalotes, des poireaux, des carottes, des endives, des épinards, de la mâche, des salades d’hiver, des salades d’été, des petit-pois, des blettes, du rutabaga, du pissenlit, des courges, des tomates, des pommes de terre (la Binche), des betteraves longues et rondes, de l’oseille, des radis gris et de saison.


La vie  et l’organisation aux jardins Familiaux


Sur chaque parcelle se sont érigés des cabanes de fortune fabriquées et montées avec des matériaux de récupération. L’eau fut installée au commencement des jardins, plusieurs points d’eau (bornes)  étaient à disposition des jardiniers. La seule restriction imposait le seul usage de l’arrosoir, le jet d’eau était proscrit ce qui en encore le cas aujourd’hui. Depuis plusieurs années chaque abri de jardin  a donné un prolongement aux premières cabanes de fortune qui sont désormais toutes équipées d’une cuve de 100 litres adossée à l’abri de jardin.


Il existait une zone de dépôt des déchets et des fanes des légumes qui étaient enlevés une fois par mois. Les jardiniers n’avaient pas recours au compostage à cette période.
Le seul apport était l’engrais et surtout le fumier provenant d’exploitations agricoles (fumier de vache et de cheval).


La bouse de vache servait aussi à fabriquer un substrat mélangé avec de l’eau dans un seau où était déposée la porette avant d’être plantée en terre.
Dorénavant c’est le purin d’orties qui devient un engrais très utilisé.


Aujourd’hui les jardiniers n'introduisent plus ni  engrais chimique ni produit phytosanitaire.


Dès le début des jardins familiaux, les fleurs ont été semées ou repiquées et le sont davantage aujourd’hui. En effet les jardinières incorporent les fleurs dans leurs parcelles.
De même, les  fruitiers s'invitent de plus en plus au jardin.
Deux  ruches ont été installées   rue des Fonds car l’apport des fleurs et des parcelles inutilisées semées de gazon fleuri permettent l’activité des abeilles sur un des sites pour la production de miel.


Ce phénomène floral est accentué par la présence des jardinières qui intègrent au jardin leurs fleurs semées ou repiquées.


Evoquant la permaculture, elle n’est pas développée dans ces jardins pour l’instant.
Certains jardiniers avaient des fins de journée difficile, certains dormaient dans leur cabanon ce qui n'est plus courant aujourd'hui : en effet certains jardiniers dissimulaient quelques bouteilles de vin ou de cidre sous les pieds de rhubarbe. Les jardins étaient à cette époque le royaume des hommes, les femmes n'y mettaient pas les pieds. Désormais hommes et femmes partagent le jardin, c'est même devenu un espace intergénérationnel.

Marc Benoist a trouvé un successeur en 2024 : M. Hauchard

 

Jardins rue du Champs de Courses 2019

Jardins rue Rodin de Courses 2019

Jardins rue des Fonds 2019

Jardins rue des Champs 2019

En 1985, l'Ecole Jean Prévost avait sa parcelle, rue des Fonds


Les jardins Ouvriers et  familiaux  en quelques dates :

 

1916

Le Réveil d'Yvetot les 17-20 mai 1916, pages d'Yvetot

 

 

En juin 1917, distribution gratuite de graines,  REVEIL D'YVETOT

 

En 1920 : communiqué de Robert Lemonnier, secrétaire de la société Cauchoise d'Horticulture  à l'adresse de 120 rue du Calvaire comme l'indique l'archive ci-dessous

 

 

1920

Lors de l'assemblée générale de la société cauchoise d'encouragement de l'horticulture qui s'est tenue dans l'ancienne institution ecclesiastique d'Yvetot, M Lemonnier secrétaire de la Société  relate la visite des cultures  aux côtés de M. Mail, Vice-président de la Société Cauchoise et de son président Rimbert,  dont l'assemnblée fut présidée par le Maire et conseiller Général M. Bocheux,  le 17-20 novembre 1920 :  Le Reveil d'Yvetot relate

les prix  du concours remis aux jardiniers ouvriers d'Yvetot 

dont le 1er prix à M. Lami  rue du Champ de Courses ; 2e prix à M Parmentier, rue Clos du Manoir ; 3e prix à M. Desmoulins, rue Thiers ; 4e prix remis à M. Langlois, rue des Chouquettes, tous d'Yvetot acteurs exposants des fruits et légumes à l'exposition des jardins ouvriers de l'année 1920.

Pour les fruits à cidre le 1er prix fut remis à M. Gueroult chef de culture chez Mme Legrand à Yvetot pour sa plus belle collection de pommes, dont il exposait plus de 60 variétés. Ses légumes lui méritèrent le maximum de points de félicitations du jury.

 

 

ROBERT LEMONNIER - Concours de jardins ouvriers - Réveil d'Yvetot 8 juillet 1922

 

Pour se remémorer  la piste du créateur  des jardins, Robert Lemonnier, je la dois à  l'information  transmise par René Gilles en 2019, qui m'avait indiqué qu'on devait les jardins ouvriers  d'Yvetot à Robert Lemonnier et  par la suite à Raymond Hétru aux alentours des années 1941 : Cette information m'a encouragé à chercher les preuves dans la presse ou les annuaires pouvant restituer l'époque. 

 

Lechevallier Ferdinand                          22 février 1881- 15 mai 1904
Lhermitte Emmanuel                        15 mai 1904- 16 mai 1908
Bocheux Eugène Charles                16 mai 1908-17 mai 1925
Rimbert Charles                                17 mai 1925- 17 mai 1929
Richard Marcel                                   17 mai 1929- 29 mai 1943

Délégation spéciale sous la présidence de M. Orcel  29 mai 1943- mai 1945

Richard Marcel                                 19 mai 1945- 9 mai 1953
François Jean                                        9 mai 1953- 20 mars 1959
Bobée Pierre                               20 mars 1959-1995
Décultot Philippe        1995-2008
Canu  Emile           2008-2022

Francis Alabert 2022- 
 


1943 /  Les statuts sont déposée en préfecture par Robert Lemonnier
Naissance des jardins familiaux sur l'impulsion de M. Lemonnier le 17 janvier 1944.
À la fin du XIXème siècle, l'abbé Lemire crée les Jardins Familiaux afin de permettre aux familles de subvenir à leurs besoins pour leur permettre de cultiver des légumes et fleurs, pour y passer du bon temps, pour y fréquenter des copains non loin de chez eux, non loin de leur maison, non loin de leur appartement.
Jean-Louis fut l'un des premiers jardiniers à Yvetot qui au fil du temps arriva à entretenir 3 parcelles rue des Champs. Il avait 23 ans quand il a pris un jardin en 1944. Il faisait pousser poireaux, petits pois, haricots verts et pommes de terre.

En 1944, M. Horcel, nommé représentant de la ville par Vichy en 1943.

Le Docteur Richard  qui avait quitté la fonction en 43 et l’a reprise de 1945 à 1953.

Entre 1945 et 1970, Raymond Hétru reprend après Robert Lemonnier occupé à la reconstruction d'Yvetot pendant plusieurs décennies aux côté de M. Richard, M. François et M. Bobée.

 

1962  AUX JARDINS FAMILIAUX, Rue des Champs

CC du 10 février 1962

 

 

 

 

M. Raymond Hétru en 1965 dans son jardin, rue de l'Union

RAYMOND HETRU  28 3 1965 aux JARDINS O F

Le Député Constant Lecoeur

remettra la Croix de Chevalier du Mérite Agricole à M. Raymond Hétru,

avec l'aimable autotisation de Didier Clatot (2017)

in : «Jean Hétru, 50 ans de manifestations à Yvetot et ses environs.»

Raymond Hetru


Artisan créateur avec Robert Lemonnier des jardins familiaux

"Raymond Hétru fut une grande figure locale bien avant son fils Jean.
Il a contribué  activement à la vie locale. Le père de jean avait travaillé à la Cordonnerie Delaunay à Yvetot. Durant la seconde guerre mondiale sa maison fut détruite suite aux multiples incendies qui ont frappé Yvetot. 
C’est surement dans ce contexte qu’il rejoignit Robert Lemonnier pour organiser les conditions de subsistance des yvetotais  par l’octroi de nouvelles parcelles de jardins à conquérir afin de leur  céder un lopin de terre pour y créer leur potager.
1941 : Naissance des jardins familiaux sur l'impulsion de M. Lemonnier et de Raymond Hétru  sur une première bande de terrain de la rue des Fonds. 
René Gilles a très bien connu Jean et son père Raymond, il  se souvient des fêtes et des fleurissements dans Yvetot : 
« Raymond Hétru a été président longtemps. Il faisait de très belles décorations en légumes à la st Fiacre à la chapelle paroissiale pour la messe ».
Le 26 mai 1946, Raymond Hétru en compagnie de sa femme participait à la Kermesse du Printemps devant un stand très fleuri.


Il fut membre des Jardins ouvriers puis Vice-Président avant de prendre la présidence tenue à cette époque par Robert  Lemonnier, jusqu’en 1963 date à laquelle il présenta sa démission.
Il reçut la Croix de Chevalier du Mérite Agricole par le député Constant Lecoeur en 1958 lors de la fête de la Saint-Fiacre, patron des jardiniers.
Raymond était attaché à la Saint-Fiacre. Saint-Fiacre fut un moine légendaire et modèle des jardiniers, dans le potager duquel les pauvres avaient le droit de se ravitailler. En somme son potager est l’ancêtre du « jardin partagé ».


Raymond Hétru aimait perpétuer cette tradition en offrant cette année 1958 les plus beaux légumes des jardins Ouvriers et Familiaux exposés lors de la cérémonie religieuse célébrée cette année-là  par l’abbé Carron, premier vicaire aux petites orphelines de la Miséricorde. A cette occasion l’autel fut décoré et orné par un amas de légumes sur lequel reposait une reproduction d’un baromètre géant (toujours au beau fixe, souligne le journaliste réalisé par MM.Jacques et Tétrel aidés par Mme Hétru.


A l’Hôtel de Ville,  après l’office, cette manifestation annuelle fut l’occasion  de remettre à Raymond Hétru, en dévouement de son œuvre sociale,  la Croix de Chevalier du Mérite Agricole entouré de son épouse et de ses deux petites-filles.  


En l’absence de Jean François H. Cahan officia la cérémonie à laquelle assistait MM.Constant Lecoeur, député  et conseiller général, le chanoine Delaune et les abbés Carron et Gaudray, les conseillers municipaux  Lebrun, Hurard,, Jourdain et Caron et m. Plot, vice-président et son épouse, M. Tétrel, vice-président, M. Levitre secrétaire et son épouse, M. F.Lecoeur, secrétaire adjoint, M.Jacques, trésorier, et les membres de l’association :  Varneville, Hautot, Lebourg ,  Caltot. 


Il fut remis à Mme Hétru associée à ces mérites, de magnifiques fleurs.
M Constant Lecoeur rappela le parcours de Raymond Hétru soulignant son inlassable dévouement.


Il reçut en cadeau un véritable baromètre par ses amis jardiniers.
Un repas s’en suivit à l’Hôtel du Chemin de Fer,  selon la tradition instaurée avant-guerre par la Société d’Horticulture que présida Robert Lemonnier."

Rédaction Pascal Levaillant 2019-2024
 

 

Années 1953 à 1959 : M. Jean François, minotier, maire d’Yvetot
En 1963, M. Pierre Bobée,  médecin  est le maire d'Yvetot.
                                                         M. Benoist entre aux jardins familiaux en 1963

1970  

CC - 23 mai 1970 Robert Lemonnier

 

M. Hétru donne sa démission après 25 ans de bons et loyaux services

 

1976

Lors de l'épisode  de la sécheresse  qui sévit partout en France y compris en Normandie, Yvetot et ses jardins Familiaux ne sont pas épargnés. M. Benoist déclarait dans la presse locale : "la terre est morte"
En effet la récolte fut maigre, les rendements faibles pour les haricots, poireaux, salades, carottes. Seuls les tomates, et les mêmes ont tiré  leur épingle du jeu ce que constateront rue des fonds M. Langlois et M. Benoist.
En 1976, M. Pierre Bobée, médecin  est le maire d'Yvetot.

 

 

1981 cette année M Garbe est Président ; M. Benoist, secrétaire

 

1983


Cette année-là,  M. Benoist succède  à M.Garbe.
Sont effectués à cette époque des travaux d'aménagement d'un local pour recevoir du matériel.
L'association sous la nouvelle présidence de M. Benoist à pour mot d'ordre : mettre à disposition des amoureux du jardin des parcelles de terrains qu'elle gère.

 

                           M. Langlois et M. Benoist constatent les effets de la secheresse en 1986

 

1988


L'association des jardins familiaux par la voix de son président Benoist alerte les adhérents sur le niveau d'entretien des parcelles quelques mal entretenues, sur la dégradation de quelques abris  de jardin, sur des vols de légumes  lors de l'Assemblée Générale. Il invita les adhérents au respect du règlement  afin que les jardins soient mieux entretenus.
 

En 1988, M. Pierre Bobée, médecin est le maire d'Yvetot
 

1994


Ce fut l'année du cinquantième anniversaire des jardins ouvriers et familiaux que préside à cette époque M. Benoist en présence de M. Pupin, président de Haute Normandie et le docteur Pierre Bobée, maire, conseiller général. L'association fut déclarée en préfecture par M. Lemonnier, avoué, fondateur de l'association en partenariat avec d’un côté la Ville d'Yvetot et d'autre part l'hôpital Local d'Yvetot.
Dans les années 90, M. Langlois déjà présent en 1976, s'occupait de la section "graines" et son action permit une augmentation de 30% d'adhérents. Faut-il le rappeler,  M. Langlois fut aussi à l'initiative de la renaissance du potager du Manoir du Fay A Yvetot.

 

 

En 1994, M. Pierre Bobée, médecin est le maire d'Yvetot.

2004


Le mercredi 8 septembre 2004 est publié un article dans le Paris-Normandie titrant :
"le bonheur est dans le potager" à l'occasion de la 47eme exposition et concours des jardins ouvriers et familiaux de Normandie où treize équipes ont été en lice dont une d'Yvetot à la salle du Vieux-moulin.
En 2002-2004, M. Philippe Decultot, médecin est maire d'Yvetot et Président de la CCYN

En 2008, M. Canu est maire d’Yvetot

 

De 2004 à  2014, M Leguay  est Président de la CCYN

en 2020 il ya eu même des lectures aux jardins familiaux

https://projets.normandielivre.fr/initiatives-bibliotheques-en-normandie/2020/04/20/yvetot-les-lectures-au-jardin/

"Les lectures dans le jardin ouvrier sont l’une des activités proposées dans le cadre de ce festival mais c’est la seule à être récurrente (sont également proposés des ateliers de construction d’hôtel à insectes et de nichoirs, de sauvetage d’animaux sauvages, la projection gratuite du documentaire Après Demain dans le cinéma de la ville).

Le succès ayant été au rendez-vous, et la parcelle du jardin ouvrier étant louée pour toute l’année, il a été décidé de reconduire les lectures au jardin avec un rendez-vous hebdomadaire pendant l’été."

Qu'est devenu ce projet de lectures aux jardins familiaux?

en 2022, M. Alabert remplace M. Canu, démissionnaire et M Charassier reste président de la CCYN (2014 à 2024)

M. Benoist, rue des Champs en 2019

en 2024 M. Denis Hauchard succède à M. Benoist

C'est donc  sous l'ère nouvelle du successeur de M. Canu, démissionnaire en 2022, et de l'actuel président de la CCYN qu'une menace pèse sur l'avenir des jardins familiaux  à propos d'un projet d'artificialisation (rond point) rue des Champs pouvant menacer  à court terme  un site complet avec 56 parcelles de jardins  de la rue des Champs (créés en 1943-1944 par Robert Lemonnier),  comme l'a indiqué le Courrier Cauchois  le 20 décembre dernier.

 

 

"Denis Hauchard, président des Jardins Ouvriers et Familiaux, est inquiet pour l'avenir de la parcelle rue des Champs. Il craint de devoir quitter ce lieu, exploité depuis 63 ans" In : le  Courrier Cauchois du 20 décembre 2024

Aujourd'hui M. Hauchard reprenant le flambeau d'une même voix avec  tous les jardiniers insiste sur les points suivants :

Le jardinage est la pratique et l'art de semer qui croise un besoin d'esthétisme et alimentaire. Jardiner répond au but d'embellir et entretenir un lieu : un jardin, un potager.

Jardiner c'est apprendre la patience, s'adapter à l'environnement, à la météo et à ses caprices.

Jardiner c'est du lien social, c'est maintenir un exercice physique pour la santé, c'est la production de légumes afin d'obtenir fraicheur et qualité gustative tout en respectant le sol, la nature du sol ; c'est venir chercher un moment de détente pour se ressourcer.

Aujourd'hui ce sont 355 parcelles sur 4 sites,  tient à souligner  Denis Hauchard.

Il faut s'écouter, respecter son environnement et veiller à respecter les espaces communs.

La richesse des parcelles entretenues depuis 1943 concoure à une terre  vivante, nourricière  où grouillent les vers de terre, les meilleurs amis du jardinier.

Le Courrier Cauchois 2021 - Denis Hauchard

Docs transmis par M. Hauchard

M. Hauchard ajoute :

 

"Nous avons mis en place un achat groupé de petites graines pour les jardiniers et c'est plus de 

1500 euros de graines qui ont été commandées!!

 

Un système de mail a été mis en place. Les jardiniers reçoivent toutes les semaines des informations conseils et préconisations

 

Ils posent aussi des questions de jardinage :  C'est plus de 8000 mails qui ont été envoyés.

 

L'association fourni des amendements de la chaux et du boschovos.

 

Les JOF vont installer des hôtels à insectes pour favoriser la biodiversité.

 

Pour l'hiver l'association facilite l'installation de couvert végétal (culture piège à nitrate) avec des plantes qui ameublissent le sol et augmente le taux de matière organique

Pour les jardins en attente les JOF implantent des cultures mellifère pour favoriser la pollinisation.

 

Un suivi régulier des parcelles est organisé avec de l'entraide pour les jardiniers absents pour cause de maladie.

Un système d'échange de plantes et de légumes en surplus est organisé."

 

Les jardins familiaux ou le " réflexe de survie "

En effet le jardin apporte la nourriture donc permet de s'alimenter et vivre tout simplement

 

Un public devenu très hétérogène: JOF jardins ouvriers et familiaux ce sont des jardins familiaux toutes catégories socio-professionnels de l'ouvrier au cadre supérieur en passant par l'employé de banque

Un public qui se féminise : ce n'est plus forcément le couple mais des femmes seules ou divorcées ou veuves qui prennent un jardin.

Un public écolo,  des citoyens qui veulent manger des produits de qualité et respecter l'environnement

Conclusion la société évolue les jardiniers aussi!!

 

 

J'ai contribué à faire diffuser à Yvetot ce film auquel Denis Hauchard a assisté

en septembre dernier

aux Arches Lumière, Yvetot

grâce à  Action Citoyenne Yvetot en présence des réalisateurs Guy et Dominique Chapouillié

Pour compléter votre information, je voulais rendre hommage à Maurice Leperchey, Denis Langlois et à Bernard Boullard, ces passeurs du vivant qui ont été en leur temps des passeurs de la transition écologique, parfois en avance sur leur temps mais dont les écrits restent et resteront...

 

Nature au crible,  Nuances d’humus, levées botaniques, Collectif Corblin-Levaillant, plasticiens-botanistes

a présenté en 2024 à Cahors

LE CHAI (auberge de jeunesse),  52, avenue André-Breton  Cahors  - 1er - 31 Mars 2024 

 


" La vie était revenue. […] 
Kevin s’empara de la bêche, fit quelques pas pour choisir le meilleur emplacement et se mit à creuser. La lame s’enfonça facilement dans le sol. La terre était noire et brillante. 
Elle dégageait une odeur de sous-bois capiteuse. Dans une des mottes qu’il dégageait, 
Kevin remarqua une belle troupe d’anéciques, grouillants et humides, en pleine forme. […]"
Humus, Gaspard Kœnig, 2023
________________________________________
Gaspard Kœnig, Humus, Editions de l’Observatoire / Humensis, Paris, 2023, p. 376-377.


Aux autrices, auteurs et aux experts : 
Bourguignon Claude et Lydia ; Boullard Bernard ; Christophe Jean-Damien ; Cauquelin Anne ; Clément Gilles; Ernaux Annie ; Feller Christian ; Goulfier Guylaine ; Jabiol Bernard ; Koenig Gaspard ; Langlois Denis ; Leperchey et M. & D. Bazire ; Pessis Céline ; Roger Jean-Marie ; Selosse Marc-André ;  Strullu-Derrien Christine ; Tassin Jacques ; Terre Vivante et la revue les quatre saisons ; Touyre Patricia;  Veragrow ; Hervé Brunon et Laurent Le Bon (dir.), Jardins, cat. exp., Paris, Réunion des musées nationaux – Grand Palais, 2017.  avec aussi la complicité de Marc Jeanson, botaniste ; Alice Freyet et Guy Chapouillé…

Pour la communication et l'information notamment :
Les Abattoirs : programmation d'art contemporain des Abattoirs, Musée - FRAC OCCITANIE TOULOUSE en région Occitanie de mars à décembre 2024, double page Cahors, Humus miraculum.
https://www.lesabattoirs.org/Expositions/humus-miraculum/


Petit lexique[1] de l’humus

Humus
Substance issue de la transformation de la matière organique, dans le sol ou dans le tas de compost. C’est l’humus qui donne à la terre du jardin sa couleur noire, sa consistance légère et grumeleuse.

Compost
C’est ce qu’obtient le jardinier lorsqu’il fait fermenter des matières organiques fraîches en les disposant en tas (ou en couche sur le sol à fertiliser). Ce sont les micro-organismes et les vers de terre qui sont les principaux agents de cette transformation en humus. 

Terreau 
C’est du compost très mûr, c’est-à-dire assez « vieux ». Le terreau est composé d’éléments fins de couleur noirâtre ; il ressemble à de la terre légère.

Matière organique
Pour le jardinier et l’agriculteur, c’est tout ce qui est issu des êtres vivants et qui peut retourner au sol : feuilles, paille, herbes, épluchures, fumier, compost, terreau, tourbe, humus, etc. La teneur des sols en matière organique est variable : autour de 5% dans un jardin.

Micro-organismes
Ce terme désigne tous les êtres vivants visibles seulement au microscope (bactéries, champignons microscopiques, etc.) Ceux-ci sont très nombreux dans le sol et dans les tas de composts ; ils jouent un rôle très important dans la fertilité (en fabriquant l’humus, par exemple).

Les quatre saisons : 
Premier magazine à se revendiquer “0 phyto” dès 1980, les 4 saisons est aujourd’hui le magazine référent du jardinage bio.
Des experts du jardinage, des essais menés dans les jardins du Centre Terre vivante et des échanges constants avec ses lecteurs, lui permettent de donner les meilleurs conseils pratiques au potager, au verger et au jardin d’ornement.
Et parce que la quête d’autonomie ne se limite pas au potager, il s’intéresse à toute l’écologie pratique : permaculture, habitat, alimentation, santé, alternatives…
In : https://www.terrevivante.org/contenu/le-magazine-les-4-saisons/
[1] In : revue « les quatre saisons » du jardinage. Bimestriel n°1, mars-avril 1980, Editions Terre Vivante, Paris, p.63


EXTRAITS  de « L’intime de l’humus » HERVÉ BRUNON
In : MAQ_RMN_CAT_JARDINS_BLOC_v70.indd 59
Ou file:///C:/Users/rosel/Downloads/essai%20HBrunon3_2017-02-02%20(1).pdf


« S’amorce un processus d’apprentissage, au cours duquel on s’aperçoit « qu’il faut donner à la terre plus qu’on ne lui prend ». Alors, poursuit Capek, « vous serez transporté d’enthousiasme devant un humus bien noir, vous triturerez avec amour le mol humus de feuilles qui tapisse les forêts, vous soupèserez la lourde terre à gazon ainsi que la tourbe légère[1]». En somme, commente l’historien de la littérature Robert Harrison, « jardiner, c’est se donner les moyens de comprendre les efforts déployés par la vie pour s’enraciner dans une argile hostile et réfractaire[2] »

« La bêche se réfère à la fonction primordiale de l’homme, faire fructifier la terre. ¶ Cependant, l’usage de cet outil se verra remis en question à la fin du XXe siècle par de nouvelles connaissances du sol. En effet, les scientifiques ont peu à peu mis en évidence sa composante vivante et l’emploi du microscope a permis d’étudier les invertébrés et micro-organismes produisant l’humus, auparavant considéré comme une matière chimique inerte. En 1875, les travaux de Jean-Jacques Théodore Schloesing et Charles Achille Müntz sur la nitrification orientent dans cette direction les recherches d’un domaine en cours de constitution autonome, la pédologie[3], et l’agronomie connaît un virage biologique. Six ans plus tard, Darwin publie son dernier ouvrage, consacré au rôle des vers de terre dans la formation de la terre végétale, montrant qu’ils n’ont pas un rôle nuisible, comme on le pensait antérieurement, mais bien essentiel[4]. Cependant, l’essor de l’agrochimie et de la mécanisation conduit à oublier le rôle positif de l’humus sur la fertilité ; l’emploi des engrais de synthèse se généralise après la Seconde Guerre mondiale. Le développement d’une écologie des sols aboutit à la prise de conscience, un siècle plus tard, de la nécessité de ne pas bouleverser l’équilibre fragile de ces milieux vivants[5], et donc de procéder à d’autres pratiques de préparation et d’entretien du terrain. C’est ainsi qu’André Grelin fait breveter en 1963 un nouvel outil, la grelinette, qui permet d’ameublir et d’aérer la terre, pour faciliter le développement racinaire des plantes, sans la retourner, contrairement à la bêche, afin de ne pas renverser la distribution entre micro-organismes aérobies, ayant besoin d’oxygène et se situant en surface, et les anaérobies, ne pouvant vivre qu’à l’abri de l’air et proliférant dans les couches inférieures. Apparue dans les années 1950 aux États-Unis, la technique du paillage (ou mulch) consiste à recouvrir le sol de matériaux organiques ou minéraux, pour ne pas laisser la terre à nu comme dans les environnements naturels. Aujourd’hui, tandis que certains, tels Claude et Lydia Bourguignon en France, militent pour une agriculture enfin respectueuse des sols épuisés par la surproduction[6], les manuels se multiplient pour exposer les meilleures manières de soigner ceux des jardins[7]. »

________________________________________
[1] Čapek, L’Année du jardinier, op. cit., p. 114-115.
[2] Robert Harrison, Jardins. Réflexions sur la condition humaine, trad. Florence Naugrette, Paris, Le Pommier, 2007, p. 47.
[3] Voir Boulaine, Histoire des pédologues, op. cit., p. 88 sq.
[4] Voir Charles Darwin, Rôle des vers de terre dans la formation de la terre végétale (1881), trad. M. Levêque, Paris, C. Reinwald, 1882.
[5] Sur l’état actuel des connaissances, voir Jean-Michel Gobat, Michel Aragno et Willy Matthey, Le Sol vivant. Bases de pédologie. Biologie des sols (1998), Lausanne, Presses polytechniques et universitaires romandes, 2003.
[6] Voir Claude Bourguignon, Le Sol, la terre et les champs (1989), Paris, Sang de la terre, 2002. Parmi la bibliographie de plus en plus importante sur le sujet, voir aussi Frédéric Dhenez, Cessons de ruiner nos sols ! Paris, Flammarion, 2014.
[7] Voir par exemple Rémy Bachet et Blaise Leclerc, Une bonne terre pour un beau jardin : paillage, engrais vert, grelinette, Mens, Terre vivante, 2009.
                                                       

In : Laurent Le Bon (dir.), Jardins, cat. exp., Paris, Réunion des musées nationaux – Grand Palais, 2017.

Humus et compost
Maurice Leperchey, yvetotais

Le compost parfait et idéal de Maurice Leperchey
 
Il doit la réussite de son produit final (BIOTERO) à un subtil mélange de fumier de cheval d'un club hippique à Mont-Saint-Aignan avec des brisures d'écorce de pin sylvestre ou pin maritime (pin des Landes) ce qui explique le port du béret basque pour ceux qui l'ont bien connu.
Récupérant le fumier de cheval, Maurice Leperchey le préférait au fumier de vaches (fumier froid) soignées aux antibiotiques et porteuses de familles de bactéries. Il aimait dire " C'est Pasteur qui m’a aidé à découvrir l'intérêt du fumier de cheval ». Il avait fait le constat que les bactéries cassaient les molécules nécessaires à la vie des plantes. Il disait encore que "si le sol est fécond, avec un bon équilibre carbone-azote, les plantes finissent par s'immuniser contre les maladies et n'ont pas de pucerons".
Le secret d’un bon compostage de ces éléments transformés en plusieurs étapes jusqu'au « produit » prêt à l'emploi, résidait à répartir en tas linéaires de deux mètres de largeur, sur un mètre cinquante de hauteur, de manière à favoriser une bonne fermentation.
La réussite tint à l'idée d'aérer et de brasser ces tas mis en andains pour faciliter le compostage.
Effectivement, il fallait de l’oxygène (principe du compostage en aérobie) et de l'humidité, il fallait remuer les petits tas contrairement à d’autres procédés de fermentation anaérobie des résidus. Les andains étaient remués et aérés par soulèvement à l’aide d’engins de levage. En cas de sécheresse, l’arrosage des andains étaient nécessaire afin de maintenir l'humidité propice à la mise en température.
L'objectif de ce processus était la recherche d’une bonne « combustion » pouvant atteindre presque quatre-vingt degrés afin d’éliminer, parasites, bactéries. Pour ce faire, les tas étaient soulevés, aérés, humidifiés si besoin, régulièrement jusqu'à la phase finale du broyage. Cette ultime étape permettait d'affiner le produit final avant un passage éventuel au crible.
Le produit fini, le compost était friable, il avait une couleur brunâtre et dégageait la seule odeur subtile d'humus de sous-bois.
De 1973 à 1989, ses différents composts étaient destinés aux pelouses d’exception, aux greens des golfs d’Octeville, de Belgique, d’Erquy jusqu’à ceux de la Riviera comme celui de Cannes. Clients fidèles. Ces apports de qualité permettaient aussi de les employer pour couvrir le sol, après carottage de terrain de sport.
Si l’activité des greens fut un succès, celle-ci gagna en diffusion par la qualité remarquable du produit.
Le produit BIOTERO est une fumure biologique à l’ancienne, fruit d’une longue phase d’expérimentation menée par l’homme au béret basque. Il fut soutenu par sa seconde épouse Anne-Marie et efficacement ensuite par sa fille Martine et plus tard par son gendre Daniel. Son concept fut récompensé à plusieurs reprises. Entre autres, l’entreprise a reçu en 2001 l’ECO-Trophée pour son avancée dans le cadre du « développement durable » lancé par le Parc des Boucles de la Seine Normande. La société BIOTERO reçu la somme de 15000 francs. 
La reconnaissance enfin !
BIOTERO devint une marque déposée mais Maurice, le « rebelle » n’a jamais voulu déposer un brevet.
La fumure biologique à base de fumier de cheval était appréciée par les jardiniers de la Ville de Paris et utilisée dans les espaces verts de plusieurs arrondissements de la capitale, entre-autre, aux pieds des rosiers des jardins de Bagatelle, des arbustes du square Georges Brassens ou de l’hôpital Henri Mondor comme dans le superbe jardin de la Fondation Claude Monet à Giverny.
A la fin de sa vie, Maurice Leperchey encore valide, n’aura de cesse d’améliorer la « grelinette » avec l’accord de son inventeur Mr Grelin. La « fourche à bêcher » qui sert à aérer la terre de son jardin sans la retourner. Retourner la terre, pour Maurice était une grave erreur. Il utilisait la « houe maraichère » pour désherber et préparer la terre avant de la cultiver.
Sa devise fut de prôner l’écologie, dispensant souvent à bon nombre de clients, des conseils judicieux pour rester en bonne santé, en se nourrissant sainement à partir de ce que la nature nous offre, sans arrière-pensée démagogique ou politique comme le décrit l’article paru dans GMD information en 1982.
Au fil de sa production il incorpora des compléments naturels aux matières premières, bases de ses composts, comme des algues marines, des déchets végétaux, du sable, de la terre de bruyère, des écorces de pin, de la corne broyée, des minéraux, pour obtenir des fumures équilibrées de qualité supérieure, but atteint dès 1989, après vingt-cinq années d’effort et de ténacité.
Je crois qu’il est certain que ses idées lui survivront ce qui est avéré à l’instar de l’Hora de Pierre Rabhi, ardéchois d’adoption, né en 1938 en Algérie, essayiste, romancier, agriculteur et fondateur du mouvement Colibris (agro écologie).
En 2003, Le rouennais pure souche s’est éteint à l’âge de 96 ans.
Extrait de l’article biographique que j'ai rédigé avec les membres de sa famille en 2020
Maurice Leperchey 1907-2003, un Yvetotais défenseur précurseur de l'écologie.
 
  


 
Dans la fin de sa vie, encore valide il améliora la « grelinette » qui sert à aérer la terre de son jardin sans bêcher. Il utilisait un autre engin à roue pour désherber naturellement.
Crédit photo M. & D. Bazire

Humus et compost
Maurice Leperchey, yvetotais

Un artisan de l’humus[1]
Maurice Leperchey
Par-dessus la haie
 
« En plein cœur du pays de Caux, à Yvetot (Seine-Maritime), c’est un jardinier pas comme les autres que nous avons rencontré.
De l’école d’Horticulture de Versailles à son métier actuel de fabricant d’amendements organiques, l’itinéraire de Maurice Leperchey a été celui d’un amoureux de la terre. Il a consacré toute sa vie au jardin – le sien et celui des autres.
« Jardinier et producteur d’humus », voilà quelle pourrait être sa carte de visite.
Quand on arrive chez lui, il est impossible de se tromper : les immenses tas de terreau et de fumier se voient de loin, derrière la haie d’ifs proprement taillés. 
A soixante-douze ans, Maurice Leperchey ne pense pas encore à la retraite. Pourquoi abandonnerait-il ce chantier artisanal où, visiblement, il est à l’aise comme un poisson dans l’eau ?
M. Leperchey : j’ai fait à peu près tous les métiers touchant à l’horticulture avant de trouver ma véritable vocation : la transformation des déchets organiques en humus. Vocation tardive, car c’est à soixante ans que j’ai cessé mon activité d’entrepreneur de jardins pour me consacrer au compostage !
Les Quatre saisons : Vous êtes en quelque sorte un « récupérateur » de matière organique ?
M.L : Il faut croire que l’endroit était prédestiné, car mes deux voisins sont eux aussi des récupérateurs, dans la ferraille et le chiffon.
Moi, ce qui m’intéresse, c’est tout ce qui est organique et qui finit habituellement dans les décharges ou dans les chaudières : écorces, son de moutarde, déchets de lin, de papeterie, etc. Je traite aussi de grandes quantités de fumier, de la tourbe et même des boues de lavage de betteraves. 
Mon travail consiste à broyer tout cela, à faire de savants mélanges, et à aider la nature à fabriquer un produit utilisable par l’horticulteur et le jardinier.
L.Q.S. : Quels sont les mélanges qui font du bon terreau ?
M.L. : Je fais surtout des mélanges fumier + écorce de pin sylvestre et fumier (de cheval) + son de moutarde.
L.Q.S. : La moutarde n’est-elle pas un peu trop …forte pour les plantes ?
M.L. : J’ai essayé d’en répandre directement de l’herbe.  Le résultat a été excellent. De toute façon, lors du compostage qui dure plusieurs semaines, les substances irritantes du son de moutarde disparaissent.
L.Q.S. : N’y a -t-il pas des risques de pollution lorsque vous utilisez des sous-produits de l’industrie ?
M.L. : Effectivement, j’ai eu un « coup dur » il y a quelques années avec des matériaux issus de l’industrie du lin. Il y avait trop de bore dedans, ce qui a provoqué des « brûlures » de la végétation. Depuis, j’ai appris à être prudent !
 L.Q.S. : Quel est le secret d’un bon compostage ?
M.L. : Il faut tout d’abord choisir une matière première de composition bien équilibrée. Le broyage est très important pour rendre le produit homogène.
Ensuite, il faut faire attention à l’humidité. Dans nos régions où il pleut souvent, les tas sont fréquemment gorgés d’eau et la fermentation a du mal à démarrer. Si tout se passe bien, la température dépasse les 50°C., preuve que les micro-organismes sont actifs. J’incorpore de la chaux, de la magnésie ou des phosphates naturels à mes matériaux de base. Cela neutralise un éventuel excès d’acidité.
L.Q.S. : Et votre jardin ?
M.L. : Vous vous doutez bien qu’il est le premier servi en compost. D’ailleurs, voyez les résidus d’écorce qui couvrent le sol.
Une chose est certaine : les plantes sensibles aux pucerons, comme les artichauds, les capucines, les rosiers, ne subissent jamais une attaque chez moi. Je pense que le compost aide au sol à trouver son équilibre ; la plante est mieux nourrie donc elle résiste mieux.
Le seul problème grave que j’ai, c’est le ver de la carotte. Je vais essayer un produit naturel dérivé de la résine de pin. 
J’ai essayé de cultiver des légumes directement dans le compost. Bien sûr, ce n’est pas à la portée de tous les jardiniers, mais j’ai pu constater que pendant au moins deux ans il est inutile d’apporter un engrais complémentaire.
Le tour du propriétaire étant terminé, j’accompagne Maurice Leperchey à l’intérieur de sa petite maison. En entrant, je remarque de curieux bacs pleins d’eau.
M.L. : Non, ce ne sont pas des aquariums ! ce sont mes radiateurs à moi. Ils pompent la chaleur dans le circuit d’eau qui circule sous les tas de compost. C’st économique, car la seule dépense – faible – provient de la consommation des pompes électriques. C’est une variante du chauffage « à eau froide » qu’on appelle aussi pompe à chaleur.
Ecologiste tranquille mais efficace. C’est l’impression que donne Maurice Leperchey. A une époque où l’on parle de « biomasse », de « pétrole vert », de valorisation des déchets agricoles, il est rassurant de voir quelqu’un qui depuis ans quinze est passé à la pratique. Encore trop rares sont ceux dont la mission est de remettre sur la bonne voie certains déchets organiques qui autrement seraient perdus – voire même polluants. Cette bonne voie, c’est celle du retour au sol après transformation en humus.
  
________________________________________
[1] In : revue « les quatre saisons » du jardinage. Bimestriel n°1, mars-avril 1980, Editions Terre Vivante, Paris, p.51 et p. 63.

 

 

 
Crédit photo M. & D. Bazire

 

Denis Langlois, 


 "Le jardin biologique du manoir du Fay, Yvetot"
  Humus, compost


       
Le manoir du Fay et son jardin biologique, Denis Langlois, Robert Tougard, autoédition A.N.E.T.H., Manoir du Fay à Yvetot, fin des années 1990.
les premiers instants de la vie de la renaissance du jardin clos pour devenir un jardin biologique avec l'A.N.E.T.H. au début des années 1990 ( archives de Denis Langlois)
 


  
Le jardin biologique pris en 1996 par Pascal Levaillant

 


 
Le succès de la production végétale dépend de la présence d’un sol vivant. En effet, un sol fertile est peuplé de milliards d’êtres vivants : bactéries, champignons, algues, lichens, acariens, mille-pattes, vers de terre et d’innombrables autres êtres vivants.
Tous remplissent une fonction précise dans le cycle de la nature. 
Les êtres vivants dans le sol remplissent encore une importante fonction de stockage ; ils empêchent le lessivage des éléments nutritifs excédentaires libérés par la dégradation de la matière organique et l’altération des roches, en les emmagasinant dans leur corps jusqu’à leur mort et leur propre décomposition. Leurs besoins sont donc étroitement liés à ceux de la végétation, c’est un perpétuel échange. Plus ils sont prospères : plus grande est la réserve d’éléments nutritifs à la disposition des plantes et plus fertile est le sol.
On trouve parmi les plus gros habitants du sol : 
Les lombrics ou vers de terre, ils digèrent les végétaux morts de la terre, ils aèrent également le sol grâce à leurs galeries. Toutes les espèces de vers de terre exigent un sol régulièrement humide et beaucoup de matière organique. Les engrais chimiques, facilement solubles leur nuisent et les chassent. Utilisez donc un bon compost, compost signifie engrais composé et désigne un fertilisant à base de fumier, feuille, paille, résidus de récolte, tonte de gazon, déchets de cuisine et d’autres matières organiques déchiquetées, mélangées et mises en tas.
Le compostage n’est au fond rien d’autre qu’un élevage de micro-organismes qui trouve dans le compost des conditions idéales de chaleur, humidité et alimentation pour une multiplication rapide.
Pour bien réussir son compost les bactéries ont absolument besoin de matières organiques riches en azote pour se multiplier et échauffer le compost à 60° C minimum.
Le fumier convient très bien à cet usage et devrait entrer pour environ un cinquième dans la composition du tas. Ce tas doit avoir un certain volume pour bien composter, au minimum 1 m2 à la base sur 1 m de hauteur environ. Vous pourrez ajouter l’activateur de compost biologique qui permet d’améliorer et d’accélérer efficacement le processus de maturation du substrat. Le produit naturel est à la base de micro-organismes spécifiques à bactéries, levures et enzymes. Il existe un autre moyen d’apporter au sol de la matière organique, c’est l’engrais vert. Il consiste à semer sur une surface hors culture une espèce produisant beaucoup de racines. Dès qu’on a de nouveau besoin du terrain, on coupe cette végétation.          
Les racines restent au sol, se décomposent et nourrissent les bactéries puis les plantes. 
Si votre sol est pauvre en azote la vesce (légumineuse) l’enrichira naturellement en fixant l’azote de l’atmosphère.
Votre terrain est en friche avec beaucoup de chiendent : semez du sarrasin.
Vous désirez protéger votre sol des rigueurs de l’hiver : semez en octobre de la moutarde, vous n’aurez pas à vous soucier du broyage car les basses températures des mois d’hiver feront le travail à votre place, il vous suffira de travailler votre terre au mois de mars.
La moutarde blanche est appelée ainsi à cause de la couleur de ses graines, cependant ses fleurs sont jaunes d’or. Semée au début de l’automne, elle protégera votre planche des rigueurs de l’hiver et facilitera l’aération du sol au printemps. Dose du semis : 20 grammes pour 10 m2.
La vesce produit beaucoup de matières organiques, elle fixe l’azote de l’air qu’elle restitue au sol après l’enfouissement. Elle aime les sols lourds et permet d’améliorer sensiblement leur structure, les rendant ainsi plus faciles à travailler. Dose semis : 100 grammes pour 10 m2.
Le sarrasin est idéal en terre pauvre et acide, sur des planches qui restent inoccupées pendant tout l’été. Il permet de nettoyer le sol après défrichement en étouffant les plantes indésirables. Très mellifères, cet engrais vert favorise aussi la présence de nombreux insectes utiles au jardin. Dose de semis : 70 grammes pour 10 m2.
On complètera avec des amendements naturels. On en trouve toute une série convenant à la culture biologique. Ils contiennent des composés organiques ou minéraux peu solubles :
•    Le guano[2] du Pérou, engrais complet 100% naturel, récolté sur les rivages des côtes péruviennes. Il est très riche en éléments fertilisants moyens à action rapide.
•    La corne broyée[3], engrais avec un effet fertilisant beaucoup plus prolongé dans le temps.
•    La corne torréfiée[4], engrais azoté naturel. Son action est progressive et durable, sans risque de brûlure pour les racines.
•    Le basalte[5], exceptionnellement riche en magnésium, très riche en oligo-éléments et en silice, le basalte facilite l’absorption par les plantes des éléments nutritifs présents dans le sol.
•    Le lithothamnium[6] est un produit naturellement riche en calcium, magnésium et autres oligo-éléments. Il rétablit les équilibres biologiques, chimiques et physiques du sol en augmentant l’activité microbienne. Il renferme la résistance des plantes aux maladies.
En été, à l’époque de la plus forte croissance, les jus d’herbes rendent de bons services. On fait macérer dans un récipient rempli d’eau un sac plein d’herbes fertilisantes jusqu’à ce qu’on obtienne un jus brunâtre. Avant on le dilue pour lui donner la couleur d’un thé.
•    Le jus d’ortie produit un précieux engrais foliaire, évite les pucerons, évite le mildiou.
•    La grande consoude fournit aussi un excellent engrais ainsi que la camomille. Pour neutralise l’odeur nauséabonde, ajouter de la poudre d’os[7] ou de roche.
 
On peut se faire une idée sur la nature d’un sol par sa flore, voici quelques exemples :
Laiteron : terre fraîche et argilo-calcaire
Coquelicot, trèfle blanc, moutarde : sol à tendance calcaire
Plantain, prêle : terre lourde, acide et humide
Bouton d’or, liseron, oseille sauvage, pâquerette : terre lourde, acide et souvent humide
Ravenelle : terre légère, manquant de phosphore assimilable
Chiendent : terre légère et siliceuse
Chardon : terre calcaire
Ortie : terre humifère
La terre neutre, ayant un pH égal à 7, convient à la plupart des plantes potagères, mais un sol ayant un pH compris entre 6,5 et 7 (légèrement acide et neutre) se prête aussi à leur culture. Pour corriger le pH d’une terre trop acide il est conseillé d’y faire des apports de lithothamme ; lorsqu’elle est calcaire (pH basique) par des apports réguliers de compost, de poudre de roches.
[2] Guano - In : Engrais coup de fouet. Engrais organique complet en provenance des Mers du Sud (oiseaux de mer). Utilisable en Agriculture Biologique. En savoir plus Référence : CPJA1259 EAN : 3252640012593 – https://agrifournitures.fr/engrais-bio-universels-jardin/9610-guano-marin-800g.html
[3] Corne broyée – In : https://fr.jardins-animes.com/corne-broyee-25kg                                         
[4] Corne torréfiée – in : https://www.planete-agrobio.com/produit/engrais-bio-corne-torrefiee-850g/
[5] Basalte – in : https://www.fermedesaintemarthe.com/basalte-volcanique-p-22219
[6] Lithothamnium - In : https://www.oogarden.com/prod-45583-lithothamne-algues-marines-800g.html
[7] Poudre d’os – in : https://www.graines-baumaux.fr/284016-poudre-d-os.html
 
Extrait  "les vers de terre", article de la Revue les quatre saisons n°3, juillet-août 1980

 

Bernard Boullard, 


« Vie intense et cachée du sol »
Essai de pédobiologie végétale, 1967
Collection la terre, Flammarion, Paris, 1967, p.7-21.
« Sous les pieds du promeneur, comme sous ceux du semeur, du vigneron, de l’arboriculteur, s’active là, jour et nuit, la foule laborieuse et grouillante des serviteurs microscopiques du monde entier. […].
Le sol dérive initialement de la roche qui en constitue la matrice. Cette partie est très stable. Mais s’il n’y avait que les phénomènes physicochimiques du monde inanimé cela ne conduirait pas loin. Fort heureusement des forces biologiques interviennent : aux matériaux inertes s’ajoutent des débris organiques, des glucides, des lipides, des protides, une foule de substances. Champignons, Bactéries, Algues, Lichens, Mousses etc., colonisent hardiment et élaborent ou dégradent. […]. »
A la surface du sol : la litière puis l’humus
« Pour beaucoup la litière n’a la valeur que d’un manteau triste et annonciateur des jours sombres et froids de l’hiver, manteau que le vent soulève et roule, tel un gigantesque mais invisible balai. Cette litière, sous-estimée par beaucoup, n’en retient pas moins l’attention de certains : collectée au râteau elle vient apporter son aide au jardinier préparant ses couches, éliminée ailleurs à la faveur des opérations d’étrépage elle libère le sol pour le culture ultérieure, réétalée à l’étable il lui arrive de reprendre du service sous les animaux. Mais c’est réellement le biologiste qui accorde leurs lettres de noblesse à ces « reliquats de frondaisons printanières et estivales ». Il y voit là le prodigieux travail de la dégradation s’amorcer et se poursuivre quelques centimètres plus bas. En effet, de la litière aux matériaux pratiquement encore intacts, on passe vers une zone où la « fermentation » active conduit au démantèlement complet, à la matière humifiée. Ces Quelques centimètres – à quelques décimètres – superficiels, reçoivent des pédologues la désignation d’horizon A0. La litière de feuilles mortes masque donc l’humus, ce « produit de la matière vivante et sa source » (cf Thaer et Waksman, 1936). Cette tache exaltante des ternes résidus se poursuit aussi bien dans l’intimité des pâtures, des marais, qu’au sein des forêts mystérieuses. Mais il est certain que, c’est là, sous la voûte de feuillage, que sa présence se manifeste avec le plus de générosité. Cette générosité n’avait pas échappé à E. Herriot (1925). A l’issue de sa description des strates végétales de la « Forêt Normande », n’écrivait-il pas : « Plus bas encore la forêt qui nous parait morte vit et travaille sous l’amoncellement des aiguilles et des fruits, des brindilles et des lambeaux d’écorce. C’est le vêtement, l’épiderme délicat et sensible qui protège le sol lui-même contre les excès de la chaleur ou du froid, amortit le choc de la pluie, retient les éléments nourrissants de l’air, abrite ce qu’il faut de vie animale pour ameublir cette terre où ne vient pas le laboureur. Ces feuilles que vous croyez inanimées travaillent pour l’arbre dont elles se sont séparées. Pa elles, par leur labeur mystérieux mais continu s’achève ce rythme qui fait de la forêt une harmonie, depuis les profondeurs du sol jusqu’à la cime de l’arbre le plus dominant. De haut en bas, de bas en haut, la vie monte et descend… »
Nous pourrions rapprocher de ces propos-là très juste sentence de Pochon et de Barjac (1958, p.21) : « La matière organique forme la différence essentielle qui sépare un sol productif proprement dit d’une simple masse de débris rocheux. »
La litière doit surtout son existence à la chute saisonnière des feuilles et des menus rameaux, en forêt, à la décomposition des pailles, chez les Céréales. Un bois de chêne peut supporter en plein été 10 tonnes de litière par hectare. L’apport automnal élève bientôt cette valeur de 3.5 tonnes environ. Mais les infatigables et discrets microorganismes entreprennent, de février en août, la destruction d’une partie de ce manteau déchiqueté et ramènent les 13,5 tonnes de la litière hivernale aux 10 tonnes de la litière estivale. Cet exemple, déjà nous incite à penser que la litière d’un sous-bois est quelque chose d’éminemment mouvant, qu’elle s’épaissit et se minimise, comme si le vent d’automne gonflait ce tapis moribond que les promeneurs printaniers plaqueraient à nouveau sur le sol. Ce « mécanisme compensateur » attribué aux germes dégradateurs de la litière se produit sous tous les climats, dans tous les bois, feuillus comme résineux, mais sa vitesse est variable. Ainsi la litière de résineux dure beaucoup plus longtemps que celle de feuillus. […] C’est à son caractère acide, aéré, riche en Champignons et, corrélativement, plus pauvre en Bactéries, que ce milieu doit la lenteur de sa dégradation. Par oppositions les litières qui se constituent sous les feuillus font figure de linceuls, épais souvent de quelques centimètres seulement. […]
Quittant un instant la forêt pour rejoindre les sols de Céréales nous devons remarquer que la décomposition des pailles (dont un aperçu de la décomposition moyenne […] est en général fort lente, freinée par la pauvreté du milieu en azote. […].
La vie dans la litière est extraordinairement intense. Selon Waksman un gramme de sol renfermerait 3 milliards de germes en surface, et 1,5 milliard à 10 cm de profondeur. […]
L’humus, matière organique complexe, résulte donc de la prodigieuse activité des microorganismes qui constituent la « microflore tellurique ». C’est grâce à eux que les constituants des Végétaux Supérieurs, ou plutôt de leurs cadavres, sont démantelés, simplifiés ou remodelés. 
Mille Bactéries peuvent participer à cette œuvre d’intérêt mondial aux côtés de centaines de Champignons (Aspergillus, Pénicillium, etc.) et, très certainement, d’Actinomycètes. Il s’agit là d’un travail gigantesque dont le chimisme intense « saute aux yeux » lorsque le tas de fumier « fume » dans la cour de la ferme, lorsque la couche du maraîcher ou le compost de l’horticulteur « chauffent ».
C’est une œuvre coopérative, que marquent de leur empreinte propre des groupements successifs de germes. […] Il serait malvenu de penser que l’opération de dégradation touche à son terme dans les plus brefs délais. C’est une oeuvre de longue haleine.  (…]  
La diversité des matériaux de départ, l’hétérogénéité du petit monde qui les prend en charge, tout contribue à justifier l’opinion de Pochon et de Barjac, des maîtres dès que l’on parle du Sol : « Il n’y a pas « un » humus, mais « des » humus » (1958, p. 521). »
 
  


Litière forestière, sapins de l'Aigle, épines et feuilles de chêne, Beaufai en Normandie, 2018.

Partager cet article
Repost0
30 octobre 2024 3 30 /10 /octobre /2024 13:05

Avertissement

Les contenus que vous découvrirez peuvent être empruntés qu'avec mon accord et mon autorisation

Bonne lecture à tous

Il se peut qu'en lisant cette histoire que vous trouviez quelques coquilles qui seront à terme corrigées une à une lorsque le récit sera entièrement achevé car publié au fur et à mesure de l'avancée de cette recherche, il viendra le temps de la totale relecture finale et pueu-être d'une publication ouvrage.

Des visuels vont encore enrichir également cette histoire, à suivre...

à tout moment, vous pouvez accéder à toute référence en  tapant CTR+F en indiquant dans la barre recherche le mot ou le nom que vous souhaitez rechercher ce qui vaudra pour l'occasion un index numérique interactif.

Pommes à cidre de Haute-Normandie, Normandie, France

Préambule

 

On connait l'histoire du cidre du pays d'Auge, du Cotentin mais pas celle du pays de Caux ! et pourtant elle recèle bien de pépites, des trésors tirés des archives, des évènements insolites autant qu'historiques : de la masure cauchoise jusqu'au château de Versailles.

La prétention de cette recherche n'est pas tant de couvrir tous les connaissances en la matière mais plutôt de balayer tout ce qui peut se dire à ce propos.

Toutefois volontairement je ne vais pas traiter du savoir faire proprement dit de la fabrication du cidre, beaucoup de livres en  parle spéfiquement et mieux que j'en dirai, affaire de spécialistes... tout comme de l'analyse du cidre ou nutritionnelle quoique cette question pourrait être ajoutée en annexe, ce  qui n'est pas exclu.

En Annexe, je pense évoquer quelques biographies de pépiniers, d'agriculteurs, d'horticulteurs ou de chimistes ainsi que la question du cifre dans les hïtaux, hospices de Rouen notamment dont la récolte des pommes se faisait en pays de Caux dans les fermes appartenant aux Hospices de Rouen depuis le 15e siècle.

 

570 ans nous contemplent.


Mon ambition est de construire un récit m'appuyant sur une architecture de recherches préexistantes qui m'ont paru pertinentes et éclairantes : en somme une véritable reconstitution de ce que fut l'avènement du cidre sur le plateau de Caux Pays et de ses vallées le rainurant, pour en faire un cru unique, de terroir et de caractère.

Comme vous le savez, on n'invente rien. Il s'agit ici de prolonger et constituer un récit avec le maximum d'éléments éclairant l'histoire du  cidre du pays de Caux et de ceux qui le boivent.

On ne peut pas évoquer un cidre sans une histoire, sans la botanique qui au final fait lien entre la géologie, l'agriculture, le patrimoine naturel végétal, l'histoire des peuples, l'histoire de ce territoire administré par tant de tribus, de peuples envahisseurs, par tant de civilisations distinctes et pourtant le pays de Caux, aux limites au demeurant instables s'est construit sur ce passé riche d'expériences pour qu'un jour le pommier à cidre s'y installe durablement.

Comme vous l'imaginez une recherche prend du temps et vous oblige à vous détourner des évidences et des idées reçues, des fausses pistes, des impostures, des rivalités et des pommes de la discorde concernant l'origine du cidre.

Aussi,  afin que cette recherche  arrive à son  terme, j'ai  cherché inlassablement à trouver les facteurs, des indices, des évènements  qui ont conduit à développer l'activité du cidre en pays de Caux alors que le peuple cauchois buvait à ce moment principalement et presque exclusivement de la cervoise, sauf  le clergé et les abbayes et curés qui en buvaient déjà ainsi que du vin par ailleurs.

Quelques informations dont certaines sont publiées sans sources aucunes donnent un vague aperçu de ce chantier de cette entité cidricole cauchoise  mais peut-on se satisfaire   d'imprécisions ou de faits relatés non sourcés ?

 J'ai remarqué jadis que la tendance était de tirer la couverture à soi (Bretons, Basques, Italiens, Egyptiens... et Normands...).



Cette recherche a donc vocation de remettre le pommier au centre du verger et de rendre à César ce qui lui appartient ainsi que de citer avec les preuves,  les faits, les auteurs qui, sans eux, ne m'auraient pas permis d'entreprendre ce récit.


On va donc parler des celtes, des gaulois de la Gaule Belgica,  des défrichements, des Romains, des Saxons, des Germains, des Francs, des Mérovingiens, de Charlemagne, de Guillaume le Conquérant et fils, des Abbés et Abbesses, des Evêchés,  des curés,  des masures et cours cauchoises,  des cultivateurs fermiers, des bergers des masures et cours cauchoises,  des bâtisseurs, des cidriers, des savants, des  bastardiers, des pépiniers, des arboriculteurs, des fruiticulteurs, des pomologues, des chimistes, des buveurs de cidre, des écrivain(e)s :  Flaubert, Rabelais, Ernaux et bien sûr des botanistes et des archéo-botanistes sans qui cette histoire n'aurait pas de commencement.

Ainsi au milieu du deuxième millénaire le pays de Caux devint progressivement un terroir de production du cidre aux côtés du pays de Bray.

 

Mais les effets répétés et répliqués de la greffe ont précipité divers chaos au verger et principalement au sortir de la Révolution française en dépit de toute la science qui a commencé à être véhiculée  depuis Le Paulmier. De sorte qu'il a fallu aux maîtres pépiniers de la Seine-Inférieure, deux siècles plus tard,  de relever les manches sur les encouragements des sociétés d'Horticulture, d'Agriculture, de Pomologie et de Botanique  de Paris, car c'est de la Seine-Inférieure que l'identification des problèmes  est apparue et on le doit au Maitre des pépiniers de la Seine-Inférieure : M. Prévost qui avant 1811 avait découvert les maladies et le chaos à venir dans les vergers de fruits à pressoir.

L'ennemi du verger et du cidre à ce titre est : le vent, la tempête, la maladie, trop de greffage répété, l'homme, l'animal qui blesse l'arbre, le manque d'entretien au pied  de l'arbre, la guerre et sa conséquence le manque de bras, des politiques publiques qui oscillent entre plantation et abattage, la mauvaise réputation etc...

Au mitan du 19e siècle, M. Michelin, le Président de la Société  pomologique confia et délégua à Hauchecorne et à De Boutteville le soin d'organiser la régénérescence  des pommiers après qui l'ait été fait pour les pommes de table et les poires de table à Rouen au jardin des plantes qui deviendra pour cette section de recherche et d'amélioration des fruits, le verger Boisbunel que tout le monde connait bien. 

Forts des premiers succès pour les fruits de table ce fut le tour au début des  années 1860 de démarrer l'opération pour les pommiers à cidre dont les maitres pépiniers, incubateurs, obtenteurs de variétés nouvelles à partir des meilleures variétés anciennes régénérèrent moult variétés d'élite et de collection qui firent ensuite le tour du monde des pays producteurs de cidre, je veux parler de P.M. Legrand, de F. Godard, de H. et F. Lacaille, des M. Dieppois, M. Audièvre, M. Varin, M. David du pays de Caux et de M. Power du Roumois de Saint-Ouen-de-Thouberville : vous me direz  que vient faire le Roumois dans  cette affaire ? : cela tient au passé des savoirs-faire arboricoles de ce pays, de l'autre  côté  de " l'iau".

Environ le tiers des variétés de pommiers à cidre, aujourd'hui classées par l'Association Française de Pomologie ont été obtenues par ces habiles praticiens et artistes.


Pour ce succès il est dû à l'art du pépin qu'ont mené ces semeurs, pépiniers de Boisguillaume, Frichemesnil et d'Yvetot.

Pour la qualité du cidre et de sa fabrication on la doit à un autre yvetotais : Hauchecorne, pharmacien à Yvetot, son ouvrage fut pendant un siècle un des livres de chevet de tous les cidriers, semeurs, pépiniers et cultivateurs.

C'est à l'occasion d'une lecture d’une thèse sur les pépiniers de la Seine-Inférieure que j'ai eu connaissance de ces artistes seinomarins.


Depuis la pomme à cidre se porte plutôt mieux ici et ailleurs dans le monde cidricole tout comme en pays de Caux dont les producteurs de cidre souhaitent et espèrent une AOP cidre du pays de Caux.

C'est sur ces bases que l'histoire du cidre du pays de Caux s'appuie, à partir d'un millier de lectures, d'articles, de documents d'archives nationales, régionales, départementales, locales qui avant d'être rassemblées, compilées par mes soins dans un récit, étaient véritablement éparpillées dans une quantité d'ouvrages, de bulletins de rapports divers.

Il fallait que ce travail de recherche aboutisse et c'est pour cela que je vous le soumets dès à présent.

C'est ici que vous pourrez donc lire et consulter cette histoire du cidre du pays de Caux et de ceux qui le boivent.

Pascal Levaillant, artiste-auteur, plasticien et créateur d'herbiers contemporains dont celui du verger et des fruits de pressoir. Je suis membre de la Société Centrale d'Agriculture de la Seine-Maritime, adhérent de l'association Faire Vivre le Manoir du Fay, du verger conservatoire de Brémontier-Merval, du Verger du Vallon... En 2019, avec Marie-Thérèse Mériot nous avons élaboré un socle de connaissances pour la réalisation de panneaux d'interprétation du paysage du manoir du Fay d'Yvetot, au niveau de la cour plantée du pourpris de ce manoir sachant que le verger se trouvait jadis juste en face dans un closage aujourd'hui démantelé, rue des zigzags là où se trouve désormais un lotissement à côté du nouveau cimetière, c’est peut-être là l'ironie de leur sort : "ci-gît" l'ancien verger du manoir du Fay.

La cour plantée fut de 2000 à 2007 verger conservatoire mais a perdu son label depuis car un verger conservatoire nécessite la rigueur taille, conservation des doublons) et des fonds pour don entretien dont la taille.

Vous trouverez sur le panneau à l'entrée, nos deux noms écrits (tout en bas)

 

Pommes au rinçage avant mise au pressoir © Pascal Levaillant 2020

Gâteau de pommes © Pascal Levaillant 2020

« Toute l’année quand on était gosse, on buvait de la « boisson », qui finissait aigre à la fin de l’été, en attendant les prochaines barriques à remplir à l’automne. On allait remplir des jerricans d’eau potable à la source d’Héricourt sur la route de Grainville-la-Teinturière. Au début des années 1960, à cette époque l’eau potable n’était pas encore distribuée dans nos villages.

Arrivés à Yvetot en 1964, en novembre de la même année, les rasières arrivaient chargées sur la remorque du tracteur de mon cousin Bernard et puis la "presse" venait les brasser. Ça sentait le jus de pomme dans la rue Pierre Jean de Béranger à Yvetot. A Noël on buvait le cidre nouveau (le cidre de la soif) et le dimanche le « cid'qui toq » en cauchois : le cidre qui toque la tête, qui étourdi. Ce cidre brut avait une robe jaunâtre à orangée, de nature légère mais complexe, très peu sucré et très sec, légèrement acidulé en bouche avec une petite pointe d'amertume. 

Pour le cidre il fallait attendre un peu.  Mon père pesait le cidre. Il était mis en bouteille quand le jus était à maturité et suffisamment alcoolisé, c’était le moment de remplir les bouteilles. On nettoyait les bouteilles et on les rinçait avant la mise en bouteille. 200 à 300 bouteilles par an étaient ainsi bouchées avec des bouchons plastiques maintenus par un fil de fer afin d’éviter que le bouchon parte et que le « cid’ ». On les rangeait dans le  casier à bouteille  au sous-sol  à moitié enterré de la cave du pavillon à Yvetot.   »

Le pays de Caux, ses masures, ses cours, ses us et coutumes …  Pascal Levaillant, 2022

Limites du pays de Caux cidricole,

cadre de référence

 

C'est la partie de l'ouvrage la plus complexe à constituer tant les limites du pays de Caux, tout légitimement, ont fait débat, chacun des auteurs ( Corneille, Moll, Delisle, Sion, Musset, Mensire, Canu, Frémont,  Ridel, Derouard, Vigarié, Fauvel, Lerond, Bouillon,  l'ARHEN, la DREAL, le CAUE (pour la synthèse cartographique des contours )... le délimitant selon ses propres critères et angles de recherche,  qu'ils soient géographiques, historiques, linguistiques, climatiques, toponymiques, agricoles, paysagers, géologiques, botaniques, architecturaux, littéraires... autant de domaines pertinents mais qui n'éclairaient pas totalement mon objet de recherche alors il me restait à trouver l'auteur pour les contours pomologiques, pomicoles et cidricoles du cidre du pays de Caux.

 C'est en poursuivant depuis 2022 la consultation des bulletins de la Société Centrale d'Agriculture que cela m'a été révélé, fait inédit et exceptionnel :

En 1910 et 1913 Charles Brioux établit la carte du pays de Caux cidricole, pomicole, géologique et climatique.

Là encore je n'invente rien, juste à dévoiler et exhumer les archives, ce goût si implicite à remonter le temps pour comprendre le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui.

En effet, découvrant et exhumant au fur et à mesure les archives de la Société Centrale d'Agriculture, je prends connaissance de la monographie de M. Ch. Brioux, un des éminents spécialistes en Agriculture, Directeur de la Station agronomique de la Seine-Inférieure (1891-1928), Membre non résidant de l'Académie d'Agriculture de France, juillet 1930, Brioux Charles (1872-1963).

Chimiste et directeur de la Station agronomique de la Seine-Inférieure de 1908 à 1940, ses nombreux travaux publiés après Hauchecorne et De Boutteville ont été des points de repères pour sa génération (Warcollier, Félix), après les travaux de Hauchecorne, De Boutteville, Truelle, Lecoeur,  ceux qui ont, comme nous le verrons,  ont construits les savoirs de la fin du dix-neuvième siècle en vue de l'amélioration des variétés de pommes et de la qualité  notammant du cidre du pays de Caux.

Dans le bulletin trimestriel de la Société Centrale d’Agriculture du département de la Seine-Inférieure publié pour la période d’octobre à décembre 1910, Charles Brioux expose sa monographie de la pomologie de la Seine-Inférieure. En rappelant brièvement l’histoire de l’apparition du cidre dans le pays de Caux, il est le premier (avant Félix) à délimiter les contours du pays de Caux prenant en compte la nature des pommes et des variétés s’y acclimatant selon les zones géographiques distinctes tout en affirmant qu’à l’Est les limites restent moins précises.

Ce rapport pourrait encore aider à délimiter une aire géographique pour aujourd’hui entre la limité définie par des écrivains au 20e siècle la situant aux alentours de la vallée l’Austreberthe et de la Scie et celle de la DREAL incorporant pour d’autres motifs légitimes à l’Andelle et la Varenne. 

Brioux, à ce titre, sans pour autant qu’il ait produit une carte  établit des contours plus précis à propos du cidre et de la pomologie : – à l’est les limites sont moins précises affirme-t-il – nous permet de percevoir plus finement les contours du pays de Caux notamment vis-à-vis des variétés de pommes cultivées dans l’ensemble du département de la Seine-Inférieure à cette époque d’avant la Première Guerre Mondiale qui aura des conséquences sur l’état des vergers après-guerre.

Pour Brioux je le cite : « Le pays de Caux, de beaucoup le plus vaste des régions agricoles de la Seine-Inférieure, comprend l’arrondissement du Havre tout entier, la plus grande partie de l’arrondissement d’Yvetot, moins la presqu’île située en face de Caudebec, et une partie des arrondissements de Dieppe et de Rouen. Il est limité au Nord par la Manche et au Sud par la Seine : mais à l’Est, sa délimitation entre Dieppe et Rouen est moins précise ; nous admettrons avec la plupart des auteurs qu’il s’étend jusqu’aux rivières du Cailly et d’Arques (c’est-à-dire la Varenne), réunies par une ligne traversant les cantons de Clères et de Saint-Saëns ; sa superficie serait ainsi d’environ 341 000 hectares.

Il définit par ailleurs les autres régions agricoles : celle de la partie de l’arrondissement de Dieppe située à l’est de la Béthune est désignée sous le nom de Petit Caux comprenant les cantons de Dieppe, d’Envermeu et d’Eu ; et le Pays de Bray.

Si on suit les contours de Ch. Brioux, cette limite partant de Dieppe irait vers Arques suivant le sommet de la vallée de la Varenne jusqu’à Saint-Saëns pour obliquer vers Rocquemont et suivre la vallée du Cailly jusqu’au sommet du plateau allant à Maromme et Canteleu surplombant le Cailly, La Clairette et enfin la Seine.

Il va sans dire que Brioux en l’état des connaissances d’avant la Grande Guerre s’appuie sur une pomologie plurielle du pays de Caux la distinguant de la Pomologie du Petit Caux et du pays de Bray.

 

Charles Brioux en 1910 a dessiné par une simple description les contours et les limites, ce qui peut constituer la véritable carte du pays de Caux cidricole et pomologique sur laquelle nous pouvons nous appuyer.

Il livre son analyse dans les bulletins de la Société Centrale d'Agriculture du trimestre octobre, novembre et décembre 1910 :  Monographie de la Pomologie de la Seine-Inférieure.

 

[Sion, 1909] - voici le plan en vigueur durant les 900 ans de la masure avant qu'apparaissent les inventions  des locutions "cour-masure" (1866) par le corps notarial) et "clos-masure" (1968) par deux architectes, Garofalo et Warnier) comme nous pourrons le découvrir plus en aval.

Alors que depuis l'âge adulte, je la nommait cour ou cour-masure,  la masure est ma préférence. A mes yeux et relisant Maupassant et Flaubert, elle représente le lien entre toutes les approches car tous l'évoquent sous ses divers vocables et cela depuis le Moyen-Âge, ce lieu si emblématique en normandie, en  Seine-Inférieure et en pays de Caux, à l'endroit même où les pommiers et poiriers  ont été plantés massivement au sortir de la guerre de Cent Ans pour disparaître peu à peu après la Seconde Guerre Mondiale qui par la paix retrouvée, ironie du sort, ont fait naître et plusieurs siècles plus tard démenteler les vergers du cidre cauchois.

Mais il reste aujourd'hui, depuis la "renaissance" du cidre cauchois dans les années 1980, des producteurs qui tentent de le remettre au goût du jour et c'est de bonne augure pour cette boisson de "terroir" décrite la première fois par Le Paulmier, à la fin du 16e siècle.

Mon analyse :

Impossible de calquer des limites floues du peuple des Calètes  avec une aire géographique du cidre du pays de Caux.

Pourquoi ?

La première raison c'est que les premières cartes de l'antiquité - gauloise et romaine - ont été dessinées qu'à partir du 15e siècle.

La deuxième raison tient au fait que ce ne sont pas les Calétis qui ont inventé le cidre.

 

La troisième raison tient au fait  qu'après les Calètes, c'est la Normandie de Guillaume le Conquérant et du Clergé qui a maitrisé le défrichement fiéffant et percevant la dîme, contribuant non pas à l'invention du cidre mais dans le processus lent d'amélioration de la qualité d'une boisson potable et hygiénique.  Ce sont eux qui les premiers qui l'ont importé d'ailleurs et les premiers qui ont semé et greffé les pommiers dont les successifs croisements ont fini, depuis le temps de la forêt gauloise et celte par constituer un pommier à cidre avec les croisements  et  hybridations des  pommes venues du Levant avec les pommes sauvages sylvestris européennes dont celles de la Gaule Belgica.

Les Abeilles et autres pollinisateurs ont contribué au processus de pollinisation et d'hybridation et aux voyages des pépins (ours, chevaux, oiseaux...)

Puis le voyage des pommes, par l'entremise de l'Homme, du Cotentin vers le Pays d'Auge et le Roumois en plusieurs siècles a constitué une culture et un savoir transmis par les curés et les moines aux cultivateurs et fermiers de la Seine-Inférieure à partir de la fin de la Guerre de Cent Ans.

En Seine-Inférieure, les masures cauchoises comme celles du pays de Bray et du Talou ont accueilli dans leurs closages, clos et masures ces pommiers les mettant à l'abri du vent et sur des herbages verdoyants où paissaient moutons et plus tard les bovins.

Le démantèlement des talus plantés remplacés par des haies bocagères du pays de Bray  au 17 et 18e siècle a privilégié progressivement l'élevage laitier au détriment des vergers qui se sont développés au dehors du pays de Bray et plutôt du côté du plateau de Caux. De l'Austreberthe à Rouen et jusqu'à l'Andelle,  la hauteur des talus s'atténue car plus loin de la mer l'impact des vents s'amoindrit progressivement à tel point qu'avec le remembrement du 20e siècle ils ont été supprimés pour laisser plus d'espace aux grandes cultures après que les vergers aient disparus progressivement depuis les années 1960.

 

C'est ainsi que le goût d'un cidre cauchois s'est dessiné grâce au limon, au sous-sol, à la marne et aux effleurements de calcaire et argile à silex et grâce aux clos des masures qui ont abrités les pommiers.

De la rencontre entre les entes venues du Roumois, le sol, sous-sol seinomarin et des habitants de la Seine-Inférieure qu'est né finalement et progressivement un cidre de terroir mais tout dépend encore du choix des variétés de pomme, ce que dit  encore Charles Brioux.

----------------------------------------------------------

Charles Brioux ajoute à son étude réalisée en1910 complétée en 1913 (ligne de couleur fuschia sur la carte ci-dessous)  à propos des pommes à cidre du pays de Caux,  les communes du plateau Nord et Est  de Rouen comme  Bois-l'Evêque ;  Ecalles-Buchy ;  Blainville-Crevon , Bois d'Ennebourg ; Bihorel ; Bosc-aux-Moines ; Saint-Aubin-Epinay, c'est à dire une limite qui comprend le bassin extérieur au Robec et l'Aubette et s'adossant à la rivière Crevon qui elle même fait partie du bassin de l'Andelle.

Ainsi considérant le Caux-Vexin-Bray il exclut les plateaux du bassin de l'Andelle, juste à éfleure Balinville-Crevon bordé par de hauts plateaux à l'ouest comme les communes  voisines du plateau à Servaville-Salmonville, Morgny-la-Pommeraye.

En effet Charles Brioux dans un prolongement de son étude publiée en 1910, produit un tableau de la provenance des pommes qu'il attribue au terme "Pays de Caux" en l'associant  dans sa plus grande extension, en y faisant rentrer tous les terrains de limon des plateaux et d'argile à silex. Charles Brioux, éminent membre de l'Association pomologique de l'Ouest, rapporte qu'il s'appuie sur l'origine géologique des terrains, sur les conditions climatiques, sur l'influence de la nature du sol, qui est aussi très importante, d'autant plus que cette région -pays de Caux - possède des variétés adaptées de longue date aux conditions spéciales du milieu.

Ainsi Bois-guillaume, et Franqueville-Saint-Pierre où le cidre Mousse ramasse des pommes rejoindrait hardiment et sans complexe l'aire géographique du cidre du pays de Caux selon Charles Brioux (1910-1913)

in :  Charles Brioux, composition des pommes à cidre pur jus de la Seine-Inférieure (Récolte de 1912), Bulletins de la Société Centrale d'Agriculture de la Seine-Inférieure, 1813, p.429-439.

[Sion, 1909] la plaine et la masure

 

----------------------------------------------------------

Charles Brioux ajoute à son étude réalisée en1910 complétée en 1913 (ligne de couleur fuschia sur la carte ci-dessous)  à propos des pommes à cidre du pays de Caux,  les communes du plateau Nord et Est  de Rouen comme  Bois-l'Evêque ;  Ecalles-Buchy ;  Blainville-Crevon , Bois d'Ennebourg ; Bihorel ; Bosc-aux-Moines ; Saint-Aubin-Epinay, c'est à dire une limite qui comprend le bassin extérieur au Robec et l'Aubette et s'adossant à la rivière Crevon qui elle même fait partie du bassin de l'Andelle.

Ainsi considérant le Caux-Vexin-Bray il exclut les plateaux du bassin de l'Andelle, juste à éfleure Balinville-Crevon bordé par de hauts plateaux à l'ouest comme les communes  voisines du plateau à Servaville-Salmonville, Morgny-la-Pommeraye.

En effet Charles Brioux dans un prolongement de son étude publiée en 1910, produit un tableau de la provenance des pommes qu'il attribue au terme "Pays de Caux" en l'associant  dans sa plus grande extension, en y faisant rentrer tous les terrains de limon des plateaux et d'argile à silex. Charles Brioux, éminent membre de l'Association pomologique de l'Ouest, rapporte qu'il s'appuie sur l'origine géologique des terrains, sur les conditions climatiques, sur l'influence de la nature du sol, qui est aussi très importante, d'autant plus que cette région -pays de Caux - possède des variétés adaptées de longue date aux conditions spéciales du milieu.

Ainsi Bois-guillaume, et Franqueville-Saint-Pierre où le cidre Mousse ramasse des pommes rejoindrait hardiment et sans complexe l'aire géographique du cidre du pays de Caux selon Charles Brioux (1910-1913)

in :  Charles Brioux, composition des pommes à cidre pur jus de la Seine-Inférieure (Récolte de 1912), Bulletins de la Société Centrale d'Agriculture de la Seine-Inférieure, 1813, p.429-439.

Au niveau de Frene-le-Plan et Epreville, rideaux d'arbres et talus-fossé planté. [Levaillant, 2025]

Au niveau de Mesnil-Raoul, rideaux d'arbres et ancienne masure avec un pommier [Google maps]

Au niveau de Epreville, rideaux d'arbres et ancien clos [Google maps]

Au niveau de Longuerue, talus-fossé, rideaux d'arbres et masure [Google maps]

 

Au niveau de La Vieux-Rue, talus-fossé, rideaux d'arbres et masure [Google maps]

 

Au niveau de Vieux-Manoir, talus-fossé, masure et verger [Google maps]

Au niveau de Morgny-la-Pommeraye, masure et rideau d'arbres. [Google maps]

Au niveau de Rocquement, rideau d'arbres d'une masure. [Google maps]

 

Puis vers Dieppe, sur la ligne de partage des eaux entre la Scie et la Varenne une sucession de masures, closages, rideaux d'arbres...

Suivant Montreuil-en-Caux ; Cottevrard ; Cropus, les Cent Acres. Grigneuseville; Martigny ...

en pays de Caux, il est vrai que les masures sont moins nombreuses que ce soit vers la Varenne qui s'ouvre  de la corniche cauchoise sur le pays de Bray ou que ce soit du balcon cauchois ouvert vers l'Andelle.

 

 

 

 

 

Depuis Thomas Corneille et 1707, et  Sion en 1909, d'autres auteurs et autrices se sont penchés  depuis sur ce qui serait les limites et contours du pays de Caux.

Corneille, Sion,  Brioux, Mensire, Ridel, Derouard, CNBBL, AREHN, CAUE 76, DREAL

les voici avec un code un couleur chacune.

En fuschia le tracé de l'aire géographique, géologique et pomologique du cidre du pays de Caux  de Charles Brioux,  dessin de Pascal Levaillant, 2025. Ce tracé en fuschia intégre les deux schémas que Charles Brioux à établit entre 1910 et 1913. Sa description ne comprend pas la ville de Rouen, toutefois le plateau nord-est de Rouen (Les Sapins- La Grand-Mare) pourrait s'y intégrer car positionnés sur le plateau en altitude.

Observez bien cette carte : on tient très surement les contours du pays de Caux pomologique, géographique et cidricole même si d'autres auteurs en ont figuré d'autres limites selon leurs critères de recherche.

Ci dessus j'ai réalisé à partir d'une carte vierge des limites et contours ce qui vous donne un aperçu de ce qu'ont été, depuis 1909, les limites décrites par divers auteurs, poètes et hommes de lettres, spécialistes en histoire, paysage, masures et architectures, colombiers, en botanique, en pomologie et en cidriculture... qui après la description de Thomas Corneille (1707) se sont penchés sur les limites du Caux au pays de Caux

Comme vous pouvez le constater, il existe plusieurs lignes, que j'ai repris avec un code couleur différent que je vais vous commenter  ci-dessous.

 

A gauche une double ligne verte et bleue, partant du Havre longeant les falaises du pays de Caux, quasiment jusqu'au Pont de Tancarville. Poursuivant la ligne bleue, elle suit les coteaux de la Seine en incorporant les rivières s'y déversant à l'exception de la boucle de Jumièges et de Sahurs comprenant la forêt de Jumièges et celle quasimnt de Roumare. Poursuivant la ligne verte, elle vient en recul surtout au niveau des vallées ce qui semble logique car elle incorpore des critères de culture agricole tandis que la DREAL semble incorporer les profils topographiques d'altitude du plateau de Caux.

Ces deux tracés remontent vers le nord après avoir rejoint la confluence de l'Andelle avec la Seine.

La jonction se fait à l'approche depuis la source du Crevon traversant le plateau vers la source de la Varenne, plus au sud où se situe Buchy (la marche vers le Bray).

La troisième ligne bleue de démarcation est proposée par Ridel (2003) sur des critères historiques, toponymiques et paysagers. Elle parait démarrer de Saint-Wandrille remontant   en oblique vers Saint-Saëns avant de rejoindre les autres tracés à quelques kilomètres près.

La quatrième ligne en violet est celle de l'homme de lettres Raymond Mensire (1946), partant de Yainville vers le nord en zigzag avant de basculer vers Clères puis Saint-Saëns pour rejoindre Dieppe, sur des criètes historiques et linguistiques.

La cinquième ligne en rouge foncé est celle que propose Sion (1909) qui suit l'Austreberthe pour rejoindre la Scie vers Dieppe, sur des critères historiques, paysagers et agricoles.

La sixième ligne de couleur orangée est proposée par Sabine Derouard (1998) selon des critères historiques et géographiques. Sa ligne part vraisemblablement de Fontaine puis traverser le Cailly avant de rejoindre le plateau vers Buchy et vers Saint-Saëns, puis Dieppe ; cette ligne suit quasiment la suivante au moins jusqu'à mi-parcours de la Varenne.

La septième ligne en "rouge" s’appuie la flore du pays de Caux recensée et cartographiée par le Conservatoire National de Bailleul, s'appuyant sur une carte de l'AREHN. Comme je le soulignais au départ l'étude, la botanique permet d'établir une cartographie thématique d'un territoire.  Pour cette raison elle s'oriente vers le Petit-Caux sur la bande du plateau littoral.

 

La ligne pointillée verte suggère une limite intermédiaire appelée Caux-Vexin pour le motif agricole.  (Cette délimitation prend en compte en vert des petites régions agricoles - INSEE - (1946] : découpage basé sur des critères géographiques et agricoles exposé dans le livre Clos-masures et paysage cauchois, CAUE 76, Editions point de vues, 2008.

Cette délimitation orientale est quasiment commune à celle de la DREAL, Normandie, 2025.)

CARTE DREAL 9 JANVIER 2025 transmise par la DREAL

 

 

Voici les communes qui sont limitrophes du Pays de Caux selon Charles Brioux (1910) avec le Pays de Bray, l'Aliermont et le Caux-Rouen-Vexin et qui ont une partie - même infime- de leur territoire sur le plateau de Caux.

Communes :

Dieppe ;   Rouxmesnil-Bouteilles ;  Arques-la-Bataille ;  Martigny-Quevremont ;  La Chapelle-du-Bourgay-Le Bougay ; La  Chaussée-Bois Hulin ; Sainte Foy  ;  Les Cent-Acres- Beau Theroulde ;  Le Catelier ;  Cropus ;  Val-de-Scie - le bout de Cressy  ;  Montreuil-en-Caux - La pommeraye ;   Louvetot - Grigneuseville ;  Beuzeville la Giffarde ;  Cottevrad ;  Critot ; Rocquement ;  Buchy-Ecalles ; Vieux-Manoir ; Longue-Rue ;  Blainville-Crevon ; Grainville-su- Ry ;  Servaville-Salmonville ; Martainville-Epreville ; Epreville ; Fresne-le-Plan ; Mesnil-Raoul ; , Boos , Franqueville-Saint-Pierre ; Mesnil-Esnard ;  Bonsecours ;  Darnetal ;  Bihorel ; Bois-Guillaume ;  Mont-Saint-Aignan ,  Déville, Canteleu ;  Montigny ;  Hénouville ;  Saint-Pierre-de-Varengeville ;  Duclair ;   Sainte-Marguerite-sur-Duclair ;  Saint-Wandrille-Rançon ;  Caudebec-en-Caux ;  Saint-Arnoult ;  Villequier ;  Norville-Secqueville ;  Triquerville ;  Port-Jérôme-sur-Seine-Péromare ;  La Frenaye ;   Lillebonne-Le Becquet ;  Saint-Jean-de-Folleville ;  Saint-Nicolas-de-la-Taille ;  Tancarville-Le Val-Martin ;  La Cerlangue-Saint-Jean- d’Abbetot ;   Saint-Vigor-d’Ymonville ;  Sandouville-Le Vachat ;  Oudalle ; Rogerville ;  Gonfreville-l’Orcher ;  Harfleur ;  Le Havre ;  Saint-Adresse ;  Octeville-sur-Mer ;  Cauville-sur-Mer ;  Heuqueville ;  Saint-Jouin-Bruneval ;  La Poterie-Cap-d’Antifer,  Etretat ; Bénouville ;  Les Loges ;  Vattetot-sur-Mer ;  Yport ;  Saint-Léonard ;  Fécamp ;  Senneville-sur-Fécamp ;  Eletot ;  Ecretteville-sur-Mer ;  Saint-Pierre-en-Port ;  Sassetot-le-Mauconduit ;  Saint-Martin-aux-Buneaux ;  Veulettes-sur-Mer ;  Paluel ;  Saint-Sylvain ;  Ingouville ;  Saint-Valery-en-Caux ;  Manneville-ès-Plains ;  Veules-les-Roses ;  Sotteville-sur-Mer ;  Saint-Aubin-sur-Mer ;  Quiberville-sur-Mer ;  Sainte-Marguerite-sur-Mer ;  Varengeville-sur-Mer ;  Hautot-sur-Mer

A l’intérieur de ce périmètre  du pays de Caux pomologique et cidricole  de Charles Brioux de 1913 on trouve ces autres communes  :

 

Angerville-l’Orcher ; Anglesqueville-l’Esneval ; Auberville-la-Renault ; Angerville-Bailleul ; Angerville-la-Martel ; Anquetierville ; Allouville-Bellefosse ; Alvimare ; Auberbosc ; Ancretteville-sur-Mer ; Anvéville ; Auberville-la-Manuel ; Autretot ; Autigny ; Ancretiéville-Saint-Victor ; Anceaumeville ; Angiens ; Amfreville-les-Champs ; Anglesqueville-la-Bras-Long ; Auzouville-l’Esneval ; Authieux-Ratiéville ; Aubermesnil-Beaumais ; Anneville-sur-Scie ; Auppegard ; Avremesnil ;

 

Bretteville du Grand Caux ; Bornambusc ; Bréauté ; Bernières ; Bénarville ; Bec-de-Mortagne ; Beuzeville-la-Grenier ; Bolbec ; Beuzevillette ; Bolleville ; Butot-Vénesville ; Beuzeville-la-Guérard ; Bermonville ; Bertheauville ; Bertreville ; Bois-Himont ; Bosville ; Baons-le-Comte ; Blacqueville ; Betteville ; Bouville ; Berville-en-Caux ; Bénesville ; Bretteville-Saint-Laurent ; Bourville ; Blosseville ; Butot ; Bacqueville-en-Caux ; Brachy ; Biville-la- Baignarde ; Bertrimont ; Bosc-le-Hard ; Bracquetuit ; Brametot ; Boudeville ; Blosseville ; Barentin ;  Bois-l'Evêque ;  Bois d'Ennebourg ;  Blainville-Crevon ;   Bosc-Guérard ;  

 Cailly ;   Clasville-Motteville ;  Criquetot-sur-Scie ; Criquetot-l’Esneval ; Cuverville ; Colleville ; Contremoulins ; Cliponville ; Cléville ; Criquetot-le-Mauconduit ; Cany-Barville ; Canouville ; Canville-les-Deux-Eglises ; Criquetot-sur-Ouville ; Cailleville ; Crosville-sur-Scie ; Colmesnil-Manneville ; Cottévrard ; Critot ; Clères ; Carville-Pot-de-Fer ; Carville-la-Folletière ; Croix-mare ; Cideville ;

Drosay ; Daubeuf-Serville ; Doudeville ;  Darnétal ;  

Etalleville ; Etoutteville ; Ecalles-Alix ; Flamanville ; Fontaine-le-Dun ; Fultot ; Fréville ; Epinay-sur-Duclair ; Ectot-l’Auber ; Epouville ; Epretot ; Ecrainville ; Epreville ; Envronville ; Ecretteville-lès-Baons ; Etaimpuis ; Esteville ; Emanville ; Ectot-lès-Baons ; Eslettes ;  

Fontaine-la-Mallet ; Fontenay ; Fongueusemare ; Froberville ; Foucart ; Fresquiennes ; Frichemesnil ; Fresnay-le-Long ; Fontaine-le-Bourg ;   Fontaine Sous-Préaux ;  

Grémonville ; Gueutteville-les-Grès ; Gueutteville ; Gainneville ; Gonneville-la-Mallet ; Grainville-la-Teinturière ; Gerponville ; Gerville ; Graimbouville ; Gommerville ; Goderville ; Ganzeville ; Grand-Camp ; Gruchet-le-Valasse ; Goupillières ; Grugny ; Gonneville-sur-Scie ; Greuville ; Gruchet-Saint-Siméon ; Gerponville ;

Hugleville-en-Caux ; Hautot-le-Vatois ; Hermeville ; Hattenville ; Héricourt-en-Caux ; Hautot-l’Auvray ; Houdetot ; Hautot-Saint-Sulpice ; Heugleville-sur-Scie ; Hermanville ;  Houppeville ;   

Ingouville ;  Isneauville ;  

Le Tilleul ; Les Loges ; Les Trois-Pierres ; La Trinité-du-Mont ; Le Hanouard ; La Remuée ; Limpiville ; Lintot ; Longueville ; Longueville-sur-Scie ; La Chaussée ; Longueil ; Le Bourg-Dun ; La Chapelle-sur-Dun ; Luneray ; Lamberville ; Lammerville ; Lintot-les-Bois ; Limésy ; La Gaillarde ; La Houssaye-Béranger ; Louvetot ; Le Bocasse ; Lestanville ; Les-Hauts-de-Caux ;   La Vaupalière ;    Le Houlme ;  

Maniquerville ; Manéglise ; Mannevillette ; Montivilliers ; Mirville ; Mentheville ; Montreuil-en-Caux ; Mesnil-Panneville ; Motteville ; Mont-de-l’If ;  Mont-Cauvaire ;  Montville ;  Malaunay ;  Maromme ;  Montmain ;  Morgny-La -Pommeraye ;

Notre-Dame-du-Bec ; Nointot ; Normanville ; Néville ; Notre-Dame-du Parc ;

Oherville ; Ourville-en-Caux ; Ouainville ; Ouville-la-Rivière ; Offranville ; Omonville ; Ouville-l’Abbaye ; Ocqueville ;

Pavilly ; Pierrefiques ; Parc-d’Anxtot ; Prétot-Vicquemare ; Pissy-Pôville ;  Préaux ;

Quincampoix ; 

Rolleville ; Rouville ; Raffetot ; Riville ; Royville, Rainfreville ; Rocquefort ; Robertot ; Routes ; Roumare ;  Roncherolles ;  Ricarmesnil ; 

Saâne-Saint-Just : Sainte-Austreberthe ; Saint-Martin-aux-Arbres ; Saussay ; Saint-Ouen-Du-Breuil ; Sierville ; Sainneville ; Saint-Laurent-de-Brèvedent ; Saint-Sauveur- d’Emanville ; Sainte-Marie-au-Bosc ; Sausseuzemare-en-Caux ; Saint-Gilles-de-la-Neuville ; Saint-Romain-de- Colbosc ; Saint-Vincent-Cramesnil ; Saint-Jean-de-la-Neuville ; Saint-Maclou-la-Brière ; Sainte-Hélène-Bondeville ; Saint-Martin-du Bec ; Saint-Antoine-la-Forêt ; Saint-Gilles-de-Crétot ; Saint-Aubin-de-Crétot ; Sorquainville ; Saint-Clair-sur-les-Monts ; Sainte-Marie-des-Champs ; Saint-Paër ; Saint-Laurent-Caux ; Saint-Vaast-Dieppedalle ; Sainte-Colombe ; Saint-Riquier-es-Plains ; Saint-Pierre-le-Viger ; Saint-Pierre-Bénouville ; Saint-Victor-l’Abbaye ; Saint-Maclou-de-Folleville ; Saint-Aubin-sur-Scie ; Sauqueville ; Saint-Pierre-le-Vieux ; Sasseville ; Saint-Crespin ; Saint-Jean-du-Cardonnay ; Saint-Denis d’Aclon ; Sainte-Foy ; Saint-Crespin ; Saint-Ouen-le-Mauger ;

Turretot ; Tourville-les-Ifs ; Toussaint ; Thiétreville ; Thiergeville ; Tocqueville-les-Murs ; Thérouldeville ; Trouville-Alliquerville ; Terres-de-Caux ; Theuville-aux-Maillots ; Touffreville-la-Corbeline ; Tourville-sur-Arques ; Tocqueville-en-Caux ; Thil-Manneville ; Tôtes ; Torp-Mesnil ; Thiédeville ; Saint-Aubin-Epinay ;  Saint-André-sur-Cailly ; Saint-Jacques-sur-Darnétal ;  Saint-Léger-du-Bourg-Denis ; Saint-Pierre ;  Saint-Martin-du-Vivier ; 

Valmont ; Vattetot-Sous-Beaumont ; Villainville ; Vergetot ; Valliquerville ; Veauville-lès-Quelles ; Vinnemerville ; Vittefleur ; Virville ; Varneville-Bretteville : Vassonville ; Vénestanville ; Val-de-Saâne ; Val-de-Scie ; Vibeuf ; Villers-Ecalles ; Varvannes ;

Ypreville-Biville ; Yvetot ; Yvecrique ; Yerville ; Yquebeuf

 

 

 

Voilà les limites orientales du pays de Caux cidricole, pomologique, pomicole, géologique et climatique de Charles Brioux - cartes cumulées 1910 et affinée en 1913 épousant la limite de partage des eaux comprenant le Robec et l'Aubette, et passant à l'ouest du Crevon  et rejoignant ( Ecalles - Buchy) et longeant la limite de partage des eaux entre la Scie  et la Varenne.

Ces limites orientales correspondent à mon hypothèse  de départ.

 

Le Pays de BRAY s'observe de la côte des Bosc-Hyons, de la corniche cauchoise comme le souligne  André Vigarié mais on ne parle pas du pays de Caux cidricole de Charles Brioux mais plutôt du "plateau de Caux"

Voir page 42, ouvrage de la Seine Maritime, André Vigarié, Professeur à l'Ecole Normale d'Instituteurs de Rouen, le Petit coin de France, OCCE, 1962.

 

Voici quelques vues de vergers  jadis dans le périmètre défini par Charles Brioux dans lequel il est possible de discerner, fermes, talus, vergers...

Bihorel,  portail de la Grande Madeleine, ancienne propriété des Hospices de Rouen, donnée par Robert de Bois-Guillaume en 1269, laquelle ferme abritait jadis un pressoir. [Muller, Guy Pessiot, Communes de l'agglomération de Rouen, Volume 1, 2007, p.55.]

La vue aérienne de Bois-Guillaume montre l'Hôpital  qui est passé dans différentes mains dont Join-Lambert [Vavasseur, Guy Pessiot, Communes de l'agglomération de Rouen, Volume 1, 2007, 1.74.] on y voit encore en 1971 de nombreux vergers.

 

Entre Bois-Guillaume et Mont-Saint-Aignan non loin du Mont Fortin et du Mont au Cat, suivant la rue de Clères, voilà encore un verger présent en 1955. [Vavasseur, Guy Pessiot, Communes de l'agglomération de Rouen, Volume 1, 2007, p.73.].

A Franqueville Saint-Pierre dans le bourg on discerne de nombreux vergers  en 1970. [Vavasseur, Guy Pessiot, Communes de l'agglomération de Rouen, Volume 1, 2007? P.195.]

Ci-dessous, Mesnil-Esnard, son grand verger et les petites cours plantées du village en 1950. [Guy Pessiot, Communes de l'agglomération de Rouen, Volume 2, 2007]

A Isneauville en 1970, des rideaux d'arbres délimitent des clos. [Guy Pessiot, Communes de l'agglomération de Rouen, Volume 1, 2007? P.243.]

A Mont-Saint-Aignan, vers le panorama il  reste encore des vergers plantés en 1962. [Vavasseur, Guy Pessiot, Communes de l'agglomération de Rouen, Volume 2, 2007, p.305.]

De même à Canteleu, ci-dessous, notamment celui de la Béguignière autrefois clos aux Moines [Vavasseur, Guy Pessiot, Communes de l'agglomération de Rouen, Volume 1, 2007, p.141.]

Ainsi qu'à la Grand-Mare, ancienne grande ferme du plateau de Caux-Rouen en 1961 [Vavasseur, Paris-Normandie,  Guy Pessiot, Communes de l'agglomération de Rouen, Volume 1, 2007]

 

Enfin dans la vallée du Robec et de l'Aubette, au pied du coteau calcicole : un verger à Saint-Aubin-Epinay juste derrière l'arbre défiant les deux cheminées d'usine. [Guy Pessiot, Communes de l'agglomération de Rouen, Volume 2, 2007? P.407.]

 

En attendant les pommes à presser © Pascal Levaillant, oil on cardboard, 1982, archive picturale

En attendant les pommes à presser © Pascal Levaillant, oil on cardboard, 1982, archive picturale

Charles Brioux commence son étude pomologique par le peuplement des vergers de la région d’Yvetot car dit-il on y trouve toutes les bonnes variétés disséminées dans l’ensemble du pays de Caux.

 Il rappelle qu’Yvetot fut un centre actif d’études pomologiques.

  • En 1e saison Charles Brioux cite le Blanc-Mollet, le Précoce-David, la Reine des Hâtives, Le Vagnon-Legrand, le Vagnon-Tretel
  • En 2e saison : Bramtot ou Martin-Fessart, Fréquin-Lajoie, Fréquin rouge, Godard, Hauchecorne, Médaille d’or, Muscadet, Rouge-Bruyère d’Yvetot, Reine-des-Pommes, Saint-Laurent
  • En 3e saison : amère-de-Berthecourt, Argile Grise, Bedan ancien, Bedan-des-Parts, Grise-Dieppois, Marin-Onfroy, Paradis, Peau-de-Vache ancienne, Peau-de-Vache musquée et Peau-de-Vache, Petit-Hébert.

 

Charles Brioux signale les variétés les plus appréciées : Blanc-Mollet, Vagnon-Tetrel, espèce locale poussant bien ; le Bramtot et Martin-Fessart, variétés voisines quasi identiques (beaux arbres, vigoureux, rustiques et fertiles) ; Muscadet, Godard, Marin-Onfroy, Bedan, Saint-Laurent, Fréquin rouge.

Charles Brioux indique de la Grise-Dieppois et la Reine-des-Hâtives obtenues à Yvetot conviennent surtout aux terres légères.

La Médaille d’or s’avère chancreuse dans la région d’Yvetot - est plutôt délaissée.

Le Bedan-des-Parts donne un bon fruit.

Le Petit-Hébert appréciée en 3e saison. Elle est originaire d’Etalleville, près de Doudeville et se répand autour d’Yvetot.

Dans la région d’Yvetot, Charles Bridoux indique les variétés qui sont en déclin en 1910 :  Peau-de-Vache ancienne ; le Rouge-Bruyère ; le Paradis ; le Marin-Onfroy.

 

Yvetot est signalé comme un centre important d’expédition pour les fruits de pressoir ; les cultivateurs font du cidre pour leur propre consommation mais le surplus est vendu.

Il rapporte qu’en région d’Yvetot la culture des pommes de 1e saison sont délaissées car qu’elles viennent trop tôt en maturité. Ce sont les variétés de 2e saison (50 %) qui prédominent pour leur expédition et les 3e saison (30%) servent à la fabrication du cidre localement.

Charles Brioux poursuit son étude pomologique par le peuplement des vergers de la région de Doudeville

On y retrouve le Blanc-Mollet, les Vagnons, le Bramtot, l’Amère-de-Berthecourt, Le Marin-Onfroy, la Médaille d’or, le Rouge-Bruyère et le Bedan. Viennent nouvellement compléter la liste : en 2e saison - l’Osier, l’Antoinette, le Gros-Muscadet, la Grise Tardive, et l’Ameret.  Le Rouge-Bruyère se comporte mieux que dans la région d’Yvetot.

Les cidres de cette région de Doudeville sont droit comme goût, c’est-à-dire sans aucun terroir, mais ils durcissent vite (en raison du manque d’entretien des tonneaux)

Le blanc-mollet, le Muscadet, le Rouge-Bruyère peuvent être brassés seuls. Le meilleur cidre est donné par le mélange Ameret et Bedan, les autres variétés sont mélangées entre elles, suivant leur époque de maturité.

Dans le canton voisin d’Ourville une variété spéciale dite « la pomme de Roi » est très répandue et est très fertile

Peuplement des vergers de la région de Saint-Valéry-en-Caux.

Au bord de la mer on retrouve les mêmes variétés que celles de la région d’Yvetot : le Bedan Hellouin introduit au château de Neville par M. Hellouin ; le Rouget ou pomme à glanes ; le Massé très répandu dans le canton de Cany et de Saint-Valery.

Celles qui déclinent sont les mêmes que citées précédemment.

Aux environs de Dieppe, les variétés les plus cultivées sont le Blanc-Mollet, l’Amère, petite de Bray, le Muscadet, le Rouge-Bruyère, le Jaunet, le Bedan, le Roquet, ancienne variété de 3e saison produisant tous les deux ans.

Peuplement des vergers de l’arrondissement du Havre.

Le climat vif et humide où l’argile à silex présente des affleurements importants, nous ne retrouvons pas les mêmes que le pays de Caux centre oriental. Le nombre des variétés est plus restreint.

  • 1e saison : Blanc-Mollet, Gros-Papa, les Vagnons
  • 2e saison : Amer-gris, Fréquin-Barré, Médaille d’or, Reinette douce, Rouge-Bruyère, Saint-Michel, Saint-Nicolas
  • 3e saison : Bedan ancien, Marin-Onfroy, Reine-des-Pommes, Peau-de-Vache ancienne et nouvelle.
  • Le Gros-Papa est l’arbre le plus répandu dans toutes les exploitations mais qui doit être brassées aussitôt. Le Saint-Nicolas est très apprécié (1/4 des plantations) ; le Fréquin-Barré et dans la région de Saint-Romain de Colbosc, le Bedan est réputé. (1/3 de verger) mélangé au Marin-Onfroy.

La Reinette douce est appréciée, la peau-de-vache nouvelle, le Vagnon, le Saint-Michel complètent la liste

En cette région nous dit Charles Brioux il y a un pourcentage d’un tiers de pommes de 1e et 2e saisons réunies. Les surplus sont absorbés par les cidreries havraises.

La tradition du poirier à cidre doit être réservée aux plus estimées : Carisis, Souris et Navet.

Charles Brioux en brossant cet inventaire tient à signaler qu’il faut constater que parmi les nombreuses variétés citées, il y en a beaucoup d’excellentes qui figurent sur la liste des variétés étudiées et classées par l’Association Française Pomologique originaires pour beaucoup de la Seine-Inférieure.

Parmi les plus d’un tiers des variétés classées on compte l’Ambrette, Amère petite-Bray, Bramtot ou Martin-Fessart, Binet rouge, Fréquin-Lajoie, Grise-Dieppois, Marabot, Médaille d’or, Muscadet ou Antoinette, Reine-des-Hâtives obtenues par Legrand, Godard de Boisguillaume et Dieppois et Saint-Laurent.

Charles Brioux recommande aux cultivateurs producteurs de ne pas privilégier la productivité au dépend de la qualité.

 

Autre avertissement

Cette histoire, sous cette forme, fera peut-être un jour l'objet d'une version éditée, d'un livre,  c'est pourquoi, en l'état, les contenus peuvent encore évoluer ou être enrichis en fonction des découvertes, des lectures que je pourrais annexer à tout moment.

En effet la "vérité" des sciences expérimentales est provisoire et peut à tout moment être dépassée jusqu'à ce qu'un nouveau fait la contredise ou la contraigne à  l'amendement.

 

A ma tante Thérèse qui m’a fait aimer les pommes,

à sa fille Monique et son gendre Bernard chez qui nous ramassions des rasières de pomme à cidre,

à ma mère qui faisait des bouloches[1] de poire de coq et des douillons de pommes,

à mon père qui faisait son cidre cauchois,

à M. Bonmartel ; à Michel Traversat et  à ses fils;   à  Annie Ernaux qui m’ont offert les clefs de l’histoire des pépiniers et de la pomme Bedan des Parts en 2020,

à Marie-Thérèse Mériot avec qui j’ai démarré cette recherche en 2019,

à Charles Brioux qui  m'a délivré la carte du pays de Caux pomologique, cidricole, climatique et géologique, 

Aux Archives nationales, regionales, departementales, patrimoniales dont la S.C.A. 76,

à Roselyne avec qui je partage la passion des pommes de nos pays respectifs : le pays de Caux et le pays d’Auge,

et enfin à Constant Lecoeur qui a  écrit la Préface de mon ouvrage numérique.

 

 

Histoire du cidre du pays de Caux et de ceux qui le boivent

Récit de Pascal Levaillant, artiste auteur, botaniste et plasticien – 2019-2024

Membre adhérent de la Société Centrale d'Agriculture de la Seine-Maritime,

membre de l'Association Faire Vivre le Manoir du Fay à Yvetot, du Verger Conservatoire de Brémontier-Merval, du Verger du Vallon à Rouen

créateur d'herbiers contemporains dont celui du verger et des fruits de pressoir   

sous l'égide du Collectif Corblin-Levaillant 2022

 

 

PREFACE

 

A quels souvenirs et à quelles références, le nouvel ouvrage de Pascal Levaillant sur « La « véritable » histoire du cidre du Pays de Caux et de ceux qui le boivent » nous renvoie-t-il ? Le cidre, boisson quotidienne de la ferme du Gal de mon enfance, que l’on appelait la « besson » fait partie de notre univers. Je me souviens de la grosse cruche « le bédon » qui accompagnait les moissonneurs à la plaine et au tas (dans le grenier et sous le hangar) au début des années 1950. A la maison, enfants, il nous a fallu attendre la 1ère communion pour avoir le bonheur de déguster le cidre bouché que mon grand-père Constant accompagnait de ses plus grands soins, choix des pommes, de la barrique, du poids (le peser) et du degré mais aussi du temps pour le mettre en bouteille. Les passages « tempêteux » sont écartés. Mon grand-père soutirait le précieux breuvage et ma grand-mère tenait la boucheuse en main et avec le pied sur la pédale.

Pascal Levaillant enracine les pommiers et le doux cidre en Pays de Caux. Mais quelle délimitation géographique lui donner ? En bon chercheur, quelles sont les sources pour affirmer tel endroit et tel autre lui appartenant. Il avance les raisons de son choix. Remonter à la tribu gauloise des Calètes, grand merci. Oui Jules César dans « La conquête des Gaules » cite cette peuplade. Ce rappel nous indique que Caux ne vient pas du latin Chaux/Calcaire mais du celte « calk », froid. Qui eut dit que ce plateau venté entre Manche et Mer du Nord tire ce nom de son climat froid et humide ? Pour être simple, j’ai toujours retenu que le Pays de Caux se distingue du Pays de Bray. Cette boutonnière, après l’érosion de l’anticlinal, qui fait alterner argile et sable, en fait un pays de sources mais surtout de boue. Mais oui, Bray vient aussi du celte : boue. La limite orientale est claire, le Pays de Caux n’est pas le pays de la boue. Au sud, la limite nette suit le cours de la Seine. En effet, observons les colombages en bout de maison, entre les deux rives de la Seine. Au nord dans les angles, les deux colombes sont penchées vers l’intérieur de la maison alors qu’au sud, elles apparaissant en diagonales à partir de la base. Il en est de même avec les harnais et les attelages de chevaux. En Pays de Caux, les attelées sont menées de front, alors qu’au sud les chevaux figurent en enfilade.

Pascal Levaillant décrit également les Clos-masure pour protéger les maisons et bâtiments aux toits de chaume mais aussi les plantations de pommiers. Chacun sait que leur enracinement n’est guère profond. Il convient que les vergers de pommiers résistent aux vents et tempêtes, grâce aux talus plantés que l’on appelle fossés en Pays de Caux. Ces derniers supportent de belles rangées de hêtres, de chênes et encore de frênes, parfois doublées par des lignes de plantations au sol. Ces dernières permettaient d’assurer la protection en cas d’abattage alterné entre les arbres sur fossés ou sur sol. Des édits du Parlement de Normandie oblige les fermiers à maintenir ces fossés plantés pour garantir les vergers contre les vents. Revenons au terme Clos-masure que je découvre en classe préparatoire Agro du Lycée Corneille de Rouen. Surprise pour moi, le terme masure correspond à la chaumière dans son petit clos mais absolument pas à la cour de ferme entourée de ses arbres. Enfant, j’entends que les salariés soit restent dans la Cour soit partent à la Plaine pour leurs diverses activités. Les géographes qui ont pris ce terme de Clos-masure n’ont pas été sensibles à la pratique du langage des fermes et des villages. Je retiens donc la Cour plantée par rapport à cette Plaine ouverte.

Le pommier, longue histoire, pour ceux qui ne le savent pas encore, il appartient à la famille des rosacées. Dans sa sous-famille, le genre Malus comprend 25 à 30 espèces. Aussi, il n’est pas surprenant que de nombreux travaux aient été entrepris dès le XVIIIe siècle pour décrire et conserver cette diversité des « fruits à pressoir » (pommes à cidre et poires à poiré), travaux de pomologistes et action des sociétés d’horticulture comme celle de Seine-inférieure. Suivons Amandine Cornille dans son article « Les tribulations du pommier cultivé en Eurasie » paru avec la société nationale d’horticulture de France ou dans l’ouvrage « pommiers à cidre - variétés de France » de Jean Fleckinger et Jean Miche Doré édité par Inra éditions. Pascal Levaillant relate aussi les travaux de Charles Brioux (1872-1963), un des éminents spécialistes en agriculture, directeur de la station agronomique de la Seine-Inférieure (1891-1928), membre non résidant de l'Académie d'agriculture de France (juillet 1930).

Les espèces du genre Malus se rencontrent des Balkans en Europe, à la Chine et au Japon en Asie en passant par le Caucase, le Turkestan, les montagnes de l’Altaï et la Sibérie. Quelques espèces sont aussi originaires du sous-continent nord-américain. L’Asie du Sud-Ouest apparait comme un centre de plus grande diversité, notamment dans les forêts du Caucase et de Turkestan. Des études paléontologiques indiquent la présence du genre Malus à l’ère tertiaire (Challice et Westwood, 1973). Le pommier a été longtemps cultivé. Il semble que cette culture soit connue sous le règne de Ramsès II (13 siècles avant Jésus-Christ). Grecs et Romains la pratiquaient. La création de nouvelles variétés commence avec T.A Knight (1759-1835), grâce à l’hybridation contrôlée.

Auguste Chevalier, membre de l’Académie des sciences et membre titulaire de l’Académie d’agriculture (décédé en 1956), directeur du laboratoire d’agronomie tropicale au Muséum d’histoire naturelle a laissé une documentation abondante sur le pommier à cidre dont sa publication principale « Histoire et Amélioration des pommiers et spécialement des pommiers à cidre » (1921).  Il cite que, « Jusqu’au XIème siècle, aucun texte ne fait mention des Pommiers cultivés. … L’étude des pommiers (la pomologie) prend vraiment naissance en France avec Julien Le Paulmier et Jean Cahaignes de Caen (1590), Olivier de Serres (1623), Jean de la Quintynie (1690). Henri-Louis Duhamel de Monceau, membre de l’Académie des sciences et membre associé dès 1761 de la Société centrale d’agriculture de la généralité de Paris (devenue Académie par la suite) publie son « Traité des Arbres Fruitiers » en 1768, après de nombreuses expériences et observations menées avec rigueur et méthode.  Auguste Chevalier décrit l’activité de la Société centrale d’agriculture de Seine-Inférieure. Cette dernière charge A. du Breuil et Girardin d’étudier les fruits à cidre de la région et de créer une première collection au sein du Jardin botanique de Rouen. Ainsi, les vergers de Normandie entrent dans l’univers scientifique. Sont répertoriées 181 variétés de pommiers et 128 de poiriers alors que le pommier cultivé comprend environ 6.000 variétés…

Auguste Chevalier indique encore « Il est souvent question dans les vieux textes de piracium et de pomacium, boissons fermentées fabriquées avec les poires et les pommes sauvages récoltées dans les forêts qui couvraient une grande partie de la Gaule. L’usage du cidre s’est brusquement développé en France à partir du XIIème siècle… Tous les pommiers à cidre de Normandie bien qu’on puisse les distinguer en pommes amères, pommes douces et pommes acides, sont très voisins ; en revanche, ils diffèrent beaucoup des pommes acerbes de nos forêts. » « Ils ont donc pris naissance dans une autre région, et nous avons la conviction que cette région est les Pays Basque dans le Nord-Ouest de l’Espagne, où la culture est actuellement répandue. … Ils avaient et ont encore une langue très spéciale dans la laquelle le nom de pommier est Sagara ; nom peu différent du nom latin sicera d’où est dérivé Sidre et cidre (en français) et cidar (en anglais). »

Dans mon périple professionnel, j’ai été surpris de découvrir un cidre de garde en Pays d’Othe (à cheval sur les départements de l’Aube et de l’Yonne). La route dite « blanche » (passage dans la craie) était le chemin de livraison de ce cidre vers la Champagne. De même, cette boisson est courante en Bretagne où elle accompagne galettes et crêpes. Ma propre filleule, associée en EARL avec son mari dans l’Eure, a entrepris une plantation à grande échelle de pommiers à cidre. A vous lecteur de goûter le fruit de cet ouvrage avec ce parfum particulier de la pomme et du cidre du Pays de Caux qui se dégage encore de votre gorge.

 

Constant LECOEUR

Secrétaire perpétuel honoraire de l’Académie d’agriculture de France

Ingénieur général honoraire des ponts, des eaux et des forêts.

---------------------------------------------------------------------------------------------

Jules César, dans « La conquête des Gaules »

Amandine Cornille, dans son article « Les tribulations du pommier cultivé en Eurasie » paru avec la société nationale d’horticulture de France

Jean Fleckinger et Jean Miche Doré, « pommiers à cidre - variétés de France » édité par Inra éditions

Auguste Chevalier, « Histoire et Amélioration des pommiers et spécialement des pommiers à cidre »

Henri-Louis Duhamel de Monceau, « Traité des Arbres Fruitiers »

En ce mois de mars 2025, Constant Lecoeur m'a écrit spécialement ce texte qui figure en guise de cette Préface de l'Histoire du cidre du pays de Caux et de ceux qui le boivent, que j'ai commencé à publier en octobre 2024.

Ce texte original de Constant Lecoeur mérite toute votre attention. "Le Gal" de Grémonville, cher à Constant est entré par deux fois dans ma vie sans qu'il soit pour autant l'objet de notre première rencontre qui s'est produite à Yvetot dans les années 1968 puis en 2024 à Thérouldeville.

Son texte arrive en toute fin d'écriture de cette histoire qui sacralise un goût, un terroir atypique : le pays de Caux et son cidre si singulier et rafraîchissant. 

D'une certaine manière j'associe cette  préface à celle d'Annie Ernaux qui, en 2020, a été un catalyseur pour le commencement de mon histoire du patrimoine végétal d'Yvetot mais aussi  finalement de l'histoire du cidre du pays de Caux m'offrant la perspective de focaliser sur une des pépinières historiques des pommes à cidre du pays de Caux, pommes régénérées en grande partie par P.M. Legrand, maître semeur et pépinier yvetotais, cauchois de talent aux côtés de Lacaille, Godard et Dieppois ...

C'est avec plaisir et honneur que je publie ici la Préface de Constant Lecoeur issu d'une illustre famille cauchoise, dont il a contribué à perpétuer le talent, l'éloquence et l'engagement constant en AGRICULTURE.

 

Collection personnelle

« Le pays de Caux est le plus fertile que je connaisse. L'épaisseur de son humus, qui en quelques endroits cinq à six pieds de profondeur, les engrais que lui fournit le fond de marne sur lequel il est élevé [...] concourent à le couvrir de superbes végétaux. »

[Henri Bernardin de Saint-Pierre, 1775 ; Voyage en Normandie et Etudes de la nature 1825]

 

Un dicton populaire entendu dans le pays de Caux dit : 

« Il est de dicton populaire, qu'en même temps qu'on donne à la terre un habit blanc, il faut aussi lui donner un habit noir. » [Annuaire des cinq départements de la Normandie, 1851]

- Blanc pour la marne, noir pour le fumier -   P.L.

 

D'Hautot-Saint-Sulpice à Yvetot nous étions dans un environnement de pommiers.

Mon père Adrien en train de jardiner dans son potager de la rue P.J. de Béranger mitoyen au verger des voisins (rue Fief de Caux)

 

« Hautot St Sulpice, village du pays de Caux.

 

Il est mon village natal où j'ai vécu les sept premières années de ma vie...pour autant j'ai vu le jour à Rouen.
Mon père Adrien Levaillant est natif d'Hautot-Saint-Sulpice en 1922 au hameau du "Nouveau Monde" vers la route d'Anvéville, près de la mare de l'orme. Son grand-père Philogone a participé au chantier de plantation de la quadri-allée plantée de hêtres du château du Boscol à Héricourt-en-Caux en 1871. 
»

Le pays de Caux, ses masures, ses cours, ses us et coutumes …  Pascal Levaillant, 2009

 

 

Définir les contours et les limites du pays de Caux m’a été une tâche difficile et délicate et le restera car ce territoire depuis tous les âges de la préhistoire à aujourd’hui a connu une limite précise, voire chirurgicale d'une part par le trait de côte de la Manche, d'autre part par les coteaux et falaises surplombant la Seine, large estuaire remontant notamment jusqu'à Rouen et à la rivière de l'Andelle, juste avant le barrage de Poses.

Mais ce pays de Caux n'a jamais connu à l'est, et au nord-est une limite précise sinon plusieurs comme l'attestent les nombreuses publications.

Ainsi vous entendrez dire   et pourrez lire que certains délimitent le pays de Caux ne dépassant pas l'Austreberthe, par d'autres qu'il s'étend jusqu’au Cailly ou l’Andelle.

Concernant le pays de Caux cidricole et pomologique, Brioux a tranché en 1910 ce qui permet de définir une aire géographique cohérente, pertinente pour le sujet qui me préoccupait depuis 2020.

 

Mes cousinages 

d'après Gilles Quedeville et Dominique Carpentier, généalogiste

Bernard ALEXANDRE ;  Daniel AUTHOUART ;  Jacques ANQUETIL

Pierre BEREGOVOY ; Alain BLONDEL ; Victor BOUCHER ;  Jean BOUISE ;  Pierre BOULARD ; BOURVIL ; Yves BOUFFIGNY,
Sylvie CABAL ;  Dominique CARPENTIER ;  Suzanne CLEMENT ;  René COCAGNE
René COT ; Roger COURTOIS,
Charles DALIN ; J et H DECAENS  ; Daniele DENOUETTE ;  Roger DOUVILLE ;  Yannick DUMONT ;  André DUROMEA
Annie ERNAUX (8)
Roger FORCHY
Roger GUERRANT ; Narcisse GUILBERT,
Alexis HANQUINQUANT ;  Françoise HARDY  ;  Fauve HAUTOT
Constant LECOEUR ;  Janou LEGOY ;  Jean LEPOVREMOYN ; Valérie LEMERCIER

Eric MARDOC ;  François MARTOT ;  Raymond MENSIRE

Jean -Claude NALLET
Thomas PESQUET (12)  ;  Dominique PATUREL  ;  Emmanuel PETIT ;  Jean Marie PETITHON  ;  Edouard PHILIPPE  ;  Jean PREVOST
Gilles QUEDEVILLE
Charles REVET  ;   Pierre RICHARD ;  Joël ROQUIGNY ;   RUFUS
Laurent RUQUIER,
Armand SALACROU ;   Claude SAUTET
Claude TROXLER ;   Roger TOLMER

Paul VATINE,

Karine VIARD ;  Murielle VISSAULT

 

Le(s) pays de Caux

limites et contours

d’hier à aujourd’hui,

du Caux au pays de Caux.

 

Pour introduire ce chapitre, afin de rester le plus objectif ... je vous propose une carte inédite où vous visualiserez les différents tracés des contours du pays de Caux déjà connus, selon les auteurs, les experts, les publications, les administrations qui sont à prendre en considération vis à vis de l'histoire, des préoccupations des auteurs et des thématiques qu'ils explorent.

Car d'un côté on peut toujours discuter des limites du pays de Caux depuis les Calètes.

en effet les cartes n'ont connu leur développement  qu'à partir du 15e siècle  soit plus de 15 siècle après la Gaule romaine.

Le Caux n’été dessiné qu'à ce moment-là et n'a cessé d’évoluer comme l'indiquent les cartes que vous découvrirez ci-après.

Vous constaterez que l'influence des institutions religieuses, judicaires ou militaires feront évoluer les contours du Caux et également sous la pression de l'évolution des territoires voisins comme la Picardie, le Vexin ou le Roumois.

Vous constaterez qu'après la Révolution française le pays de Caux et le pays de Bray n'apparaissent quasiment plus laissant aux cartographes le soin de délimiter les départements et ses arrondissements : changement de paradigme qui va durer près d'un siècle au niveau cartographique.

Il est probable que ce nouveau découpage a réveillé les défenseurs des anciens pays qui au cours du 20e siècle ont réaffirmé leurs singularités à tout point de vue.

Pour autant depuis le 17e siècle les paysages, les fossés et talus se sont vus démanteler les uns après les autres pour laisser place à des plaines toujours plus vastes pour y cultiver des cultures exigeantes. L'habitat s'en est trouvé modifié comme nous le verrons par la suite. 

 

Il existe un réel décalage entre le sentiment d'être cauchois, de le rester, de le faire vivre dans des paysages vers les limites et contours orientaux. Les marches géographiques entre Bray et Caux ont été remplacées par des marches symboliques où les zones urbaines ont contribué à ce que le Caux s'estompe dans ces zones péri-urbaines où les clos ont été un à un supprimés pour les remplacer par des zones commerciales, artisanales ou par des lotissements et des zones pavillonnaires. (Caux-Rouen) (Pointe de Caux-Le Havre-Montivilliers)

 

C'est important au départ de cette histoire du cidre du pays de Caux de montrer l'évolution d'un "pays" qui n'a jamais eu des contours stables d'autant que dans nos régions on distingue les pays comme une partie précise d'une province ce qui tend à complexiser la notion de terroir dans ce millefeuille territorial. 

Le retour de la Normandie dans le Royaume au 13e siècle l'a fait dessiner pour plusieurs siècles avant que le pays de Bray affirme sa boutonnière jusqu'aux marches du pays de Caux et de la Picardie.

Il est bien normal qu'on s'étonne que le pays de Caux ait eu plusieurs visages toutefois Thomas Corneille a vu une unicité territoriale grâce aux pommiers et au cidre que ce pays a accueilli deux siècles plus tôt.

 

Beaucoup de spécialistes (géographes, historiens, agriculteurs, architectes, paysagistes administrateurs ... ont confronté leurs points de vue, de même les habitants ont longtemps débattu et cela continuera encore un bon moment...

Il semble qu'en fait depuis la Gaule Belgica les calètes l'ont habité mais comme tout territoire suite aux invasions germaniques, romaines, anglo-saxonnes ses contours ont évolué sans cesse historiquement, géographiquement, botaniquement, linguistiquement, administrativement, culturellement, pomologiquement et cidricolement.

Voici un aperçu des diverses cartes produites depuis le 16e siècle. 

 

 

Galliae regni potentiss. nova descriptio / Ioanne Ioliveto auctore
Jolivet, Jean (15..-1553 ; cartographe). Cartographe - extrait

gallica.bnf.fr

[Europae tertia tabula continens Europam] : [Gaule] / [Ptolémée]
Mercator, Gerard (1512-1594). Cartographe  - extrait

gallica.bnf.fr

Galliae descriptio ex Julij Caesaris commentarijs / Liebaux sculp.
Liébaux, Jean-Baptiste (16..-17..? ; graveur). Graveur- extrait

gallica.bnf.fr

Gallia vetus, ad Iulii Caesaris commentaria / [Janssonius]
Van den Ende, Josua (1584?-1634).

gallica.bnf.fr

 

Notitia chorographica episcopatuum Galliae. In gratiam redi et spectabilis viri dni Cl. Robert, descriptionem episcopatuium Galliae molientis, tabulam hanc l. m. g. delincabat / P. Bertius... ; Joannes Picart incidit, Parisiis
Bertius, Pierre (1565-1629). - extrait

gallica.bnf.fr

Galliarum descriptio / ex Sansonum Tabulis editis et manuscriptis excerpta ; ope Animadversionum Domni Martini Bouquet Benedictini ; et Dissertationum Domini Leboeuf Autissiodor. Canonici, emendata ; ab AEgidio Roberto, ...
Robert de Vaugondy, Gilles (1688-1766). Cartographe 
- extrait

gallica.bnf.fr

----------------------------------------------------------------------------

Galliae antiquae descriptio geographica / autore Nicolas Sanson Abbavillaeo ; Robert Cordier sculpsit
Sanson, Nicolas (1600-1667). Cartographe - extrait

gallica.bnf.fr

--------------------------------

Galliae Antiquae tabula geographica Populos, Civitates, pagos, Praefecturas, colonias et provincias Imperio Romano subjectas complectens. Ex Itinerariis Theodosiani, Antonini et Hyerosolimitani, Redacta. Auctore J. C. Dezauche. [ gravé par P.F. Tardieu]
Dezauche, Jean-Claude (1745-1829). Cartographe 
- extrait

gallica.bnf.fr

---------------

Galliae antiquae descriptio geographica / autore N. Sanson d'Abbavilleio christianiss. Galliarum Regis geographo
Sanson, Nicolas (1600-1667). Cartographe

gallica.bnf.fr

----------------------------

[Galliae typus cum iis quae a Strabone] / [Anville]
Anville, Jean-Baptiste d' (1697-1782). Cartographe - extrait

gallica.bnf.fr

-------------------------------

Gallia Vetus in Partes II, Regiones IV, Provincias XVII, et populos C. / autore N. Sanson d'Abbavilleio christianiss. Galliarum Regis geographo
Sanson, Nicolas (1600-1667). Cartographe - extrait 

gallica.bnf.fr

-------------------------

Gallia vetus ex C. Julii Caesaris Commentariis descripta ; ou les Conquêtes de Jules César dans la Gaule Transalpine / Par N. Sanson - extrait

 

gallica.bnf.fr

----------------------------------

Gallia, Britannia, Germania, provinciae Danuvienses / Auctore H. Kiepert
Kiepert, Heinrich (1818-1899). - extrait

gallica.bnf.fr

--------------------------------

Au moment de St-Clair-sur Epte

 

www.universalis.fr

 

Il est certain que le "Pays de Caux"  se situe sur le plateau de Caux et se distingue du Roumois, du Vexin, du Bray, du Talou, du Petit-Caux

Mais avant que le 20e siècle tente de redessiner les Cartes, observons les fonds de carte Vidal Lablache que nous avons vu sur nos murs des écoles.

LISTE OFFICIELLE DES CARTES VIDAL LABLACHE :
Carte Vidal Lablache 1 Termes de Géographie
Carte Vidal Lablache 2 France Cours d’Eau
Carte Vidal Lablache 3 France Relief du sol
Carte Vidal Lablache 4 France Départements
Carte Vidal Lablache 6 France Canaux
Carte Vidal Lablache 8 France Agriculture et Industries
Carte Vidal Lablache 9 France Provinces
Carte Vidal Lablache 24 Paris et environs de Paris
Carte Vidal Lablache 39 France Géologie
Carte Vidal Lablache 60 France de l’Ouest
Carte Vidal Lablache 61 Bassin Parisien

 

«Si Vidal de La Blache, dans son Tableau de la géographie de la France, en 1903, base son analyse du territoire français sur les affinités que les milieux font naître dans les genres de vie, il attache une grande importance à la notion de pays, dont le nom exprime selon lui les particularités du sol et dont il prend soin de dresser la liste et les caractéristiques. Se conformant aux itinéraires des voyageurs, qui ont entrepris par cette région, dès le XVIIIe siècle, l’exploration de la Normandie, il accorde de ce point de vue une place particulière au pays de Caux, dont il estime qu’il n’est Normandie que pour l’histoire et la géographie politiques9. Le sol a un rôle actif dans la mise en place des cadres et des délimitations qui organisent la vie des hommes, qui obéissent ainsi à des influences qu’ils ne perçoivent pas toujours. Ainsi explique-t-il, à propos de Rouen :

Autour de ce centre urbain gravitaient d’anciens pays gaulois échelonnées sur les voies romaines se dirigeant vers l’ouest et le sud. L’existence de cadres anciens perpétuait des influences nées du sol et déjà consolidées par l’histoire. » La Balche, 1903 ; Guillet, 2013]

in : Impressionnisme : du plein air au territoire Sous la direction de Frédéric Cousinié : books.openedition.org

Des années 1880 à la fin des années 1960, plusieurs générations d’élèves ont ainsi appris à connaître la France et le monde grâce à ces cartes colorées imaginées par le géographe Paul Vidal-Lablache.

En 1899 est sortie la thèse de Georges Lecarpentier dont s'est emparé Vidal de la Blache.

On y parle de limites floues et extensibles dans l'histoire, du Cailly, de l'Andelle, de tiraillement entre les zones d'influence des Caleti comme des Véliocasses, d'agriculture et de pommiers dans les masures. Un état des lieux du pays de Caux à la fin du 19e siècle, 60 ans après le récit de L. Moll (1834-1835) et avant ceux de Delisle et de Sion.

 


LE PAYS DE CAUX ÉTUDE GÉOGRAPHIQUE, Thèse pour l'obtention du diplôme d'études supérieures de Géographie, soutenue en Sorbonne en 1899. Par M. GEORGES LECARPENTIER Licencié ès-Lettres, diplômé d'Études supérieures de Géographie
In : Bulletin de l'année 1905 / Société normande de géographie - www.rotomagus.fr

PRÉFACE Par M. VIDAL DE LA BLACHE, Professeur à la Sorbonne

« Ces pays représentent, et surtout représentaient autrefois, de petites autonomies locales. Ce que le peuple appelle de noms tels que Beauce. Brie, Limagne, Pays de Caux, etc., ce sont des contrées qui souvent n'ont jamais eu d'existence administrative ou politique : ils vivent toutefois dans le langage populaire. Ils répondent à des divisions sur lesquelles les savants se trompent quelquefois, mais pas les habitants.

Ils se maintiennent, sans avoir l'appui d'une consécration officielle, par la seule force de l'usage, et en dépit d'autres désignations concurremment employées.

Il faut, pour être ainsi doués de cette vitalité singulière, qu'ils expriment pour ceux qui les emploient quelque chose de vivant et de réel. C'est là ce qu'il est intéressant de chercher.

Le paysan ne se soucie ni de géologie ni d'histoire. Peu lui importe quel nom de peuple gaulois ou quel étage chronologique de roches distingue le pays dont il parle. C'est pour lui un centre social, si exigu qu'il paraisse. Être du même pays suppose, pour celui qui se sert de cette expression, une certaine affinité, quelque plaisir à se reconnaître. Le sentiment de ces affinités est entretenu par des signes sensibles : vêtement, coiffure des femmes, habitation, modes de culture et de nourriture ; ou tout au moins l'accent, les expressions du terroir, le patelin.

Ces traits, il est vrai, s'affaiblissent. Nous assistons aujourd'hui à leur atténuation graduelle. 
On lira donc, je pense, avec intérêt l'étude d'un Normand sur un pays de Normandie. Qu'il me soit permis, quant à moi, de féliciter la Société normande de Géographie du bon exemple qu'elle donne en encourageant de sa publicité ce genre d'enquête.

P. Vidal de la Blache. »


LE PAYS DE CAUX HISTORIQUE

« Il est très digne de remarque, écrivait Fustel de Coulanges, dans ses Origines de l'Ancienne France, que les vieux États gaulois ont conservé jusqu'à une époque très voisine de nous leurs noms, leurs limites et une sorte d'existence morale dans les souvenirs et les affections des hommes ».

Jusqu'à une époque très voisine de nous, c'est trop peu dire, car le souvenir des civitates gauloises a le plus souvent survécu jusqu'à nos jours même. Si certains de nos « pays » sont des unités géographiques, d'autres ne sont que la projection dans le temps de ces anciennes civitates, quelques-uns enfin réunissent ce double caractère. Le Pays de Caux figure parmi ces derniers.

Le premier écrivain qui fasse mention du Pays de Caux est César, qui parle à plusieurs reprises, dans son  histoire de la guerre des Gaules, des Caleti, de la civitas Caletorum mais sans en indiquer la situation géographique.

Suivant Strabon, les Calètes habitaient a près de l'embouchure de la Seine », et Ptolémée, plus précis, ajoute « sur la rive septentrionale de la Seine, avec Juliobona pour capitale ».

Quelles étaient les limites de leur civitas ?

Au sud, à l'ouest et au nord les limites fixées par la nature étaient la Seine et la mer. Mais sur terre, à l'est ? Les géographes anciens ne l'indiquent pas […] Dans un Mémoire sur la Carte Préhistorique de la Seine-Inférieure, M. de Vesly estime : « qu'il y a lieu de tracer la limite des Calètes et des Véliocasses par la vallée de la Sainte-Austreberthe, à   de laquelle se trouve l' ancien oppidum de Varengeville et de lui faire descendre la vallée de la Scie, en traversant le plateau près des mottes de Varneville, Bretteville, d'Heugleville, d'Auppegard et du camp de Varengeville-sur-Mer, qui défendait l'entrée de la vallée du côté de la Manche. Ce tracé est fort hypothétique […] ».
A propos des Véliocasses, on peut lire ceci : « Le territoire des Véliocasses suivait le cours inférieur de la Seine, au nord depuis le confluent avec l'Oise et s'étendait sur le plateau du Vexin actuel toujours sur la rive droite en deçà de Rouen jusqu'à une limite indéterminée à l'ouest de cette ville et qui faisait frontière avec les Calètes. » source Wilipédia.


Là encore  pas de limite précise entre les Caléti et les Véliocasses.

Dans ses Notes sur les forêts de la Seine-Inférieure, M. Samson émet sur les limites des civitates gauloises une théorie générale qui mène aux mêmes conclusions que l'archéologie, en ce qui concerne la limite orientale des Calètes :
« C'étaient, dit-il, les forêts qui servaient de limites entre les territoires des diverses civitates sans que pourtant ces frontières fussent délimitées avec la rigueur qu'on leur assignerait aujourd'hui, et, à dire vrai, ces espaces boisés intermédiaires, ces marches, représentaient ce que nous appellerions maintenant une zone neutre; suivant une coutume, commune à la Gaule et à la Germanie, elles restaient sans culture ».

Il existait une zone forestière de ce genre à peu près ininterrompue entre la Seine et la Manche; elle commençait au sud par la forêt dite actuellement de Roumare, se continuait par la forêt appelée, au moyen âge, forêt de Silveison, et se prolongeait jusqu'à la mer par la forêt d'Eawy. Cet immense rideau forestier était limité à l'ouest par la Sainte-Austreberthe et par la Scie, le long desquelles courait la ligne des oppida gauloises.

Ces conclusions se corroborent; l'on peut donc considérer comme limite orientale de la civitas calète : la Sainte-Austreberthe, la Scie et une ligne qui, passant par Varneville-Bretteville rejoignait les sources de ces deux rivières.

La civitas des Calètes ne subit aucune modification de frontières pendant les trois premiers siècles qui suivirent la conquête, mais Rothomagus devint le chef-lieu d'une province romaine et le nœud d'un important réseau de grandes voies rayonnant dans toutes les directions. Juliobona isolée dans sa position excentrique décrut d'autant que grandissait la capitale des Véliocasses ; elle fut incendiée et presque entièrement détruite, au 4e siècle, par des pirates saxons. La civitas calète, privée de sa capitale fut réunie à la civitas des Véliocasses et, dès lors, disparut pour toujours.

Deux cents ans plus tard, le nom de l'ancienne civitas réapparaît mais il est porté maintenant par un pagus franc, pagus Caletus, il devint plus tard celui d'un bailliage, Bailliage de Caux; mais de toutes les divisions administratives, civiles ou ecclésiastiques qui portèrent, au cours des siècles, le nom de l'ancienne civitas, aucune n'eut les même limites qu'elle.

Le pagus Caletus de l'époque mérovingienne, celui de l'époque capétienne, celui même de l'époque normande étaient moins étendus que l'ancienne cité ; quant aux divisions ecclésiastiques, aux archidiaconés du Grand et du Petit Caux, ils coïncidaient presque entièrement avec le pagus primitif.

Au contraire, le bailliage de Caux qui remplaça le pagus, dès 1204, s'agrandit rapidement aux dépens des pagi voisins et engloba des territoires qui n'avaient pas fait partie de la civitas.

Le pagus Caletus de la période franque ne comprenait primitivement que les parties occidentale et septentrionale de la civitas. D'ailleurs, au cours des sept siècles de son existence les limites du pagus Caletus ont fréquemment varié, il semble même qu'au 9e siècle ce pagus ait disparu pendant quelques années ; sa partie septentrionale aurait été absorbée par le pagus Talogensis et sa partie méridionale par le pagus Rodomensis. Sous les ducs de Normandie le pagus Caletus reprit son importance primitive.

Lorsque la Normandie fit retour à la couronne de France, en 1204, Philippe-Auguste s'empressa de la diviser en bailliages. Le bailliage de Caux eut d'abord les mêmes limites que le pagus Caletus de l'époque normande, mais bientôt s'y enclavèrent « d'autres bailliages royaux plus ou moins subordonnés au premier, tel que : le bailliage de Neufchâtel que l'on rencontre, en 1216 et en 1219 ; celui d'Aumale dont l'existence se révèle en 1238, et enfin celui d'Arques, signalé dès 1204 - HELLOT, Essai sur les baillis de Caux ». Ainsi entendu le bailliage de Caux englobait au nord-est, des territoires qui jamais n'avaient été compris dans la civitas Calète, mais par contre la partie sud-est de l'ancienne civitas restait en dehors du bailliage de Caux.

Ce sont pourtant les limites du bailliage que de nombreux géographes ont données comme étant celles du Pays de Caux. Toussaint-Duplessis a contribué plus que personne à accréditer cette erreur : « Entre la Brêle et l'embouchure de la Seine, écrit-il, étaient anciennement situés les peuples de la Gaule que César nomme Caleti. L'espace de terrain que ces peuples occupaient porte aujourd'hui le nom de Pays de Caux ». Et il joint à son ouvrage, comme carte du Pays de Caux, la carte du bailliage.
Vivien de Saint-Martin, dans son Dictionnaire Géographique, et Baudrillart, dans son ouvrage sur la France Agricole, ont reproduit en grande partie l'erreur de Toussaint- Duplessis. Le premier comprend dans le Pays de Caux les « trois arrondissements du Havre, d'Yvetot et de Dieppe ». Baudrillart, en plus de ces trois arrondissements, y comprend encore les cantons de Buchy, de Clères, de Maromme, de Duclair et de Pavilly, dans l'arrondissement de Rouen, et celui de Saint-Saëns dans l'arrondissement de Neufchâtel.

Les savants peuvent bien écrire que le Pays de Caux s'étend jusqu'à la Bresle et qu'il comprend tout le littoral de la Seine-Inférieure ; les paysans qui habitent en-deçà de la Cailly et de la Varenne, savent bien qu'au-delà de la forêt d'Eawy et de Dieppe il n'y a plus de Cauchois.

Dans le Pays de Caux, de Vivien de Saint-Martin et de Baudrillart, il y a, en réalité, considérées au point de vue moral, cinq régions différentes : D'abord la région comprise entre Dieppe et le Pays de Bray, à l'ouest et à l'est, la Brêle ; Passy, Baudrillart et Joanne l'appellent « le Petit Caux ».

Cette région différente du Pays de Caux géographiquement, comme nous le verrons plus loin, l'est aussi au point de vue ethnique. « C'est une terre plus picarde que normande », comme l'a très justement noté M. l'abbé Cochet. Les habitants n'ont ni le même parler ni les mêmes coutumes que les Cauchois. Lorsqu'ils parlent avec des paysans des cantons situés à l'ouest de Dieppe, ils leurs disent : « Vous autres Cauchois », ceux-ci leur répondent : « Vous autres Picards ».

Le pays compris entre la vallée de Bray et la limite occidentale de la forêt d'Eawy forme la seconde région. Les habitants ont la prononciation brève des Picards mais leur mentalité ressemble à celle des Cauchois ; néanmoins, ils ne se considèrent pas comme Cauchois.

La troisième région qui comprend le canton de Buchy, la partie orientale de celui de Clères jusqu'à la Cailly, le canton de Maromme et la partie du canton de Duclair située sur la rive gauche de la Sainte-Austreberthe, est, suivant l'expression même de ses habitants, a la région dans l'influence de la ville ». C'est le souvenir du pagus Rodomensis sur la rive droite de la Seine ; seule la partie de ce pagus, située sur la rive gauche, a conservé jusqu'à nos jours le nom de Roumois.

Entre la Varenne, la rivière de Cailly jusqu'à Montville, Barentin, la Sainte-Austreberthe et la Scie « on est et on n'est pas dans le Pays de Caux ». La prononciation des habitants y est moins traînante que celle des Cauchois du plateau.

Plusieurs localités de cette région, Saint-Victor, Montreuil, portent accolé à leur nom le suffixe en Caux; au XVIIIe siècle Longueville et Sierville (près de Clères) le portaient encore couramment.

Les habitants de cette région ont cependant raison de ne pas se considérer comme de « véritables Cauchois », car le pays entre la Varenne et la Scie est un essart de la grande forêt gauloise, des lambeaux forestiers échelonnés sur la crête qui domine la rive droite de la Scie en témoignent encore, et il ne faisait pas partie intégrante de la civitas calète.

Le Pays de Caux incontestable et incontesté ne commence qu'au-delà de la Scie et de la Sainte-Austreberthe. Sur tout le plateau, à l'ouest, on se dit Cauchois et on est fier de l'être, mais au pied du plateau, entre Duclair et Caudebec « les riverains » prétendent n'être point Cauchois, il en va de même à l'entrée de quelques vallées sur la Seine et sur la mer, à Bolbec, par exemple, ou à Fécamp. La population d'Yport est une population d'origine méridionale immigrée dans une « valleuse » du Pays de Caux à une époque indéterminée.

Voici donc le Pays de Caux délimité d'après le dire des habitants, mais la question se pose maintenant de savoir sur quel criterium ils se basent pour déclarer qu'un canton ou qu'une commune est ou n'est pas du Pays de Caux ? Sur quels caractères, en un mot, font-ils reposer son unité ?

Les Cauchois ont le sentiment très profond que l'unité du Pays de Caux repose sur la communauté d'origine de ses habitants, qu'elle a pour base une unité ethnique. La formule invariable de leurs réponses, lorsqu'on les interroge sur ce point, l'indique très nettement. Quel que soit la forme que vous donniez à votre question : « Jusqu'où s'étend le Pays de Caux ? —

Suis-je bien dans le Pays de Caux ? », etc. ; dans la réponse des habitants il sera question non du Pays de Caux, mais des Cauchois :  Oui, nous sommes Cauchois — ou bien : Non ce village n'est pas cauchois ». Pour eux le Pays de Caux est la région habitée par les Cauchois ; ils ne considèrent ni les Yportais, ni les habitants des vallées, jadis occupées par les envahisseurs normands, comme des Cauchois, pas plus d'ailleurs que ceux-ci ne se considèrent comme tels.

Les caractères du Cauchois sont difficiles à préciser. Le Cauchois se reconnaît à un ensemble de particularités qui le caractérisent, plutôt qu'à une particularité très déterminée. Ce qui le distingue le plus de l'habitant des régions voisines, c'est son langage et sa prononciation. Entre eux les Cauchois se reconnaissent « au patelin ».

Jusqu'en 1789 il a subsisté un monument vivant et caractéristique de l'unité morale des Cauchois, c'était leur droit spécial, la Coutume de Caux.

Antérieure à l'invasion normande, cette coutume fut supplantée par celle de Normandie, dans la vallée de la Seine, de la Sainte-Austreberthe et de Bolbec, mais elle s'était conservée sur le plateau.
N'est-ce pas la preuve indiscutable que les Cauchois ne sont pas des Normands mais bien les descendants de la tribu gauloise des Caleti ?


LE PAYS DE CAUX GÉOGRAPHIQUE

Le Pays de Caux n'est pas seulement une contrée historique il est aussi une région géographique, seulement, en tant qu'unité géographique, il s'étend vers l'est, plus loin que la civitas dont il tira son nom.

Le facteur prépondérant du Pays de Caux, envisagé au point de vue géographique, c'est sa situation péninsulaire. Cette situation le différencie des régions voisines, Vexin et Roumois, dont le rapprochent sa constitution géologique et son relief. C'est à sa position entre la Manche et la Basse- Seine qu'il doit un climat plus humide et plus doux, et une activité économique plus grande que ceux du Roumois et du Vexin.

Les limites du Pays de Caux, unité géographique, ne sont pas plus précises à l'est que celles de la contrée historique d'où lui vient son nom.

Le Pays de Caux est, grosso modo, la presqu'île triangulaire comprise entre le Havre, Dieppe et Rouen; ses caractères péninsulaires s'atténuent progressivement d'ouest en est, et l'on passe par une dégradation insensible du Pays de Caux proprement dit, qui s'arrête à la rive droite de la Cailly, au Vexin qui commence sur la rive gauche de l'Andelle.


GÉOGRAPHIE PHYSIQUE

Le Pays de Caux forme, au point de vue de la Géographie physique, un plateau presque complètement isolé.

Sur la Seine, sur la Manche, sur la vallée de Bray il se termine nettement « par une coupe perpendiculaire de la craie », c'est-à-dire par une falaise, mais au sud-est il se rattache au Vexin par une sorte d'isthme compris entre Rouen et le Pays de Bray.

Passy lui donnait pour limites, de ce côté, l'Andelle : c'est là une limite toute artificielle, car des deux côtés de cette rivière, on trouve même composition géologique et même relief. L'Andelle ne saurait donc pas plus former une limite, à ce double point de vue, que la Sainte-Austreberthe ou la rivière de Cailly.
 

En réalité, le Pays de Caux et le Vexin se confondent sans qu'on puisse tracer entre eux une limite franche ; mais pratiquement on peut admettre que le plateau cauchois se termine à l'Andelle.

Géologie.

Géologiquement le Pays de Caux forme l'extrémité nord-ouest de l'auréole crétacée du bassin de Paris. Il se compose d'un épais massif de sédiments crétacés reposant sur un soubassement jurassique et dominé par un revêtement d'argile à silex et de limon.

Ce limon, légèrement argileux, dit limon des plateaux « recouvre d'une manière uniforme toutes les parties hautes du Pays de Caux. Sa puissance très considérable aux environs d'Yerville, où elle atteint plusieurs mètres, diminue graduellement vers le nord et l'ouest, de telle sorte qu'aux environs de Saint-Valery il ne forme plus qu'une couche mince et discontinue au-dessus de l'argile à silex ».

Telle est la composition minéralogique du Pays de Caux; elle est identique à celle du Vexin, du Roumois et de la région comprise entre la vallée de Bray et la Bresle.

Ces contrées datent des mêmes époques géologiques, elles formaient jadis un seul bloc compact que des mouvements tectoniques ont ensuite divisé.

La pression latérale qui causa ces deux fractures détermina également, grosso modo et réserve faite du travail d'érosion, le relief du Pays de Caux.

Elle provoqua deux soulèvements, l'un à l'ouest, entre le Havre et la faille Fécamp-Lillebonne, l'autre à l'est, entre la falaise occidentale du Bray et les rivières de la Varenne et de la Crevon.
Sous la pression latérale qu'il subit, le Pays de Caux gondola […]
En somme il est résulté de ces divers phénomènes tectoniques et d'érosion un plateau légèrement ondulé, terminé presque partout par une haute falaise à pic et sillonné d'une vingtaine de vallées profondes et de nombreuses « valleuses » très courtes qui finissent en escarpement sur la falaise.

Il y a une inclinaison générale d'est en ouest, depuis la falaise qui domine le Bray, par 200 et même 240 mètres d'altitude, jusqu'aux falaises occidentales d'une hauteur de 100 mètres environ.

Perpendiculaire à cette première inclinaison, de chaque côté d'une ligne de faîte qui coupe le plateau d'ouest en est, du cap d'Antifer à Buchy, il existe une double pente vers la Manche au nord, vers la Seine au sud.[…] l'endroit le plus élevé du centre du Pays de Caux (206 mètres au nord d'Yerville) (65 mètres environ près de l'embouchure du Dun). 


CARTE CLIMAT  


Placé sur les bords de la Manche, le Pays de Caux doit à sa forme de presqu'île une accentuation de l'influence marine sur son climat. Considéré dans son ensemble, celui-ci possède les caractères principaux de tout climat marin : il est tempéré et humide.

La péninsule cauchoise va en s'amincissant d'est en ouest et s'élève d'ouest en est; il en résulte que la température sur la surface du plateau cauchois est d'autant moins constante que l'on s'avance vers l'est.

La majeure partie des vents qui soufflent sur le Pays de Caux, sont dus aux courants aériens qui arrivent dans la Manche, soit du sud-ouest, de l'ouest, du nord-ouest, par l'Atlantique; soit du nord et même du nord-est, par la mer du Nord. Venant de la mer ils sont toujours humides et très souvent pluvieux.

Cette diminution de la pluie d'ouest en est s'explique par la forme même de la péninsule cauchoise. Elle va s'amincissant d'est en ouest, or, c'est dans sa partie la plus étroite que l'abordent les vents les plus chargés de pluie (vents d'ouest, du sud-ouest et du nord-ouest), celle-ci reçoit donc de chacun de ces vents une quantité maxima de pluie.

Le plateau s'élargissant vers l'est, les vents du nord-ouest et ceux du sud-ouest ont chacun leur zone d'influence dominante et les pluies qu'ils apportent séparément ne s'additionnent plus; il en résulte une diminution de pluie d'ouest en est.

Le climat du Pays de Caux est, à tout prendre, un climat humide et, s'il ne pleut en moyenne que 150 jours par an, pendant 3oo jours environ les vents sont chargés d'humidité.

Hydrographie.

l'eau se dépose et forme des mares très évasées et peu profondes. En raison même de l'étendue de leur surface l'évaporation y est active et, aux époques de forte chaleur, ces mares sont souvent à sec. Pour recueillir et conserver les eaux de pluie, les habitants du plateau ont creusé des citerne s. Quant à creuser des puits on n'y pouvait songer ; les nappes d'eau souterraines in-
tarissables se trouvant en moyenne à 100 mètres de profondeur.

En résumé, au point de vue hydrographique, le Pays de Caux est divisé en deux régions bien distinctes le plateau avec, çà et là, quelques mares d'eau stagnante, souvent à sec en été les vallées arrosées par d'abondantes rivières qui tarissent très rarement.

GÉOGRAPHIE ÉCONOMIQUE

Le Pays de Caux, envisagé au point de vue économique, a pour caractéristique que l'agriculture, l'industrie et le commerce s'y sont également et harmonieusement développés.

Agriculture.

Le Pays de Caux, par sa situation, par les qualités spéciales de son sol, par la nature de son climat, convient parfaitement à l'agriculture. Celle- ci se divise en deux grandes branches la culture et l'élevage
Par son relief et par sa composition géologique, le plateau cauchois est naturellement voué à la grande culture production des céréales, des plantes industrielles, des fourrages. La fertilité, toutefois, n'est pas égale sur tout le plateau, elle dépend de la qualité de la terre végétale, de l'humus qui n'est lui-même que le produit de la désagrégation superficielle de la roche sous-jacente.

Ces divers terrains sont de valeur très inégale pour l'agriculture, mais la limite n'est pas entre eux franchement marquée.
Suivant qu'elles sont de limon, d'argile ou de craie, les terres sont dites, dans le Pays de Caux bonnes, médiocres, mauvaises, et suivant leur qualité elles sont recouvertes de bois, d'ajoncs et d'herbes ou livrées à la culture.

Aux époques gauloise et romaine, et pendant une partie du moyen-âge, la majeure partie du plateau était couverte de forêts ; des chartes nombreuses et les noms mêmes de certaines localités en font foi. Le défrichement commença dès l'époque romaine et, les « essartements », dus pour la plupart aux moines, se poursuivirent durant tout le moyen-âge, de jour en
jour plus nombreux et plus étendus.

On ne respecta les forêts que là où la pente et la nature du sol ne permettaient pas de rendre le terrain cultivable. Des immenses forêts du passé il ne reste plus, aujourd'hui, que quelques rares débris au flanc des vallées et sur la surface du plateau, là seulement où affleurent la craie et une argile trop siliceuse.

Les bois taillis, coudriers et noisetiers, dominent dans la région septentrionale, les bois de haute-futaie se rencontrent surtout sur le versant de la Seine et dans la région orientale.

Les forêts de Lillebonne, du Maulévrier, du Trait, de Roumare, la forêt Verte et la forêt d'Eawy appartiennent à cette seconde catégorie. Elles se composent pour la plus grande part des essences suivantes le chêne, l'orme, le frêne et surtout le hêtre, l'arbre des terrains calcaires. Sur le littoral les «mauvaises» terres non boisées sont couvertes d'herbe sèche et de joncs marins; au centre du plateau l'on ne rencontre pas de joncs marins mais seulement une herbe maigre qui sert de pâture à des troupeaux de moutons, de jour en jour moins nombreux.

Les « terres moyennes composées d'argile peu siliceuse amendées par le « marnage qui les « réchauffe », et les « bonnes terres » ou  « terres franches » se partagent entre la culture |23o ooo hectares) et les « masures » (43 000 hectares).

Les 236 000 hectares de terres arables représentent environ 65 % du territoire total du Pays de Caux.

Les terres consacrées à la culture n'ont pas partout une valeur uniforme, en général autant que l'on peut établir un rapport entre leur valeur réelle et leur valeur vénale leur qualité va croissant d'est en ouest.
En représentant la valeur moyenne de l'hectare de terre arable dans l'ensemble du Pays de Caux (par 100) elle est de 91,40 dans les cantons cauchois de l'arrondissement de Dieppe; de 96,90 dans celui de Rouen; de 102,90 dans l'arrondissement d'Yvetot; de 109,70 dans l'arrondissement du Havre. Les cantons marins donnent une moyenne de 103,40 ; ceux qui bordent la Seine, de 102,70 ; ceux du centre, seulement de 98. 
Pourtant le limon, la terre du centre que dans ceux de l'ouest, du nord ou du sud ; la valeur de la terre arable dépend donc principalement, toutes choses égale d'ailleurs, de la
quantité d'eau qu'elle reçoit.

Les plantes cultivées dans le Pays de Caux se divisent en céréales, cultures industrielles, plantes fourragères et prairies artificielles. 

Les diverses plantes industrielles exigent chacune des conditions spéciales de terrain et de climat qui ne se présentent pas d'une manière uniforme sur tout le plateau, leur culture est par conséquent localisée.  Les cultures industrielles se divisent en trois catégories le colza ; le lin ; la betterave sucrière ou industrielle.
Le lin, dont Pline signalait déjà l'existence dans le pays des Calètes, et qui, par sa culture et son tissage, a longtemps fait vivre beaucoup d'ouvriers dans les masures cauchoises ; le lin après avoir habitué les habitants de la région au tissage du coton, recule devant lui. 
La betterave industrielle offre, avec le colza et le lin, le plus parfait contraste tant comme résultats que comme mode de production. Leur culture est en décadence, la sienne est en progrès.


Sur la surface du plateau, au milieu des champs, se dressent, de ci delà, des lignes d'arbres droits et élancés qui limitent de toutes parts l'horizon et à distance paraissent former la lisière d'une forêt ininterrompue, ce sont les « hètrées » ou « brise-vents ».

Les pommiers auxquels le climat humide du Pays de Caux convient admirablement, parce qu'il fait grossir leurs fruits et augmente leur rendement en jus, se rencontrent un peu partout à la surface du plateau mais tendent à se concentrer dans les cours-masures. Leur culture dans les champs offre en effet un double inconvénient qui ne se présente pas dans les enclos la violence des vents fait tomber au printemps une grande partie des rieurs des pommiers plantés en rase campagne et diminue d'autant la quantité de pommes qu'ils seraient susceptibles de produire ; et d'autre part, l'ombre des arbres nuit aux moissons qu'ils abritent en les empêchant de mûrir. Dans les enclos ces deux inconvénients ne se produisent pas.
Dans la masure on élève des porcs et des volatiles de basse-cour, mais quoique plusieurs variétés de canards et de poules (canards de Duclair et poules de Pavilly) aient, dans le monde des gourmets, une certaine renommée, leur élève dépend de l'industrie des fermiers et non de rapports directs avec les facteurs géographiques de la contrée.

Tout au contraire l'élevage du gros bétail, qui se pratique dans les vallées, dépend des conditions géographiques. Grâce à leur constitution géologique imperméable et à l'humidité permanente qu'y entretiennent le voisinage de la mer et surtout les rivières qui les irriguent, les vallées cauchoises sont par excellence un pays d'élevage.

Les pâturages naturels du Pays de Caux se divisent en trois catégories les deux premières se partagent la vallée de la Seine et les basses vallées de ses affluents, la troisième comprend les vallées des rivières de la Manche et les parties moyenne et supérieure des vallées des affluents de la Seine.
Dans la basse vallée de la Lézarde, dans celle de la Scie, de la Sainte-Austreberthe et de la Cailly, voire même à Vittefleur et à Palluel, le long de la Durdent, les cultures maraîchères sont du meilleur rapport les cressonnières de Veules sont renommées.

Industrie.

L'industrie est aussi florissante que l'agriculture. Elle est en grande partie localisée dans les vallées où les rivières lui fournissent l'eau, son indispensable aliment soit comme force motrice sous forme d'eau courante ou de vapeur, soit simplement pour les lavages.

Au point de vue de l'origine géographique des matières premières qu'elles emploient, les industries cauchoises se divisent en industries dont les matières premières proviennent du Pays de Caux lui-même, et en industries dont les matières premières sont exotiques.

A l'époque romaine et au moyen âge on tirait le fer des argiles ferrugineuses du plateau. Les buttes ferrières ou « faisières » de Saint-Léonard, près de Fécamp, de Bellencombre, de Montreuil-en-Caux et de Bosc-le-Hard, ne sont que des amas de scories des argiles traitées pour l'extraction du fer.

Le seul combustible que renferme le sol cauchois, c'est la tourbe des vallées de Lillebonne, de Caudebec et de Saint-Saëns; l'exploitation annuelle n'atteint pas 1,000 tonnes.

A la surface du plateau, les dépôts meubles sur les pentes, les sables et graviers des terrasses, l'argile à silex fournissent le silex pour l'empierrement des routes et les grès de pavage. La craie blanche à silex est exploitée pour la fabrication de pierres de taille. Cette même craie blanche, la craie marneuse et l'argile à virgule donnent la chaux grasse et la chaux hydraulique.

Mais de toutes les extractions minérales du Pays de Caux la plus importante est celle des argiles pour la fabrication des tuiles, des briques, et même quand elles sont assez pures (argile plastique) pour celles des poteries.

Çà et là, à la surface du plateau et dans les vallées, au Havre, à Caudebec, à Yvetot, à Buchy, à Auffay, etc., on aperçoit sur le bord des routes et au milieu des champs des carrières de terres jaunes et rouges près desquelles se dressent de hautes cheminées ou de simples fours ronds en forme de dômes ce sont des tuileries, des briqueteries et des poteries.

Les manufactures et usines sont plus nombreuses dans ces dernières que dans celles qui aboutissent à la Seine mais par la nature même de leurs industries et par leur développement commercial, les plus importantes sont situées dans les vallées qui débouchent sur la Seine, principalement dans celles de la Lézarde, de la Bolbec, du Caudebec, de la Sainte-Austreberthe et de la Cailly.

Les grandes industries cauchoises se divisent en deux catégories celles qui tirent du pays même leurs matières premières celles qui opèrent sur des matières premières d'origine étrangère : telles l'industrie cotonnière dérivant pratiquement de l'industrie linière, telles les raffineries et les métallurgies.
La présence de l'industrie des cuirs dans le Pays de Caux s'explique naturellement par l'abondance des matières premières le Pays de Caux et
la région voisine, le Bray, étant pays d'élevage, l'abat fournit le cuir, les forêts de chêne donnent le tan et les rivières l'eau courante nécessaires à la tannerie. 
La corroierie et la mégisserie, qui dérivent immédiatement de la tannerie, occupent un assez grand nombre de manufactures spécialement à Caudebec et dans les vallées septentrionales, à Dieppe, à Auffay, à Bacqueville, à Cany, etc. Mais plus encore qu'un pays d'élevage, le Caux est un pays de céréales, aussi les minoteries sont-elles nombreuses dans les vallées (130 environ) il y en a plus de 20 dans la vallée de la Lézarde, dont 12 à Montivilliers, 12 dans les vallées de Ganzeville et de Valmont ; Bolbec en possède 8, Héricourt 7, etc. Il  n'y a si petite rivière qui ne possède la sienne sur la rivière de Veules qui n'a que 1 kilomètre de longueur, on en trouve 2 ou 3. Le grand nombre des rivières explique seul un fait en apparence paradoxal sur le plateau cauchois balayé par les vents, on ne rencontre presque pas de moulins à vent; personne n'est assez éloigné d'une rivière pour ne pouvoir porter son blé à la minoterie.

Une industrie qui dérive également de la culture des céréales est celle de l'amidon; elle tient peu de place dans la région, il n'y a qu'une seule amidonnerie à Lillebonne.

La betterave sucrière, dont la culture est prospère dans la partie orientale du Pays de Caux (cantons de Tôtes, Yerville, etc.), forme la base de l'industrie sucrière et de la distillerie dans notre région. Les distilleries sont pour la plupart confinées dans les grandes villes, à Rouen et au Havre, pourtant, depuis quelques années, elles commencent à apparaître sur le plateau.

L'industrie cauchoise de beaucoup la plus importante est l'industrie textile. Elle donne lieu à une série considérable d'opérations pour les transformations successives et l'appropriation de la matière brute aux besoins de la consommation » et occupe un très grand nombre de personnes.
Elle se divise en deux industries distinctes: l'industrie linière dont la matière première est indigène; l'industrie cotonnière qui importe la sienne de l'étranger, principalement de l'Amérique.

Suivant le témoignage de Pline, aux temps même de l'indépendance gauloise, les Calètes cultivaient déjà le lin et le tissaient.

La transformation des fibres du lin en toiles exige 5 opérations successives, dont les 2 dernières seules (filage et tissage) méritent véritablement le nom d'industries.

Jusqu'en 1785 on fila uniquement à la quenouille et au rouet. A cette époque, les premières broches mécaniques arrivèrent d'Angleterre ; aujourd'hui les usines de Barentin (filature Badin, 10 000 broches), de Denestanville (3 000 broches), de Gueures, de Pavilly et d'Avremesnil préparent pour le tissage la filasse linière.

Comme pour la filature il y a deux modes pour le tissage le tissage à la main, « au métier » opéré par « les cacheux » dans les masures du plateau et le tissage mécanique dans les usines des vallées. Peu à peu le tisserand à la main disparaît, incapable de soutenir la concurrence des usines de tissage. Au commencement du siècle les métiers à la main étaient nombreux dans les cantons de Goderville, de Criquetot et de Fécamp, il n'y en a plus un seul aujourd'hui. Luneray, Yvetot, Brachy et Doudeville continuent seuls à fabriquer des toiles écrues, les toiles à matelas et les coutils.
Au commencement du siècle les métiers à la main étaient nombreux dans les cantons de Goderville, de Criquetot et de Fécamp, il n'y en a plus un seul aujourd'hui. Luneray, Yvetot, Brachy et Doudeville continuent seuls à fabriquer des toiles écrues, les toiles à matelas et les
coutils.

L'industrie linière toute entière recule devant l'industrie cotonnière. Le coton apparaît dans le Pays de Caux au début du 16e siècle, et les habitants prirent l'habitude de le filer concurremment avec le lin, mais pendant un siècle cette nouvelle industrie végéta. A partir du 17e siècle les arrivages d'Amérique se firent réguliers ; dès lors le filage, le tissage et les industries annexes blanchisseries, teintureries, fabrication d'indiennes et de rouenneries, se développèrent successivement.

Quant à la fin du 18e siècle les machines à filer le coton, analogues aux broches pour la filature du lin, firent leur apparition, il y avait 20 000 fileuses à rouet dans le Pays de Caux.

Aujourd'hui presque tout le coton se file dans les usines. Celles-ci, sauf une vingtaine dans les vallées septentrionales, une dizaine dans la vallée de Bolbec, sont centralisées dans les environs de Rouen, à Rouen même, dans la presqu'île qui lui fait face (Oissel, Quevilly, Sotteville) et
dans les vallées de la Sainte-Austreberthe, de la Cailly et du Robec. Le tissage, la fabrication des indiennes et des rouenneries sont des industries plus particulièrement cauchoises […]  à Bolbec, à Doudeville, à Luneray, à Yvetot, à Bacqueville, à Saint-Laurent on tisse encore au métier à main le calicot ou le mouchoir de filé cru. La rouennerie, tissée avec des fils préalablement teints, se fabrique aussi à la main dans l'arrondissement d'Yvetot.

La fabrication des indiennes appartient à l'industrie des vallées, car l'impression des dessins coloriés exige la présence de l'eau, elle est localisée à Bolbec et dans les vallées du Robec et de la Cailly.

La Pêche : Dans l'activité économique du Pays de Caux, la petite et la grande pèche jouent un rôle important.

La pêche côtière est la ressource naturelle des simples localités maritimes et des ports secondaires du Pays de Caux : Au Havre, à Etretat, à Yport, à Fécamp, à Saint-Valery et à Dieppe les barques à voiles sortent du port ou quittent la plage pour pêcher la marée qui approvisionne les Halles de Rouen et de Paris. Fécamp et Dieppe arment pour la grande pêche. 

Le commerce spécial du Pays de Caux comprend à l'importation, les matières premières nécessaires à ses industries coton, peaux, minerais, houille, charbon; à l'exportation du blé, du bétail, des pommes, des légumes, des œufs, du beurre à destination de l'Angleterre; des tourteaux de lin et de colza pour notre département du Nord, enfin les produits manufacturés de son industrie cuirs tannés, articles de corroierie, sucres bruts et raffinés, toiles et cotonnades qu'il expédie en tous pays et surtout dans nos colonies.

Pour favoriser ce double trafic on a construit, en raccordement avec les grandes lignes du Havre à Paris et de Dieppe a Paris par Rouen, des lignes dites d'intérêt local qui relient les localités industrielles des vallées avec les ports du Havre, de Dieppe et de Rouen. 
L'emplacement des ports situés sur la périphérie de la péninsule cauchoise Rouen, Dieppe, le Havre, s'explique naturellement : Rouen s'est établi sur la Seine immédiatement en aval des îles qui embarrassent ce grand fleuve au confluent des deux rivières de la Cailly qui remonte vers le Pays de Caux et du Robec qui est une voie de pénétration vers le Bray et le nord de la France.

Dieppe est situé à l'embouchure de la plus large vallée cauchoise et de la rivière la plus abondante, la rivière d'Arques, qui réunit les eaux de la Béthune et de la Scie. 
A l'embouchure de la Seine, Le Havre remplace, comme port maritime, depuis le milieu du 16e siècle, Lillebonne et Harfleur qui, successivement pendant l'antiquité et le moyen âge, ont été les grands ports de guerre et les grands ports de commerce de la Gaule romaine et de l'ancienne France.
Rouen et le Havre réunis par la Basses-Seine, dont le lit a été considérablement amélioré depuis vingt ans, sont notre Manchester et notre Liverpool. 
L'activité agricole, industrielle et commerciale du Pays de Caux nous permet de prévoir que la population doit y être nombreuse.

Et, en effet, les 310,000 hectares du Pays de Caux renferment une population totale de 430 000 habitants, 230 000 ruraux, 200 000 urbains.

C'est que la fertilité du plateau augmente dans le même sens avec l'influence grandissante des caractères maritimes du climat. Nous retrouvons ici l'influence de la forme péninsulaire du Pays de Caux.

La population rurale n'est pas agglomérée dans de grands villages mais répartie dans une infinité de hameaux et lieux dits, réunis à trois, quatre, cinq ou même plus pour former une commune. Sur 14 chefs-lieux de canton à la surface du plateau, Yvetot et Doudeville sont seuls des communes urbaines.

Sur ce plateau en grande partie imperméable les habitants n'éprouvent pas le besoin de se réunir. Chaque ferme possède sa mare ou sa citerne qui lui fournit l'eau indispensable et, en cas de sécheresse, on va « pucher » aux rivières.

Les 200,000 âmes de populations urbaines sont groupés dans 2 grands centres à la fois commerciaux et industriels (Le Havre avec 13o,ooohab., et Dieppe avec 23,000).

Les localités industrielles  de Bolbec, 12 ooo hab. ; Lillebonne, 6 000 ; Montivilliers , 5 ooo ; Barentin, 4,5oo ; Pavilly, 3 000 ; Montville, Auffay, etc., se partagent plus de 5o,ooo habitants.

Depuis plus d'un demi-siècle on a émigré du plateau dans ces différents centres Vers 1840, l'arrondissement d'Yvetot atteignait une population de 143 000 âmes ; il n'y en a plus aujourd'hui que 96 000, c'est donc en 60 ans une diminution de plus d'un tiers.

La dépopulation du plateau tient une autre cause, elle tient aux progrès même de l'industrie.

Il n'y a donc pas dépopulation proprement dite mais déplacement de population dans les limites mêmes du Pays de Caux.
 
La population dans son ensemble a augmenté depuis le commencement du siècle de 3oo ooo âmes à peine, en 1806 ; elle atteint aujourd'hui 450 000, soit augmentation d'un tiers. »

Georges Lecarpentier

 

Aperçu des différentes cartes representant le pays de Caux à travers les siècles passés

 

 

 

 

 

www.violoneux.fr

 

 

Le Pais de Caux : geheugen.delpher.nl

Une des premières descriptions du pays de Caux  a été rédigée par Thomas Corneille en 1707.

Un des premiers témoignages  consignés du cidre du pays de Caux se trouve dans le Dictionnaire universel, géographique et historique. T. 1, A-D / , contenant la description des royaumes, empires, estats, provinces, pays, contrées, deserts, villes, bourgs, abbayes, chasteaux, forteresses, mers, rivieres, lacs, bayes, golphes, détroits, caps, isles, presqu'isles, montagnes, vallées ... à consulter sur ce lien : gallica.bnf.fr

Voici en 1708,  la première aire géographique du cidre du pais de Caux  définie par le Royaume de France, décrite par Thomas Corneille. [...].

En 1685, Thomas Corneille produisit  un Dictionnaire des termes des arts et des sciences en complément du dictionnaire de l’Académie puis à un Dictionnaire universel géographique et historique en 1708 avec privilège de sa majesté Louis XIV.

«Caux. Pays de France en Normandie, l’un des quatre qui composent le vaste Diocèse de Rouen, en latin Calentis Ager. Il est situé entre la Seine, l’Océan, la Picardie, le Bray & le Vexin Normand, & a pris son nom des anciens Caletes qui l’ont habité.

Il comprend les ports de mer & villes de Caudebec, d’Harfleur, du Havre de Grâce, de Fécamp, de Saint Valery, de Dieppe, de Tréport, d’Aumale, de la Ville d’Eu et de Neufchâtel. Il y a aussi Montivilliers & Lillebonne dans les terres. Ce Pays est à peu près de forme triangulaire, ayant en tête un Cap ou Promontoire, qui est une côte avancée dans la mer proche du Havre, & qu’on appelle Cap ou Chef de Caux. Sa plus grande largeur est de seize lieues, depuis la banlieue de Rouen jusqu’à la ville d’Eu & au Tréport, & dans cette étendue, comme dans le cœur du Pays, & même vers la côte de la mer, on voit quantité de vastes campagnes qui produisent toutes sortes de bons grains, des légumes, des lins & et des chanvres, de la navette ou rabette dont on fait l’huile à brûler, & pour d’autres usages. D’ailleurs on voit non seulement dans les vergers, & dans les cours des particuliers, mais aussi dans les chemins & à travers les campagnes, grand nombre d’arbres à fruits, pommiers & poiriers dont on fait du cidre & du poiré, qui servent de boisson à ceux du pays, parce qu’étant un peu froid, il n’est point propre à la vigne. [...] Le Pays de Caux comprend trois Duchez, Longueville ; Aumale et Etoutteville, dont le premier s’est éteint ; six comtés, Tancarville, Lillebonne, Maulévrier, Claire, Dieppe & Eu ; cinq Marquisats, Graville, Cani, Hocqueville, Gremonville & Hermeville ; & environ trente baronnies, pami lesquelles on compte Bec-Crespin, Cretot, Fécamp & Vittefleur. Le même Pays a plusieurs Châtellnies ; cinq baillages ; […] quatre Eglises Collégiales ; seize Abbayes, dont celle de Jumièges, de Saint-Wandrille & de Fécamp […] Les rivières qui arrosent le Pays de Caux sont la Paluel, la Sanne, la Scie, l’Arques & l’Eaune, qui se déchargent dans l’Océa.n, dit la Manche ou Mer d’Angleterre. La Brêle qui sépare le diocèse de Rouen de celuy d’Amiens s’y va rendre aussi ; mais la Laizarde, l’Enne, la Bapaume & quelques autres, tombent dans la Seine.» [Corneille, 1708]

Une carte du pais de Caux  du début du 18e siècle est répandue, carte que j'ai trouvé exposée encadrée au Musée de Musée d'Histoire de la Vie Quotidienne, il traite de la vie quotidienne des habitants de Petit-Caux, et plus généralement des Français, de la fin du XIXe siècle à la fin du XXe ... Allez découvrir ce musée où vous verrez cette carte que l'on peut également consulter via ce lien : gallica.bnf.fr

Une autre figure le pays de Caux en 1716 in : gallica.bnf

De cette même époque je vous propose cette vue d'Eu, observez la légende

Vue du château de la ville d'Eu, en Normandie dans le Pays de Caux, 1702

Extrait du site : www.rotomagus.fr

une autre figure le pays de Caux en 1716 in : gallica.bnf.fr

 

 

Plusieurs analyses se sont donc répandues depuis le 18e siècle géographes, historiens, spécialistes du paysage, architectes, toponymistes, topographes, cartographes, auteurs…  J’ai choisi pour commencer de m’appuyer sur plusieurs documents.

Celui de Alain Roquelet et Daniel Fauvel tout d’abord ; celui de David Gaillard [1]  se référant à  Mensire [2] (critères historiques et géographiques) mais aussi sur celle de Sion (1909) sur des critères géographiques, paysagers et sociaux, de Ridel (2003) sur des critères historiques, toponymiques et paysagers ;  de Sabine Derouard (1998) aux critères, aux contours proches de celle de Mensire cartographiés dans l'ouvrage :  Clos-masures et paysage cauchois, CAUE 76, Editions point de vues, 2008. Et puis Sion ainsi d'autres documents publiés par la D.R.E.A.L.[3]. l'ARHEN ; le CBNBL  de Bailleul ; Georges Dubosc - in :  Jumieges.free.fr


[1] Le clos-masure en pays de Caux : vers une inscription au patrimoine mondial de l’Unesco ? David Gaillard

[2] Le Pays de Caux : son origine, ses limites, son histoire / Raymond Mensire, Livre, Mensire, Raymond, Edité par Ed. du Bastion. s.l. – 1984 : En effet Raymond Mensire situe la frontière est du pays de Caux, partant du Trait vers Carville ; Freville ; limite Est de Bouville, Mesnil Panneville, Limésy ; limite Ouest de Butot et de Grigneville, et remontant vers Dieppe jusqu'aux falaises aval de Dieppe.

[3] Direction Régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement (DREAL) Normandie est un service déconcentré de l'État français.

Progressons au 19e  siècle

Mais avant de considérer celle décrite par la DREAL, il est intéressant de lire la perception de Jean Canu :  Voir le lien : www.jstor.org

« Né à Rouen d'un père depuis longtemps établi à Rouen et d'une mère normande, élevé à Rouen, passant aux portes de Rouen la plus grande partie de son existence, Flaubert acquit peu à peu, et tout naturellement, une connaissance intime et profonde de cette ville et de ses environs. Ses relations de famille, ses amitiés, ses voyages de vacances à Trouville et à Pont-l'Evêque, le mirent en contact avec d'autres aspects de la terre normande, mais son expérience prolongée des hommes et des choses n'a guère dépassé les limites du pays de Caux, ce plateau crayeux qui tombe par de blanches falaises, au Sud sur la vallée de la Seine, au Nord-Ouest sur la Manche au Nord-Est sur le pays de Bray et la Picardie, à l'Est enfin sur la vallée de l'Andelle, réalité géographique si nettement différente  des régions environnantes qu'elle formait dès avant la conquête romaine une unité distincte, et qu'elle garde aujourd'hui encore sa personnalité. Avant que d'être normand, Flaubert est cauchois, et c'est une couleur cauchoise qu'il a donné à Madame Bovary. »

Jean Canu rapporte également une remarque faite par Flaubert vis-à-vis des cauchois « […] un enterrement qui lui montre de braves Cauchois moins soucieux de leur deuil que de leurs arbres fruitiers.»

 

« Le Pays de Caux est globalement composé d’un immense plateau vallonné, entaillé de vallées et situé entre la Manche et la vallée de la Seine. L’habitat caractéristique est celui des clos-masures, isolés ou regroupés en villages et en bourgs. Le plateau se divise lui-même en six parties. Les critères de différenciation des paysages s’appuient sur la proximité de la mer et l’organisation de l’habitat : Le Caux maritime forme le premier ensemble. Le long de la côte de la Manche, sur une largeur de 10 km environ, l’influence maritime se perçoit avec ses vents permanents et un habitat plus rare, privilégiant les replis des petites vallées. »[DREAL Normandie, 2018]

A consulter les cartes via ce lien où sont décrites les 9 unités de paysage :

www.normandie.developpement-durable.gouv.fr

 


[1] Bouloche, ou boulo - Pâtisserie cuite au four, faite d’un fruit entier (pomme ou poire) entouré de pâte. » [Bouchard-Le Scour, 1981] A certaine occasion ma mère nous faisait des bouloches aux poires de coq. Petit je ne prenais pas mon pouce mais je boulochai ma couverture en laine. Plus tard elle me disait arrête de boulocher.

 

« Le Pays de Caux typique est celui qui s’étend sur le plateau limoneux, balayé par les vents d’ouest qui apportent des précipitations supérieures à celles de la vallée de la Seine et du Bray. Les limites orientales ne passent pas par une ligne bien précise : c’est plutôt une zone où s’estompent progressivement les fondements géographiques, historiques et culturels qui caractérisent le Pays de Caux. » [Fauvel-Roquelet, 1978]

En 1978, M. Daniel Fauvel était Professeur du service éducatifs des Archives de la Seine-Maritime. Il est Docteur en histoire. - Professeur agrégé à la retraite, aujourd’hui membre de l’association des amis de Flaubert et de Maupassant.

Raymond Mensire a délimité le pays de Caux   d’un côté par la mer et de l’autre suivant schématiquement une ligne allant de Dieppe suivant le plateau sommital vers Bosc-le-Hard, bifurquant vers Limésy rattraper la Seine au Trait.

« Le Pays de Caux est un cap massif s’enfonçant dans la mer comme l’avant du grand navire qui s’appelle la France. […] La question de la limite Est du Pays de Caux serait donc fort controversée et même à peu près inextricable […]  la limite du Pays de Caux passe sur les hauteurs dominant tout le cours de la Scie, à l’Est, depuis son embouchure jusqu’à sa source, pour de là , suivre approximativement la ligne de partage des eaux entre les sources de la Scie et celles de l’Austreberthe, longer cette rivière à l’Ouest et s’en écarter progressivement pour aboutir à la Seine  entre Caudebec et Duclair. »

Le site de l'inventaire de la flore sauvage de la Haute-Normandie présente le pays de Caux le dissociant du Petit Caux, toutefois sur la carte à laquelle ils se réfère  les deux sont associés.

A consulter sur ce lien : digitale.cbnbl.org

Pays de Caux

Le Pays de Caux s’étend au nord de la Seine jusqu'aux falaises littorales de la Manche. Il occupe la plus grande partie du département de la Seine-Maritime. C’est un plateau crayeux, recouvert en grande partie par des limons fertiles. Il est découpé par un certain nombre de vallées de fleuves littoraux, de valleuses ou de rivières affluentes de la Seine. Les paysages sont dominés par les grandes cultures. Les clos-masures (cours de fermes ceinturées de talus plantés de hêtres, de chênes et parfois maintenant de peupliers), donnent au paysage de ce pays un caractère relativement arboré. La cour enherbée est généralement plantée de pommiers à cidre. Le pays de Caux est célèbre pour son littoral et ses falaises de craies dont la couleur blanche est à l’origine de son appellation de "Côte d'Albâtre".

Petit-Caux

Le Petit-Caux est une région voisine du Pays de Caux. Situé à l’est de Dieppe elle constitue une bande littorale d’environ 15 km de large pour atteindre la vallée de la Bresle. Les paysages sont assez semblables à ceux du pays de Caux (grandes cultures et clos-masures) auquel il est parfois rattaché.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ancien verger de Côteau à Saint-Clair-sur-les-Monts © Pascal Levaillant 2020

Alignement d'arbres d'une masure à Pavilly © Pascal Levaillant 2010

Masure cauchoise à Allouville-Bellefosse © Pascal Levaillant 2012

Masure cauchoise près de Fauville-en-Caux © Pascal Levaillant 2021

Masure cauchoise près de Fauville-en-Caux © Pascal Levaillant 2018

Verger cauchois près d'Yvetot en hiver © Pascal Levaillant 2020

René Musset rapporte ce que sont pour lui les limites du pays de Caux. 

Voir le lien : www.persee.fr

« On applique aujourd'hui communément le nom de Caux, non au territoire qui fut celui des Calètes, mais à toute la partie de la Normandie au N. de la Seine et à l'W. de l'Andelle, moins le Pays de Bray : on saisit l'influence de la division départementale (la Seine- Maritime se limite pratiquement à l'Andelle inférieure), mais l'influence aussi de traditions plus anciennes. La pression de l'enseignement primaire et des ouvrages publiés fait qu'aujourd'hui les gens du pays eux-mêmes tendent à admettre un Caux au sens large, mais avec des résistances quelquefois : les habitants du N.-E. de la Seine-Maritime ne se disent pas cauchois. Ce dernier coin de terre, de fait, est original : il est une transition vers la Picardie, à laquelle il ressemble par deux traits, la présence de longs cours d'eau parallèles, le langage qui fait passage du parler normand au parler picard. On a pris l'habitude d'appeler ce coin de terre le Petit Caux : cette appellation n'a rien de populaire et est une invention des doctes (au haut Moyen Age ce fut le pagus Tellavus, le Tallou, nom oublié, qui fut usité seulement du 7 e au 11e siècle).» [Musset, 1961]

Jules Sion témoigne de la singularité du Petit-Caux, citant Le Boullenger (1807) :

« Suivant la côte d'Étretat au Tréport, l’ingénieur Le Boullenger notait en 1807 que vers Saint-Martin-en-Campagne et Criel, on ne retrouve plus les aspects du Caux : « les masures deviennent plus rares ; on ne cultive plus que par assolements, c'est-à-dire que tout le village sème ses avoines du même côté et contiguës, ses blés et ses trèfles de même ; il en résulte des champs immenses une beauté trop uniforme » ; et cette méthode était aussi connue dans les cantons d’Eu, de Blangy, d’Aumale, d’Envermeu, de Longueville, de Tôtes, de Bellencombre »

Jules Sion, Les paysans de la Normandie orientale, pays de Caux, Bray, Vexin normand…1909.

 

Vous pourrez observer des structures végétales subsistantes à Régnétuit,

commune d'Avesnes-en-Val au   Petit-Caux, vu par la [DREAL, Normandie, 2018]

www.normandie.developpement-durable.gouv.fr

Juste à propos du parler cauchois

 

Considérant le parler cauchois, la revue "parlers et traditions populaires de Normandie

celui de la région du Havre

celui de la région d'Yvetot-Yerville

celui de la région de Dieppe

 

Extraits

 

A propos de la diversité des parlers cauchois, mes parents disaient que le patois d'un village différait du village voisin en prenant exemple d'Hautôt-Saint-Sulpice  et d'Etoutteville dont ils étaient originaires.

Cette distinction ne m'a jamais trop étonné d'autant que dans d'autres contrées du pays de Caux, je l'(ai entendu.

Cette revue le confirme en citant trois principales zones de parlers cauchois.

Il disent ceci  en remarques préliminaires : 

" On trouvera dans les pages qui suivent quelques indications sur le parler cauchois de la région de Dieppe. Il faut savoir, en effet, qu'il a plusieurs parlers cauchois ; en gros : celui de la région du Havre (Fécamp-Bolbec), celui de la région d'Yvetot-Yerville ; et celui de la région de Dieppe, réparti à peu près sur les cantons de Saint-Valéry-en-Caux, Fontaine-le'Dun, Bacqueville, Offranville, Longueville-sur-Scie, Tôtes et Envermeu. (A Dieppe même, les milieux populaires parlent un français approximatif, émaillé de quelques expressions cauchoises et d'argot du Pollet, le vieux quartier du port).

Il existe entre ces parlers de nombreuses ressemblances. Il y a une sorte de fonds commun du cauchois, notamment pour la prononciation des r et des l, dans le fait du é qui devient è ; mais tant dans la pronociation que dans le vocabulaire, les différences sont réelles" 

In : Le parler cauchois de la région de Dieppe, N° 52, Parlers et traditions populaires de Normandie, 1981.

 

Le fascule 2 du parler cauchois de la région de Dieppe est sorti peu après le décès de l'abbé Hue, le 4 octobre 1981.

Son étude sera publiée en intégralité sur les numéros 53-54- 55 et 56. En hommage à sa mémoire et en hommage de son profond attachement au peuple cauchois dont il est issu (in : p. 45 du n° 54, 1998)

dans la troisième partie du parler cauchois on peut lire 

Au jardin :

Des fruits euribles (précoces)

eul'pêizié : le poirier

locher les pommes (les faire tomber)

Eul' fossé (le talus) qui entoure fermes et maisons haut parfois de 2 mètres, surmonté de hêtres et de chênes. C'est un aménagement très propre au pays de Caux.

Entre eux (j'insiste bien) ils se traiteront de petzouille "paysan" mais prière de ne pas s'y risquer.

J'ai entendu dire, en présence de faits bizarres : y a du berquer là-dessous (les bergers passaint pour savoir des choses)

Leun'nay pour LUNERAY

Bacqueville en Caux : Bâk'ville

Offranville : Suffranville

Auppegard : Eul'pougar

Le Havre : Eul' Rhâv avec un h très aspiré

Fécanais pour Fécampois

Les Valdiquais pour les Valeriquais

Dans le N° 53 du parler cauchois

N'avei /é/ que des crèques à manger, "n'avons rien du tout" Les crèques sont des petites baies rouges des épines.

---------------------

Le gros cidre " le pur jus" mis en bouteille

Cheus nous, on ne beit/è/ point de l'iâo : ést du pissâ de guernouille

------------------------------------------------

Dans le N° 56 du parler cauchois

La vague s'est prônée, elle a avalé une pomme tombée dans le pré, et elle s'est engobée " étouffée.

Un pot de cidre "deux litres"

 

 ​

Le pays de Caux : un terroir, un sol, un sous-sol sur lequel tout pousse : les sols d’un plateau calcaire sur lequel ont été déposés les limons depuis des millions d’années

"Le Pays de Caux est globalement composé d’un immense plateau vallonné, entaillé de vallées et situé entre la Manche et la vallée de la Seine. » [DREAL, Normandie 2018]

Depuis la glaciation du Würm [Futura-Sciences] le loess a été déposé sur ce plateau et celui voisin de l’Eure, pour atteindre plusieurs mètres.

« Pendant la glaciation du Würm, la Haute Normandie s'est trouvée dans la zone balayée par les vents partant de façon plus ou moins rayonnante d'un anticyclone centré en permanence plus au nord-est. C'est dans ces conditions que les plateaux de la région se sont trouvés recouverts par une couche de loess (limon des plateaux) [www.futura-sciences.com] qui atteint souvent plusieurs mètres. Aujourd'hui complètement décalcifié, ce dépôt constitue un sol légèrement acide, qui, moyennant un amendement calcaire, confère à une grande partie de l'Eure et de la Seine-Maritime une richesse agricole exceptionnelle. »

« Le pays de Caux est le pays le plus fertile que je connaisse au monde Ce qu’on appelle la grande agriculture y est porté à la perfection. L’épaisseur de son humus, quina en quelques endroits cinq à six pieds de profondeur, les engrais que lui fournit le fond de marne sur lequel il est élevé, ceux qu’il tire des plantes marines de ses rivages, qu’on répand à sa surface, concourent à le couvrir de superbes végétaux. » [Bernardin de Saint-Pierre, Voyage de Normandie, 1775 ; Pouchain, 2015] 

« Les limons du Caux, et surtout ceux du Vexin, passent cependant pour l’une des meilleures terres à blé de la France. Arthur Young (17871789) admirait la fertilité des « loams » qu'il traversa de Rouen au Havre » [Sion, 1909] 

A la même époque, dans les années qui suivirent  la Révolution Française, De la Morinière, l'un des fondateurs de la Société d'Émulation de l'Agriculture, du Commerce et des Arts de la Seine-Inférieure écrivait dans son essai sur le département de la Seine-Inférieure : il propose un tableau où cette marne abonde  dans de grandes proportions plus qu'ailleurs : du simple au double :  le district d'Yvetot vis à vis du district de Dieppe suivi de celui de Cany. 

« On emploie la marne dans tous ces districts maritimes pour fertiliser la terre. Cet usage date de loin, car il est question dans les anciennes loix des français, des règles à suivre pour l’emploi de la marne. Elle se trouve à des profondeurs très inégales. Les marneurs prétendent qu’elle est disposée par pyramides sous la terre, de sorte qu’on est souvent obligé de faire les frais de plusieurs marnières, avant d’en trouver une bonne […] » [De la Morinière, 1785]

Les limons et lœss : qualité des limons et de l’humus originel venu des forêts primaires.

Un milieu en harmonie entre, limon, marne et humus propice à une croissance végétale remarquable

« Les paysages agricoles sont très ouverts sur les plateaux couverts de limons fertiles et profonds favorables aux grandes cultures (blé, betterave, lin) […]  Les formes d’humus sous forêt indiquent un processus de décomposition des litières ralenti en raison de la relative acidité du milieu : - 23 % de la surface de forêt présente un humus de forme moder ou hémimoder ; - 4 % des humus sont de forme dysmoder. Cependant 61 % des humus ont un fonctionnement meilleur : formes oligomull à dysmull (30 %) ou eumull à mésomull (31 %). Les humus sont carbonatés sur 13 % de la surface de forêt de production. » [inventaire-forestier.ign.fr]

La Géologie du pays de Caux est favorable aux grandes cultures sur son territoire – plus tardivement aux pommiers.  

« Vigarié (1969) a bien montré l'importance des sols : « Le Cauchois naît dans le limon, vit dans le limon, travaille dans le limon et meurt dans le limon ». Le Caux ne forme cependant pas une « table » monotone ; il est au contraire entaillé par des vallées drainées. »[Vivier-Douyer, 1985]

Le Pays de Caux a des limites multiples si on contaste toutes les études réalisées depuis la cartographie romaine qu’elles le soient administrativement, géographiquement, historiquement, géologiquement, patrimonialement…

 

 

 

Voici une des limites et contours du plateau du pays de Caux : en orange le plateau sommital, en blanc correspond les vallées littorale et Seine du pays de Caux, en noir la vallée de Seine d'un côté ; et à l'est la vallée de l'Andelle ; au nord-est la boutonnière de Bray : plateau et vallées ; d'après une carte éditée en noir et blanc, colorisée par mes soins, m’inspirant d’une des cartes éditées dans le BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ BOTANIQUE DU CENTRE-OUEST, NOUVELLE SÉRIE, TOME 20 -1989 1990, avec l’aimable autorisation de René Guéry,  éminent botaniste seinomarin membre de cette société.

On s'aperçoit partant  vers le nord des Authieux-Port-Saint-Ouen  vers Buchy, et glissant à l’ouest  vers Tôtes, Yerville, Yvetot, Fauville, Goderville, Sainte-Adresse en pointe de Caux on voit que la ligne de partage des eaux réunit ce plateau qui de cette ligne suit de part et  d'autres les vallées vers la Manche  - Etretat, Fécamp, Saint Valery-en-Caux, Veulettes, Veules les Roses, Saint-Aubin-sur-Mer,  Quiberville, Pourville et Dieppe -  et les autres vers la Seine : Gonfreville l'Orcher,  la Cerlangue, Triqueville, Villequier, Sainte-Marguerite-sur-Duclair, Hénouville, Bois-Guillaume, Bihorel.

Sable rouge argile à silex, issu d'une poche en affleurement d'un talus à Yvetot © Pascal Levaillant 2020

 

 

 

Le pays de Caux : un terroir, un climat spécifique sous deux influences maritimes, celle de l'estuaire de la Seine et de l'autre la Manche.

La proximité de l’air marin et de l’influence maritime jusqu’ à Rouen comme un atout car la température océanique atténue les fortes gelées

Les conditions climatiques sont de type océanique : « Le Caux  et les plateaux voisins sont des régions où la chaleur est douce et égale, où les extrêmes sont rares et relativement faibles. Ils doivent la constance de leur température au voisinage de la mer qui, s’échauffant et se refroidissant moins vite que la terre, rafraîchit l’air l’été et l’attiédit pendant la mauvaise saison. Ce caractère est d’autant plus net que, à altitude égale, une station est moins éloignée de la mer. Du Havre à Rouen, il n’y a pas 75 kilomètres à vol d'oiseau, et pourtant le climat de Rouen est déjà moins soumis aux influences marines, moins régulier. […] Comme les écarts de température qu'entraînent, soit l’altitude, soit la distance de la mer, ne dépassent pas 1°,5 d’un point à l’autre de notre région, les dates des travaux agricoles ne varient que d’une ou deux semaines. » [Sion, 1909]

Le vent et leurs forces sont des contraintes et la pluie demeure un comme avantage parce que la mare permet de conserver l’eau.

 

La belle et grande mare du Plain Bosc à Etoutteville qui a été sauvée, curée et remise en eau par mes cousins. Elle sert à préserver à retenir l'eau de la plaine. Un refuge de biodiversité.

 

Le climat et la prédominance des vents d’ouest [Sion 1909] dont l’influence maritime se fait sentir jusqu’à Rouen est favorable aux cultures en raison de sa douceur relative atténuant les fortes gelées, alternant pluies et ensoleillement. En revanche les vents parfois violents ont toujours malmené les arbres, ce pourquoi les cauchois redoutant l’assaut des vents marins ont protégé leur habitat et leurs pommiers à l’abri dans leurs masures et autrement dit dans la cour.

Si les précipitations sont abondantes, elles font la réputation de la Normandie et du pays de Caux. « On s’explique que l’herbe si drue des masures normandes, pas sa croissance vigoureuse, rappelle aux anglais les pelouses de leur pays » [Sion, 1909].

Les vents. « La prédominance des vents d’Ouest concourt à rendre plus modéré et plus égal le climat de la Normandie, en portant dans l’intérieur l’air frais de la mer l’été, en réchauffant le continent l’hiver. Elle est très sensible dans le tableau suivant qui indique le nombre de jours où, durant les trente années 1853-1882, le vent a soufflé à Fécamp de telle ou telle direction. En réunissant les vents d’Ouest à ceux de Sud-Ouest et de Nord- Ouest, on voit que le vent venait de ce quart de l’horizon plus d’une fois sur deux. Sa direction moyenne est d’Ouest un quart Sud-Ouest. Elle varie du Nord-Ouest au Sud-Ouest et au Sud-Sud-Ouest suivant la saison. En mars, la direction moyenne du vent coïncide avec la moyenne annuelle ; il remonte vers le Nord jusqu’en juin, selon le mouvement apparent du soleil, puis il le suit dans sa descente vers le Sud jusqu’en décembre. […] Les vents d’Ouest la laissent se condenser en partie quand ils arrivent sur le littoral. Ce sont eux qui rendent si humide le climat normand. […] En même temps que les plus humides, les vents marins sont les plus violents. Sur les 86 jours où domine le vent d’Ouest chaque année, il est qualifié 29 fois de brise légère, 3o fois de bonne brise, 18 de forte
brise et 9 de très forte brise ou de tempête. Les grandes tempêtes viennent exclusivement du Sud-Ouest, de l’Ouest et du Nord-Ouest ; par contre, les vents du Sud et du Sud-Est sont les plus doux. Il n’est d’ailleurs pas besoin de girouette ni d’anémomètre pour constater la fréquence et la force des vents marins : la vue des arbres de la côte suffit. C’est pour protéger les constructions, pour empêcher les fleurs et les fruits des pommiers d'être emportés que les Cauchois entourent leurs vergers d’une lisière de hêtres ou d’ormes, plantés sur les fossés qui limitent la masure ; dans les fermes importantes, on renforce souvent cette enceinte en disposant devant le fossé deux ou trois rangées supplémentaires sur le côté qui fait face à la mer. Ces lignes de grands arbres, qui font la beauté régulière de la campagne cauchoise, montrent jusqu’à quel point, même à plusieurs dizaines de kilomètres de la côte, on redoute l’assaut des vents marins. » [Sion, 1909]

La pluie, l’eau de pluie est nécessaire à retenir mais elle reste impropre dans la mare. Seule les sources au pied du plateau coté Seine ou côté Manche sont des compléments à l’usage de l’humain.
 

Ces pluies dites de relief au pays de Caux varient d’un endroit à l’autre selon les inclinaisons du plateau vers la Seine et vers le Vexin. Paradoxalement les eaux sont peu retenues du fait que le sous-sol est calcaire. Néanmoins les cauchois - « les pucheux » - ont canalisé les eaux de pluie pour remplir des puits, des citernes et des mares sur les argiles leur permettant non pas de la consommer mais de la conserver pour divers usages (bétails, eau pour le cidre, incendie…). C’est bien après la seconde guerre mondiale que l’eau est arrivée dans les ménages au pays de Caux. [Couvret 1954]

Les précipitations 

« Les précipitations sont abondantes 800 à 1000 mm : « La quantité d’eau apportée par le vent du Sud-Est est donc trois fois inférieure à celle que déverse, soit le vent du Sud-Ouest, soit celui de l’Ouest. […]  La Normandie n'a pas usurpé sa réputation de contrée pluvieuse.
Sous forme de pluie, de brouillard, de neige ou de grêle, il tombe à l’Ouest du Caux près d’un mètre d’eau, quantité qui classe cette région parmi les plus arrosées de la France, immédiatement après les massifs montagneux, la Basse Bretagne et la côte Gasconne. […] On s’explique que l’herbe si drue des masures normandes, par sa croissance vigoureuse, rappelle aux Anglais les pelouses de leur pays. […]  Cette humidité, le Caux la doit au régime des vents et à l’altitude de ses campagnes. Les vents marins, presque saturés de vapeur d’eau, se heurtent contre les falaises de la Manche ; ils s’élèvent, se refroidissent et laissent se condenser la vapeur d’eau. Les pluies qui tombent sur ces plateaux, hauts de 100 à 200 mètres, rentrent dans
la catégorie des « pluies de relief », comme celles que produit dans nos montagnes de l’Est et du Centre la montée de l’air sur les versants orientés vers l’Atlantique. Le maximum se place, non pas dans la région la plus élevée, mais dans celle où les courants les plus humides, ceux du Sud-Ouest, de l'Ouest et du Nord-Ouest, combinent leurs effets, à l’extrémité occidentale de la péninsule. » [Sion, 1909]

Paradoxalement, soumis aux pluies abondantes le pays de Caux est pauvre en eau (et surtout potable).  « La Seine-Inférieure, pays à sous-sol calcaire, est, dans son ensemble, pauvre en eau. Celle-ci gît, dans le Pays de Caux, à des profondeurs de 60, 80, 100 mètres et plus. Beaucoup de communes n’avaient jusqu’ici d’autres ressources que des puits non permanents ou contaminés, des citernes ou des mares. […] déjà, bien avant la guerre 1939-1945, des efforts avaient été entrepris en vue d’organiser dans les campagnes des distributions d’eau ; de grands forages avaient été tentés. Malgré tout, en 1946, l’on ne comptait encore que cent seize communes rurales alimentées. » [Couvret, 1954]

La Mare était cruciale au pays de Caux, à plus d'un titre.

« Le pressoir était installé dans la cour d’une petite ferme proche, sous un appentis, à quinze pas de la mare. […] Il y fallait de l’eau de mare, la pluie même du ciel tombée sur l’herbe et se faufilant, clairette, par toutes les rigoles des chemins pour se décanter à l’ombre des arbres dans sa large cuve d’argile. » [Le Povremoyne, 1954]

 

 

Le pays de Caux : un terroir où la forêt s'est trouvée défrichée en partie pour l'agriculture, l'habitat, les fermes et masures  qui accueillirent, en lisière et dans des clairières de forêt,  des vergers et dans les masures et les cours le pommier et le poirier à cidre

Le pays de Caux s’il se caractérise aujourd’hui par sa structure d’habitat : la masure et/ou la cour elle est apparue singulièrement depuis les successifs défrichements. Au temps des Calètes il est supposé que sur leur territoire fut boisé à 80% [Lerond, 1978) mais rien ne dit qu’ils vivent exclusivement en forêts comme nous le verrons plus loin.

« En France, pommes, poires, merises, noisettes, glands, cynorrhodons d’églantiers, prunelles, cenelles d’aubépines, raisins ou olives, tous sauvages, composaient une partie de l’alimentation des derniers chasseurs-pêcheurs-cueilleurs du Mésolithique (9000-6000 av. J.-C), mais aussi des premiers agriculteurs-éleveurs du Néolithique malgré l’arrivée de plantes domestiquées du Proche-Orient au VIe millénaire av. J.-C. et de leurs successeurs. »  [Ruas ; Marinval 1988, 1999 ; Ruas & Marinval 1991 ; Ruas 1996 ; Ruas et al. 2005-2006 ; Zech-Matterne et al. 2008 ; Vaquer & Ruas 2009 ; Bouby 2010].

Forêt cauchoise, défrichements, reboisements, essarts, pommiers sauvages et pommes cultivées

Le pays de Caux un territoire jadis boisé abritait les pommes. Les premiers essarteurs de l’époque de bronze [Lerond, 1978] ont permis à la tribu gauloise des Calètes de se fournir en ressource pour le bétail et pour leur consommation propre, avant même que les Romains définissent une notion de propriété forestière (domaine) [Lerond, 1978].

« Les Celtes entretenaient des pommiers au milieu des forêts. Les druides considéraient qu’il s’agissait d’un arbre sacré, à l’égal du chêne. » [Parcs Naturels Régionaux de Brotonne et de Normandie-Maine, 1982]

Dès l’époque romaine, le Caux n’était certainement pas entièrement déboisé (Sion, 1909]

Puis les invasions des Saxons, [...] des Scandinaves ont poursuivi les défrichements avec alternance de reconstitution de massifs, reprenant au Moyen Age [Lepert, DRAC HN, 2014]

Au XIe siècle, une charte du Conquérant accorda à l’abbaye de Boscherville de nouveaux essarts de cette paroisse – Guillaume par ailleurs venait chasser dans ces forêts que les ducs voulaient préserver à cette fin [Sion, 1909]

« Il convient de préciser que le terme « forêt » ne désigne pas ici les seuls terrains densément boisés que nous appelons ainsi aujourd'hui. La forêt, c'est alors le terrain de chasse des rois normands, puis angevins et de leurs successeurs. Guillaume le Conquérant, infatigable chasseur, avait affirmé ses privilèges sur la forêt royale, mais celle-ci fut progressivement étendue par ses successeurs, jusqu'à ce que, en 1184 (Assize de Woodstock), Henri II décidât que la forêt royale relèverait d'une loi spéciale et non de la loi commune. Henry II, Richard et Jean étendirent démesurément le territoire soumis à ce régime juridique particulier, y incorporant des landes ou des prairies, et même des champs, des villages ou des villes, de telle sorte que la forêt ainsi entendue recouvrait un tiers du royaume. » [Charte de la forêt. Digithèque MJP, 2011]

Les actes du XIe et XIIe siècles l’évoquent, mais surtout au 13e siècle. Ils concernent les forêts de Préaux et de Cailli ; la forêt de Lillebonne ; la forêt de Halates, la forêt de Fécamp. 

Prenons l’exemple des défrichements ordonnés par le Clergé de Rouen sur l’exemple de  1296 où l’archevêque de Rouen donna aux moines de Saint Ouen la dîme des essarts de la forêt Verte et de la forêt de Lions. Autre exemple de la forêt de Roumare où le défrichement fut commencé sous Henri II qui par la suite vit la fondation de La Vaupalière, en 1257, les religieuses y acquirent des terres défrichées et essartées […] en 1269 concéda aux Emmurées de Rouen des terres labourables dans ses essarts près de Montigny, y bâtir une grange. L’abbaye de Saint Georges quant à elle y entreprit quelques défrichements où verra se cultiver la pomme Montigny [Delisle, 1903]

Si on prend l’exemple de la commune de La Cerlangue, elle fut créée vers 1240 car de nombreuses étendues de bois avaient été défrichées avant. En 1474 des fournitures de boisson et de cidre pour les ouvriers du château sont consignées. L’histoire de la commune relate également que les vergers de la Cerlangue étaient réputés dès cette époque et fournissaient le cidre de l’abbaye de Montivilliers.  Au temps du Moyen Age les écoles étaient subventionnées par la « fabrique de l’église » - terme ancien indiquant les biens et les revenus, par exemple les produits des pommiers dont le cimetière était planté à cette époque. [Bulletin de La Cerlangue, 1985]

« La vogue du cidre de Montigny, attestée par un acte du 14e siècle relatif à un marché de pommes, cité par M. Ch. De Beaurepaire dans ses Notes et documents sur l'état des campagnes de la Haute-Normandie pendant les derniers temps du moyen âge, avait certainement persisté au 18e siècle. C'est ce qui résulte notamment d'une mention très curieuse qui a été relevée par M. Félix et qui concerne l'acquisition d'une futaille de cidre de cette provenance pour le service de la maison du Roi, au Parc-aux-Cerfs, à Versailles. Une commande royale de cidre de Montigny, près Canteleu ; Rouen, 1883, in-8°, p. 13 .» [Le Paulmier, 1589 et 1906]

Concernant la couverture boisée de la forêt de Lillebonne et de la forêt de Fécamp il est précisé qu’elle se rejoignaient. Les bois résiduels des Loges et des Hogues n’étaient qu’un quartier de la forêt de Fécamp [Soulignac citant Deck, 1970], laquelle s’étendait d’Etretat aux Dalles, rejoignait au sud la forêt de Lillebonne. [Soulignac, 1980].

« Les ducs en admettant dans leur forêt de nombreux fiefs, l'abbaye par une gestion habile, certains barons formés par la pratique de l'administration ducale, les paysans par un travail acharné, tous, depuis le milieu du 10e siècle jusqu'à la fin du XIIe, ont contribué largement à la prospérité du duché par l'apport de terres neuves ; ils ont créé un paysage qui, sauf sur la côte, n'a guère varié en profondeur. » [Deck, 1970]

Cette évolution sera également décrite et cartographiée par Musset   René Musset dans son article intitulé Le nom et l'ancienne ceinture forestière du Pays de Caux ; les villages des défrichements médiévaux [Musset, 1961].

Pour beaucoup d’entre-elles les forêts bornaient le pays de Caux au nord-est par la vallée de la Varenne côté Caux, les parties boisées à l’est est de l’Andelle côté Caux Rouen, et enfin les forêts des bords de Seine et du plateau côté Seine. C’est là aussi que les paysans sont venus se grouper en terrains, (boel) autrement dit cour ou masure de part et d’autre de la rue devenant ainsi village. [Delisle, 1903]

En effet comme le signale Michel Lerond « La population rurale du Moyen-Âge est étroitement associée à la forêt qui est ainsi le siège d’une vie villageoise intense, abritant mille métiers et mille activités. La toponymie cauchoise est d’ailleurs significative à cet égard : Saint-Eustache-la-Forêt, Bois-Himont, Auberbosc, Saint-Martin-aux-Arbres » [Lerond, 1978]  et pourrait-on ajouter Boisguillaume, hameau du plein-Bosc à Etoutteville, Bois-d’Ennebourg, Bois-l’Evêque, Bosc-Bordel, Bosc-Edeline, Bosc-le-Hard, ...

 

Le verger au Plain bosc à Etoutteville où j'aidais mon père à ramasser les pommes à cidre, cela fait déjà 60 ans (on en ramassait près de 100 rasières sur les 1000 que pouvait contenir la cour.)

 

 

 

 

« Pour les pommes et les poires, nous avions à demeure des pommes à couteau  et chez notre tante Thérèse - Tata Golden- mais pour les pommes à cidre nous allions les ramasser à Etoutteville dans la cour  de la ferme de Bernard et Monique, nos cousins. Nous ramassions les pommes  puis elles étaient livrées par notre cousin en tracteur jusqu'à Yvetot. Nous lochions les pommes avec des gaules, nous secouions les grosses branches qui tombaient d’un seul coup sur l’herbe. Je me souviens du bruit mate de leur tombée dans l’herbe haute. Nous en prenions sur la tête avant de tout mettre dans des « pouches » ou dans des sacs plastiques à engrais retournés qui même rincés sentaient encore un peu la chimie. Nous en ramassions 70 rasières. [...]  Les pommes pourries servaient à des bagarres dans la cour : il y avait le clan des pommes « su» - les méchants -  et le clan des pommes douces – les gentils. Selon, on se traitait de soit pommes « su » ou de pommes douces. »

Le pays de Caux, ses masures, ses cours, ses us et coutumes …  Pascal Levaillant, 2022

Etant reparti du moyen-âge qui a contribué à redessiner le pays de Caux, suite à des invasions vikings mais aussi grâce à des défrichements, qui ont permis de voir apparaitre des habitations (masure) et des hameaux s’agrégeant en paroisse (village), les études de René Musset mettent en évidence les zones de défrichements qui se sont opérées autour du plateau sommital du pays de Caux, de la pointe de Caux jusqu’à l’Andelle.

 

 

Musset a focalisé sur les zones forestières qui ont subi des défrichements. Force est de remarquer que ces forêts et zones défrichées successivement ceinturent les limites qu’il définit du pays de Caux, du Havre à l’Andelle et de Rouen à Dieppe. D’après Musset, d’autre part le plateau non colorisé n’a que peu subit de défrichements peut-on en déduire ! et pourtant  selon de ce que Soulignac (1980) a évoqué ci-dessus que  la forêt d'Etretat  rejoignait la forêt de Lillebonne, ce qui semble-t-il  a échappé à Musset qui fit son étude plus tôt dans le siècle. (1961)

Voici la carte sur lequel il positionne ces défrichements successifs : en vert j’ai colorisé les forêts actuelles dont : 1 - Les principales sont désignées sur la carte par un numéro. Rive droite : 9, Forêt Verte ; 10, de Roumare ; 11 de Jumièges ; 12, du Trait ; 13, de Maulévrier ; en orange j’ai colorisé les forêts défrichées depuis le moyen âge : 2- Zones forestières au moyen âge, défrichées depuis.

Ces trois cartes  du pays de Caux montrent  finalement des contours assez proches les uns des autres.

 

Un pommier dit "sauvage" entre Maromme et Montigny en Seine-Maritime ©Pascal Levaillant 2024

 

Le pays de Caux : un terroir dans lequel l’habitat fut déterminant pour accueillir les pommiers et poiriers.

Développement à l'aube du second millénaire de la masure cauchoise à de la cour et du clausage (closage) :

talus -fossés plantés de trois rideaux, d’arbres et d’arbustes pour protéger du vent  la masure des vents d’ouest, forts à violents, avant d'y abriter durablement les pommiers et les poiriers à partir du mitan du 2e  millénaire.

 

Comme nous l’avons observé sur la carte établie par Musset les l’intérieur du plateau de Caux déboisé progressivement en en peu plus d’un millénaire, a permis aux successeurs des Calètes d’y mener une agriculture diversifiée basée sur les cultures céréalières - blé, orge…- entre autres servant à confectionner une boisson potable qu’était consommée à l’époque : la Cervoise sachant que les vignes s’acclimataient plutôt en vallée de la Seine et sachant que le cidre  apparut plus tard en commençant par être commencé par les religieux dans les abbayes. Toutefois il fallut attendre Charlemagne et l’établissement des Abbayes pour que la consommation du cidre fait à partir des vergers s’installèrent en clairière de certaines forêts et en lisière d’autres dont la tâche revenait aux curés qui cultivaient les pommiers à cette fin au nom des abbayes situées en vallée de la Seine ou dans les vallées affluentes de la Seine et leurs forêts adjacentes où s’y trouvaient les pommiers sauvages.

Il fallut attendre plus tard dans le second millénaire pour que les cours et les masures s’y rattachant y soient affectés.

Masure, clausage et closage

Ce dispositif semble être le prolongement d’anciens habitats ruraux de la Tène finale/Haut Empire que des archéologues ont découvert  suite à des fouilles du siècle dernier lors des chantiers routiers et autoroutiers de l’A 29 ou de rocades de ville colle sur le plateau nord  de Rouen comme celles décrites par Philippe Fajon sur lesquelles nous reviendrons en citant plus tard quelques-unes de ses conclusions.

Avant cela nous pouvons citer quelques extraits de ses recherches sur l’exploitation agricole antique du pays de Caux et comme préambule à la masure.

Philippe Fajon décrit l’agriculteur : « au sens de « celui qui gère l'espace agricole autour de son siège d'exploitation par une forme de maîtrise foncière » est autonome dans ses décisions d'affectation du sol. L'agriculteur crée le paysage autour de sa ferme en façonnant les espaces sur lesquels il travaille. »

Il évoque une relation de continuité semble exister en ce sens et constate des cas d'enclos attribués à une activité agricole dominante. L'enclos dit-il « semble être effectivement le critère commun qui traverse le temps pour ces exploitations ex :  Saint-Antoine-la-Forêt "Le Clos Pestel" (Ladureau, 1995) ou Grémonville "Le Bois Thillant" (Rougier, 1995); Bolbec "Les Maréchaux" et "Les Maréchaux sud" ; Saint-Valéry-en-Caux "Ancien centre mobilisateur 39" ; Eslettes "Le Manoir Bosquet" ; Saint- Romain-de-Colbosc "Contournement ouest" ; 15 - Bois-Guillaume "Contournement…[…] présentent des enclos  dans leur forme élémentaire (fig. 2). Sur d'autres sites comme Etaimpuis "La Briquetterie" (Blancquaert & Herment, 1995), Veauville-les- Baons "RD 37", Baons-le-Comte "Les Baons" (Blanquaert & Desfosses, 1997), […] on constate la continuité stricte qui existe entre les éléments fossoyés formant enclos à la fin de l'Âge du Fer et les systèmes parcellaires qui se développent sur les mêmes sites selon l'organisation établie antérieurement […] avec ces exemples, cet article nous fait constater la marque laissée par l'agriculture gauloise puis gallo-romaine dans notre paysage. Nous n'avons pas cherché ici à modéliser mais simplement à proposer une suite d'observations visant à répondre à la question de l'opportunisme des choix d'implantations des fermes antiques. » [Fajon, 2003]

Commençons par examiner ce lieu, cet espace agricole singulier selon  la définition que donne Léopold Delisle à la masure au moyen-âge

" La masure (en latin "mansura, "masura", "masagium) , "mesagium", "masnagium", etc... n'était point une tenure particulière. C'était plutôt l'indication de l'habitation du paysan avec ses dépendances, de sorte qu'une masure pouvait être tenue aussi bien en vavassorie qu'en bordage. On appelait surfait tout ce qui s'élevait sur la masure. [...] A côté de la masure doivent être signalés le clausage, synomyme de masure, le cottage, qui indique quelquefois la tenure d'un jardin, ainsi que le courtillage ; la croûte dont le nom est resté attaché à un grand nombre de nos champs, l'ouche et le pourpris, espèces de cour. [...] »

A masure il faut entendre le synonyme cour que le corps notarial a cherché à changer en 1866 par la locution cour-masure, locution qui elle-même a été remplacé par un couple d’architecte en 1968 la transformant en clos-masure, autre locution, qui ne sont pas ni l’une, ni l’autre pour autant au dictionnaire de la langue française.

Dans le cœur des cauchois,  la cour masure, la masure ou la cour sont encore la référence que le clos-masure ne remplacera jamais véritablement d’autant que leur mutation en espaces immobiliers vient déprécier leur fonction initiale mais faut-il rappeler qu’au 19e siècle bon nombre de parisiens ou de rouennais ont fait des vavassories et de manoirs une résidence secondaire ce qui explique l’introduction de la cour-masure dans les annonces immobilières en 1866 par le corps notarial local voire national. 

 «  Masures : sens provincial, la cour plantée entourant la maison d’habitation et les batiments agricoles d’un cultivateur. « On appelle masures en Normandie, les terrains en campagne, enclos de haies, fossés ou murs, en nature d’herbage et ordinairement plantées d’arbres fruitiers ». (Journal des arrêts des cours royales de Rouen et de Caen, t. VII, 1827, p. 41).» 

in : Droit privé et Institutions régionales, Études offertes à Jean Yver, Sous la direction de Société d'histoire du droit et des institutions des pays de l'Ouest de la France ; Fossés cauchois et normands, André Dubuc, p. 183-196 in : books.openedition.org

 

Et si... 

 

Et si c'était pour cette raison lexicale que la locution[1] « clos-masure » identifiée  à propos du  dossier d'inscription du "clos-masure" au Patrimoine mondial de l'UNESCO n'ait pas été retenu ! possible d'autant que j'ai trouvé la preuve qu'en pays de Bray les enclos de talus et fossés plantés d’arbre (futaie) ont existé avant d'être remplacés par des enclos de haies.  Oui, c'est avéré ! en dépit des apparences d'aujourd'hui.


[1]Préférence du mot à locution : Franz Josef Hausmann formule une critique cinglante de l’état actuel de la phraséographie, dont la carence est d’autant plus patente pour le locuteur étranger. Les dictionnaires non spécialisés privilégient le mot : les locutions, lorsqu’elles sont présentes, y sont mal traitées, telles les collocations qui, sémasiologie oblige, ne donnent pas les collocatifs à l’article de la base, là où on serait justement amené à les chercher.

 

Seuls le Littré, le Larousse et le Trésor de la langue française cible le mot du vocabulaire français dans son acception dimension régionale : Littré : « Nom, en Normandie, de l'enclos, ou verger, ou herbage planté d'arbres fruitiers, dans lequel sont situés les bâtiments de la ferme »

Larousse : « Maison rurale traditionnelle du pays de Caux, composée de plusieurs bâtiments d'habitation et d'exploitation dispersés dans un pré clos de haies et planté de pommiers. »

Voilà ce que rapporte le Trésor de la Langue française  : « Définition masure - Région. (Pays de Caux)

 

1. Habitation rurale ; ensemble de bâtiments d'une exploitation agricole. Les préoccupations d'arboriculture et d'élevage se font sentir dans la ferme-masure caractéristique du pays de Caux. Elle se distribue en bâtiments séparés, mais tous compris dans l'enceinte rectangulaire (VIDAL DE LA BL., Princ. géogr. hum., 1921, p.180).

2. Herbage clos planté de pommiers ou d'autres arbres fruitiers entourant les bâtiments de la ferme. Le régisseur aida Bouvard et Pécuchet à franchir un échalier, et ils traversèrent deux masures, où des vaches ruminaient sous les pommiers (FLAUB., Bouvard, t.1, 1880, p.27).

3. Jusqu'à nos jours, c'est dans ces gains successifs que tient toute l'histoire du pays de Caux. Ainsi se sont multipliées les fermes entourées de leurs vergers ou masures [it. ds le texte], d'où le fermier surveille son bétail, et que flanquent des fossés, ou levées de terres garnies de hêtres. »

 

La masure, l’espace par excellence dédié au verger, aux pommiers. André Vigarié nous offre une des plus belles descriptions de ladite masure Cauchoise dont Jean-Robert Pitte nous fait l’éloge dans son Histoire du paysage français. [Pitte, 1983]

« André Vigarié - dans ses études sur la masure cauchoise. On sait qu'elle représente le plus beau type de maison à cour ouverte, c'est à dire constituée de bâtiments dispersés au sein d'une pâture complantée de pommiers et close d'un fossé doublé d'un talus planté de hêtres. [...] La structure dissociée la rend bien adaptée à l'économie rurale variée Pays de Caux : céréaliculture, élevage bovin et porcin, pommiers à cidre. […] ce type de maison se rencontre tout au long des littoraux qui vont des Pays Baltes et du Jutland à la Normandie et au Devonshire […] cette aire d’extension best celle de la civilisation noroise des 10e et 11e siècles. » [Vigarié, 1969, Pitte, 1983]

 

A la masure il convient d’associer le mot « cour ».

"Les exploitations rurales du pays de Caux sont connues aujourd'hui sous le nom de « cours-masures » ou « clos-masures », termes empruntés aux géographes, que les habitants n'emploient pas eux-mêmes, utilisant les termes masure ou cour.  » [Bouillon, 2008]

Cet auteur apporte quelques précisions qui pourront éclairer le lecteur :

« De même, « l’herbage » clos planté de pommiers ou de fruitiers entourant les bâtiments de la ferme » correspond très exactement à ce que les Cauchois appellent encore aujourd'hui une cour. Pour notre part, nous nous référerons ici à l'article Masures de la Coutume de Normandie. [D. Houard, 1780-1783] « La Coutume réformée, article 271, entend par ce mot ce que la Coutume ancienne appelloit ménages ; c'est-à-dire ce qui comprend les bâtiments, le clos, la cour & le jardin ». Cette acception fait de la cour un des éléments constitutifs de la masure que nous définirons donc comme l'espace clos qui entoure la maison d'habitation, et où les divers bâtiments de la ferme (écurie, étable, bergerie, charretterie, four) sont répartis. » [Bouillon, 2008]

Faut-il enfin définir cette cour comme « L’espace clos qui entoure la maison d’habitation et où les divers bâtiments de la ferme (écurie, étable bergerie, charretterie, four) sont repartis » ou autrement dit « cour-masure, expression encore utilisée par les notaires pour désigner une maison avec un peu de terrain. Autrefois aucune maison n’était vendue sans un jardin. » [Bouchard-Le Scour, 1981].  Enfin ce mot est choisi pour désigner une fois de plus cet espace cauchois : « Dans le pays de Caux, la cour, revêt l’ampleur de la richesse, la rigueur des tracés réalisés pour les siècles, le bien-être de l’abri parfaitement protégé des vents de la plaine, la beauté du végétal savamment ordonné, hêtres, pommiers, herbe. » [Frémont, 1981]

A propos de l'apparition des masures et des cours, Michel Lerond apporte des éclairages  sur les raisons qui les ont constituées d’autant plus intéressantes qu’au 13e siècle in ne parle pas encore du pommier en son sein : 

« Il serait difficile et imprudent d’être affirmatif sur la genèse des cours et de la situer précisément dans le temps. […] Sans doute cette structure paysagère s’est-elle mise en place très progressivement, un élément fondamental étant sa dispersion. Celle-ci est due à la facilité de retenir une réserve d’eau, la mare, sur le sol argileux ; cette réserve étant indispensable du fait de la rareté des rivières. Vers les 12e et 13e siècles une exploitation comporte certainement un ensemble de champs autour d’un bloc maison-abri du bétail. La progression démographique fait éclater les familles et crée de nouveaux « feux » auquel l’élevage ovin apporte la matière première à un artisanat rural naissant. […] Dès la fin du 13e siècle, les clairières se sont agrandies pour faire place à de vastes champs ponctués d’enclos à moutons. […] Les défrichements ayant pris une grande ampleur, le bois[1] devient une matière plus rare et sa vente s’organise. C’est sans doute à partir de ce moment que les paysans ont cherché à assumer leur propre production de bois en plantant des arbres autour de l’enclos à moutons, protégeant les animaux et l’habitation des vents forts. » [Lerond, 1978]

 

[1] Droit d'usage concédé, à l'origine, de la propre volonté du seigneur à une communauté d'habitants, l'autorisant à se servir du bois pour se chauffer. La plupart des coutumes limitent le droit de l'usager au bois mort, ou au bois vif des essences inférieures de la forêt. L'affouage peut aussi être le produit de la forêt de la communauté, destiné au chauffage est délivré aux habitants. La forêt, qui fournit l'affouage, s'appelle souvent la fourasse. Le mot "affouage" date du XIIIe siècle et vient du verbe d'ancien français "affouer" = chauffer, lui même du latin "affocare". In : foret.chambaran.free.fr

Quant à Sion, il évoque la masure à propos du pommier et du cidre, ce qui introduit le pommier dans la cour et la masure au mitan du 15e  siècle: « C’est à la fin du 15e siècle, lors de l’œuvre de restauration qui suivit le départ Anglais et la pacification du plat pays, que le pommier fut cultivé dans le pays de Caux et dans le Vexin. De grands propriétaires, comme l’archevêque de Rouen, obligèrent alors leurs fermiers de planter les entes, souvent achetées dans le Roumois, après avoir essarté sol et l'avoir « déroché » s’il était nécessaire. Le verger était établi dans une partie de la masure, souvent dans le jardin, près de la grange ; parfois, « afin de rompre les vents qui pourraient grever ou abattre les dits pommiers », […]. C’est peut-être de cette époque que date l’aspect typique des fermes cauchoises, avec les grands arbres qui surmontent leurs « fossés ». Parfois aussi, le verger excédait les limites de l’ancien jardin et l’on enclosait des champs voisins. La masure s’agrandissait, et l’extension de la culture du pommier correspond’ peut-être à un développement des prairies. […]. Si l’usage du cidre se généralisa vers le 16e siècle dans la Normandie orientale, c’est que la fabrication de la cervoise avait l'inconvénient d’absorber une partie importante des céréales récoltées.» [Sion, 1909]

Ainsi localement pour désigner ce qui est nommé comme étant ménages, masure, cour, cour-masure d’hier ou clos-masure d’aujourd’hui, la masure cauchoise au 15e siècle fut idéale pour y accueillir ces pommiers comme elle l’a été à la fin de la Guerre de Cent Ans.

Mais avant de revenir à ce changement de paradigme arrêtons-nous un instant sur la pomme avant de revenir au « vin de pomme » comme l'a dit si bien Michel Lerond en 1978.

- de la pomme « sauvage » aux premiers cidres

 

Il est nécessaire de distinguer les pommes entre elles pour mieux comprendre leurs spécificités.

Quid de la pomme Sieversii,  de la pomme cultivée, de la pomme sauvage sylvestris, de la pomme à cidre…

 

 

Je vous propose de faire le point  avec Marie Pierre Ruas, Amandine Cornille et Michel Chauvet.

Michel Chauvet, Michel Cambornac et Marie-Pierre Ruas ont contribué à mon exposition "Herbier contemporain délicieux " aux jardins de l'abbaye Saint-Georges de Boscherville en 2021.

« La pomme[1] fait aussi désormais l’objet de recherches génétiques et paléogénétiques parallèles. La génétique moderne a montré que le pommier domestique (Malus domestica), un des principaux fruitiers cultivés en Europe tempérée, n’a pas pour ancêtre le pommier sauvage européen (Malus sylvestris), contributeur secondaire à la diversification des variétés cultivées, mais un pommier sauvage d’Asie centrale, Malus siviersii, qui forme encore des forêts au Kazakhstan (Velasco et al. 2010 ; Cornille et al. 2012). [Ruas, 2016]

« En France, pommes[2], poires, merises, noisettes, glands, cynorrhodons d’églantiers, prunelles, cenelles d’aubépines, raisins ou olives, tous sauvages, composaient une partie de l’alimentation des derniers chasseurs-pêcheurs-cueilleurs du Mésolithique (9000-6000 av. J.-C), mais aussi des premiers agriculteurs-éleveurs du Néolithique malgré l’arrivée de plantes domestiquées du Proche-Orient au VIe millénaire av. J.-C. et de leurs successeurs (Marinval 1988, 1999 ; Ruas & Marinval 1991a, b ; Ruas 1996 ; Ruas et al. 2005-2006 ; Zech-Matterne et al. 2008 ; Vaquer & Ruas 2009 ; Bouby 2010). » [Ruas, 2016]

Quant au pommier sauvage (malus sylvestris) dont l’origine est a été recherchée  Michel Chauvet, nous précise également certains faits concernant ses usages au temps de la préhistoire : « A l’époque préhistorique[3], les pommes sauvages étaient abondamment cueillies. [...] Peu agréables à manger à l'état cru, elles étaient conservées par dessication, et devaient être consommées en mélange avec d'autres fruits sauvages dans des boissons fermentées, ou cuites dans diverses préparations. Avec la diffusion des pommiers cultivés, les pommiers sauvages ont été diversement introgressés au cours des siècles. Ils étaient communs dans les haies avant que celles-ci disparaissent. Il est difficile de différencier ceux qui sont vraiment sauvages de ceux qui résultent de semis d'un pépin d'un type cultivé. » Après la domestication, le pommier sauvage a été délaissé comme aliment, mais il a toujours été recherché dans les forêts pour servir de porte-greffe.

Michel Chauvet, m’a transmis quelques autres explications dans l’état des connaissances actuelles car depuis 1929 et 2009, la Science en sait davantage ce qui permet de clarifier leurs origines.

« Tout d'abord, il faut savoir que les pommiers, comme de nombreux arbres fruitiers ou autres, sont essentiellement allogames et interfertiles. Ce que nous appelons des espèces pourrait donc être considéré comme des races géographiques.

Malus sylvestris donne de petites pommes qui ont été utilisées séchées ou fermentées pendant la préhistoire. Mais effectivement, il a fallu attendre l'apport de Malus sieversii à gros fruits pour que commence l'histoire de la pomme cultivée. 

Cela a été rendu possible grâce à l'invention de la greffe, au premier millénaire avant J.C. Le greffe permet de fixer les caractères intéressants, alors que le semis rebrasse les caractères. Cela dit, l'homme a aussi utilisé certains semis de hasard qui donnaient de bons fruits. C'est pourquoi on distingue Malus domestica comme espèce d'origine hybride (surtout entre sieversii et sylvestris). À tout moment dans l'histoire, on peut avoir des croisements entre pommiers cultivés et pommiers sauvages locaux. Cela s'est aussi passé en Amérique du Nord avec Malus coronaria.

La diffusion de Malus sieversii en dehors de son centre d'origine est donc le fait de l'homme qui a propagé des greffons.

Je ne pense pas que le pommier à cidre ait une origine différente, car il a lui aussi de gros fruits. »

Dans l’encyclopédie des plantes alimentaires qu’il a publiée en 2018, Michel Chauvet nous avait déjà rapporté que :

« Les pommiers à cidre ont souvent été considérés comme botaniquement distincts, et on une histoire particulière. […] Si des boissons fermentées à base de pommes sauvages sont attestées dans les premiers siècles sous le nom de pomacium, il semble que la production de cidre avec des cultivars spécialisés ait débuté au pays Basque. Les premiers cultivars de pommier à cidre seraient arrivés par voie maritime dans le Cotentin (Normandie) à partir du 10e siècle. […] Par hybridation avec les pommiers sauvages, la gamme actuelle des pommiers à cidre s’est alors constituée. Les Normands ont à leur tour introduit des pommiers à cidre en Grande-Bretagne lors des conquêtes anglo-normandes. » [Chauvet, 2018]

Pour citer deux pommes à cidre Michel Chauvet donne l’exemple de « Bedan », cultivar ancien de l’est de la Bretagne et de Normandie. Ovoïde, jaune piqueté de rouge-brun.

« Kermerrien », du Finistère et du Morbihan. Conique, rouge.

« Marin Onfroy », de la Manche, dédié à un gentilhomme normand du 17e siècle. Jaune lavé de rouge.

Gautier et Marchenay nous ont aussi  précisé la nature des pommes à cidre et de leur provenance.

« Les pommes à cidre[4]  ne sont généralement pas comestibles. On les divise en trois catégories : les pommes sures, qui fournissent un jus acide, clair, léger, sujet à noircir ; les pommes douces, moins riches en suc, qui donnent un jus sucré et un cidre très agréable mais passant à l’amer ; les pommes amères ou âpres, qui fournissent un cidre généreux, coloré, ayant du corps, apte à bien se conserver. Les meilleurs cidres se font avec un mélange des deux dernières variétés. On ajoute quelquefois un cinquième de poires. » [Gautier, 1904]

« Les premiers cultivars de pommier à cidre seraient arrivés par voie maritime dans le Cotentin (Normandie) à partir du 10e siècle. Ces introductions auraient continué jusqu’au 16e siècle, avec les cultivars ‘Marin Onfroy’ et ‘Barbarie de Biscaye’. Par hybridation avec des pommiers sauvages, la gamme actuelle des pommiers à cidre s’est alors constituée. Les normands ont eu à leur tour introduit des pommiers à cidre en Grande-Bretagne lors des conquêtes anglo-normandes. » [Marchenay, 1981]

 

Pour en savoir plus sur le Malus sieversii, Michel Chauvet nous conseille la lecture de cet article de Daniel Mathieu à propos de l'origine de la pomme  publié dans : www.tela-botanica.org 

Malus sieversii, l’ancêtre vivant de toutes les pommes cultivées.

« Pour comprendre l’histoire de Malus sieversii il est nécessaire de savoir que jusqu’en 1989 -année de la chute du mur de Berlin- tous les travaux réalisés par des chercheurs soviétiques, étaient inconnus du monde occidental. On supposait alors que nos pommiers cultivés descendaient de pommiers sauvages disséminés dans la grande forêt de feuillus couvrant l’hémisphère Nord. Les fruits de ces Pommiers petits et amers faisaient le régal des oiseaux et des petits mammifères, mais pas des humains.
Mais lorsqu’en 1989 le généticien Herb Aldwinckle se rend au Kazakhstan, il découvre d’immenses forêts de pommiers sauvages ne présentant aucuns éléments de comparaison avec les arbres solitaires d’occident.
Leurs fruits d’une étonnante biodiversité, sélectionnés pour leurs qualités par les ours pendant des milliers d’années, sont à la fois plus gros et sucrés.
Fort de cette découverte, il s’aperçoit que deux éminents chercheurs Nicolaï Vavilov et Aymak Djangaliev s’étaient bien avant lui penchés sur ce phénomène unique.
Dès 1929, le russe Vavilov affirme que le Tian Shan est le centre de l’origine de la pomme, et Aymak Djangaliev son disciple consacrera sa vie au recensement et à l’étude des pommiers Malus sieversii.
Le fin mot de cette histoire sera apporté par le généticien Barrie Juniper en 2002. Grâce à des outils moléculaires il démontre que Malus sieversii, la pomme du Kazakhstan, est à l’origine de toutes les pommes cultivées.
Boostée par ces révélations, une équipe européenne dirigée par Velasco fournira la preuve irréfutable de cette origine à l’aide du séquençage du génome complet de la pomme fin 2009.

La route de la pomme

Partie du Kazakhstan, cette pomme voyage depuis plus de 10 000 ans avant notre ère. Portée par les nomades puis par les caravanes de la route de la soie, au gré des guerres et des migrations de populations. Elle traverse les civilisations de l’antiquité, croise les Perses et les Grecs et arrive en Gaule par les Romains. Fruit illustre de la renaissance cette pomme atteindra les rives du nouveau monde à bord des caravelles des grands explorateurs.

Les particularités de Malus sieversii

1-milieu naturel :
Les pommiers Malus sieversii évoluent en bord de steppe et dans les piémonts jusqu’à 2400 m d’altitude. Ils sont soumis aux rigueurs de l’hiver -40°C dans le nord et de l’été chaud et très sec dans le sud +40°C.

2- une sexualité débridée assure sa biodiversité :
Le Malus sieversii a besoin d’un partenaire sexuel pour se reproduire. Comme chez les humains chaque individu arbre est unique. Cette diversité se retrouve dans la forme et la taille des arbres mais aussi dans les fruits. Un arbre aux pommes rouges pousse au voisinage d’un autre aux fruits verts, une petite grappe jaune se trouve à quelques mètres de mastodontes bigarrés. Avec les pommes sauvages du Kazakhstan se déploie une incroyable diversité de couleur, de taille et de goût.

3- une résistance hors-norme aux maladies :
Habituée à vivre à l’état sauvage depuis des millions d’années selon les principes de la sélection naturelle, les Malus sieversii ont su développer des résistances aux maladies notamment celles qui frappent aujourd’hui nos vergers modernes tels la tavelure, l’oïdium et le redoutable feu bactérien. Ces pommiers sauvages sont donc une alternative aux pommes industrielles qui aujourd’hui nécessitent plus de 36 traitements de pesticides par an pour êtres commercialisées.

Un patrimoine mondial en péril

Politique de destruction initiée par l’URSS, ignorance, déforestation sauvage, urbanisation tous azimuts : 70% des forêts de pommiers sauvages ont déjà disparu. La vaste forêt primitive se réduit comme une peau de chagrin, emportant avec elle un patrimoine génétique inestimable. Et la prise de conscience se fait attendre… Les pommiers sauvages disparaissent progressivement dans l’indifférence générale. Avec la mort de Djangaliev, ils ont perdu son plus actif défenseur. »


[1] M.P.Ruas - in :  shs.hal.science

[2] M.P.Ruas - in :  shs.hal.science

[3] Les restes carbonisés de petites pommes, souvent coupées en deux, sont fréquents dans les sites archéologiques du néolithique bet de l’âge du bronze en Suisse, mais aussi en Allemagne, au Danemark, en Europe centrale et du Sud. In Michel Chauvet, Encyclopédie des plantes alimentaires - 700 espèces du monde entier - 1700 dessins, Belin, 2018, p.599.

[4] In : L'alimentation et les régimes chez l'homme sain et chez les malades (2e édition revue et augmentée) / par Armand Gautier, Paris, 1904,: gallica.bnf.fr

 

Ne pas oublier pour compléter votre information :  "Les origines de la pomme ou le jardin d'Eden retrouvé", le film de Catherine Peix diffusé sur ARTE le 10 mai 2010 

2 - De la pomme « sauvage » aux premiers cidres

« Le pommier fait sa place au verger. Cette évolution ne s’est pas faite en un jour, mais en plusieurs millénaires »

[Marchenay, 2008 - Des pommes]

 

Philipe Marchenay nous raconte aussi que cette pomme sauvage est un fruit riquiqui, minuscule de couleur verte comparée à la pomme domestiquée, bien plus grosse, prenant d’autres couleurs du jaune au brun que l’on croque avec saveur contrairement à la pomme sauvage qu’il est impossible d’en avaler une bouchée.

Philippe Marchenay nous rappelle qu’on ne sait pratiquement rien des variétés de la Gaule d'avant 800.

Le 9e siècle est l'époque à laquelle on commença à s'occuper réellement des fruits.» [Marchenay, 2008]

L'un des auteurs importants pour l'histoire du cidre et de son amélioration est Auguste Chevalier, car  ses recherches en tant que botaniste sont toujours reconnues par ses pairs et ils s'y réfèrent continuellement comme Marie-Pierre Ruas citant Chevalier en 2016 : 

« Curieux de comprendre les facteurs de diversification des espèces fruitières, il estimait nécessaire de rechercher « en particulier » l’origine des genres poirier, pommier, cognassier, pêcher, prunier, cerisier, abricotier, notamment en région méditerranéenne, afin de révéler, dater et suivre les itinéraires biogéographiques des cultivars au cours des transmissions et des sélections (Chevalier 1939, p. 641).» [Ruas, 2016]

Auguste Chevalier nous rapporte, en tout premier chef, l'histoire du pommier sauvage.

« du Malus silvestris - Le pommier sauvage de nos bois qui en s'hybridant avec les pommiers de l'Asie et du Sud-est de l'Europe a produit le Malus domestica de nos vergers est une plante très ancienne. Il a existé probablement en Europe depuis la fin du tertiaire. G. de Saporta en a rencontré des empreintes de feuilles dans les tufs quaternaires des Aygalades (période chelléenne), près de Marseille et à Saint-Antonin dans la même région. Parmi les débris de forêts submergés de Belle-Ile-en-Mer, M. E. Gadeceau a trouvé le Pommier de Deuborh avec la souche encore en place qui pouvait avoir 0m30 à 0m40 de diamètre ; il n'est pas douteux qu'il appartient au Malus sUvestris. Or, ces forêts sont contemporaines des tourbières néolithiques du nord-ouest, postérieures §. la période glaciaire. Le Dr Erland Nordenskiold nous signale qu'on a trouvé aussi en Suède dans les couches des habitations lacustres un assez grand nombre de pommes bien conservées. [...]  Au 11e siècle, on n'avait bu en Normandie que le cidre (pomacium) fabriqué avec les pommes sauvages récoltées dans les bois.

Sans être à proprement parler cultivé, le Malus sylvestris devait cependant être entretenu par les Celtes à travers les forêts. Les pommiers sauvages étaient encore très abondants au Moyen Age dans les forêts des diverses régions de la France, principalement en Normandie. La récolte des pommes des bois était réglementée et les serfs devaient la dîme sur le produit de la cueillette. Celle-ci n'eût plus d'intérêt lorsque la culture du pommier à cidre se fût répandue dans les champs. En outre l'aménagement des forêts et l'arrachage des plants de pommiers sauvages (nommés surets, les fruits se nommaient hoquettes  pour en faire des porte-greffes amenèrent peu à peu la raréfaction du Malus silvestris dans nos forêts.

Le bourguignon Raoul Tortaire (mort vers 1113), ayant bu du cidre dans une taverne à Bayeux, le trouva exécrable.

Il ne pouvait être question que de la boisson fabriquée avec les fruits sauvages.

L'introduction en Normandie de nouveaux types de pommiers robustes à gros fruits, si différents de ceux qui vivaient dans les forêts et donnant un jus supérieur, marque une époque nouvelle.

Les formes introduites s'acclimatèrent par la dissémination naturelle des pépins et il se produisit de nouveaux hybrides entre les formes introduites et les races locales du Malus silvestris, chaque région arrivant peu à, peu à avoir ses variétés spéciales dont plusieurs se sont conservées plus ou moins intactes depuis le 16e siècle, jusqu'à nous.

Vers 1550, d'après le Sire de Gouberville et Julien Le Paulmier, l'introduction de nouvelles greffes venant de Biscaye se faisait encore en Normandie.

Il n'est pas douteux que dès le 12e ou le 13e siècle, d'après Leopold Delisle, la culture du pommier avait gagné la Vallée d'Auge. Elle mit plus de temps à s'étendre dans la Vallée de la Seine, puisque d'après Le Paulmier, vers 1540, la cervoise était encore la boisson habituelle de Rouen, et c'est vers cette époque que la culture du pommier s'établit dans le pays de Caux avant de s’établir dans le Pays de Bray." [Chevallier 1921]

Le genre Malus comprenant 30 à 50 espèces des zones tempérées de l'hémisphère Nord. Les pommiers sauvages ont des fruits de petite taille (moins de 3 cm de diamètre. [...] En fait tous les pommiers sauvages sont fertiles entre eux et avec les pommiers cultivés. La situation s'est compliquée avec la diffusion de la culture du pommier. Souvent, les pommiers sauvages ont été surgreffés sur place avec des formes cultivées, ou transplantées comme porte-greffe. [...] Cela explique la confusion persistante de la nomenclature. [Chauvet, 2018]

Le voyage des pommes vers la Normandie : la route de l'Italie (de la Rome antique)

De l’antiquité au Moyen Âge, les pommes de table se sont cultivées notamment sous Charlemagne.

Dans l’antiquité, Théophraste laissa une liste de six variétés : les sauvages, les cultivées, les précoces, les tardives, les douces, les épirotiques originaires de l’Epire. (en Grèce actuelle sous l’Albanie).

« Dans l'Antiquité, Théophraste ne mentionne que quelques catégories de pommes, mais Pline en cite une vingtaine. Olivier de Serres en énumère 50 en 1623, et Leroy 550 en 1873. On estime qu'au 19e siècle, 7000 cultivars ont été décrits dans le monde. [Chauvet, 2018]

 

Pline décrivit une vingtaine dit-on. Il cita le cidre fait avec des pommes écrasées sous la meule. Palladius (Palladius, agronome latin, inventeur d'un Calendrier rural) décrivait que les vergers étaient riches. L’importation de diverses espèces en Gaule contribua à enrichir le patrimoine pomologique. Les druides celtes récoltaient le gui sur le chêne et sur le Malus acerba appelé le Mâl.

L’importation de diverses espèces en Gaule contribua à enrichir le patrimoine pomologique.

Au premier siècle de l'ère chrétienne, Strabon (géographe et historien) évoque l’existence de la poire et de la pomme en Gaule.  J. Thaurin (archéologue Rouennais) trouva, lors de fouilles du sol de la ville de Rouen au 19e siècle, des pommiers en décoration sur des poteries gallo romaines fabriquées à Rouen entre 120 et 140 de notre ère. Hauchecorne et De Bouteville en déduisent : « Si cette observation était sûrement constatée, il faudrait en conclure que dès lors les fruits du pommier étaient non-seulement abondants, mais encore tenus en grande estime par nos ancêtres. » [Hauchecorne-De Boutteville, 1875]

Ainsi au fil du temps la culture du pommier s’est répandue en Europe, les premiers cultivars se sont hybridés avec diverses populations de malus sylvestris, et les semis de hasard ont donné naissance à de nouvelles formes parmi lesquelles les agriculteurs ont choisi les clones qui leur convenaient. Les meilleurs cultivars ont été échangés au cours de siècles d’un pays  à l’autre dans toute l’Europe nous dit Michel Chauvet.

« Le principal verger de la France, jadis comme aujourd'hui, ayant été la Normandie il faut interroger les archives et les vieux écrivains de cette province, si l'on veut présenter un ensemble de faits historiques se rattachant à la propagation primitive du pommier. On y voit, de l'an 1000 à l'an 1300, la haute noblesse, les évêques, les abbés favoriser de tout leur pouvoir les plantations de pommiers, tant dans les parcs et jardins, qu'aux champs et près des villages. » [Leroy, 1867-1879]

Le Clergé et les abbayes prélevaient déjà la dîme sur les pommiers et la boisson de pomme (cidre) 

Localement en Seine-Maritime on peut retenir la pomme :  De Richard (1000) ; De Bosc et de Bosquet (1200) ; De Montigny (1300) ;  De Charles Estienne, 1540 ; ainsi que la pomme Cœur de Bœuf, 1200 – On plantait sur le plateau de Caux des pommes de table à Pissy (1371), au Boisguillaume (1372). [Leroy, 1867-1879].

 

 

 

Les prémices du cidre cauchois et brayon : cidre des Abbayes

 

Au Moyen Âge, dès le 11e siècle, la pomme sauvage pour l’usage du cidre réservé au Clergé : usage du fruit sauvage comme boisson acerbe et médiocre.

« C’est au Moyen Âge que le « cildre » se répandit en Normandie grâce aux moines qui, dans le jardin de leurs monastères, privilégiaient la culture des pommes. Et l’on cite à ce sujet l’abbaye Saint-Wandrille qui, dès le IXe siècle, soignait des pommiers sélectionnés, importés notamment du Nord-Ouest de l’Espagne.[...] C’est au XIIIe siècle, avec l’invention de la presse, - la presse dite à longue étreinte, monumentale, installée dans un bâtiment spécifique, telle qu’on peut encore en voir une dans le bâtiment cidricole du château de Montaure (Eure), presse que le châtelain mettait à la disposition des producteurs de la région - que le cidre a pu se développer jusqu’au XIXe siècle.» [Patrimoine Normand, 2008]

 

Plus généralement dans l’Eure dans le Roumois-Routot ou dans le pays d’Auge, le cidre s’il était consommé restait une boisson réservée au clergé ou aux fermiers leur procurant, comme à Beaubec dans le pays de Bray. Ainsi, en pays d’Auge puisque vers 1100, la dime était notamment perçue sur le cidre était à Barneville et dans le pays d’Auge nous rappelle [Delisle, 1903] tout comme il était fait du cidre à Jumièges avec des pommes issues des forêts :  Delisle nous informe que les fruits des arbres sauvages furent pendant le moyen âge, employés à la confection du cidre.

 

Sur la rive droite de la Seine, ce sont donc les abbayes qui produisaient du cidre

 

« L.Deslile  rapporte qu’en 1183, Robert, comte de Meulan, autorisa les moines de Jumièges, dans la vallée de la Seine, à cueillir en forêt de Brotonne des pommes pour leur boisson et celle de leur serviteur. Le cidre obtenu était selon toute vraisemblance acerbe, pâle et assez médiocre. D’ailleurs, ces pommiers-là n’étaient pas toujours convoités pour leurs seuls fruits. Souvent on les déterrait pour les planter plus près de la maison ; alors ils ont pu se répandre par semis avec modification des caractères ou bien utilisés en tant que porte-greffe. » [Delisle, 1903]

 

L. Delisle rapporte également qu’à la fin du 13e siècle que les moines de Saint-Ouen possédaient, dans plusieurs domaines, des rentes de pommes de bois, qu’en 1339, dans la maison des religieux de Saint-Ouen, à Quinquempoist, on conservait un petit baril de verjus de pommes de bois. […] Il dit aussi qu’en 1338, à leur manoir de Quiquempoist, les moines de Saint-Ouen avaient un pressoir à cidre, et un tonneau ou baril rempli de cette liqueur. [Delisle, 1903] 

 

J. Sion le signale également :

 

« Les moines de Saint-Ouen possédaient dans plusieurs de leurs domaines des rentes de pommes de bois. C’est, en effet, avec des pommes sauvages que le cidre fut longtemps fabriqué dans notre région. Pourtant, de très bonne heure, on replanta dans la cour de l’habitation des entes arrachées dans les forêts. Le souvenir de ces vergers s’est conservé dans des noms de lieux qui datent de l’époque où le vocabulaire nordique était encore couramment employé ; il est peu de noms de villages dont la physionomie germanique et archaïque soit plus accusée que celui d'Auppegard, à 12 km. Au Sud-Ouest de Dieppe […] Or ces mots ont été formés des mêmes racines qui se retrouvent dans l'anglais Applegard : ils désignent des jardins plantés de pommiers. . S’il n’est jamais fait mention de ces vergers dans la Normandie orientale avant la fin du 15e siècle, quelques textes signalent cependant la fabrication du « suidre » ou « sidre », dès 1284, à Sigy ; dès 1302, à Fontaine-en-Bray ; dans les dernières années du 14e siècle, à l’abbaye de Beaubec. Vers 14oo, les curés percevaient la dîme des pommes dans les paroisses voisines de Montivilliers, d’Harfleur, de Saint-Romain-de-Colbosc, dans cette région humide et battue des vents où la vigne ne put persister. » [Sion, 1909]

Ce qu’Hauchecorne et De Boutteville avait déjà repéré.

« Ce n'est pas à dire cependant que la culture des pommiers à cidre fût absolument négligée dans la Haute-Normandie. En 1284, Michel Despinguet renonce, en faveur des religieux de Saint-Ouen de Rouen, au droit qu'il avait de prendre en leur prieuré de Sigy, à certaines fêtes de l'année, des redevances en vin, en cervoise et en cidre. A Fontaine-en-Bray, en 1302, nous voyons que le pressoir à pommes d'un malheureux paysan poursuivi pour dettes, fut estimé 5 sous tournois…… Mention en 1402, d'un fournil et d'un pressoir au manoir de Nicole, de Saint-Aubin, seigneur et curé de Saint-Aubin-sur-Cailly. [...]   A une exception près il n’avait qu’à Montivilliers que les religieuses cette abbaye se fournissaient de cidre par un autre corps du Clergé de la rive droite – les curés- qui en plantaient des pommes pour en fabriquer en limite nord est du pays de Caux, à Saint-Aubin-du Cailly au pressoir du curé pour l’abbaye du Beaubec où se faisait également le poiré, boisson très médiocre importance au tout début du 15e siècle.[...] A Montivilliers dès les premières années du 15e siècle, le cidre entrait pour une part importante dans la consommation habituelle des religieuses et des gens qui étaient à leur service. Elles s'en procuraient à Auberville, la Cerlangue, Gaineville, Harfleur, Mélamare, la Remuée, Rogerville, Rolleville, Saint-Aubin, Saint-Eustache, Saint-Gilles-de-la-Neuville, Saint-Laurent, Saint-Martin-du-Manoir, Saint-Romain-de-Colbosc, Sainte-Marie-au-Bosc, Sandouville et Sanvic, et il est à observer que très-souvent elles l'achetaient des curés des paroisses… »[Hauchecorne-De Boutteville, 1875]   

 

Pour reprendre la liste des pommes dont les noms de variétés sont connues de Leroy, il cite des variétés de pomme à cidre hormis celles déjà citées : De Richard (1000) ; De Bosc et de Bosquet (1200) ; De Montigny (1300) ;  De Charles Estienne, (1540) ; ainsi que la pomme Cœur de Bœuf, (1200).

 

« Variétés de pommes à cidre d’après Leroy : 

 

1402. Pommes de Rose, 1 boisseau pour faire du verjus (R. de B., p. 381.) » 6 s. » [ La pomme de Bosc , ou de Bosquet , ou d'Estranguillon , n'est autre que le fruit du Malus silvestris.

 

Bédane ou Bédangue ( à cidre) 1363, cité par Charles Estienne(1540)

De Castegnier (1370) Cité par Charles Estienne(1540)

De Bequet ( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Cappe ( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Cire ( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Coqueret( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Couet( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Courdaleaume ( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Feuillu ( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

D’Héroet ( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Mennetot( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Renouvet( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Sapin( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Souci( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

De Turbet ( à cidre) cité par Olivier de Serres (1600)

 

Sous charlemagne : 7 ; de 814 à Louis XII 1498 / 32  soit au total 129  de 768 à 1643 dont celles signalées par Etienne Bauhin, De Serres et Lectier» [Leroy, 1867-1879].

 

 

La route de la pomme et du cidre comme vecteur d’amélioration des pommiers à cidre  via l'Espagne.

 

Avant Chevalier [1921] le Marquis de Chambray écrivit ceci :

« La fréquentation des Normands avec les Biscayens par le commerce maritime, leur fit connoître l'utilité du cidre ; ils plantèrent des pommiers, apportèrent, de Biscaye, des greffes de ces fruits à cidre, et les premières pommes qu'ils recueillirent, furent appelées pommes de Biscait ; nom que les pommes conservent encore. Bientôt les pommiers se multiplièrent, et l'usage du cidre devint général. » [De Chambray, 1765]

Auguste Chevalier en 1921 introduit le premier la route des croisades comme vecteur d’importation de plants et de la technique de la greffe qui était pratiquée que dans les monastères :

« Quant à nos Pommiers à cidre de Normandie ils sont d'origine assez récente. Les premiers plants furent apportés d'Espagne (Castille et Biscaye) en Normandie à partir du 10e siècle et pendant les Croisades. Jusqu'au 11e siècle, on n'avait bu en Normandie que le cidre (pomacium) fabriqué avec les pommes sauvages récoltées dans les bois. » [Chevalier, 1942] 

PhilippeMarchenay  en 2008 résume le même contexte des échanges entre l’Espagne et les Normands :

« En Normandie, au 11e siècle, le cidre est déjà connu. […] Pour rendre le cidre meilleur, les vikings, qui occupent alors la région, font venir de nouveaux pommiers du Nord de l’Espagne, par bateau. Puis, sur les traces de Guillaume le Conquérant, les Normands emportent des pommiers en Grande-Bretagne. Pendant plusieurs générations, pommes et pommiers circulent en Europe, dans les bagages des armées et des voyageurs. » [Marcheney, 2008].

Philippe Marchenay est chercheur, rattaché au CNRS. Il travaille au sein du laboratoire d’éco-anthropologie et d’ethnobiologie. Ses recherches portent sur les territoires, la biodiversité et les productions localisées, le statut des animaux, l’alimentation, la nutrition et la perception gustative. Auteur de Des pommes, Collection sauvegarde, Gulf Stream Editeur, 2008.

Apparition du mot "Pomme".

C’est non loin de l’Espagne, de la Navarre et de le France que le mot pomme est apparu dans la langue française car en 1080 le terme « pomme » apparaît dans la célèbre Chanson de Roland. Il vient du latin populaire poma, mot qui signifie « fruit » et qui a remplacé le malum du latin classique. Ce dernier terme, dont le sens est « mal, mauvais », rend compte des mythes qui abondent dans bon nombre de cultures qui voyaient la pomme comme un symbole de débauche.[www.eurotoques.fr/petite-histoire-de-la-pomme] :

« Les blamer tous ? fait Ganelon. Pourquoi ?  Un seul a tort ; c’est Roland qu’on le nomme. Tenez : naguère il va trouver le roi. Il lui présente, en riant, une pomme : Chacun des rois, dit-il, sera votre homme. Sire, voilà leurs couronnes ! – ce preux.  N’a point souci qu’on l’égorge ou l’assomme. Qu’il meure donc ! et nous vivrons heureux. » Extrait de la Chanson de Roland

Auguste Chevalier nous renseigne sur le recours à la boisson du cidre du 11e siècle au 15e siècle en Normandie :

« A certains moments, par suite de la disette des grains (de 1095 à 1444), causée par le manque de bras (à l'époque des Croisades et de la Guerre de Cent Ans), l'agriculture étant alors très délaissée, il fallut renoncer dans certaines provinces à l'usage de la cervoise, et l’on constate que c'est précisément à ce moment que l'usage du cidre se répandit et que l'on commença à cultiver le pommier en Normandie.

Un arrêt en date de 1203 rapporte la défense qui avait été faite de fabriquer de la bière en Normandie, mais déjà quelques vergers de pommiers devaient avoir fait leur apparition. D'accord en cela avec l'abbé Rozier et avec A. Liébault, nous constatons que l'usage du cidre s'est brusquement développé en France à la fin du 12e siècle, et il est évident que la culture du pommier à cidre n'a pas pris naissance spontanément.

Tous les Pommiers à cidre de Normandie, bien qu'on puisse les distinguer en pommes amères, pommes douces et pommes acides, sont très voisins ; par contre, ils diffèrent beaucoup des pommes acerbes de nos forêts. » [Chevalier, 1921]

Ils ont donc pris naissance dans une autre région, et nous avons la conviction que cette région est le Pays basque dans le N. W. de l'Espagne où leur culture est actuellement très répandue.

La première vague : 

Du Pays Basque à la Bretagne et au Cotentin par le golfe de Gascogne 

Ce que nous révèle Chevalier :

« Il  est évident que la culture du pommier à cidre n'a pas pris naissance spontanément. Cela est d'autant plus certain que les Pommiers à cidre que nous cultivons dans le Nord-Ouest de la France diffèrent considérablement du Malus silvestris spontané dans les bois delà même région. Ce dernier les a certainement influencés, mais les Pommiers à cidre comme les Pommiers à couteau appartiennent au Malus domestica et ont comme ancêtre commun principal le Malus dasyphylla de l'Asie occidentale.

Tous les Pommiers à cidre de Normandie, bien qu'on puisse les distinguer en pommes amère â, pommes douces et pommes acides, sont très voisins; par contre, ils diffèrent beaucoup des pommes acerbes de nos forêts. .

Ils ont donc pris naissance dans une autre région, et nous avons la conviction que cette région est le Pays basque dans le N. W. de l'Espagne où leur culture est actuellement très répandue.

Les Basques ou Vasques formèrent dès la plus haute antiquité une nation vivant dans la partie occidentale des Pyrénées gauloises et dans le Nord-Ouest de l'Espagne. Ils étaient d'origine plus ancienne que les races celtiques de la Gaule. Ils avaient et ont conservé encore une langue très spéciale dans laquelle le nom du pommier est sagara ; nom peu différent du nom latin sicera, d'où est dérivé Sidre et cidre (en français), cidar (en anglais).» [Chevalier, 1921]

A propos du mot sicera, Chevalier [1921] rapporte : « Ce nom a été employé pour la première fois par Saint-Gérôme au iv« siècle, pour désigner le vin de pommes. Saint-Gérôme, originaire de Siyrie, était un érudit et ayant beaucoup voyagé, il a pu avoir connaissance de la culture du pommier en Espagne" pour la fabrication du cidre. »

Chevalier poursuit en ces termes : En Espagne, le Malus silvestris est spontané et le M. domestica a dû être introduit dès une haute antiquité. Il est donc possible que ces espèces se soient hybridées de bonne heure, donnant des variétés nouvelles, à pommes à peine mangeables, mais formant des arbres plus robustes que ceux qui étaient cultivés comme fruit à couteau. Or, de tous temps et dans tous les pays du globe, l'homme primitif a utilisé les fruits qu'il avait à sa disposition, pour en faire des boissons fermentées. Nous l'avons constaté à l'intérieur de l'Afrique où les peuplades noires les plus primitives, tirent parti de divers fruits de rosacées, d'anacardiacées, etc., vivant dans la forêt vierge pour en faire des boissons !

Nous n'avons malheureusement pas de documents sur les débuts de la culture du pommier à cidre chez les Basques, mais elle est sans doute très ancienne. Au Moyen Age, la Biscaye exportait du cidre en Normandie et jusqu'à la Méditerranée.

Dès l'époque gallo-romaine, le fond du Golfe de Gascogne était relié à la Normandie et aux îles anglaises par des routes maritimes et les Basques, à la suite des Romains, entretinrent des rapports fréquents entre ces pays. Ils avaient établi un relai au port de l'Aber-Vrach sur la côte de Bretagne, et une véritable navigation interpéninsulaire très suivie s'étendait de la Biscaye au port de Lorient, au Cotentin et au Pays de Galles. Or, de ces quatre points la culture du pommier à cidre a précisément rayonné, constituant quatre centres principaux de culture : 1er   le, N. W. de l'Espagne, 2° la Bretagne dans la région de Quimperlé, 3° le Cotentin d'où elle s'est étendue au reste de la Normandie et à l'W de la Bretagne, -4° le Devonshire en Angleterre.

La seconde vague :  

Des plants ou greffes apportées de Biscaye au Cotentin et les échanges entre l'Angleterre et la France.

Des greffes ou des plants de pommiers de la Biscaye durent être apportés sur les côtes du Cotentin dès le 10e siècle. » [Chevalier, 1921]

« Au 10e siècle au moment où les normands colonisaient les côtes de la Manche depuis l'embouchure de la Seine, jusqu'à la Hague, des Espagnols  s’installaient sur la côte du Cotentin, notamment près de Granville (R. de Félice.)

[« En Normandie, les Costentinois en ont cogneu premièrement l'usage par deçà, ce qu'on peut entendre par les plus vieilles et antiques fieffes de leurs terres faites aux charges de cueillir les pommes et faire les sidres. » (J. Le Paulmier.) « Au 10e siècle, au moment où les Normands colonisaient les côtes de la Manche depuis l'embouchure de la Seine, jusqu'à la Hague, des Espagnols s'installaient sur la côte du Cotentin, notamment près de Granville. » (R. de Félice.)]

« Au cours de la Guerre de Cent Ans et probablement aussi postérieurement, de nombreuses sortes de pommiers à cidre de Normandie ont été introduites en Angleterre (Norman’s) Il s’est donc établi depuis des temps très reculés, des échanges de variétés de pommiers, entre diverses régions, mais ces variétés transplantées loin de leur lieu d’origine, finissent par se transformer, soit qu’elles s’altèrent à la longe si elles sont multipliées indéfiniment par la greffe, soit qu’elles de modifient si elles sont renouvelées par semis.[Chevalier, 1921]

L’introduction en Normandie de nouveaux types de pommiers robustes à gros fruits, si différents de ceux qui vivaient dans les forêts et donnant un jus supérieur, marque une époque nouvelle.  Les formes introduites s’acclimatèrent par la dissémination naturelle de pépins et il se produisit de nouveaux hybrides entre les formes introduites et les races locales du Malus silvestris [Chevalier, 1921]

Nous reviendrons le devenir  des pommes à cidre d'Angleterre,  car à la fin du  19e siècle les anglais feront leur cidre avec pour moitié de quantité  de pommes à cidre à presser :  la pomme Michelin, incubée par Legrand, semeur et pépinier d'Yvetot du pays de Caux , principal artisan de la régénération d'un tiers des  pommes à cidre  menacées d'extinction dont la Doux Lagniel devenue la Vagnon. Quant à la Michelin aujourd'hui on peut dire qu'elle provient de la Bisquet du pays d'Auge elle-même issue de la Biscait.

Et le cidre du pays de Caux advint.

Au regard du 14 et 15e siècle, après le Guerre de Cent Ans, la démographie se trouve en pleine croissance. [Lepert, DRAC HN, 2014] C’est à cette période que se produit l’implantation des vergers, en lisière des forêts d’un côté et de l’autre dans la masure cauchoise selon plusieurs raisons : la paix retrouvée, le verger abrité dans la masure, le Clergé introduit le pommier pour tous adapté au terroir et à la masure, enfin une nouvelle boisson durable pouvant remplacer la cervoise, en l’absence de vin peu adapté au climat. En effet la viticulture n’a pas connu de vif succès, cultivée d’abord par les abbayes de Fontenelle et de Jumièges puis davantage après l’arrivée des scandinaves en amont d’Heurteauville et de la boucle de Jumièges et sans succès aucun sur l’approche du littoral malgré quelques rares tentatives. Les ducs Anglo-Normands voulaient être indépendant du royaume de France, mais la concurrence revenant dès l’annexion de la Normandie au royaume de France sous Philippe-Auguste sa culture disparut vite d’autant que me climat ne fut jamais favorable sous l’influence maritime. En pays de Caux, il fallait donc recourir à d’autres boissons d’ autant que le plateau n’est pas un château d’eau en dépit de ses quelques sources disséminées. Le paysan ne buvait guère de vin et davantage de cervoise avant qu’il en produise une nouvelle : le cidre.

« Des plants de pommiers se forment sur divers points du pays de Bray et du pays de Caux vers la fin du 15e siècle, mais surtout au siècle suivant, il est aisé d'en suivre les progrès [Hauchecorne/De Boutteville, 1875]

Brioux en 1925 nous signale La culture du pommier à cidre dans notre département ne date guère que de la fin du 15e  siècle.

 

En 1910 il décrit cette phase ainsi :

« Le pommier à cidre ne se répandit dans le pays de Caux que vers la fin du 15e siècle ; les grands propriétaires fonciers, suivant en cela l’exemple donné par l’Archevêque de Rouen, firent planter autour des bâtiments d’exploitation de leurs domaines ruraux, des entes qu’ils tiraient généralement du Roumois. » [Brioux, 1910]

 

Georges Dubosc, dans ses séries Par ci par là, en 1832 raconte un fait pas si anecdotique qu’il n’y parait :

« C’est si vrai qu’en 1484, un député de la Haute Normandie aux Etats Généraux de Tours, défendant notre région contre les délégués des baillages de Basse-Normandie et du Cotentin qui voulaient rejeter tout le poids des impôts sur nos pays au-dessus de la Seine, est obligé d’exposer que le pays de Caux souffrait du manque d’eau bet était absolument privé de boissons naturelles, n’ayant pas, comme les deux baillages, ses rivaux, des plants de pommiers et de poiriers.  Est-ce à dire qu’à cette époque on ne connaissait point le cidre dans la Haute-Normandie ? Est-ce à dire que parce qu’il n’y avait point alors de pommiers dans la Seine-Inférieure, on n’y buvait point la liqueur dorée qu’on y consomme maintenant si largement ?

Que non pas ! » Seulement, tous les pays situés sur la rive droite de la Sei,e faisaient venir leur queues de cidre de la rive gauche, particulièrement du Roumois et de la vallée d’Auge. […] Si on parcourt les archives municipales de la ville de Rouen, on trouve, à tout instant, la preuve de ces arrivages de cidre par bateaux, chargés de queues[1], de tonneaux et de ponsons, qui paient des droits variant de 5 à 6 sous, droits généralement affermés par des adjudicataires. C’est seulement vers la fin du 15e siècle que se formant dans le pays de Caux et dans le pays de Bray, de grandes plantations de pommiers semblables à celles de Basse-Normandie et qui ne feront que se développer très grandement pendant le 16e siècle.

C’est alors qu’on commence la création de nos vergers normands, de nos cours ou masures plantées de pommiers abritées des vents par de grands arbres formant comme une ceinture autour de la ferme. […] Lisez par exemple, ce qui se passa, en 1478, sur un domaine de l’Archevêché de Rouen au manoir de Fresne : « On desrocha, dit un des comptes, une demi-acre de terre dans le grand jardin pour planter pommiers et on planta cent chênes de 16 à 18 pieds de hauteur, afin de rompre, afin de rompre les vents qui pourraient grever ou abattre lesdits pommiers. […] Le prix des pommiers sur pied était assez cher dans ces premières années du 15e siècle, ce qui prouve encore leur rareté.  Dix pommiers, mis au manoir de Déville, coûtaient chacun 15 sous ; cent douze pommiers bâtards, plantés à Fresne-l’Archevêque, étaient vendus, la pièce, 20 deniers. Une autre coutume très curieuse – et qui s’est encore maintenue en Normandie, - témoignant elle aussi du prix fort cher des pommiers, était le bail à louage d’arbres déterminés dans les vergers. Cette pratique avait lieu principalement auprès de Rouen, à Boisguillaume, au Mont-Saint-Aignan, à Duclair, à Saint-Jean-du-Cardonnay et surtout au Val-de-la-Haye. »» [Dubosc, 1932]

 

[1] Une queue en Champagne variait de 266 à 396 litres

 

Quant aux premiers pommiers à cidre du pays de Caux, ils n’ont été plantés qu’à partir de la fin du 15e siècle avec des entes du Roumois à partir de la fin de la Guerre de Cent-Ans (1452-1475),  entes de variétés cultivées auparavant en pays d’Auge, Lieuvain, du Bessin et du Cotentin, voire de Biscaye et non plus avec des pommiers sauvages dont on les conservera pour les porte-greffes des plants des variétés déjà hybridées.

ENTE : Jeune branche, scion qu'on prend à un arbre pour le greffer sur un autre. In :  Dictionnaires le Robert

Après la paix retrouvée et le départ des Anglais (1452-1475) il aura donc fallu attendre près de 50 ans de pratique et d’usage pour que le cidre du pays de Caux soit désigné comme tel. 

Pour introduire la notion et sa description il fallut attendre presque un siècle pour que les auteurs et les spécialistes le qualifient : Celle de 1589 de Le Paulmier (1589) convient parfaitement pour désigner le cidre du pays de Caux.

Plusieurs raisons expliquent ce changement en pays de Caux d’autant qu’en pays de Caux l’eau potable a toujours manqué.  Plusieurs contextes peuvent expliquer comment cela s’est-il produit ?

 

Et le cidre du pays de Caux advint : La première raison

 

La première raison, je l’emprunte à Michel Lerond qui à propos du « Vin de pomme » rapporte que qu’il a fallu substituer au « vin de grains », la cervoise des gaulois, le « vin de pomme ». :

« Seulement connu en forêt, à l’état sauvage, le Malus sylvestris est progressivement mis en culture sous l’influence de coutumes venues du sud de l’Europe et pour échapper à la taxe que Louis XI avait imposée sur le vin. » Lerond, 1978

Les denrées alimentaires connurent des taxations de Charles VI à Louis XI. [Dupont-Ferrier, 1941]

Comme point de départ fut la raison tient aux directives de Saint-Louis (1226-1270) puis de Philippe le Hardi (1272) explique [Delisle , 1903] vis-à-vis des disettes du 13e siècle qui a conduit et propulsé deux siècles avant le pays de Caux le pays d’Auge et - jusqu’à Touques et la vallée de la Risle -  à produire du cidre comme boisson potable pouvant remplacer la cervoise, consommatrice de céréales car à cette époque le peuple se nourrissait de pain d’orge ce qui posait problème en cas de disette en raison de son affectation à la fabrication de la cervoise.  Ce que nous indique à juste titre :

« Si l’usage du cidre se généralisa vers le 16e siècle dans la Normandie orientale, c’est que la fabrication de la cervoise avait l'inconvénient d’absorber une partie importante des céréales récoltées. » [Sion, 1909]

« Le seul cas qui jusqu'à présent ait fait l'objet d'une enquête relativement étendue est celui du pommier à cidre.  Sa généralisation permit de rendre à la panification la part de la récolte d'orge (ou plus rarement d'avoine) utilisée jusque-là pour fabriquer la boisson la plus usuelle, la cervoise. La culture du pommier à cidre semble avoir pris son essor d'abord dans la vallée d'Auge, vers la fin du XIe siècle (premier texte en 1082), puis avoir gagné le reste du Pays d'Auge et le Bessin aux XIIe siècle, l'ensemble de la Basse-Normandie aux XIIIe et XIVe siècles. On ignore si la production du poiré, si essentielle dans les Bocages au XVIIIe siècle, a suivi une courbe parallèle ou plus tardive : les textes les plus anciens n'en font aucune mention. La Haute-Normandie, on le sait, ne suivit l'exemple bas-normand qu'avec un décalage sensible : les dernières conquêtes du cidre y datent seulement du XVIe siècle et elle semble être restée rebelle au poiré. » [Musset, 1992]

 

Et le cidre du pays de Caux advint : La deuxième raison

 

«Une légende assure que la qualité du cidre du Pays-de-Caux contribua pour une large part à la reprise d’Harfleur aux Anglais, en 1434.»

[Le cidre : organe des pépiniéristes, 1895] 

 

La seconde raison s’explique par la paix retrouvée après la guerre de Cent Ans. Le territoire retrouve une stabilité, de la main d’œuvre pour s’occuper d’agriculture dans l’intérieur du pays de Caux, et la démographie se trouve en pleine croissance.

En effet durant le Guerre de Cent Ans les affres de la guerre touchèrent sévèrement le monde rural et agricole : « La guerre de Cent-Ans et l'occupation anglaise furent pour la Normandie une période de désolation et de ruines, durant laquelle l'agriculture eut nécessairement beaucoup à souffrir. Le 21 janvier 1352, Charles VI avait établi un droit de huitième sur le vin et sur tous autres breuvages vendus au détail, pour les dépenses de la guerre contre les Anglais.  L'un des actes par lesquels Henri V, roi d'Angleterre, inaugura sa prise de possession de la Normandie ; fut la levée du « quartage de tous les beurages, c'est, assavoir, vin, cidre, cervoise et hochet) qu'il ordonna par ses lettres patentes du 7 mai 1410.» [Duval, 1896]

La Guerre de Cent Ans est un conflit multilatéral qui a impliqué nombre de belligérants, les royaumes d’Angleterre et de France et l’« État bourguignon » pour les principaux, ainsi que de nombreux acteurs secondaires. Elle s’est déroulée sur une période d’environ 116 ans, de 1337 à 1453 pour sa période la plus active. [ Dambrine, 2017]

La locution « guerre de Cent Ans » est récente. En effet, on en trouve les premières occurrences au XIXe siècle (Contamine 2012 / Dambrine, 2017).

Beaucousin L.A. raconte l’épisode de la Guerre de Cent Ans qui a touché dramatiquement le pays de Caux relatant des faits de 1415 consignés dans la Chronique de Pierre Cochon, p. 340 : et ceux de 1419. Ce pays de Caux a eu à souffrir des passages de l’armée anglaise.

« Tout le monde connait les désastres qui, pendant la première moitié du 15e siècle, accablèrent la France et spécialement la province de Normandie. Le 14 août 1415, Henri V, roi d’Angleterre, après avoir débarqué à Graville, vient mettre le siège devant Harfleur. Lorsqu’il eut réussi à s’emparer d’Harfleur, Henri traversa le pays de Caux pour retourner en Angleterre par Calais.  Fauville fut sa première étape, et l’on peut imaginer quelles calamités causa dans les environs une armée sans discipline, sans respecter l’âge ni le sexe. Une grande mortalité s’étendit sur toute la contrée, principalement vers Fauville et Baons-le-Comte. Cette dernière paroisse confinait à la principauté, dont les habitants eurent grandement à souffrir du fléau. […]  L’armée anglaise s’étant alors divisée pour aller attaquer les diverses forteresses du pays de Caux, plusieurs détachements passèrent par Yvetot, et, si nous en croyons la tradition, il aurait été presque entièrement brûlé par les soldats. […] Yvetot et la principauté resta moins de 18 ans entre leurs mains.

En 1432, un complot visant à livrer Rouen aux Français rata de peu. Le pays de Caux se souleva contre la domination anglaise en 1434. [Dambrine, 2017]

L’épisode de la Guerre de Cent ans : échanges entre l’Angleterre et la France

« Au cours de la Guerre de Cent Ans et probablement aussi postérieurement, de nombreuses sortes de pommiers à cidre de Normandie ont été introduites en Angleterre. Selon Hogg on désigne plusieurs variétés anciennes de Grande Bretagne sous le nom de Norman’s. Il s'est donc établi depuis des temps très reculés, des échanges, de variétés de pommiers, entre diverses régions, mais ces variétés transplantées loin de leur lieu d'origine, finissent par se transformer, soit qu'elles s'altèrent à la longue si elles sont multipliées indéfiniment par la greffe, soit qu'elles se modifient si elles sont renouvelées par semis. » [Chevalier, 1921]

Le territoire retrouve une stabilité, de la main d’œuvre pour s’occuper d’agriculture, dans l’intérieur du pays de Caux et en lisières. On s’appuie sur le transfert de compétences des fermiers, curés et moines qui faisaient le verjus de pomme et de cidre pour les abbayes depuis le 13e siècle, à l’abri des invasions et de la Guerre de Cent Ans ou devant importer du cidre de plus loin notamment de la Basse Normandie ou d’Espagne. Les clairières déjà repérées suite aux premiers défrichements du Moyen Age à Montigny étaient notamment considérées comme de bons terrains propices au verger comme l’atteste la pomme Montigny- [Luce, De Paumier 1589, Cahaignes, Travers, 1895]

Auguste Chevalier le rapporte également : « A certains moments, par suite de la disette des grains (de 1095 à 1444), causée par le manque de bras (à l'époque des Croisades et de la Guerre de Cent Ans), l'agriculture étant alors très délaissée, il fallut renoncer dans certaines provinces à l'usage de la cervoise, et l’on constate que c'est précisément à ce moment que l'usage du cidre se répandit et que l'on commença à cultiver le pommier en Normandie. » [Chevalier, 1921]

La Clairière de Montigny, au nord-ouest de Rouen dont altitude est de 136 m, se situe à la limite du pays de Caux, enchâssée au sommet de la forêt de Roumare, voisine de La Vaupalière.  Montigny comprend le village lui-même et un hameau, l'Essart, situé à 1 km au nord.  La commune est exposée à un « climat maritime », correspondant au Pays de Caux, frais, humide et pluvieux. La DREAL n’a pas situé Montigny au pays de Caux et pourtant en raison des indications précédentes tout laisse à penser qu’il y serait sous couvert forestier de la forêt de Roumare classée dans la vallée de la Seine. Faut-il rappeler que l’attitude du pays de Caux varie de 100 à 180 mètres d'altitude.

Et le cidre du pays de Caux advint : La troisième raison

 

La 3e raison s’explique par le rôle protecteur des seigneuries et des « agriculteurs » résidant dans leurs masures [Sion, 1909], entourées de fossés et talus pouvant abriter des vents marins des pommiers et poiriers au centre de la masure et/ou de la cour et s’explique par le fait que déjà depuis la fin du 13e siècle des arbres plantés sur les talus de l’enclos permettaient aux propriétaires et aux fermiers d’assumer leur propre besoin de bois du aux défrichements de grande ampleur. (Lerond, 1978] ; par le fait également du rôle qu’ont tenu les fiefs aidés de leurs fermiers résidant dans leurs masures déjà protégées des vents violents à organiser la plantation des entes de pommiers et de poiriers venus du Roumois, sur l’impulsion et l’égide de l’Evêché de Rouen après la Guerre de Cents Ans., en pays de Caux et en pays de Bray par ailleurs.

Ainsi poursuit Sion :  « C’est à la fin du 15e siècle, lors de l’œuvre de restauration qui suivit le départ des Anglais et la pacification du plat pays, que le pommier fut cultivé dans le pays de Caux et dans le Vexin. De grands propriétaires, Comme l’archevêque de Rouen, obligèrent alors leurs fermiers de planter les entes, souvent achetées dans le Roumois, après avoir essarté le sol et l'avoir « déroché » s’il était nécessaire. Le verger était établi dans une partie de la masure, souvent dans le jardin, près de la grange ; parfois, « afin de rompre les vents qui pourroient grever ou abattre les dits pommiers », on plantait, comme à Fresne-l’Archevêque, « 100 chesnes de 16 à 18 pieds de hauteur tout à l’entour ».  C’est peut-être de cette époque que date l’aspect typique des fermes cauchoises, avec les grands arbres qui surmontent leurs « fossés ». Parfois aussi, le verger excédait les limites de l’ancien jardin et l’on closait des champs voisins. La masure s’agrandissait, et l’extension de la culture du pommier correspond’ peut-être à un développement des prairies. […] au pays de Bray des fossés et lisières de taillis, qui entouraient jadis les masures, entremêles d’arbres de haute futaie ont été remplacés entre le 16e et le milieu du 17e siècle par des haies vives qui bordent les chemins afin de préserver la valeur acquise des prés. » [Sion, 1909]

Ce même constat est établi par Charles Brioux lorsqu’il évoque cet aspect dans sa monographie communiquée en 1910 auprès des membres de la Société Centrale d’Agriculture de la Seine-Inférieure : « Les levées de terre garnies de grands arbres qui donnent encore au Pays de Caux son aspect si caractéristique, protégèrent efficacement les jeunes plantations contre la violence des vents d’Ouest. » [Brioux, 1910]

Parfois aussi, le verger excédait les limites de l’ancien jardin et l’on enclosait des champs voisins. La masure s’agrandissait, et l’extension de la culture du pommier correspond peut-être à un développement des prairies.

Cet aspect fera l’objet ultérieurement d’un inventaire au pays de Bray pour repérer les traces d’anciens talus et fossés du pays de Bray car parait-il il en subsiste quelques-uns ici et là.

Revenons et attardons nous sur les talus fossés car il est noté qu'ils "auraient existé" durant au moins un millénaire avant de se trouver démantelé progressivement en pays de Caux et avant cela au pays de Bray.

 l'Etude suivante nous apporte quelques éclaricissements sur l'origine et la nature des talus-fossés :  sur le Droit privé et Institutions régionales, Études offertes à Jean Yver, Sous la direction de Société d'histoire du droit et des institutions des pays de l'Ouest de la France ; Fossés cauchois et normands, André Dubuc, p. 183-196 ; 1976.  In : books.openedition.org

 

« Du point de vue de la géographie agraire comme du droit normand, les fossés-talus ont toujours intrigué et posé divers problèmes d’interprétation, en particulier ceux du Pays de Caux, beaucoup plus élevés et apparents qu’ailleurs. Ils ont certainement répondu à des buts agricoles, à des moyens de protection et ils ont fatalement entraîné des conséquences juridiques encore mal connues et réglées de nos jours, à la surprise de beaucoup, par un arrêt du Parlement de Normandie de 1751. Leur ancienneté est certaine. [...] 

Si, en Pays de Caux, ils sont plus élevés qu’ailleurs, c’est que l’argile se manie facilement et que lorsqu’on a cru devoir y planter des rangées d’arbres, pour leur donner plus d’assise on a pensé à les surélever.

Sincénus (Voir l’ouvrage de Jules Sion citant le texte latin de Sincenus, p. 471. )  parcourant le Pays de Caux en 1616, entre Rouen et Dieppe rapporte dans son récit sa surprise d’avoir traversé « des bourgs en plaine ayant de loin l’aspect de forêts, parce que chaque maison est entourée de cours très larges et est environnée de tous côtés par des arbres très élevés à ce point que le sommet des arbres cache les maisons. 

et il ajoute  : En normandie, il te faut six jours entiers pour la traverser [...] On y trouve en abondance le poisson, le bétail, le blé ;  les pommes et les poires y poussent avec une telle profusion, qu'on les exporte dans les autres provinces et que le peuple s'en fait une boisson qu'il appelle cidre. » Repris par Gaguin. [ Sincerus, 1616]

Cette surprise manifestée par cet auteur latin est encore éprouvée de nos jours par ceux qui plus rapidement que lui le parcourent plus profondément. L’aspect agraire n’a guère changé depuis, bien que l’élevage des bovins s’y soit développé depuis un siècle, ce qui s’est traduit par une multiplication d’herbages, non plantés de pommiers comme les masures et seulement entourés avec des pieux en fer ou en ciment armé portant des fils de fer. Aujourd’hui même, ces talus maintenus sont parfois détruits par des tracteurs, après en avoir scié les arbres avec des tronçonneuses électriques. Le paysage agraire s’est donc modifié, si les talus demeurent encore nombreux au cœur des villages ou dans les grandes fermes isolées dans la plaine, sorte de panache de fierté et d’aisance.

Deux auteurs à notre connaissance, Moll et Sion, l’un au début du dernier siècle, l’autre au commencement du nôtre ont essayé, l’un en agriculteur et l’autre en géographe, de les expliquer et de les justifier2.

2Moll, Excursion agricole dans quelques départements du Nord, dans Mém. Soc. centr. agric. S.-Inf., t. VIII, 1835, p. 400 et 1836, p. 10 et 67.

Moll, à la demande du gouvernement a fait une excursion dans des départements au nord de la Seine vers 1833, en voiture, et il rapporte : « Depuis la Seine jusqu’au Pays de Bray, de Rouen jusqu’au Havre, tous, soient châteaux, maisons de plaisance ou exploitations rurales sont modelées les unes sur les autres. Elles sont placées dans une enceinte plus ou moins vaste, une cour comme on l’appelle ici, plantée en pommiers et entourée d’un fossé, derrière lequel s’élève un mur ou rempart de terre large et haut, sur lequel sont plantés trois ou quatre rangées de grands arbres : hêtres, ormes, chênes, d’une belle venue. Cette ceinture garantit les batiments, les vergers, les jardins et même les champs des vents impétueux de la mer. Cet avantage dans un pays élevé et voisin de l’océan compense bien la privation des points de vue qui en résulte. Le grand nombre de ces bocages dispersés dans la plaine forme un coup d’œil admirable. Mais ce n’est pas leur seule utilité. Il y a une grande valeur dans ces plantations, dans une contrée où le bois est aussi cher qu’il l’est ici. Elles fournissent le combustible de la ferme. On vend aussi maint bel arbre... On suit, en les exploitant, la méthode du jardinage, c’est-à-dire on n’enlève que quelques arbres des plus vieux chaque année, en ayant soin de ne jamais dégarnir la place. Ces enceintes ou cours ont depuis deux à douze hectares et plus d’étendue. Elles sont plantées de pommiers, sous lesquels croît une herbe touffue qu’on fait pâturer au piquet ou tière3.

3Le terme tière est encore employé dans le Pays de Caux. On emploie aussi le verbe entierrer ; il signifie attacher un bovin par un collier de cuir au cou avec une longue chaîne de fer terminée par un anneau rond que l’on passe dans un piquet de fer comme une grosse pointe et que l’on enfonce en terre avec un maillet à long manche. C’est ce piquet qu’on appelle tière : mettre un animal au tière. Moll dit que les vaches étaient ainsi mises dans les cours masures, ce qui est possible. De nos jours, on ne met plus que les taureaux plus ou moins furieux, que l’on attache au pied. Dans les cours masures de nos jours, on met librement les jeunes veaux (bétons). Du temps de Sion, les vaches étaient mises au tière dans les champs, en longues files, et les domestiques venaient tous les trois ou quatre heures les changer de place. Ce spectacle champêtre du Pays de Caux, s’est modifié depuis que l’on fait usage des clôtures électriques déplaçables. Le terme tière est encore employé dans le Cotentin, avec le même sens que dans le Pays de Caux. Dans cette région, de la Manche, on emploie le mot tiérée, pour indiquer l’espace circulaire qu’un bovin peut parcourir avec sa chaîne.

 

 

Des issues sont pratiquées dans le rempart et sont fermées de barrières... » Moll exploitait un domaine important ailleurs qu’en Normandie et l’un de ses buts était d’inciter les grands propriétaires terriens à utiliser les méthodes modernes, à les faire connaître autour d’eux et pour lui de découvrir leurs initiatives, leurs réussites ou leurs déboires dans leur entreprise.

Cette enquète peu utilisée se relie à l’ouvrage de Jules Sion sur les Paysans de la Normandie Orientale, paru au début de ce siècle et toujours bien actuel. Ayant parcouru les deux départements axés sur la Seine en bicyclette il écrit : « Arbres fruitiers et bâtiments sont protégés contre le vent par les « fossés » dont l’enceinte rectangulaire délimite la masure, comme partout en Normandie. On appelle fossé, non une rigole plus ou moins profonde, mais une levée de terre, une « banque4 » dressée avec des mottes de gazon et des pelletées de limon, large de 1 m 50 à 3 m à la base, de 0 m 70 à 1 m au sommet ; quelquefois, elle est assez haute pour cacher l’intérieur de la ferme.

4Banque, mot dialectal fréquemment employé au nord de la Seine, équivalent au mot levée et talus. Grimper sur la banque équivaut à grimper sur le talus.

Sur toute la longueur, elle est surmontée par des arbres de haute futaie, des hêtres près d’Yvetot, des ormes près du Havre, des chênes, des frènes, des sapins, disposés sur deux ou trois rangées. Tous ceux qui ont visité le Pays de Caux ont conservé dans leur souvenir la silhouette de ces arbres rigoureux, régulièrement alignés, presque de même taille qui cachent chaque ferme par un rideau de verdure. C’est là une des beautés les plus originales de ce pays et c’est un élément de sa richesse. Dans cette région dépouillée de ses forêts depuis plusieurs siècles, les ormes et les hêtres qui poussent si drus atteignent une grande valeur...5 » Moll et Sion concordent dans leurs observations.

5Sion (Jules), Les paysans de la Normandie orientale (thèse de géographie) Paris, 1908. Cet ouvrage qui peut apparaître ancien est encore fort utilisé. Devenu très rare et fort recherché, il n’a pas d’égal pour les deux départements de Haute-Normandie, p. 471, les masures).

Il s’agit là d’un type agraire plus accentué dans le Pays de Caux, plus faible dans le Pays de Bray encore visible sur la rive gauche de la Seine, dans le Roumois, mais presque inexistant dans le Vexin. Il semble bien que depuis la Révolution de 1789, ce mode de création de fossés-talus a été abandonné. Les grands domaines avec leurs terres environnantes, fermes seigneuriales autrefois, demeurées longtemps dans les mêmes familles, sont entourées de ces talus plantés. Dans de nombreux villages demeurés stables, de petites exploitations, même des chaumières avec leurs petites masures sont également entourées de la sorte y compris de nombreux cimetières mais seulement dans le pays de Caux6.

6M. Fauvel, préparant actuellement une thèse d’histoire et de démographie sur son canton natal de Goderville et le connaissant fort bien, m’a rapporté que son père, journalier agricole, durant la période d’hiver après les battages était souvent sollicité pour réparer les talus-fossés. A sa connaissance, il n en a fait qu’un seul à Ecrainville et encore à la demande d’un propriétaire mécontent de ce que l’un de ses prédécesseurs ait fait abattre deux des quatre côtés du fossé de sa cour masure et le lui a fait refaire avant 1939, pour avoir une cour plus équilibrée et plus logique. Il n’est pas rare dans cette commune de voir des chaumières entourées d’une cour d’une trentaine d’ares, avec un talus-fossé planté, mais surtout celles construites avant 1789. En général, ce sont les fermes grandes ou petites et surtout les grands domaines qui étaient entourés d’un fossé planté.

Les arbres des fossés servaient aux fabriques pour la réparation des églises et des clochers7.

7Manneville (P.), Les arbres des cimetières du Pays de Caux au XIXe siècle, dans « Les eaux et forêts en Normandie » (actes du 8e congrés des sociétés historiques et archéologiques de Haute-Normandie, Lyons-la-Forêt, octobre 1973, offset, lmp. adm. de l’Eure. (En dépôt aux Arch, de la S.-Mme) pp. 97-107.

Les habitants continuent d’ailleurs d’appeler fossés ce qu’il serait logique d’appeler talus. Cette mutation est due à ce qu’antérieurement le fossé marquait la limite de la propriété, mais celui-ci non entretenu depuis longtemps a pratiquement disparu, si bien que le talus encore appelé banque, est toujours appelé fossé.

Sans doute, avant l’apparition du pommier, les talus-fossés n’étaient pas nécessairement plantés, mais ceux-ci dans un terrain détrempé par les eaux, se déracinent facilement, si bien que l’on a dû songer aux arbres de futaie pour les préserver de l’action brutale des vents. A l’intérieur d’une cour-masure, les vents sont apaisés, la température est plus douce que dans les champs et les vents coulis à ras du sol dessèchent moins cette terre argileuse qui durcit rapidement et contrarie la pousse de l’herbe. A leur origine, les fossés ont dû indiquer un autre but : une limite qu’on ne devait pas franchir. Les masures8 étaient entourées, soit d’une haie vive9, soit d’un fossé qui faisait mur. Sous l’ancien régime, à cause du droit de parcours mais aussi des dîmes, on ne pouvait clore à sa volonté.

8Masures : sens provincial, la cour plantée entourant la maison d’habitation et les batiments agricoles d’un cultivateur. « On appelle masures en Normandie, les terrains en campagne, enclos de haies, fossés ou murs, en nature d’herbage et ordinairement plantées d’arbres fruitiers ». (Journal des arrêts des cours royales de Rouen et de Caen, t. VII, 1827, p. 41).

9Haie vive ou haie de plantes vives : généralement en épine blanche, mais aussi charme, coudrier, houx. Pour les bornes de coin, on ne tolérait comme pieds corniers que les pieds d’épine blanche, le chêne et l’érable. L’épine noire, le saule, le peuplier était considéré comme usurpateurs à cause de leurs racines et rejets. Dans le pays d’Auge, les harts d’osier qui ligaturaient les jeunes plans aux jalons ont été remplacés par du fil de fer, mais dans toute la Normandie, on considère que le côté de la haie ou le fil de fer est tordu et serré, appartient en droit au propriétaire pour l’ensemble.

 

On se trouve donc, dans cette région de champs ouverts, au centre d’un ancien système agraire qui a perdu sa signification, mais qui la conserve suffisamment pour servir de référence, avec les avantages agricoles que la cour masure pouvait tirer de ces talus-fossés. On comprend alors que Maupassant, dont toute la jeunesse espiègle s’est passée dans un petit château de Grainville-Ymauville, entre les marchés bien cauchois de Fauville et de Goderville, jouant et vivant avec les enfants du village, ait dépeint, devenu adulte, avec une précision touchante, les fossés-talus de son enfance et rendu leur curieuse atmosphère : « La cour de ferme enfermée par les arbres semblait dormir. L’herbe haute où les pissenlits jaunes éclataient comme des lumières, était d’un vert puissant, d’un vert tout neuf de printemps. L’ombre des pommiers se ramasssait en rond à leurs pieds et les toits de chaume des batiments, au sommet desquels poussaient des iris pareils à des sabres fumaient un peu comme si l’humidité des écuries et des granges se fut envolée à travers la paille... Il y avait là, dans le creux du fossé, un grand trou plein de violettes dont l’odeur se répandait, et, par dessus le talus, on apercevait la campagne, une vaste plaine où poussaient les récoltes avec des bouquets d’arbres par endroits et de place en place, des groupes de travailleurs lointains, tout petits comme des poupées, des chevaux blancs pareils à des jouets, traînant une charrue d’enfant poussée par un bonhomme haut comme un doigt...10 » Maupassant a traduit simplement la sorte de sécurité, de tiédeur, de douceur du temps que l’on éprouve à l’intérieur de ces cours masures, protégées par les talus élevés et leurs arbres défiant les vents furieux du large.

10Maupassant, Contes et nouvelles (T. I, bibl. de la Pléiade, 1974) : Histoire d’une fille de ferme, p. 226.

Ailleurs qu’en pays de Caux, ces fossés-talus étaient beaucoup moins élevés, notamment dans le pays de Bray voisin, demeurant faiblement perceptibles, couverts non plus de rangées d’arbres de futaie, mais d’une haie de plantes vives, rarement d’épine blanche ou noire, mais plutot de coudrier, de charme, d’orme, aussi de houx. Ces haies que l’on laisse pousser à dessein, sans les couper par le haut, forment de place en place des « têtards » à grosses têtes, comme des saules au bord des rivières. Ils sont coupés tous les six ans et ramenés à une hauteur de cinq à six pieds, travail d’hiver pour les ouvriers agricoles à demeure dans les fermes, fait à la serpe et permettant de confectionner des fagots appelés « bourrées », servant au chauffage rapide dans les grandes cheminées d’autrefois. Ces talus affaissés par le temps et par les bestiaux qui venaient s’y réfugier contre les vents et les pluies ne sont plus guère apparents. Ce talus, si médiocre qu’il ait été, avait une signification en partie oubliée.» [Dubuc, 1976]

Le premier à évoquer ce changement de paradigme fut Féret en 1855.

« Au 15e siècle seulement le cidre paraît avoir commencé à l'emporter sur la boisson rivale, l'insuffisance des récoltes provoquant quelquefois des mesures prohibitives de l'emploi des grains à tout autre objet qu'à l'alimentation publique mais cette substitution s'opéra sans doute assez lentement, car ce n'est qu'en 1692 que l'on rencontre les statuts qui régissent et organisent la corporation des marchands de cidre à Rouen. » [Féret, 1855]

C’est donc à ce moment que l’évêché de Rouen obligèrent leurs fermiers à planter  les entes du Roumois sur le relief du plateau de Caux battu par les vents, dans ses masures, cours, pourpris et vergers (closages).

« Des plants de pommiers se forment sur divers points du pays de Bray et du pays de Caux vers la fin du 15e siècle, mais surtout au siècle suivant, il est aisé d'en suivre les progrès. » [Hauchecorne et De Boutteville, 1875]

« La culture du pommier à cidre dans notre département ne date guère que de la fin du 15e siècle. » [Brioux, 1925]

Yvetot : un exemple de l’implantation de pommier et vergers dont témoigne le terrier de 1566, de la Principauté d’Yvetot que L.A. Beaucousin, historien a traduit du vieux français à la fin du 19e siècle. [ADSM 76] :

Ce témoignage est très important à signaler « in situ » comme la présence des pommiers au pays de Caux et dans la principauté d’Yvetot même. C’est le terrier de la principauté d’Yvetot qui témoigne de la présence de pommiers plantés et de closages et vergers à Yvetot. Ce terrier datant de 1566 rédigé à la demande du prince d’Yvetot, Martin du Bellay nous décrit les fiefs et propriétés de cette époque nommées masures dont celle de Jehan Houel.

Rarement les terriers décrivent la nature foncière et de ses biens avec tant de précision. Le plus souvent nous pouvons consulter un plan mais dans ce cas c’est l’inverse : Il existe le descriptif en l’absence du plan ; égaré ou aujourd’hui parti en Amérique.

C’est L.A. Beaucousin, historien yvetotais qui la transcris du vieux français dans sa langue commune de la fin du 19e siècle, que j’ai retranscris moi-même à partir de ses écrits archivés au Département de le Seine-Maritime.

Voici des extraits du plan terrier de 1566 transcris par Beaucousin à la fin du 19e siècle avant la parution  de son histoire de la principauté d’Yvetot (1884)  : 

« Jehan Houel tient une pièce de terre en masure assise au bourg d’Yvetot contenant une acre demye vergée ou envyron édifiée de maisons, close et plantée […] Idem je tiens par droiture de fief la propriété franchise de coullombier à pied une pièce dessus la terre de la dite principauté d’Yvetot[…] Idem  Je tiens une autre pièce en closage contenant trois acres trois vergées assise au dite Yvetot[…] Item  une autre pièce de terre contenant sept acres   […] Idem  Tient une autre pièce de terre contenant trois vengées ou envyron partye d’un closage  […] Idem Une autre pièce de terre  contenant ½ acre ou environ assise au dit Yvetot près les monts […], un espynne dessus plantée[…] D.B. la sente ou chemyn tendant du dit Yvetot a Calvare […] -Idem  Je tiens une pièce de terre contenant neuf acres, partie en  cinq pièces qui sont partie du fief Lhuilllier – La première pièce en masure contenant 1 acre ou envyron assise  au dit Yvetot, bournée D.C.  ladite Grand rue d’avant la ville D.C. et D.R. en pointe la sente  tendant à la sente des foryères […] La seconde pièce contient trois vergées ou environ partye en closage […] – La troisième contenant  deux acres ou  envyron […] – La quatrième pièce contenant quatorze acres  ou envyron […]- La cinquième et la dernière pièce contient deux acres […] Le chemin qui mayne d’Yvetot à la justice […] Idem. Je tiens une autre pièce de terre contenant trois acres ou envyron assise au dit Yvetot[…]Idem Je tiens vingt-deux acres trois vengées ou environ en deux pièces […] Idem.  Une autre pièce de terre contenant une acre envyron aussy close et plantée comme elle est, assise au D. Yvetot, bournée […] le grand chemin tendant du dit bourg au manoir du chemyn […] et ladite pièce partye d’un clos à pommiers du dit Houel. Une mare séante au-dedans. »

« L’utilisation d’arbres de haute futaie, pour protéger les arbres fruitiers de la parcelle répond à la nécessité d’abriter les enclos des vents dominants dans le pays de Caux. (…) La cour seigneuriale ou la basse-cour de nombreux manoirs était en effet plantée d’arbres fruitiers, en général des pommiers, comme l’attestent l’Atlas de Trudaine (…) On notera cependant que ce type de clôture caractérise le plus souvent des manoirs d’importance secondaire »

 « Des aveux des XVIe et XVIIe siècles, l’Atlas de Trudaine du XVIIIe, de nombreux plans cadastraux anciens du début du XIXe et des photographies du début du siècle dernier présentent les cours des manoirs normands plantées d’arbres fruitiers. Ces cours vertes, qui ressemblent fort à des vergers, ne doivent pas nous égarer : elles répondent sûrement moins à la volonté d’agrémenter le manoir (qu’il ne faut cependant pas exclure) qu’à celle de rentabiliser un terrain, qui, on l’a vu, pouvait être très étendu. Car la cour est avant tout, dans une majorité de manoirs, l’enclos où se trouvent réunis les bâtiments utilitaires : une basse-cour au sol boueux, où circulent charrettes, serviteurs et animaux de la ferme. » [Pagazini, 2014]

On trouve transmis la trace de closages chez : Jehan Houel, Jehan Caumont, Pierre Delamare, Allain Tassin, Loys Greffier, Wandrille Daupmalle, Cyril Nepveu, Marin Nepveu, Pierre Cornu, Andrieu Crevel, Raoullin Letellier, Guillaume Nepveu, Estienne Letellier, Pierre Basin l’Aisné, Nicollas Deniscourt, Nicollas Dubosc, Guille Lelièvre, Jehan Gombault.

Dans la principauté d'Yvetot : 

A Yvetot et Saint-Clair-sur-les-Monts (1240). La toponymie du hameau du Verger. Vergié, (Arch. Nat. P. 303-130). Le Verger, 19-11-1420 (Arch. S.-M. Tab. Rouen)[dicotopo.cths.fr]

Le closage  au 16e siècle autrefois nommé Clausage entre le 10e et 15e siècle : en Normandie, petit verger entouré de haies, avec ou sans habitation, H. Moisy, Noms de famille normands, [Littré, définition Closage]

David Marescot rapporte à propos de l’existence du hameau « le Verger qui comportait une ferme et un Manoir sur les communes actuelles de Saint-Clair-sur-les-Monts et d’Yvetot au temps Du Royaume d’Yvetot :  « Au 11e siècle, Jean 1er d’Houdetot et Colard, son frère, de 1096 partent avec Robert, duc de Normandie en Terre-Sainte du temps des Croisades. Ils reviennent en 1099. [G.David-Marescot, De César à Henri IV au pays des Calètes, 1955 ]

G.David-Marescot estime à ce titre que c’est à partir de cette  époque que les premiers vergers sont créés en pays de Caux ». L.A. Beaucousin dans son registre des fiefs et arrières fiefs du baillage de Caux [G.David-Marescot, De César à Henri IV au pays des Calètes, 1955 ]

« En la paroisse de Sainte-Marie-des-Champs et de Saint-Clair-su-Les-Monts, il y a un quart de fief nommé le Verger, appartenant à Marc de Houdetot, tenu du Roy nostre sire ». [Registre des fiefs et arrière-fiefs du bailliage de Caux en 1503, Auguste Beaucousin]

Cette terre possédée par la famille Houdetot aurait été obtenue par un don royal comme le mentionne G.David-Marescot. Ce fief fut constitué d’un manoir sur lequel fut construit l’actuel château de Marseille -Maseille - , comme l’atteste L.A.Beaucousin qui dans le terrier de 1566 précise qu’il possède bois taillis, collombier à pied…[G.David-Marescot, 1955 ]

Ainsi G. David-Marescot reprenant des informations dans Liste des fiefs de Beaucousin mentionne que le fief du Verger était déjà situé - le 3 février 1428 - sur la paroisse de Saint-Clair-sur-les-Monts. [G.David-Marescot, De César à Henri IV au pays des Calètes, 1955 ]

(Aujourd’hui, une des masures de l’ancien fief du Verger se trouve désormais sur la commune d’Yvetot, à côté du C.D.I.S qu’on peut observer de la rocade, sur sa droite juste avant le rond-point du C.D.I.S. venant d’Auzebosc.

Le dictionnaire topographique nous renseigne sur l’origine d’un des hameaux historiques du territoire de l’ancienne royaume devenue principauté fin du 16e siècle : Le Verger dont des terres appartiendront à la fin du Moyen Âge à un dénommé Legrand qui par ailleurs en possédait également entre Yvetot et la paroisse de Sainte-Marie-des-Champs à l’endroit même où M. Legrand, le grand-père eut de mémoire d’homme ses premières pépinières, agrandies un demi-siècle plus tard par l’acquisition d’autres pépinières par P.M. Legrand, père, sur le quartier clos des Parts pour en faire la pépinière de ses variétés d’élite et de collection, prêtes à partir en Europe dès 1884. Quant à son fils, en association avec sa mère, veuve, il poursuivit mais de courte durée car il mourut précocement 10 ans plus tard.

Le Verger, fief de l’ancienne principauté d’Ivetot (Yvetot)

Verger (Le), SEINE-MARITIME (76) YVETOTSAINT-CLAIR-SUR-LES-MONTS

In : Dictionnaire topographique de la Seine-Maritime, p. 1054

Vergié, (Arch. Nat. P. 303-130)

Le Verger, 19-11-1420 (Arch. S.-M. Tab. Rouen)

En la paroisse de Sainte-Marie-des-Champs 1/4 de fief nommé le Verger, 1503 (Beaucousin 210 — Vic. de Caudebec, serg. de Baons-le-Comte)

La commune du Vergier, 516 (Arch. Vauquelin Aveu)

Le Verger, 1566 (Yvetot Beaucousin : « nommé autrefois le fief Bouquelon »)

Les communes du Verger ; sentes de Bures au Verger ; sente du hamel du Verger au hamel du Bailly ; sente d’Yvetot au Verger ; grande rue de Reffigny tournant au Verger ; commune du Verger ; sente qui mène au Verger ; rue commune de Réffigny au manoir du Verger ; grande rue de Reffigny tournant au Verger : Le Verger (Jacques de Houdetot escuyer) ; chemin du Verger à Réffigny ; chemin du Verger et chemin du Verger à Bailly  (Jacques de Houdetot escuyer) ; sente de Saint-Clair au Verger ; chemin aux communes du Verger, la rue commune de Reffigny au Verger, Sente du Verger à Bailly (Charles Legrand escuyer)

Charles Legrand possédait d’autres terres décrites dans le terrier de 1566 par Beacousin

Rue commune de Reffigny ; Chemin de Rethymare à Ste Marie des Champs ; Chemin vers Ste Marie des Champs ; Rue commune de Reffigny au Verger ; -Sente du Verger a Bailly ;

Le Verger, 1876 (Tougard Yvetot 22) [dicotopo.cths.fr]

Dans la Géographie du département de la Seine-Inférieure co-écrit par les Abbés J. Bunel et A. Tougard, il est rapporté que les Sires d'Yvetot  participèrent à la bataille d'Hastings puis aux Croisades de 1096 ; 1147 ; et avec Saint-Louis (1270). Un des seigneurs d'Yvetot a possédé le fief dudit Verger. [Abbé Tougard, 1876]

 

Sur le E et T d'Yvetot : Le Verger

A l'endroit de l'ancien fief du Verger (Vergié) au dessous de la dite ferme de la Rétimare, à côté de la Mi-Voie et limitrophe à Saint-Clair sur les Monts.

Le verger - IGN remonter le temps, carte d'Etat-Major du 19e siècle.

Ci-dessus, Le Verger 1947 - IGN remonter le temps

La masure du Verger (Seigneur d'Houdetot) dont l'origine se situe au moins au  14e siècle d'après L.A.Beaucousin si ce n'est avant peu après  le  retour des Croisades faites avec le Sire d'Yvetot.

La partie en haut est sur Yvetot, l'autre partie dessous est sur la commune de Saint-Clair.

 

La locution clos-masure est née à Saint-Clair sur les Monts et à Yvetot,  au hameau du  Verger en 1968.

A l'insu des propiétaires en 1967-1968, c'est cet endroit  - masure avec château ayant remplacé le manoir, avec colombier, jardin nourricier, vergers, fossés et talus plantés, ferme etc... -  qui a  servi de décor et de toile de fond à M. Warnier et à Mme Garofalo  pour leur projet de diplome d'archictecture  publié en 1968.  Ce sont eux qui finalement  ont inventé la locution  "clos masure"   dont je ne goûte guère pour multiples raisons déjà exprimées en amont notamment pour ce qui a inauguré après eux, quelques décennies plus tard - comme au quartier du Fay à Yvetot - de nombreux lotissements au sein des anciennes "masures" et "cours" n'étant plus à cette époque de véritables "théâtre d'agriculture"/

Faut-il rappeler ci que déjà la locution cour-masure avait été inventée par les notaires dès 1866 pour vendre les masures aux particuliers, aux parisiens et aux rouennais  préférerant acheter une cour-masure qu'une "masure"  connotée sur l'image des contes de Maupassant en cette fin de 19e siècle.

masure = maison délabrée

Question d'époque, question immobilière et de plus value sûrement avec un vocable plus alléchant.

Les annonces immobilières à partir des années 1866 sont éloquentes.

Depuis le 17e siècle les gens de la ville achetaient les fermes  les masures et cours comme placement,  aux beaux rendements  comme le décrit le terrier de la Principauté d'Yvetot de 1566. Au 18e et au 19e siècle on a commencé à les acheter comme résidence secondaire ... loin de la ville, à la campagne dans un havre "du vivons heureux, vivons caché" au coeur de ma masure.

Aujourd'hui on y  fait construire des maisons modernes qui n'ont plus, à vrai dire,  un caractère cauchois dans ce soi-disant "clos-masure" où le talus semble parfois  même menacé de disparition ... 

Paradoxe contemporain du lieu : voir la masure, la cour  se délabrer, se démambrer ou voir les voir renaître sous la forme de  clos-masure  puisqu'il est moins en moins théâtre d'agriculture accueillant pommiers et poiriers, vaches, moutons ...

 

Affiche pour l'exposition cours-masures, oeuvre picturale d'Odile Penelle 1979, avec l'aimable autorisation de Didier Le Scour.

 

L'Abeille Cauchoise, 1838, ADSM 76

L'Abeille Cauchoise, 1861, ADSM 76

L'Abeille Cauchoise, 1866, ADSM 76

L'Abeille Cauchoise, 1868, ADSM 76

puis l'avènement de la locution  clos-masure à Yvetot, hameau du Verger

CROQUIS-DESSIN DE GAROFALO WARNIER 1968, qui donna naissance à la locution "clos-masure",  avec leur aimable autorisation :  projection imaginée au Hameau du Verger, Yvetot (voir cliché IGN 1947, déjà montré ci-dessus, dont vous reconnaitrez les traits qu'ils ont reproduits en vert)

Voilà ce que relatent ces deux architectes à propos de l'invention de la locution "clos-masure"

 

« Chaque unité agricole possède sa végétation propre sous la forme d'un vaste clos-masure (ou cour-masure). Le clos-masure qui «marque» l'emplacement d'un établissement humain est un quadrilatère très régulier d'une surface moyenne d'un hectare (ils peuvent parfois être de trois hectares ou plus), fermé d'un talus de 1,50 mètre à 2 mètres planté d'arbres de haut jet (hêtre, chêne, orme, frêne) sur une ou deux rangées.

Dans la prairie ainsi constituée se regroupent l'habitat, les bâtiments agricoles d'une unité agricole : le clos-masure favorise dans cette région ventée un micro-climat localisé dont bénéficient habitants et bétail. Cette prairie est souvent parsemée de pommiers à cidre.» [Les clos-masures du pays de Caux, Garofalo/Warnier, 1974]

 

 

Et le cidre du pays de Caux advint : La quatrième raison. 

La transmission des savoirs du Clergé aux agriculteurs

La 4e raison réside dans le fait que le cidre d’alors réservé au Clergé se devait d’être propagé par la transmission des savoirs des moines et des curés.

En Pays de Caux, notamment à l'abbaye de Fontenelle, les vergers des moines étaient protégés dans leur enclosoù ils cultivaient leurs fruits et leur vigne.  Ces savoirs ont pu être transmis aux fermiers, aux agriculteurs  afin de  s’en emparer à plus grande échelle,  pour tous,  pour les paysans eux-mêmes, pour les journaliers, les villageois des paroisses, pour les seigneurs, les notables autant cauchois que brayons dans cette période de la paix retrouvée où la main d’œuvre était à nouveau disponible  après cette longue guerre de Cent Ans.

Je vous propose de revenir ici sur les vergers du 9 et 10e siècle des abbayes en pays de Caux.

Et le cidre du pays de Caux advint : La cinquième raison. 

Une cause indirecte : la mévente du colza et du lin.

Sans situer la période précisément Charles Brioux, grand spécialiste en Agriculture rapporte ceci : « Une autre cause contribua indirectement à la multiplication du pommier à cidre : ce fut la mévente du colza et du lin, qui amena les cultivateurs des plateaux limoneux du Pays de Caux à engazonner une fraction plus importante de leurs terres ; les nouveaux herbages entourant les fermes furent en grande partie plantés comme leurs devanciers. Dans le pays de Bray, le nombre de pommiers s’accrut aussi parallèlement à l’engazonnement progressif du sol. » [Brioux, 1910]

 

Et le cidre du pays de Caux advint : La cinquième raison. 

La Science de l'Arboriculture, l'art de la Taille, l'art de la Greffe et l'art du Semeur et du Pépinier se distille dans des ouvrages qui deviendront des points de repère et de référence pour l'amélioration des vergers et le la boisson du cidre.

La 5e raison réside dans le fait qu’en France ce fut sous la Renaissance que la méthode scientifique appliquée à l’amélioration des arbres fruitiers et du cidre donna naissance  aux premières publications : Dany de Brossard (1540), de Pierre Belon du Mans (1558), de Julien Le Paulmier et Jean Cahaignes de Caen (1590), d'Olivier de Serres (1623), de Parkinson (1629), de Le Gendre (1662), de Jean Merlet (1684), de Jean de la Quintynie (1690), marquant les principales étapes des progrès réalisés. » [Chevalier, 1921]

Mais encore fallait-il donner une notoriété au cidre du pays de Caux qui a d’emblée souffrait une piètre réputation.

Sion évoque un préjugé tenace en pays de Caux à la fin du 15e siècle par ce témoignage :

« Il faudrait aussi tenir compte des préjugés, puissants pour ou contre l’introduction d’une boisson ou d’une culture nouvelle. Les paysans du Bourg-Dun redoutaient encore, en 1490, ces effets du cidre sur l’organisme que continuent à lui reprocher les habitants des pays de vignobles ; il est possible que plus tard, le cidre ait paru, au contraire, une « liqueur plus plaisante et salutaire » que la cervoise. « Quelle faute serait-ce aux médecins, écrivait Jacques de Cahaignes à la fin du 16e siècle, de rechercher si curieusement et avec tant de frais tant de remèdes jusqu’aux extrémités de la terre et mépriser cestuy-ci, qui est si plaisante et si excellente médecine d’une infinité de maladies ! » [Sion, 1909]

« Le sidre n’estoit anciennement si commun en Normandie qu’il est de présent […] et il n’y a pas cinquante ans qu’à Rouen et en tout le pays de Caux la bière estoit le boire commun du peuple comme est à présent le sidre. » [Le Paulmier -Jacques de Cahaignes 1589]

Le cidre n’ayant pas encore pris des lettres de noblesse sous la plume de Le Paulmier et De Cahaignes, Rabelais nous offre quelques faits de littérature en citant le cidre dans la légende de Gargantua et le discréditant quelque peu.  Faut-il rappeler que Rabelais (1483 ou 1494-1553) était le contemporain de Ronsard, de François 1er, de Joachim Du Bellay, de Le Paulmier (1520-1588), de Martin Du Bellay (1495-1559), un de ses protecteurs comme il est signalé par cette information :    

« Martin du Bellay aux côtés de Palissy et de Rabelais. Jean et Guillaume Du Bellay furent les amis et protecteurs de Rabelais. Il faut probablement ajouter Martin Du Bellay. En effet, lui et François Rabelais se trouvent à la même époque en Picardie, lors du conflit contre les Anglais. (Étude de Franck Rolland Palissy, Rabelais, Serlio et le Château et le Jardin de Troissereux. Martin Du Bellay, frère de Jean et Guillaume né à Souday dans le Loir-et-Cher comme ses deux frères (Guillaume et Jean), fut lieutenant général de Normandie. Ses Mémoires Historiques sont plus célèbres que celles de Guillaume. » [jcraymond.free.fr]

Se connaissant, se fréquentant, guerroyant ensemble, Rabelais avait la connaissance du pays de Caux et de la petite cité cauchoise de Duclair arrimée à la vallée de Seine :

« Evidemment, dès qu'on parle de boisson, Gargantua n'est jamais bien loin. Ainsi, dans la basse vallée de la Seine, il existe une légende de fondation du village de Duclair :  « Le géant s'était levé de sa chaise pour se dégourdir les jambes au bord de la Seine. Une vieille portait un fagot trop lourd pour elle. Gargantua lui a pris son fardeau et l'a déposé devant sa maison.  Pour le remercier, la vieille lui a offert un fût de cidre nouveau. Gargantua l'a bu aussitôt sans attendre que le cidre soit 'fait'. En retournant chez lui, pris par le cidre vert, il a fait 'du clair » [Marchand, 2000]

Par ce fait (fiction) littéraire, le cidre n'est plus invisible au yeux de la société dès lors qu’il met en relation le bon géant Gargantua et la boisson normande exposant la prédominance du cidre sur la bière, comme le montre cet autre extrait choisi par Patrick Lajoye [2005] auteur de - La Normandie, le cidre, Gargantua et Saint Gerbold :

«Et pour autant que ledict Gargantua avoyt fort cheminé ce jour-là il a voit grant soif, car il pria les  Normans de luy  donner à boire, lesquelz luy  apportèrent de  la bière, dont il eut si grant despit qu'il jura sainct Troubaise qu'il s'en vengeroit,  ce  qu'il fist,  car tout  incontinent il s'en partit et arracha  toutes les  vignes du pays  de Normandie et  n'y en  laissa pas  ung  bourgeon  qu'il n'emportast tout  tellement qu'il  n'y croist plus  que du cidre […] Par la suite, Gargantua donne les vignes aux Orléanais, aux Beaunais et aux Auxerrois, tellement que tous ces troys pays en sont bien peuplez et y croist de fort bons vins, Ce faict incontinent qu'il eut ainsi arrachées toutes les vignes de Normandie il s'en partit du pays sans que les Normans s'en apperceussent en aulcune sorte, car il n'estoient pas encore si caulx qu'ils sont maintenant. » [Lajoye, 2005]

Patrice Lajoye poursuit tout en la qualifiant d'« historiette »,  il insiste sur le contexte bien historique : « au début puis dans tout le courant du 16e siècle, on a planté en masse des pommiers à cidre, et on a cessé de faire de la bière. Ce phénomène a été consigné par l'auteur du premier traité du cidre, Julien Le Paulmier, en 1589 » [Lajoye, 2005] :

« il pourrait neantmoins sembler que le sidre n'estoit anciennement si commun en Normandie qu'il est de présent :  d'autant qu'il ne se trouve monastere, ne chasteau, ne maison antique, où il n'y ait vestiges manifestes & apparentes ruines des  brasseries de  Biere, qu'on  y soulait faire  pour la provision ordinaire.  Et n'y a pas cinquante ans qu'à Rouen, & en tout le pays de Caux, la biere estoit le boire commun du peuple, comme est de présent le sidre. » [Le Paulmier, 1589]

Et le cidre du pays de Caux advint : La sixième raison. 

La Science de l'Arboriculture, l'art de la Taille, l'art de la Greffe et l'art du Semeur et du Pépinier se distille dans des ouvrages qui deviendront des points de repère et de référence pour l'amélioration des vergers et le la boisson du cidre.

La 6e raison réside dans le fait qu’en France ce fut sous la Renaissance que la méthode scientifique appliquée à l’amélioration des arbres fruitiers et du cidre donna naissance  aux premières publications : Dany de Brossard (1540), de Pierre Belon du Mans (1558), de Julien Le Paulmier et Jean Cahaignes de Caen (1590), d'Olivier de Serres (1623), de Parkinson (1629), de Le Gendre (1662), de Jean Merlet (1684), de Jean de la Quintynie (1690), marquant les principales étapes des progrès réalisés. » [Chevalier, 1921]

« Certes les paysans du 15e siècle n’étaient pas des pomologistes aussi savants, aussi avertis que les cultivateurs de nos jours, mais il convient cependant de reconnaître que les pommiers étaient déjà l’objet de soins éclairés et intelligents ! Les abbayes, propriétaires de grands domaines, veillaient et assujettissaient leurs hommes à ces tâches. Voici les religieuses de Saint-Amand e Rouen, qui ordonnent à leur fermier de Boos « de fouir et d’engresser les pommiers d’an en an, à la saison ; de labourer et de leur ôter le bois mort ». Voici l’archevêque en son vieux manoir de Déville, qui existe toujours, dans les parages de la route basse, qui, en 1479, enjoint d’ébrancher, d’élaguer et de nettoyer les pommiers. A Valmont, les moines du prieuré font et de même ordonnent, « d’armer et de protéger les entes, de les cherfouir au pied, de les uns chacun émonder, rater la mousse et à la saison, les rechausser de terre, comme il est requis de faire. 

Au 16e siècle, la culture du pommier, qui a été si lente à se répandre s’est étendue dans toute la Normandie, dans l’Alihermont, le pays de Caux. : c’est le moment où le cidre, qui jusqu’alors a été une boisson de riche, commence à concurrencer la cervoise et la bière, qui étaient les boissons ordinaires. »

Georges Dubosc rappelle que toutes les pommes se vendaient à des dates différentes : les précoces à la mi-août, d’autres à la Saint-Michel, d’autres encore au Pardon de la Saint-Romain ou à la Toussaint. On connait même, dès le 15e siècle, des espèces très tardives, puisqu’un paysan de Darnétal vend des pommes à l’Archevêché, le jour des Cendres. A cette époque, on brassait dans le Palais Archiépiscopal, mais longtemps le cidre de nos évêques avait été fabriqué au pressoir Saint-Gervais. [Dubosc, 1932]

La récolte des fruits se faisait comme le dit Georges Dubosc avec beaucoup de soin et celles tombées à la main était ramassée à part selon la tradition du Moyen Âge : la « grouée » : « Il est certain qu’on « gaulait » souvent les fruits, mais on avait également soin de les cueillir à la main […] au 16e siècle on mettait à part, avec le plus grand soin, les pommes de chaque genre et on les pilait isolément, quand l’importance de la récolte le permettait. Les ouvriers agricoles employés aux différents travaux que nécessitait la culture des pommiers, commençaient leur besogne souvent après le mois de septembre, à l’époque de la bénédiction des pommes. Leurs salaires n’étaient pas très élevés : à Deville, pour planter des pommiers, pour les ébrancher pour cueillir les pommes, la journée était de 2 sous 6 deniers ; les femmes n’étaient même payées que 20 deniers, quelquefois 16 deniers seulement. Les hommes occupés à faire le cidre, les valets de pressoir, gagnaient environ 15 sous par tonneau. Quand on cidre, au 15e siècle, il valait, la queue, qui comportait deux muids (environ 49 hectolitres), un prix maximum de 77 sous, en 1461, et un prix minimum, en 1749, de 25 sous. Souvent on donnait aussi aux ouvriers, comme une sorte de récompense, ce qu’on appelait la mugée ou le mijaut ou le migot.

On me demandait dernièrement ce que c’était que ces pommes de migot C’était, non pas le nom d’une espèce, mais la dénomination des fruits de garde, qu’on tenait à conserver dans l’armoire ou le buffet, comme ces pommes de Capendu, que les ménagères cauchoises conservaient pour parfumer leur linge. C’est de ce mot migot, selon le Littré, qu’est venu le mot « magot », objet, somme d’argent qu’on garde  en cachette.

VOIR Marie Casset manoir de Fresne et de Déville https://books.openedition.org/purh/7124

Mais encore fallait-il donner une notoriété au cidre du pays de Caux qui a d’emblée souffrait une piètre réputation.

Sion évoque un préjugé tenace en pays de Caux à la fin du 15e siècle par ce témoignage :

« Il faudrait aussi tenir compte des préjugés, puissants pour ou contre l’introduction d’une boisson ou d’une culture nouvelle. Les paysans du Bourg-Dun redoutaient encore, en 1490, ces effets du cidre sur l’organisme que continuent à lui reprocher les habitants des pays de vignobles ; il est possible que plus tard, le cidre ait paru, au contraire, une « liqueur plus plaisante et salutaire » que la cervoise. « Quelle faute serait-ce aux médecins, écrivait Jacques de Cahaignes à la fin du 16e siècle, de rechercher si curieusement et avec tant de frais tant de remèdes jusqu’aux extrémités de la terre et mépriser cestuy-ci, qui est si plaisante et si excellente médecine d’une infinité de maladies ! » [Sion, 1909]

« Le sidre n’estoit anciennement si commun en Normandie qu’il est de présent […] et il n’y a pas cinquante ans qu’à Rouen et en tout le pays de Caux la bière estoit le boire commun du peuple comme est à présent le sidre. » [Le Paulmier -Jacques de Cahaignes 1589]

Le cidre n’ayant pas encore pris des lettres de noblesse sous la plume de Le Paulmier et De Cahaignes, Rabelais nous offre quelques faits de littérature en citant le cidre dans la légende de Gargantua et le discréditant quelque peu.  Faut-il rappeler que Rabelais (1483 ou 1494-1553) était le contemporain de Ronsard, de François 1er, de Joachim Du Bellay, de Le Paulmier (1520-1588), de Martin Du Bellay (1495-1559), un de ses protecteurs comme il est signalé par cette information :    

« Martin du Bellay aux côtés de Palissy et de Rabelais. Jean et Guillaume Du Bellay furent les amis et protecteurs de Rabelais. Il faut probablement ajouter Martin Du Bellay. En effet, lui et François Rabelais se trouvent à la même époque en Picardie, lors du conflit contre les Anglais. (Étude de Franck Rolland Palissy, Rabelais, Serlio et le Château et le Jardin de Troissereux. Martin Du Bellay, frère de Jean et Guillaume né à Souday dans le Loir-et-Cher comme ses deux frères (Guillaume et Jean), fut lieutenant général de Normandie. Ses Mémoires Historiques sont plus célèbres que celles de Guillaume. » [jcraymond.free.fr]

Se connaissant, se fréquentant, guerroyant ensemble, Rabelais avait la connaissance du pays de Caux et de la petite cité cauchoise de Duclair arrimée à la vallée de Seine :

« Evidemment, dès qu'on parle de boisson, Gargantua n'est jamais bien loin. Ainsi, dans la basse vallée de la Seine, il existe une légende de fondation du village de Duclair : « Le géant s'était levé de sa chaise pour se dégourdir les jambes au bord de la Seine. Une vieille portait un fagot trop lourd pour elle. Gargantua lui a pris son fardeau et l'a déposé devant sa maison.  Pour le remercier, la vieille lui a offert un fût de cidre nouveau. Gargantua l'a bu aussitôt sans attendre que le cidre soit 'fait'. En retournant chez lui, pris par le cidre vert, il a fait 'du clair » [Marchand, 2000]

Par ce fait (fiction) littéraire, le cidre n'est plus invisible aux yeux de la société dès lors qu’il met en relation le bon géant Gargantua et la boisson normande exposant la prédominance du cidre sur la bière, comme le montre cet autre extrait choisi par Patrick Lajoye [2005] auteur de - La Normandie, le cidre, Gargantua et Saint Gerbold :

«Et pour autant que ledict Gargantua avoyt fort cheminé ce jour-là il a voit grant soif, car il pria les  Normans de luy  donner à boire, lesquelz luy  apportèrent de  la bière, dont il eut si grant despit qu'il jura sainct Troubaise qu'il s'en vengeroit,  ce  qu'il fist,  car tout  incontinent il s'en partit et arracha  toutes les  vignes du pays  de Normandie et  n'y en  laissa pas  ung  bourgeon  qu'il n'emportast tout  tellement qu'il  n'y croist plus  que du cidre […] Par la suite, Gargantua donne les vignes aux Orléanais, aux Beaunais et aux Auxerrois, tellement que tous ces troys pays en sont bien peuplez et y croist de fort bons vins, Ce faict incontinent qu'il eut ainsi arrachées toutes les vignes de Normandie il s'en partit du pays sans que les Normans s'en apperceussent en aulcune sorte, car il n'estoient pas encore si caulx qu'ils sont maintenant. » [Lajoye, 2005]

Patrice Lajoye poursuit tout en la qualifiant d’« historiette », il insiste sur le contexte bien historique : « au début puis dans tout le courant du 16e siècle, on a planté en masse des pommiers à cidre, et on a cessé de faire de la bière. Ce phénomène a été consigné par l'auteur du premier traité du cidre, Julien Le Paulmier, en 1589 » [Lajoye, 2005] :

« Il pourrait neantmoins sembler que le sidre n'estoit anciennement si commun en Normandie qu'il est de présent :  d'autant qu'il ne se trouve monastere, ne chasteau, ne maison antique, où il n'y ait vestiges manifestes & apparentes ruines des brasseries de Biere, qu'on y soulait faire pour la provision ordinaire.  Et n'y a pas cinquante ans qu'à Rouen, & en tout le pays de Caux, la biere estoit le boire commun du peuple, comme est de présent le sidre. » [Le Paulmier, 1589]

Peu avant la fin de la Guerre de Cent Ans il est important d'évoquer la troisième vague aux quelles fait référence Auguste Chevalier en 1532 :  

 

Nous ne sommes pas encore à témoigner du cidre du pays de Caux qu'un premier signe de notoriété en Cotentin survient :

1532, le roi Francois 1er goutte au cidre normand du Cotentin

« L’une des greffes porte le nom de greffe de Monsieur de Lestre ou de greffe de Monsieur. Ces greffes, dit Cahaignes, ont été naguères apportées de Biscaye. Monsieur de Lestre, à deux lieues de Valognes, a esté le premier qui les a entées, à ce que j’ay entendu au pays. Il enrichit le pays de deux nouvelles espèces mentionnées plus tard dans les nomenclatures de Gilles de Gouberville : le Barbarie et le Pycey ou, pour parler plus exactement l’Epicé. C’est le cidre d’Epicé qui ravit François 1er lorsqu’il en goûta, pour la première fois, au moment de son passage en Normandie. Le feu grand roi François passant par-là, l’an mil cinq cent trente-deux, en fit porter en barraux à sa suite dont il usa tant qu’il put durer. « Et ce fut le Navarrais Guillaume Dursus, naturalisé par Louis XII, qui eut l’honneur de présider à cette évolution bienfaisante. ». [De Paulmier, Cahaignes 1589 ; Travers, 1895]

Vers 1550, l’introduction de nouvelles greffes venant de Biscaye se faisait encore en Normandie. » [Chevalier, 1921]

« Parmi les formes introduites de Biscaye à cette époque (vers 1550) et dont les noms se sont conservés jusqu'à nous (car il n'est pas certain que l'appellation actuelle désigne exactement les variétés cultivées au 16e siècle sous le même nom), on doit citer les suivantes :

1° La Marin-Onfroy, ainsi nommée du nom d'un gentilhomme du Bessin, seigneur de Saint-Laurent-sur-Mer et de Véret, qui l'apporta de Biscaye sur ses terrés au 16e siècle. Truelle croit que c'est le Macasgorriya des Basques. On la trouve partout aujourd'hui en Normandie, mais elle dépérit, probablement à cause de son ancienneté.

2° La Vèret ou Doux-Vérêt (on prononce doux vré). C'est l’Argile blanche ou Argile Barbarie blanche. D'après Emile Travers, a été aussi importée de Biscaye par le seigneur Marin-Onfroy, dans son domaine de Véret.

3° L’Epicé ou le picey, introduit d'Espagne à Morsalines, près Saint- Waast-la-Hougue, par Guillaume Dursus donne le meilleur de tous les cidres (de Gouberville). C'est la Belle- fille ou Petit-Damelot, donnant le roi dès cidres pour la bouteille [Lecoeur].

4° D’après Jacques Cahaignes, le même Dursus introduisit au 16e siècle, dans le Cotentin, la Barbarie de Biscaye qui s’était répandue dans toute la Normandie et la Bretagne et est probablement l’origine de diverses sortes de pommes dites Barbarie ou Barberiot » [Chevalier, 1921]

Ces variétés nous les retrouvons pour certaines sous ces noms ou sous leurs nombreux synonymes.

Il semble qu'à cette époque qu’on fabriquait des cidres de cru, c'est à dire avec une pomme ou deux pommes comme décrit par Gouberville, ce qui leur donnait une saveur particulière voire sucrée selon la nature du fruit comme le fut le cidre d'Epicé ou Picey qui ravit François 1er, habité à boire l'hypocras, vin sucré épicé à la mode à la cour, ou le Claret comme le souligne Eric Birlouez dans ses publications. [Birlouez, 2015]. Mais ce ne fut pas le cas du cidre du pays de Caux qui n'est pas par nature sucré, fruit d'un mélange de bon nombre de variétés d'amer, d'acide et de douce sans compter qu'on y ajoutait parfois des poires à cidre. Le pays de Caux a produit peu de Poiré mais le" pé de cô", le "croixmare" et d'autres ont été incorporées au cidre à moins de 10% du volume.

Eric Birlouez souligne que dans les régions comme la Bretagne et plusgénéralement sur les côtes de l'Atlantique et de la Manche, les producteurs de Galice et du Pays basque se mettent à diffuser vers la France de nouvelles variétés de pommes et des méthodes de culture plus productives qui viendra detroner la cervoise [Birlouez, 2015]

C’est donc au début du 16e siècle qu’il fallut attendre que le cidre du pays de Caux entre en littérature et dans divers récits et témoignages. Les citations qui suivent explicitent l'importance du cidre de la fin du 15e siècle au début du 17e siècle. Ces citations rapportées le seront chronologiquement pour insister sur l'impact qu'auront les auteurs scientifiques ou littéraires sur la société dont les ouvrages vont apparaître ainsi au fil du temps, dont certains sur lesquels nous nous attarderons. 

1534 : Rabelais

« Le géant s'était levé de sa chaise pour se dégourdir les jambes au bord de la Seine. Une vieille portait un fagot trop lourd pour elle. Gargantua lui a pris son fardeau et l'a déposé devant sa maison. Pour le remercier, la vieille lui a offert un fût de cidre nouveau. Gargantua l'a bu aussitôt sans attendre que le cidre soit 'fait'. En retournant chez lui, pris par le cidre vert, il a fait 'du clair’ » [Rabelais, 1534-1535]

1579 : Isabelle Chenu et Martin du Bellay, princesse et prince d'Yvetot, amis et protecteurs de Rabelais

« Le 12 février 1579, Isabeau Chenu obtint que les princes d’Yvetot prissent et perçussent dorénavant et à toujours les droits du quatrième sur le vin et les autres boissons – le cidre- vendues et débittées dans la principauté. »[…]

Après maintes péripéties, un peu plus tard le Roi ordonnait, quant à l’avenir, que la Dame d’Yvetot jouirait de son droit de percevoir la quatrième, de la même manière que le Roi et ses fermiers adjudicataires en jouissaient au pays de Normandie.  Confirmation des droits des seigneurs d’Yvetot, reconnus encore par Henri 111 en 1584. » [Beaucousin, 1884]

1583 :  Estienne & Liebault

Distinction entre pépinière [Traversat, 2001] et bâtardière [Estienne & Liebault, 1583]

«La pépinière est le lieu où après avoir semé et repiqué de tout jeunes plants… on laisse se développer la nouvelle plante pendant 18 à 20 mois. La batardière, elle, est destinée à recevoir les plants qui y sont greffés, ces plants étant plus serrés qu’ils ne le seront quand ils seront mis en espalier.»[Traversat, 2001]

1589 : Le Paulmier

C’est ainsi que Le Paulmier distingue les cidres normands selon la description nuancée de leurs terroirs dont celui du pays de Caux avec « son goust de terroir » : 

« Les cidres du pays d'Auge sont épais et très nourrissants ; ceux du Cotentin, ambrés et plus légers, se digèrent plus facilement. […] Le terroir fait autant pour la force et la qualité des cidres que pour les vins. « Le Costentin est le meilleur pour les excellens. Le pays d'Auge les fait puissans & vertueux, mais pour la pluspart espais, grossiers & mal clarifiez. Le pays de Caux leur donne un goust de terroir, pour le moins en quelques lieux où il y a de la marne. » [Le Paulmier, 1589]

« Cidres du Cotentin. — « Les meilleurs sidres de la Normandie se trouvent en Costentin, & en premier lieu à Beuzeville sur le Vé.

Cidres du pays d'Avranches. — Ils se purifient fort bien

Cidres du Bessin. — Julien Le Paulmier les met au rang des meilleurs.

Cidres du pays de Vire. — Ils se purifient fort bien.

Cidres des environs de Caen). — Les espèces de pommiers cultivées dans le bailliage de Caen étaient les mêmes que celles du Bessin.

Cidres du pays d'Auge. — Les cidres du pays d'Auge, & autres, obscurs & mal defequez, se deschargent tellement lors qu'ils commencent à surir, qu'en fin ils ressemblent de couleur au sidre de pommes sures, comme fait aussi tout sidre qui devient acide ». « Le pays d'Auge les fait puissans & vertueux, mais pour la plupart espais, grossiers, & mal clarifiez ». « Les sidres du pays d'Auge... sont plus recherchez pour la marine que les doux & délicats du Costentin : non seulement par ce qu'ils se gardent sur l'eau deux ou trois ans sans se corrompre, mais aussi par ce qu'en nourrissant les Matelots, ils les rafraîchissent & preservent des fieures & autres maladies chaudes, que l'usage des chairs & poissons saliez, & du biscuit leur attirerait s'ils voient du vin, ou d'eau puante, telle qu'est souvent celle qu'ils gardent longuement en leurs vaisseaux…

Cidres du pays de Caux. — « Le pays de Caux leur donne un goust de terroir, pour le moins en quelques lieux où il y a de la marne » [Le Paulmier, 1589]

 

 

Avant que le goût se définisse au fil des siècles comme les auteurs l’ont évoqué par leurs citations, la question de sa culture a occupé les auteurs, les arboriculteurs, les pépiniers avant même que les horticulteurs, les botanistes et les pomologues s’emparent de la science de la culture, de l’amélioration des arbres fruitiers. Un des premiers témoignages de cette émulation scientifique réside dans cette première distinction.

En Normandie les premiers auteurs qu’il faut mentionner sont Gouberville cité par Travers [1895] et le cauchois Le Gendre, l’artiste de l’art de la taille. Ils ont jeté les bases des techniques d’arboricultures dont Olivier de Serres traitera dans son traité d’Agriculture ;  des techniques du Curé d’Hénouville en Pays de Caux célèbre pour le développement de la taille des fruitiers avant que d’autres cauchois viennent perpétuer deux cent ans plus tard  leurs travaux pour sauver ce patrimoine arboricole et cidrier en dépérissement et en déclin : Principalement Prévost de Boisguillaume ; Du Breuil de Rouen ; Hauchecorne, Legrand, Dieppois, Varin d’Yvetot, Godard de Boisguillaume, Lacaille de Frichemesnil en Seine-Inférieure, et, Power du Roumois suivis de Lecoeur, Warcollier en d’autres départements …]

L’ennemi des fruitiers et de leur entretien fut le plus souvent les périodes de conflits armés, les maladies et le dépérissement dû à son vieillissement  : entre 50 à 60 ans pour les pommiers et 200 pour les poiriers -  durée qui n'est pas équivalent à la durée moyenne de la vériété qui se réplique par le greffe  200 ans pour les pommiers et de 300 ans à 400 ans pour les poiriers.

C’est  pourquoi  en Europe des variétés ont menacé de disparaître à partir de la fin du 18e siècle  poussant leq arboriculteurs et horticulteurs à se mobiliser à régéréner les meilleures variétés menacer d'"extension (Sageret, Prévost, Van Mons, Knight et Du Breuil) .  Pour le cidre ce furent les pépiniers et semeurs cauchois qui en seront les principaux maîtres d’œuvre.

Reprenant la liste des principaux  artistes arboriculteurs et horticulteurs que cite Chevalier [1921] c’est Brossard (1540] Le Paulmier-Cahaignes (1590), Gouberville (1549-1552] qui forgeront les premiers principes des pépiniéristes qu’Olivier de Serres (1623) continuera de perfectionner puis grâce au curé d’Hénouville l’abbé Le Gendre, sur le plateau de Caux, la -technique de la taille des fruits et de la greffe atteindra pour longtemps la renommée sans oublier Jean de la Quintynie et Duhamel de Monceau au 18e siècle. 

Les connaissances au 16e siècle

1560 - Frère Dany - Brossard Davy - 1560-1571(Edition] :

un des premiers traités de l'art de semer et de faire pépinières de sauvageaux 

L'Art & manière de semer, et faire pepinieres de sauvageaux, enter de toutes sortes d'arbres, & faire vergiers . Ensemble un petit traicté contenaut plusieurs inventions nouvelles. Le tout rédigé... par Frère Dany, ... Brossard, Davy.,  rédigé en 1540, édité en  1571.

Aucuns arbres sans être entés amènent bon fruit & aucunes soit meilleur à faire cidre que les entes

  « Il est à noter que si les pépiniers sont semées de marc de poires & pommes  franches que aucuns pépins se trouvent qui amènent arbres lesquelles sont droites & ont beau bois comme si elles étaient entées & sans avoir piquerons, lesquelles si les voulez planter ainsi à la saillie de la bâtardière sans jamais les enter amèneront bons fruits non pas proprement semblables aux fruits des arbres dont sont sortis les pépins mais d’autres sortes nouvelles compétemment bons à manger, & aussi bons à faire cidre que ceux qui feront des arbres entées. »

La forme du fruit « Car si vous en replantez des pepins le fruit s’en chargera encore, car le fruit qui vient d’enter par greffe retient toujours la forme du fruit des arbres où on les prises.»

Changement de fruit « Mais les fruits qui viennent de pépins & changent autant de fois comme on les change »

Comme on doit faire du bon cidre « Et est ici à noter que faire bons cidres de quelques fruits qu’ils soient principalement de pommiers soient, franches ou sauvages que vous voulez garder en muraille, il les faut mettre en lieu sec & couvrir par amoncellement sur de la paille, et quand vous en voudrez faire le cidre, élisez celles qui sont noires pourries et les jeter. Et pour vous donner à connaitre, ne faites pas comme aucuns du pays du Mans, qui mettent leurs pommes joncher les jardins à la pluie et gelée & sur la terre nue là où elles perdent leur force, & demeurent toutes fades & eneuses & à grand peine en peut en jamais faire cidre qui guère vaille. »

Transcription moderne du titre : Quatre traités utiles et délectables de l'agriculture. Mentions ms. signée de Joseph Decaisne :" Brossard (Davy ou David) religieux au Mans, était d'une famille qui existe encore dans le Maine. Il s'occupait beaucoup de pépinières ; il vivait dans le XVIe siècle. Plusieurs bibliographes ont défiguré son nom...[bibliotheque-numerique.hortalia.org]

 

1589 - Julien Le Paulmier - Traité du vin et du sidre / par Julien de Paulmier ; [trad. par Jacques de Cahaignes] Le Paulmier, Julien (1520-1588).

Extraits :

« Quand on parcourt le De Pomaceo et le chapitre que le traducteur y a ajouté sur « les plus excellentes pommes à faire sidre », on est frappé du nombre de gentilshommes qui, résidant alors sur leurs terres et les cultivant eux-mêmes, recherchaient avec soin les meilleures variétés de pommiers. […] M.de Lestre, aux environs de Valognes, gentilhomme originaire de Biscaye, qui a importé du nord de l’Espagne plusieurs espèces de pommes, entre autres la fameuse Greffe de Monsieur ; M. de la Haulle, à Picauville en Cotentin, dont le cidre de Barbarie de Biscaye est des meilleurs ; Le sieur de Méautis, près de Carentan, qui possède cinq espèces : l'Escarlate, l'Ameret, le Couët, le Cul-noué, le Becquet, donnant des cidres très capiteux qu'on ne peut boire sans eau ; le sieur du Mesnil, auprès de Pontaudemer, dont le  cidre de Renouvelet est aussi très vaporeux; le sieur de Montaigu-les-Bois, aux environs de Coutances, dont l'excellent cidre de « Doux-au-vesque » se garde deux ans ; le sieur du Saussay, en Cotentin, chez lequel se fait d'une petite pomme verte un cidre « aussi rouge que le vin clairet françois » ; le sieur de Soquence, ce parent de Julien Le Paulmier, qui habitait près de Sainte-Barbe-en-Auge, et possédait un très grand nombre d'excellentes espèces de fruits à cidre ; le sieur de Tourville, près de Pont-Audemer, qui faisait cas de la Peau-de-Vieille et aussi de la Camière, dont le cidre se pouvait garder trois ans; le sieur de Vatteville-en-Auge, qui avait plusieurs bonnes espèces, entre autres le Sauger blanc, pommier ne portant que de deux en deux ans, etc. Tous ces propriétaires échangeaient entre eux les greffes de leurs arbres et plusieurs les vendaient même […]

« On sait le rôle que, pendant tout le moyen âge, les grands établissements
religieux jouèrent dans le développement de l'agriculture ; plus d'un monastère possédait de véritables champs d'expériences. Ainsi Cahaignes parle des excellents cidres de l'abbaye de Longues, tirés-du Marin-Onfroy, du Doux de Lande ou Blanchet, du Doux-Dagorie, du Hérouet, du Gros-Doux et de la Franche-Mariette. Il aurait pu parler aussi des vergers des abbayes de Cerisy, d'Aunay, de Cordillon, de Saint-Étienne de Caen, de Saint-Wandrille, de Fécamp, d'Ardennes et de Montebourg (celle-ci envoyait ses meilleures greffes à Longues), ainsi que du prieuré de Saint-Vigor.

Au chapitre 1 « Les habitants de Paris, de Brie, & de la haute Normandie, qui est confine tant à l'isle de France qu'à la Picardie, & au pays Chartrain, appellent sidre, tout breuvage fait de jus de pommes ou de poires, séparément ou en confus. Mais en Costentin, & au reste de la basse Normandie, on nomme proprement Sidre, celuy qui est fait du suc de pommes : Quelques-uns l'appellent aussi Pommé, les Biscains Pommade. Car celuy qui est fait de jus de poires, est par eux peculierement nommé Poiré. C'est donc Sidre, ou Pommé, ou Pommade, une espèce de brouage visitée & familière aux Normans, & Biscains : laquelle dégoutte de soymesme, ou est
tirée à la presse, de pommes bien pilees par les meules du pressoir ».

Au chapitre 2 « « Il est vray-semblable que l'invention du sidre soit fort ancienne, veut que de temps immémorial l'usage en est en Biscaye, & en ceste province de Normandie.
Mais il est autant impossible de dire qui en ait esté premier inventeur, qu'il est difficile de composer le différend qui est entre les Normans & Biscains, pour la première possession, que l'une & l'autre partie se prétend attribuer ».

Les Basques faisaient leur cidre ou pommade avec peu de soin, se contentant parfois de mettre dans un tonneau plein d'eau des pommes concassées.
« Il pourrait néanmoins sembler que le sidre n'estoit anciennement si commun en Normandie qu'il est de présent : d'autant qu'il ne se trouve monastère ou chasteau, une maison antique, où il n'y ait vestiges manifestes & apparentes ruines des brasseries de Bière, qu'on y souloit faire pour la provision ordinaire. Et n'y a pas cinquante ans qu'à Rouen, & en tout le pays
de Caux, la bière estoit le boire commun du peuple, comme est de présent le sidre […] »

Travers et Joret au 19e siècle ajouteront  des mentions par ces précisions :

« « L’une des greffes porte le nom de greffe de Monsieur de Lestre ou de greffe de Monsieur. Ces greffes, dit Cahaignes, ont été naguères apportées de Biscaye. Monsieur de Lestre, à deux lieues de Valognes, a esté le premier qui les a entées, à ce que j’ay entendu au pays. Il enrichit le pays de deux nouvelles espèces mentionnées plus tard dans les nomenclatures de Gilles de Gouberville : le Barbarie et le Pycey ou, pour parler plus exactement l’Epicé. C’est le cidre d’Epicé qui ravit François 1er lorsqu’il en goûta, pour la première fois, au moment de son passage en Normandie. Le feu grand roi François passant par-là, l’an mil cinq cens trente-deux, en fit porter en barraux à sa suite dont il usa tant qu’il put durer. « Et ce fut le Navarrais Guillaume Dursus, naturalisé par Louis XII, qui eut l’honneur de présider à cette évolution bienfaisante. »» [De Paulmier, 1589, Cahaignes, Travers, 1895]

« Le bon renom de tous ces cidres tenait  à la nature du sol et aussi à la prédominance de certaines espèces qui s’y étaient perpétuées : « M. Siméon Luce, après avoir constaté que la plupart  des localités renommées pour la qualité de leurs cidres étaient situées sur la lisière des forêts : «  le pommier, cet arbuste généreux, se plait dans le voisinage des forêts, d’où il est originaire : c’est là qu’il rapporte le plus de fruits et que ses fruits ont le plus de saveur » [ Luce - Charles de Beaurepaire, ] ». « Si du choix des pommes on passe à la plantation des entes et au pressurage des fruits, il est impossible de ne pas être frappé de la similitude absolue des procédés usités au 16 siècle avec ceux qui sont encore suivis aujourd’hui. » « Gouberville soigne d’une façon particulière la plantation de ses pommiers ; il garnit largement le pied de ses arbres de fumier ; il étend de grands lits de fougères vertes dans ses pépinières, et il se fût bien gardé de laisser ses pommes réunies en tas et exposées sans abri à la pluie et au soleil. Après la cueillette, il les rentrait, il les faisait monter sur le plancher du pressoir, d’où elles n’étaient descendues qu’au moment de la pilaison. »» [De Paulmier,1589, Cahaignes, Gouberville - Travers, 1895] (Voir Brossard)

« Gouberville a été certainement un des propagateurs les plus zélés de la culture du pommier dans notre région, ce qu’il a semé de pépins, ce qu’il a greffé de surets est incalculable. Il greffait les pommes de Haye, de Tostonnet, de Couet, de Thoumine-Rouge, de Gentil, d’Epicé, de Dumont, de Gros-Doulx, de Feuillart, de Becquet, de Moysi, de Menuel, d’Amer-Doulx, de Jumelle, de Coustour, de Clerel, de Guillot (Roger, de Doux-Raillé, de Bec-de-Raillé, de Durepel, de Barbarye ou Barbariau, d’Ozenne, d’Orange, de Marin-Onfroy [Joret, Le Paulmier,1589, De Cahaignes, Travers, 1895]

 

 

En guise d'introduction du 17e siècle je vous propose quelques extraits d'auteurs qui ont relaté l'activité du cidre et des arbres fruitiers en pays de Caux.

Francis Yard nous livre ceci : 

"Sous Henri IV et Louis XIII, le cidre continue, de proche en proche, à gagner du terrain. Pami les autorités nombreuses qui vantent le cidfre, il n'en est pas de plus imposante que celle du chancelier François Bacon, l'un des plus grands esprits de l'Angleterre. Au cours de ses observations le chancelier avait été appelé à remarquer les propriétés hygiéniques du cidre ; il faisait le plus grand cas de cette boisson, et à lappui de son opinion, il cite l'exemple de huit vieillards qu'il avait connus personnellement et dont les uns étaient parvenus à l'âge de cent ans et les autres à cent ans et plus. Ces vieillards, dit-il, n'avaient bu toute leur vie que du cidre, et ils avaient conservé à leur âge, une si grande vigueur qu'ils dansoient et sautoient aussi bien que des jeunes gens. N'est-il pas que c'est admirable ! .." [Yard, 1942 et 2009] 

En commençant par le poète Saint-Amant chantant le cidre de sa Normandie

1627 : le poète rouennais Saint-Amant

« Qu'il est frais,qu'il est délectable!

Pour moy, je tiens pour véritable,

Lorsque j'en trinque une santé,

Que le seul cidre est l'or potable,

Que l'alchymie a tant vanté.

[Saint-Amant, 1627 ; Yard, 1942-2009]]

 

1631 :

LE PAYS DE CAUX. « Le breuvage des Cauchois est le sidre et en quelques lieux la bière. » [Du Moulin, 1631]

1677 :  au pays de Caux : extraits des tableaux et souvenirs du 17e siècle du voyage en Normandie d'Antoine Morel, fils du prévot et maire de Bar-le-Duc en compagnie de ses deux cousins germains visite Rouen, Le Havre, Fécamp, le chateau d'Angerville-Bailleul...

« Et dans le verger ou il y a quantité de pommiers ce sont les vignes de ce pays la d’où il retire ou d’ailleurs le meilleur cidre que nous ayons bu dans tout le voyage mes cousins et Mr Aubert […] mais je trouvay celuy la le meilleur on nous donna des perdrix des pigeons des poulardes de Normandie autrement gelinottes un jambon de bayonne du dessert du bon vin bon cidre et vin d’espagne bonne mine, de toutes parts de la part du père de la femme du fils, nous jouasmes apres souper nous fusmes coucher.» [Morel, 1677]

1688 : à Yvetot

« Le vendredi 20 août 1688, un incendie se déclara vers les huit heures du matin. Il ne restait plus d’Yvetot que les débris enflammés et des ruines fumantes - sauf l’église te le château – dont les 5 halles, le presbytère, tous les édifices publics et plus de 200 maisons et d’un nombre considérable de bâtiments. Il est noté qu’il y avait une cour plantée de pommiers et dans laquelle se trouvaient aussi quelques arbres de haute futaie et au nord d’une avenue bordée de plusieurs rangées d’arbres se trouvait au niveau de la rue Chouquette, la basse-cour du château, laquelle renfermait un pressoir, des granges, des écuries, des étables… » [Beaucousin, 1884]

Le 17e siècle, le cidre au pays de Caux et de Bray : 

Louis Duval est l’un des seuls qui témoignent de la période du 17e siècle et de la progression du cidre en Normandie, sans oublier le pays de Caux et ses voisins.

« La production du cidre avait fait de tels progrès sous Louis XIII, qu'en 1631, Gabriel du Moulin, curé de Maneval, dans son « Discours de la Normandie », placé en tête de son Histoire  générale de Normandie Il y a si grande quantité de pommiers qu'un homme y fait quelques fois deux ou trois cens tonneaux de sidres, si agréables au goust qu'ils reparent aisément le défaut du vin, et transportez par les rivières de Dives et de Touques au Havre de Grâce, à Honfleur et à Rouen, apportent un très grand profit. »

Le propos de Gabriel du Moulin est d’autant plus intéressant dans ce contexte qu’il émet une appréciation sur le cidre du pays de Caux ce qui peut nous rappeler les avis déjà émis par de Paulmier.

« Extrait de la description curieuse qu'il fait de ces différents pays, considérés au point de vue pomologique

LE BESSIN.  « Le sidre y est excellent, principalement les Doux-Auvesque et l’Améléon, que les plus délicats le préfèrent à beaucoup de vins. »

LE COTENTIN. « Les cidres y abondent et sont fort excellens, principalement l'Esacarlatin, qui ressemble en couleur au vin paillé et l'égalle presque en bonté. »

LE LIEUVIN.  « On y sème des pépins qui sont de grand profit. Tout ce pays est une plaine où les pommiers abondent, vers Pont-Audemer et Lieurrey, qui font un sidre deferqué [dépouillé de lie], de couleur d'ambre et transparent et qu'on pourroit, les six premiers mois, préférer à beaucoup de vins françois.

LE PAYS D'OUCHE. « Le peuple y travaille au labeur et aux toiles leur breuvage plus ordinaire est du poiré, qui semble beaucoup meilleur que celuy des autres cantons, car le poirier aime naturellement le pays pierreux, bas et humide. Il est bien vray qu'on y trouve aussi de fort bons sidres, mais on les vend bien cher à ceux d'Evreux et de la campagne du Neubourg.

Suivant ce même auteur, les pays de Caux, de Bray, le Vexin et le Roumois semblent moins bien partagés

LE PAYS DE CAUX. « Le breuvage des Cauchois est le sidre et en quelques lieux la bière.

LE BRAY. « Les sidres y deviennent aigres l'esté. »

LE VEXIN. « C'est un bon pays, qui a des terres labourables à souhait, des vins et des sidres et des poires assez. »

LE ROUMOIS. « On y sème des pépins dont on eslève des bastardiers qu'on transporte en France et ailleurs. Les manoirs de ce canton sont pleins de fruitiers, mais d'autant que la plupart de leurs pommes sont sûres, les sidres y tiennent un peu de l'aigret. »

Les renseignements fournis par le curé de Maneval attestent que la culture des pommiers était en pleine prospérité sous Louis XIII, en Normandie, et que la distinction et la classification des crus y était nettement établie

Cette extension donnée à la culture des arbres fruitiers avait été favorisée par une ordonnance de Louis XIII qui avait établi des impôts nouveaux sur les vins :

« Beaucoup de vignerons, découragés, s'étaient alors déterminés à arracher leurs vignobles pour essayer de les remplacer par des plants de pommiers. »

Ce rapport du curé de Maneval s’avère être une des clefs de compréhension de la transmission des "bastardiers" du Roumois aux pépiniers du pays de Caux qui deux siècles plus tard contribuèrent à sauver et saugarder ces variétés du roumois après la Guerre de Cent Ans. 

La note de Jean Jacquart vient appuyer ces constatations anciennes rapportées par le curé de Maneval :

« Dans tout l'Ouest de la France, les vestiges des vignobles médiévaux achèvent de disparaître : en Normandie, en Picardie, au Sud-Ouest de Paris, les ceps, d'ailleurs fragiles et peu nombreux, s'effacent devant les pommiers, et le cidre remplace le vin ou la piquette sur les tables villageoises. » [Jacquart, 1990]

 

 

Les connaissances et les techniques au 17e siècle par Michel Traversat

L'apport de la thèse de Michel Traversat s'est avéré essentiel dans la compréhension du rôle qu'ont tenus les pépiniers vis à vis de la qualité des pommes, des variétés des pommes à cidre et à deux fins et de la transmission des savoirs pour les répliquer puis plus tard de les régénérer.

C'est Michel Bonmartel qui m'a fait connaître en 2019 cet auteur, du fait qu'il a pu assister à la conférence donnée par Michel Traversat à Yvetot à l'invitation des membres du CEPC. Cette conférence portait sur les pépiniers de la Seine-Inférieure au 19e siècle en focalisant notamment sur un des maîtres pépiniers yvetotais : Pierre Michel Legrand. Michel Traversat avait une résidence secondaire à Envronville près d'Yvetot, canton de Fauville. C'est avec l'accord des fils de Michel Traversat qu'il est précieux de vous en témoigner.

Après avoir transmis les savoirs et les expériences de ces deux premiers théoriciens sans oublier Gouberville, Michel Traversat nous renseigne précisément sur les auteurs principaux ayant étudié et décrit les arbres, les arbustes et divers végétaux depuis le 17e siècle.

Parmi eux, dit-il  il y a les praticiens, Mollet ; Le Gentil ; La Quintinie ; Thouin ; les théoriciens :  Estienne ; Liebault ; les théoriciens praticiens : Olivier de Serres ; La Baraudière ; Le Gendre (le Curé d'Hénouville) ; Duhamel de Monceau ; Calonne ; Le Berryais ; Bosc.

Georges Dubosc nous raconte qu’« au 17e siècle, le pommier trioamphait de tous côtés en Normandie. Les procédés de culture nouvelle, préconisées par l’abbé Legendre, le curé horticulteur d’Hénouville, dont les jardins avaient été chantés par Antoine Corneille, s’étaient répandus au-delà du pays de Caux vers le pays de Bray, vers la Picardie, le Vexin jusque dans l’Aisne. » [Dubosc, 1932]

Ils diront pour décrire la pépinière : 

L'abbé Le Gendre  indique : « Mes amis me sollicitent[...]  de communiquer ce que j'ay pu apprendre sur la culture des arbres fruitiers, par une expérience de près de cinquante ans ( de 1600 à 1652). »

L'abbé Le Gendre ajoute : « Le principal soin que doivent prendre ceux qui veulent avoir de beaux plants & en quantité est de faire chez eux des pépinières pour y éléver des arbres  dont ils puissent planter leurs jardins. Par ce moyen, on trouve les avantages suivants : on est certain de leur origine. Les arbres reprennent plus vite et ne subissent pas les aléas du transport. Ils sont replantés dans la même terre. » [Traversat, 2001 ; Le Gendre, 1652]

Si le botaniste Chevalier (1921) et si l'historien Traversat nous vantent les mérites de l'abbé Le Gendre au plan national et normand, il n'en reste pas moins qu'il fit ses prouesses en partie en pays de Caux à Hénouville et il cotoyait le Curé de Sainte-Marie des Champs comme nous le racontent Mathis et Hilaire.

« L’abbé Antoine Legendre (1590-1665) fut pourtant bien une personnalité notoire de Normandie, dans la région de Rouen. Né au Vaudreuil, près de Louviers, dans le diocèse d’Évreux, Legendre fut effectivement curé d’Hénouville, dans l’ancien doyenné de Saint-Georges, de 1622 à 1659.  *  Malgré des racines normandes avérées, l’élément le plus marquant de sa biographie reste les honneurs précoces qu’il reçut à la cour du roi. Il avait à peine vingt ans lorsqu’il fut désigné aumônier du roi et contrôleur des jardins fruitiers de sa Majesté. Pour l’expliquer, certaines théories lui attribueraient, sans preuves, l’ascendance d’un des nombreux bâtards du roi Henri IV, qui resta longuement en terres normandes en 1590 lors de la décisive bataille d’Ivry *. Quoi qu’il en soit, il reste certain que Legendre fut très tôt distingué par la monarchie pour ses compétences horticoles. Ainsi qu’il l’indique lui-même, ses fonctions de contrôleur des jardins royaux prolongent des prédispositions naturelles qui lui ouvrirent les portes des plus belles réalisations horticoles de son temps, lui permettant d’en observer de près l’évolution des pratiques : Je me souviens que dans ma jeunesse ma curiosité me portoit à aller voir tous les jardins qui estoient en réputation. Je frequentois tous ceux qui se piquoient d’avoir de beaux fruits, et qui vouloient passer pour habiles gens en cette matière. Pour des raisons obscures, Antoine Legendre doit s’éloigner de Paris et de la cour vers 1622. Il choisit logiquement de retourner en Normandie et de prendre possession de la cure d’Hénouville. C’est dans cette localité qu’il développa ses travaux et expériences horticoles, obtenant de créer des jardins dans l’enclos du presbytère dépendant de la grande abbaye voisine : Saint-Georges de Boscherville. En 1630, l’abbé commendataire Louis de Bassompierre (1610-1676) concède ainsi à Legendre un droit de colombier, à sa charge de le bâtir dans l’enclos presbytéral. Il faut savoir que les colombiers constituent une source d’engrais indispensable pour le travail du jardin, dont l’utilisation est d’ailleurs recommandée à plusieurs reprises dans La Manière de cultiver les arbres fruitiers. Pour Legendre, ce jardin du presbytère d’Hénouville devint l’œuvre de sa vie, un chef d’œuvre d’horticulture qui acquit dans la région, et jusqu’en région parisienne, une grande renommée. La famille Corneille, ainsi que de nombreux hôtes de marques, venaient le visiter. Antoine Corneille, le frère du grand poète et dramaturge, rédigea même en 1642 un poème dédié aux attraits champêtres du Presbytère d’Hénouville : Voir à loisir ce lieu champêtre ; Les jours y coulent sans ennuis : Tâche, si tu peux de connaître Tant d’herbes, de fleurs et de fruits  . À y regarder de plus près, l’arrière-plan culturel qui nourrit ces poèmes correspond très précisément à celui relevé dans La Manière de cultiver les arbres fruitiers : un même culte naturaliste, une même omniprésence des références de l’Antiquité gréco-romaine au détriment des champs référentiels strictement judéo-chrétiens. Dans les deux cas, l’histoire sainte est complètement ignorée : « Il est certain que la politesse de l’esprit, la connoissance des belles choses, et l’estude de la philosophie ne sont pas plustost entrées chez les Perses et chez les Grecs qu’elles ont esté suivies de l’agriculture, comme de leur plus fidelle et plus innocente compagne. » – de tels propos paraissent inconcevables pour Arnauld d’Andilly et les Solitaires de Port-Royal qui, tout au contraire, fondaient tous leurs efforts à vivre et incarner les modèles de l’histoire sainte jusque dans les moindres instants de leurs activités champêtres : pratiques agricole et horticole prenant dès lors un sens spirituel profond dans leur vécu quotidien. Quant à l’« expérience de près de cinquante ans28 » dont il est fait mention dans la préface – et qui est parfois requise pour contester l’attribution à Legendre – elle ne disqualifie en réalité aucun des deux hommes, respectivement nés en 1589 et 1590, et ne constitue donc pas un argument en soi. En revanche, la publication à plusieurs reprises de l’œuvre à Rouen et surtout la dédicace à un président du parlement de Normandie, Jean-Louis Faucon de Ris, cadrent parfaitement avec les éléments connus de la biographie de Legendre. D’ailleurs, toutes les éditions du livre sans exception, y compris celles qui datent d’après la mort d’Arnauld D’Andilly et de Legendre, y compris les traductions étrangères*, donnent Legendre comme auteur. » [Mathis et Hilaire, 2014]

 

Voici LA MANIERE DE CULTIVER LES ARBRES FRUITIERS par le Sieur LE GENDRE, Curé d'Hénouville. OU IL EST TRAITE des Pépinières. Des Espalliers. Des Contr'espalliers. Des Arbres en buisson, & à haute tige, 1652


« pour bien planter, élever & greffer les pépinières, puisqu'elles sont selon l’ordre de la nature, l’origine & le principe de tous les fruitiers […] préparer & amender la terre pour y faire de grands plants & des espaliers, comme l'on doit ordonner & espacer les arbres, & disposer les différentes sortes de fruits, selon les situations & les expositions différentes des jardins, je donne par âpres la méthode de bien planter, tailler, & palisser les arbres; & enfin je finis par le moyen d'avoir de beaux fruits, puis qu'ils font la fin principale de tous ceux qui plantent; & la perfection de tous les plants. [...] 

Il rappelle quelques faits dans l’histoire de l’humanité dont celle des Perses et des Grecs qui prenaient soin de leurs jardins qui s’est transplanté chez les Romains. La connaissance est venue en France.  L’abbé Le Gendre a eu une inclinaison pour les arbres fruitiers aussi se vante =il d’avoir été un des premiers qui ait recherché avec application la véritable méthode pour faire réussir les arbres en espalier et en buisson. Cette passion lui est venue très tôt en allant visiter les endroits où se trouvaient de beaux fruits. Ayant des méthodes estropiant les arbres, il chercha à un ordre tout contraire partant du naturel de l’arbre en dépit de ceux qui n’étaient de cet avis.

L’intérêt de cet ouvrage se niche dans l’art de la pépinière, de planter et d’entretenir les pépinières ; d’enrichir les sols ; de veiller à l’exposition des fruitiers ; de bien planter et entretenir les arbres ; de les tailler et les palisser et de veiller aux remèdes des maladies des arbres.

L’Abbé Le Gendre insiste sur la nécessité de planter l’arbre dans une bonne terre pour la croissance des racines transplantées d’une terre aussi bonne. Il faut donc choisir un bon plant, le faire épanouir dans une bonne terre et le bien le cultiver. Pour ce faire il recommande de choisir des sauvageons (poirier, pommier) d’une année, venus d’un pépin (mars) sur une planche de terre bien labourée, puis sarclée avant d’être plantée en pépinière l’hiver suivant ou de faire cribler du marc de cidre & de poiré au sortir du pressoir ou de faire venir de Normandie où ils sont élevés en quantité. Il se réfère à la pomme Paradis, au Doucain au cognassier ou préférant le plant du cognassier, arbre nain par essence convenant mieux que le sauvageon s’élevant trop. De couper certaines branches afin que repoussent d’autres avec plus de force. Il défend la thèse des entes sur le franc autant que ceux greffés sur le cognassier (cognier, cognassier qui a sa préférence et de sa bouture plutôt que venu du pépin et en les couchant leurs branches pendant l’hiver). Ses principes se déclinent sur d’autres fruitiers comme les pêchers, les abricotiers, les amandiers, les pruniers, les cerisiers…

Il préconise pour ces plants un bon fonds – terre douce et fraîche, grasse surtout pour la pépinière de poiriers et de pommiers francs.

Il convient d’attendre de l’amender à l’apparition de la troisième feuille mais pas avant ; la terre devant être propre ni trop labourée, ni trop légère mais meuble pour y mettre autour des racines en plantant – en novembre ou décembre ou février selon l’humidité du terrain - Il faut avant bien irriguer le morceau de terre, y ouvrir des rigoles. Il préconise que les greffes sont posées le dos vers le midi. Les racines doivent être coupées de moitié…

Puis il faut veiller et prendre soin de bien le cultiver :  Becher pas trop près, couvrir de fougères sans étouffer le sauvageon, la repousser plus tard du pied au milieu des rangées…de veiller de mettre à l’abri de la gelée l’hiver et de ne point découvrir les racines. Ensuite au printemps il recommande de couper les fougères et les mêler à la terre car ce mélange est fumier. Et de renouveler les opérations chaque année jusqu’à deux ans après qu’elles auront été greffées. Si ces principes ne sont pas suffisants il encourage le jardinier un bon fumier gras.

Ainsi dit-il les « pépinières de sauvageons étant ainsi plantées & bien cultivées, seront assez forte pour être greffées dans leur trois ans ou quatrième année. [...] 

Pour les autres espèces (noyers, châtaigniers, chênes, pins, sapins, tilleuls, ormes)  il préconise de mettre en planche leurs graines au mois de mars.

Pour l’art de greffer il recommande la greffe en fente la préférant à celle faite en écusson. Greffer en février ou mars en nouvelle Lune. Il faudra couper le pied du sauvageon que l’on veut enter à six pouces de terre et le tailler en pied de biche jusqu’à la moitié de la tige et achever l’autre moitié toute plate afin d’y pouvoir mieux poser la greffe ; tourner le dos de la greffe au midi comme déjà dit.

Il y a une autre manière de greffer est l’emporte-pièce d’autant que l’on fend que très peu la tige & l’on entaille dans le bois la place pour mettre le greffe- adaptée sur les gros arbres. Existe également la greffe en fluteau (châtaignier). Pour bien gouverner celles qui sont entées en fente destinées pour les arbres à haute tige comme pour les poiriers et pommiers francs, il faut d’ébourgeonner la greffe aussitôt qu’elle commence à pousser pour qu’il ne demeure qu’un seul bourgeon pour s’élever en une seule tige.

L’Abbe Le Gendre de procéder par rangée pour chaque type de fruitiers, qu’il est vain de greffer une espèce sur une autre toute différente comme un poirier ne peut réussir sur le pommier et réciproquement.

Il faudra penser à penser aux différentes sortes de terre et d’arbres, des différents moyens d’amender, des fumiers qui leur sont propres et comment s’en servir ainsi de savoir comment disposer les différentes espèces de fruits selon les différentes expositions.

La question de l’exposition semble intéressante à examiner d’autant que son terrain d’expérimentation à Hénouville se trouvait en façade ouest dans l’influence maritime de l’estuaire de la Seine, du bas du coteau jusqu’ mi pente sous la partie forestière. Et exposé nord-sud sur la longueur parcellaire. Son exposition était la suivante : La meilleure exposition pour les espaliers est celle qui a le Soleil depuis huit à dix heures du matin jusques au soir.

Il poursuit en rapportant que : « Les murailles qui ont le Soleil depuis neuf à dix heures du matin jusques au soir, sont les meilleures pour y planter des poiriers de Bon chrétien, de Bergamotte et de toutes espèces qui sont pleines d’eau dautant que ces fruits ont besoin d'une plus grande chaleur pour bien meurir & avoir bon goût.

Le choix de l’exposition aux vents semble déterminant pour lui car il faudra dit-il considérer : « l’exposition des vents pour tâcher de les mettre à l’abri, car les grands vents nuisent beaucoup aux plants. C’est pour cela que les arbres résistent mieux dans les vallons, pourvu qu’ils ne soient point trop humides, que sur les montagnes et sur les situations relevées et découvertes, où ils sont trop battus des vents ; outre que la terre est toujours meilleure dans les vallons, à cause de la graisse et la bonne humeur de tous le païs descend avec les pluies. » Concernant la gelée et la floraison il rappelle ceci : «  comme les poiriers et les pommiers poussent leurs fleurs plus tard, et qu’ils résistent mieux à la gelée [...] 

Enfin sans insister sur ce chapitre qui fera la notoriété de son œuvre il traitera sur l’art de tailler et de palisse les arbres.

Ensuite il fournit d’autres recommandations au verger il précise la manière d’avoir de beaux fruits.

Cultiver des fruits c’est selon lui de contribuer à conserver la vigueur des arbres et à la grosseur de ses fruits qui demandent attention et nourriture : éliminer les branches faibles, de veiller au nombre de fruits sur la branche et d’en affaiblir la vigueur, de surveiller une bonne tenue des feuilles couvert idéal du fruit par grande chaleur ; de cueillir les fruits au bon moment comme les poires beurrées, le beurré commun, la Bergamotte, le Bon-Chrétien d’été ; cueillir ces fruits par un beau temps ; les mettre dans le meilleur état de conservation sur des planches à l’abri, fenêtres ouvertes durant un mois pour les suer, avant de les faire sécher et de les mettre dans des armoires à la fruiterie à l’abri de la gelée… [...]  Enfin le jardinier insiste sur la maladie des arbres qui peuvent nuire à l’arbre.

Il informe que c’est par leurs racines que le mal survient, du défaut du plant, dy défaut de la terre. L’indicateur se voit dans l’état de la feuille qui jaunit. Il est possible de les sauver en amendant la terre, en labourant au pied et bien d’autres procédés. Les causes peuvent être aussi le chancre, les chenilles[...]

Sans vouloir être exhaustif   mais davantage éclairant, souligner les travaux de Thouin me parait pertinent aussi Michel Traversat a étudié attentivement ses travaux. et nous en reparlerons pour aborder l'état des lieux au 19e siècle.

Pour revenir au 17e siècle   et aux théoriciens Michel Traversat  et Auguste Chevalier ont focalisé également sur Estienne et Jean Liebault.

Je vous rapporte la lecture que Michel Traversat en a fait.

« deux médecins, auteurs d'un ouvrage publié en 1583, ayant pour titre " la maison Rustique"[Estienne et Liebault, 1613]  ménagent un chapitre spécial aux pépinières où ils traitent en quatre pages de la reproduction des arbres. Ils font la distinction entre pépinière et batardière. La pépinière est le lieu où après avoir semé et repiqué de tout jeunes plants, des marcottes et des drageons, on laisse se développer la nouvelle plante pendant dix-huit à vingt mois ; la bâtardière, elle, est destinée à recvoir les plants qui y sont greffés, ces plants étant plus serrés qu'ils ne le seront quand ils seront mis en espalier. »

Concernant les théoriciens-praticiens, c'est bien à Olivier de Serres qu'il faut rendre hommage, ce grand auteur des sciences agricoles qui distinguera, pour ce qui nous intéresse, la pépinière de la batardière : la pépinière est l'endroit où l'on sème les graines ; la batardière l'endroit du repiquage.

Michel Traversat nous livre trois extraits significatifs marquant la qualité des conseils fournis par le sieur du Pardel qui serviront de guide trois siècle durant : 

«La pépinière : elle est inventée pour commencer à l'origine des arbres du verger, lorsque le plant enraciné manque [...]  Nous élèverons par semences les arbres qu'on ne peut obtenir par un auytre moyen avantageusement, et par branches, ceux dont leur facilité à reprendre par racines nous invitent de ne pas nous servir d'une autre manière [...] le temps de mettre les pépins en terre est le même des semences de froment [...] Le lieu de la pépinière sera reparti en planches et carreaux si longs qu'on voudra, et seulement large de 4 à 5 pieds (1,3 m à 1,65 m.), afin que par cet étrecissement, on puisse atteindre avec la main, des côtés jusqu'au milieu de la planche[...] On semera les pépins assez rarement et uniment, ensuite on les couvrira de deux doigts de terre qu'on y criblera par-dessus [...] Quand les rejetons seront levés de terre, on les sarclera soigneusement, pour, gaiement et sans obstacle, les faire croître, sans souffrir qu'aucune herbe n'y croisse en même temps qu'eux [...] Ils seront bêchés pour faire allonger leurs racines, mais ce sera en y allant retenu de peur d'offenser les racines, en creusant trop dans ce commencement. Ce traitement les avancera tellement que dans  la même année, ils deviendront propres à être transportés dans la batardière. »

« La Bâtardière : au mois de février, en jour choisi beau et serein, ni pluvieux, ni venteux cependant [...] on arrachera les arbrisseaux de la pépinière, le plus doucement qu'on pourra, afin que leurs racines en sortent entières, s'il est possible ; et après avoir retranché tout ce qu'on trouvera d'offensé et rompu par mégarde, et rogné la pointe des plus longues racines, les arbrisseaux seront mis dans terre, sans nullement séjourner, de peur de l'évent. Ce sera dans les rayons ou petits fossés, tirés en ligne droite, larges de deux pieds ( 65 cm ), profonds seulement d'un, qu'on les plantera, au fond desquels on jettera premièrement, un demi pied de la meilleure terre du lieu, prise à la superficie, pour asseoir sur elle les racines des arbres, et les recouvrir aussi [...] On écartera ces racines, pour qu'elles ne s'entretouchent ni ne s'entrecroisent l'une dans l'autre, afin qu'elles prennent d'autant mieux terre, qu'elles se trouveront plus à leur aise ; ensuite le reste du rayon sera rempli et réuni à la bâtardière [...] il faudra avec la serpe bien tranchante, couper l'arbre, en poussant en bas, non en tirant en haut [...] on posera les abrisseaux à égale distance l'une de l'autre [...] Voilà votre bâtardière remplie ; il n'est plus question maintenant que de la cultiver soigneusement [...] Trois fois l'année au moins il faudra la bêcher, pour tenir le fonds en guéret, et débarrassé de toute herbe, à l'avantage des bonnes plantes. Il faut être très retenu à labourer, surtout la première année, c'est à dire, ne pas beaucoup creuser en terre, en la labourant, de peur d'offenser les racinbes des arbrisseaux ; y pénétrer un peu plus avant la seconde année ; en continuant ainsi avec modération, jusqu'à ce qu'étant fortifiées, et ayant pris terre, aucun labourage, ne leur soit épargné. L'arrosement est aussi nécessaire à l'avancement de ces arbres [...]. » [De Serres, 1600 ; Traversat, 2001]

En 1689, Boyceau de la Baraudière dans son traité du jardinage qui enseigne les ouvrages qu'il faut faire pour avoir un jardin dans sa perfection écrira :

« Les pépins seront semés au commencement du printemps, en la lune vieille, en beau temps, & par lignes ou rayons. Ils pousseront plutôt, si avant d'être semé, ils ont été mouillés et tenus ensemble un pouce ou deux d'épaisseur, jusqu'à ce qu'ils commencent à germer, s'échauffant l'un l'autre ; et quand ils le seront tout-à-fait, il les faut sarcler avec soin, afin d'empêcher les autres herbes de leur ôter leur nourriture, ou de les suffoquer. Après qu'ils ont un an ou deux, il faut les transplanter, les disposant en ordre, & leur donnant de l'espace pour croître et grossir ; & quand ils seront plus avancés en âge, s'ils montent haut, il sera bon de les couper à un pied de terre, pour les faire renforcer, & grossir : ils s'accommoderont  mieux à cela; &, ne le trouveront pas si étrange que si vous veniez à les couper si bas pour les enter, comme nous dirons qu'il en est de besoin. Si vous avez du lieu pour les mettre où ils doivent demeurer, il vaudra mieux les transplanter sauvages que de les hazarder & rendre malades après avoir été entez. » [La Baraudière, 1689 ; Traversat, 2001]

En conclusion provisoire de ce chapitre sur les pépinières au 17e siècle, Thouin indique dans son instruction l'intérêt des semis sur lequel nous reviendrons pour la évoquer la cause nationale et internationale du 19e siècle : le sauvetage d'un tiers des variétés de pommes à cidre.

A. Thouin indique en 1821 : 

« Les semis étant le seul moyen de créer, ou de régénérer certaines plantes, et d'en faire naître des variétés souvent meilleures que les races dont elles proviennent, sont de la plus grande importance pour la culture, des vergers, des forêts et même pour la naturalisation des individus, des races, des variétés et des espèces. »

[Thouin, 1821 ; Traversat, 2001]

C'est encore Thouin qui en 1821 transmettra son recours possible au moment où la crise au verger se produira.

Reproduction par Sauvageons : 

« Les sauvageons sont des jeunes pieds d'arbres et d'arbustes indigènes venus naturellement de semences et qui poussent dans les bois, les haies et les champs d'où on les arrache. Ce mode de reproduction est un de ceux les plus employés lorsqu'on a un gros besoin de plants à mettre en place très rapidement. C'est pour répondre à ce besoin que fréquemment le roi a fait appel par "Bons du Roi" aux gouverneurs des forêts domaniales, pour qu'on lui fournisse les plants nécessaires aux plantations de bosquets dans les parcs royaux. » [Thouin, 1821 ; Traversat, 2001]

A. Thouin préconise l'emploi des sauvageons en pépinière nous rapporte Michel Traversat.

Après ce court traité de méthodes anciennes pour se procurer du plant il ne faut négliger les moyens dont les arbres vont être façonnés pour le bon fruit, ou pour leur donner une belle silhouette. La greffe  de l'arbre va répondre à ces deux objectifs.

Si la technique du greffage est une opération bien connue, depuis l'antiquité, nous ne l'évoquerons pas à ce moment du récit préférant introduire à la suite des techniques de sémence la question de la reproduction par sauvageons qui sera cruciale au 19e siècle. [Traversat, 2001]

 

Le 18e siècle : c'est véritablement la fin des pratiques médiévales et l’avènement du siècle des « Lumières agricoles » se propagent au Pays de Caux.

Pour introduire les grandes avancées de ce siècle qui renforcera à l’aube de la Révolution française l’avantage du cidre en Normandie.  Faut-il rappeller ici que ce fut la faillite des productions de céréales et le manque de pain qui  conduiront les « citoyens » à déclencher cette révolution.

Les citations qui suivent donnent un aperçu de ce que fut l’écho donné à ce cidre au 18e siècle avant de revenir aux avancées de la Science, de l'Agriculture, de l'horticulture, de l'avènement des premières Sociétés Centrales  d'Agriculture  que Louis XV et Trudaine  ont initié. 

1707 : au pays de Caux, dictionnaire de Thomas Coreneille

« On voit non seulement dans les vergers, & dans les cours des particuliers, mais aussi dans les chemins & à travers des campagnes, grand nombre d’Arbres à fruit, Pommiers, Poiriers, dont on fait du Cidre & du Poiré, qui servent de boisson à ceux du Pays, parce qu’étant un peu froid, il n’est point propre à la Vigne » [Corneille Thomas, 1708]

1726-1739 : au pays de Caux, dictionnaire de La Martinière

«On voit non seulement les vergers, & dans les cours des particuliers, mais aussi dans les chemins& à travers des campagnes, grand nombre d'Arbres à fruit, Pommiers, Poiriers, dont on fait du cidre & et du Poiré, qui servent de boisson à ceux du Pays, parce qu'étant un peu froid, il nest pas moins propre à la Vigne.» [La Martinière, 1726-1739]

1775 : le grand voyageur botaniste et naturaliste Bernardin de Saint-Pierre

Gérard Pouchain dans l’introduction de sa transcription de Voyage de Normandie de Henri Bernardin-de-Saint-Pierre souligne la personnalité de l’auteur attaché à sa terre natale : le pays de Caux :

« Dans sa Normandie natale, il s’intéresse constamment à tout ce qui concerne la vie, les productions et les métiers de la terre […] fabrication du Livarot et du cidre, richesse des labours du pays de Caux, […] rendements améliorés grâce à l’amendement avec de la marne, etc.  Il se fait notamment préciser la durée de conservation des pommes acides, le prix des pommes et des pommiers, du pain […] Bernardin de Saint Pierre est l’un des premiers voyageurs qui nous permet de découvrir une partie de la Normandie, essentiellement rurale, à la fin du 18e siècle […] comme le feront plus tard Janin, Hugo, Gautier ou Flaubert. » [Pouchain, 2015]

« d’Ouville à Yvetot trois [lieues]. De là à Caudebec deux [lieues] Un ouvrier me dit […] on trouve argile, sable au-dessus. Il gagnait dix sous avec cidre et dix sous avec la nourriture. A une lieue de Caudebec, terrain devient montueux et plus plaisant » [De Saint Pierre, 1775]

1787 : le voyageur agronome Arthur Young

« Le 14. Je m'avance vers Barentin à travers abondance de pommes et de poires, et un pays meilleur que la manière dont il est cultivé j'arrive à Yvetot qui est plus riche mais plus mal administré.

Le 15. Même pays jusqu’à Bolbec ; leurs enclos me font souvenir de l'Irlande les clôtures sont de larges parapets fort hauts, bien plantés de baies de charmes et de hêtres. » [Young Arthur, 1787-1789]

1788 : le Marquis de Guerchy, autre voyageur

« Les autres bâtiments sont à peu près les mêmes que les nôtres ; les bergeries font beaucoup mieux, aérées, ayant deux rangs de fenêtres ; le pressoir à cidre fait un bâtiment important, & le grenier à pomme est au-dessus. Les terres sont trop bonnes dans le pays de Caux, pour y faire des quinconces de pommiers : on n'en met qu'en avenues ou dans les clos. » [Marquis de Guerchy, 1788]

1788 : à Yvetot

A Yvetot : « Leprevost et Dubuc, après un succès judiciaire à l’encontre du prince d’Albon, firent « sauter joyeusement les bouchons des bouteilles de gros cidre, quelques-uns disent de vin de Champagne, dans un festin auquel avaient été conviés la majeure partie des bourgeois d’Yvetot. » [Beaucousin, 1884]

Le 18e siècle perpétua ces arts de la taille et de la greffe qui pour cette pratique attiendra des limites pour le renouvellement des fruitiers, des variétés d’élite. 

« Il faut savoir gré aux intendants du 18e siècle, à une époque où les causes qui influent sur la végétation étaient à peine connues des savants [Duhamel  de Monceau], des circulaires qu'ils rédigèrent pour engager les cultivateurs à prendre des mesures pour préserver les arbres, des insectes qui attaquent les bourgeons, les fleurs et les fruits. » [Duval, 1896] précieux conseils qui malheureusement n’arrêtera pas le fléau qui frappera les pommiers de l’ouest de la France au début du siècle suivant mais peut-être avait-on privilégié la réplique des pommiers par la greffe et moins pas les semis.

Si Louis Duval, rappelle que dès le 16e siècle le cidre normand avait acquis droit de cité à Paris, information divulguée par docteur Julien de Paulmier, médecin de Chartes IX et de Henri III qui plaçait cette boisson au-dessus du vin au point de vue hygiénique, pour autant il fallut attendre les progrès fait en pays de Caux pour que le cidre du pays de Caux fut servi sur la table royale de Louis XV le faisant venir de Montigny près de Rouen. Montigny se trouve sur les hauteurs du plateau de Caux même si cette commune voisine de la Vaupalière ses trouve en clairière proche de la limite nord de la forêt de Roum

Pichet à cidre du 18e style Louis XV

https://www.proantic.com/476055-pichet-a-cidre-en-verre-souffle-18-eme-siecle.html

Ce pichet à cidre provient de la manufacture de Rouen ( Normandie ), il date du milieu du 18ème siècle. 

https://www.proantic.com/1019904-pichet-a-cidre-en-rouen-18e.html

Dans le registre que Julien Félix consulte à propos de sa recherche, la chance lui sourit car un document se détache et constitue un témoignage très intéressant :

 

« Un demy muy de cidre du cru de Montigny (près de Canteleu), du plus excellent que faire se pourra. « M. Allis m'obligera d'y aller promener quelque jour, et d'en faire choix luy-même et de le faire ammener par un homme de confiance.

« Quand il sera entre ses mains, il le fera mettre en double futaille, et le chargera par un batteau addressé au Pecq au Sr Venard p. f. de M. Judde, controlleur de la maison du Roy ; Et quand j'aurai avis du départ du batteau, je donnerai mes ordres audit sieur Venard. « Ledit Venard, aussitost qu'il l'aura receu en feraexpédition, par un voiturier de toute seureté, à M. Thomas, control. de la maison du Roy, rüe des Bourdonnois, au Parc aux Cerfs, à Versailles. »[Félix, 1883]

Le cidre acquiert des lettres de noblesse à la cour sous Louis XV. - Montigny, près de Rouen

« Primitivement, c'est-à-dire au XVe et XVIe siècles, le cidre fut un boire de luxe. On n'en goûtait que le dimanche et encore à petites doses. Il se payait fort cher.

La boisson à la mode supplanta les dernières pipes de verjus et vint le moment où le pichet de cidre trôna sur toutes les tables familiales. Les plantations de pommiers, dont l'étendue allait crescendo.

Mais le pichet de cidre ne s'en tint pas au logis du manant. Il se hissa jusque sur la table royale. François Ier usait de cette liqueur pétillante et la chronique dit que Louis XV en faisait venir de Montigny près Canteleu, spécifiant que le cidre, pris naturellement au bon tonneau devait lui être amené « par un voiturier de toute sureté, après l'avoir mis préalablement en double futaille. »

Le cidre normand avait conquis des lettres de Noblesse.

Si on veut se rendre compte du phénomène au pays de Caux, l’Atlas de Trudaine - 1745-1780 – témoigne de la place qu’avait le verger, les pommeraies et les pépinières au milieu du 18e siècle.

 

L’art des pépiniers prend ses lettres de noblesse au 18e siècle au Pays de Caux et au Pays de Bray comme il l’avait été deux siècles plutôt dans le Roumois.

Le 18e siècle connut une seconde vague de rapprochement agraire entre la Couronne d’Angleterre et le royaume de France, la première vague fut au temps de la Couronne Anglo-normande. Le pays de Caux fut un laboratoire d’introduction de cultures nouvelles sur des terres réputées très fertiles. L’idée d’une agriculture « nouvelle » ou autrement à « l’anglaise » ou encore « alternative » pouvait convenir par ses échanges au gentlemen farmer cauchois – Gentilhommes et propriétaires améliorateurs [Bourde, 1958] » :

« Ainsi le pays de Caux apparaît très tôt comme une région exemplaire. Dans un ouvrage intitulé Le Consolateur (1763), le baron de Saint-Supplix consacre plusieurs pages à cette région. Il vante l'ingéniosité et la richesse des gros fermiers cauchois. Fait intéressant, il attribue leur sérieux et leur persévérance au fait qu'il y a beaucoup de protestants parmi eux, ce qui les fait ressembler à de véritables fermiers anglais. D'autres auteurs vantent les assolements complexes du Caux où entrent le lin et le chanvre, plantes précieuses à l'époque du renouveau maritime et textile. Le colza aussi, lentement introduit depuis la Flandre proche, graine dont l'huile s'utilise pour brûler ou pour fabriquer le savon noir qui dégraisse les toisons que traite celte importante région de filatures et de métiers. » [Bourde, 1958]

 Il se fixera notamment en pays de Caux la rotation des cultures dans la ferme cauchoise et une connaissance nouvelle de diverses marnes pour les utiliser en agriculture. Sur le plan des productions spéciales la pépinière pourra introduire des variétés nouvelles pour les planter dans des parcs et jardins : « Ainsi le marquis de Chambray se consacre à la pomologie et publie en 1765 un Art de faire le cidre à la manière de Normandie, encore réédité à la fin du 19e siècle » [Bourde]

Ces avancées entre 1750 et 1789, même si elles étaient encore limitées à l’aube de la Révolution française, font que la Normandie et le pays de Caux avaient admis la rotation des cultures, l’usage des herbes artificielles et l’art de faire du cidre : une véritable révolution agricole. [Bourde, 1958]

Ce siècle des Lumières agricoles fut celui de Louis XV grand amateur et administrateur d’agriculture conseillé par Trudaine-Daniel-Charles et son fils Jean-Charles qui lui succéda et Duhamel de Monceau, physicien, botaniste et agronome français, le père de l’agriculture française.

Voici comment le pays de Caux était décrit par le réputé Marquis de Guerchy lors d’un de ses récents voyages en Normandie :

« C'est au Havre que commence le pays de Caux, c'est un canton de plaine de la plus grande richesse, jusqu'à Rouen & Dieppe, les terres ne s'y reposent jamais, & rapportent douze à quinze boisseaux, pour un, de semence […] Les fermes de ce pays sont bâties dans un genre bien différent de celles des environs de Paris. […]

C'est un grand clos en herbe planté irrégulièrement en arbres fruitiers, & entouré de fossés relevés de quatre ou cinq pieds de haut sur dix à douze d'embattement garni, d'une double palissade de deux rangs de hêtres, de chaque côté, que l’on élague, tous les trois ans, pour chauffer le Eermier. Il y a souvent d'autres arbres, mais les hêtres sont le principal ornement de ces clôtures & sont en même-temps très utiles, vu qu'ils garantissent les bâtiments des vents, & ; les bestiaux du froid ; ils fournissent tous les bois nécessaires aux réparations ; ces enclos ont l’avantage que l’on y peut-mettre paître tous, les bestiaux sans gardien, & y faire des meules, que l’on ne risque pas de voir brûler par la main des malfaiteurs. […] le bâtiment servant de manoir au Fermier, qui est ordinairement bâti assez solidement, & proprement couvert en tuiles ; à cent pas plus loin, est le fournil construit de même, & toujours très -éloigné de toutes les granges, étables, &.  D'ailleurs tous les autres bâtiments sont, bâtis en terre, & couverts en paille, très isolés, & situés à cent pas au moins les uns des autres, pour éviter les dangers du feu ; d'écurie est ordinairement la plus près de la maison, de l'autre côté de la porte, mais toujours à une certaine distance.

Les autres bâtiments sont à peu près les mêmes que les nôtres ; les bergeries font beaucoup mieux, aérées, ayant deux rangs de fenêtres ; le pressoir à cidre fait un bâtiment important, & le grenier à pomme est au-dessus. Les terres sont trop bonnes dans le pays de Caux, pour y faire des quinconces de pommiers : on n'en met qu'en avenues ou dans les clos.

II y a soixante ans que l’on cultive tout dans ce pays, depuis le Havre jusqu'à Dieppe, d'un côté, & jusqu'à. Rouen, de l'autre sans admettre de jachères l'exemple a d'abord, été donné pat un seul Fermier donc lès prompts succès ont bientôt attiré beaucoup d'imitateurs. » [De Guerchy, 1788]

De Chambray donne également des conseils sur la tenue d’une pépinière[1], ce terme par ailleurs commence à apparaitre fréquemment dans les ouvrages et bulletins ayant pris ses lettres de noblesse en 1741. Le mot pépinier[2] est apparu comme directement venu du mot pépinière en 1741 définit par Louis XV[3]

« les agronomes français ont produit au 18e siècle des travaux qui ont eu une influence plus sérieuse sur la culture du pommier et sur la production du cidre. En 1765, Louis de Chambray publia l'Art de cultiver tes Pommiers et les Poiriers et de faire les cidres, selon l’usage de la Normandie - Paris, Ganeau, 1765, in-12, de 66 pages. Cet ouvrage fut réimprimé en 1781, en 1783 et un 1803, avec des additions. […] les chapitres consacrés à la pépinière, à la greffe, aux différentes pommes à cidre qu'il divise en trois classes, suivant le temps de leur maturité, sur la façon des cidres, etc., contiennent les conseils les plus judicieux.

Au nombre des ouvrages pomologiques les plus remarquables de cette époque, il faut citer encore le Traité des arbres et arbustes par Duhamel de Monceau (1755), La physique des arbres du même (1758) et son Traité complet des Arbres et fruits, 2 vol.  ornés de près de 200 planches en taille, douée, dessinées et parées d'après nature.

Les plantations de pommiers au 18e siècle, furent particulièrement encouragées par l'arrêt du Conseil d'Etat du 3 mai 1720 dans les départements de la Basse-Normandie.» [Duval, 1896]

On peut ajouter à cette littérature sur le sujet concernant la littérature sur les pépinières du 18e siècle les indications données par Michel Traversat cite l’exemple de celle de Vitry-sur-Seine permettent d’avoir accès à un inventaire exploitable qui permet d’obtenir de nombreux précieux renseignements dont ceux-ci :

« Les arbres fruitiers forment une catégorie d’arbres qui demeure stable durant les quatre premières décennies (du 18e siècle), de 22 à 29 % des arbres pour augmenter jusqu’à 31 à 62%.

Les arbres principaux de cette catégorie sont au nombre de trois :  Le poirier, le pommier, et le prunier, auquel il convient d’ajouter le cognassier dont Calonne en donne la raison :

« Le poirier : Ils sont de deux espèces, le poirier sur franc & le poirier sur cognassier. Le poirier sur franc vient de semence. En Normandie, on sème les pépins provenant du marc de cidre, appelé poiré, qui est le jus des poires. […] »  [De Calonne, 1779]

Le pommier : il figure pour 25% dans les arbres fruitiers présents à Vitry nous rapporte Michel Traversat. De Calonne nous renseigne sur la culture du pommier autrefois :

« On greffe d’abord sur le pommier franc, appelés encore aigrains qui est élevé de pépins du même arbre ou des drageons qui en proviennent. La seconde appelée pommier sur doussin, est greffée, de même que le pommier sur paradis, sur des rejets sauvages qui poussent dans les vergers au pied de ces arbres. Les pommiers francs qu’on fait venir ici l’année d’après leur semence, y sont replantés comme tous les arbres à fruits ; tous sont greffés à l’instar des poiriers au milieu de l’été. Le pommier franc qui se plante dans les grands vergers, ainsi que dans les hauts prés, est le plus tardif à produire du fruit. Le pommier sur paradis en rapporte plutôt que le doussin, mais il dure moins longtemps. » [De Calonne, 1779].

Enfin il convient de présenter ici la fondation de la Société  Centrale d'agriculture de la Seine-Inférieure ?

« En 1761, la Société centrale d'agriculture de Seine-Maritime, après avoir œuvré pendant deux siècles au développement de l'agriculture, a décidé de mettre en valeur un patrimoine unique.
Reconnue d'utilité publique, la Société dont le siège est à la Chambre d'agriculture à Bois-Guillaume a, en 238 ans, contribué à la réalisation de nombreuses recherches et organisé de nombreux comices, concours beurriers ou pomologiques ! L’une de ses plus belles réalisations fut la création de la Société des courses de Rouen, toujours très active sur l'hippodrome des Bruyères à Rouen.
» [CTHS]
 


[1] Nom : Pépiniériste : Jardinier qui cultive des pépinières. Adjectif : Un jardinier pépiniériste. Le Littré dit ceci : Le mot pépiniériste est mal fait; on aurait dû dire pépinier. 

[2] Un pépinier est celui qui élève dans une pépinière de jeunes pommiers (fruitiers notamment).   

[3]« la nouvelle Pépinière du Roi existoit donc en 1741 mais en 1772 Louis XV voulut lui donner une destination plus spéciale. Comme on sait, ce Monarque avoit beaucoup de goût pour la culture des Arbres : il désiroit, entre autres, multiplier sur le sol de la France le plus grand nombre possible d'Arbres étrangers, persuadé que par quelques-uns d'entre eux on pourroit effectuer le repeuplement des Forêts. Ainsi, il falloit les essayer sur plusieurs points du royaume. Il désigna sa propre Pépinière du Roule pour devenir le centre de toutes celles qu'on devoit établir, et il en donna la direction à l'abbé Nolin, dont il avoit eu occasion de connoître le zèle et l'habileté. » in : Notice historique sur la pépinière du Roi au Roule ; faisant suite à un discours sur l'enseignement de la botanique, prononcé dans cet établissement, le 24 mai 1824. Par le Ch[er] Aubert Aubert Du Petit Thouars, membre de l'Académie royale des Sciences. Du Petit-Thouars, Aubert Aubert (1758-1831), in : 

En cours de finalisation de ce chapitre du 18e siècle avec l'état des lieux des vergers et closages cauchois où ont poussé les pommiers et poiriers pendant ces deux siècles: le 17e siècle et le 18e siècle

Etat des lieux du territoire observé à la loupe de 1764 à 1965 en trois périodes.

On peut le territoire français et ici le pays de Caux, grâce à l'outil de l'Atlas Trudaine, et aux acrtes et vues aériennes d'IGN Remonter le temps.

Que peut-on observer et en déduire?

Force est de constater qu'en zoomant sur un village, un hameau ou sur une masure il est facile de voir l'évolution du paysage, du démantèlement  des masures et cours, des assemblages de cours, masures et closages qui au moins depuis le 15e siècle figurent dans les plans des terriers.

En s'appuyant sur ces outils on s'aperçoit que les masures, cours et leurs assemblages, qui ont constitué la configuration des villages après notamment les défrichements opérés dès le Moyen-Âge, ceux-ci ont plus ou moins disparu  aux alentours des villes comme le Havre, Rouen, Dieppe, Fécamp et les plus petites villes comme Yvetot, Pavilly-Barentin, Bolbec ou les bourgs tels Goderville, Fauville, Luneray, Auffay ... 

En premier nous prendrons l'exemple du village d'Ecalles-Alix,  ancienne paroisse de la principauté d'Yvetot  comprenant au moins à cette époque le hameau de Loumare.

Ce petit village où passait l'ancienne route du Havre à Rouen a assez peu changé en dépit de l'aménagement de quelques  récents lotissements, comparativement à sa voisine Yvetot que nous décrirons par la suite.

C'est en comparant du 18e siècle au 20e siècle, soit sur trois périodes  : 1764 - 1866 et 1966 quil est possible de se rendre compte de l'importance des vergers de pommes et poires  et de l'acivité cidricole au coeur des villages, hameaux, masure et cours.

« Les atlas des routes de France dits atlas de Trudaine constituent une collection unique et homogène de 62 volumes totalisant plus de 3 000 planches manuscrites soigneusement aquarellées.
Concervés au Service des cartes et plans des Archives nationales site de Paris, ils sont cotés : CP/F/14/8443 à 8507. Réalisés entre 1745 et 1780 sur ordre de Charles Daniel Trudaine, administrateur des Ponts et Chaussées, ils comportent les routes faites ou à faire (et leurs abords immédiats) dans les vingt-deux généralités des pays d’élections régies par des intendants.» [Archives Nationales]

« Daniel-Charles. Naissance : 3 janvier 1703 à Paris - Décès : 19 janvier 1769. Fils de Charles Trudaine, prévôt des marchands de Paris, devenu célèbre par sa droiture et son intégrité. Daniel-Charles Trudaine après avoir occupé les charges de maître des requêtes, de conseiller d'État, d'intendant de la généralité de Riom, il fut choisi en 1743 par le contrôleur général Orry pour diriger, en qualité d'intendant des finances, le service des ponts et chaussées. Il est conseiller au Parlement de Paris, puis intendant d'Auvergne de 1730 à 1734. En 1743, il est nommé membre honoraire de l'Académie royale des sciences et, l'année suivante, directeur de l'Assemblée des inspecteurs généraux des ponts et chaussées, fonction qu'il occupe jusqu'à sa mort en 1769. Il démissionne en août 1764 de l'Académie des sciences avec conservation du droit d'assister aux séances et d'y voter. En 1749, il est nommé Directeur du commerce, fonction considérable puisqu'il gouverne l'ensemble des intendants du commerce de France fonction qu'il occupe jusqu'à sa mort. C'est son fils Jean Charles Philibert Trudaine de Montigny qui lui succède à cette fonction de 1769 à 1777. Il fonde l'École nationale des ponts et chaussées en 1747, avec à sa tête Jean-Rodolphe Perronet, ingénieur de la généralité d'Alençon.  Il est aussi membre de la Société d'agriculture de la généralité de Paris, dès avril 1761 car il porte un grand intérêt aux questions agricoles, jouant un grand rôle auprès de Bertin. In : cths, Comité des travaux historiques et scientifiques. Institut rattaché à l’École nationale des chartes,  On doit à Trudaine et Turgot d’avoir su impulser une dynamique dans l’agronomie, c’est eux qui fondent la première société d’Agriculture dans la généralité de Paris en 1761. Puis viendra la 1ere société d’Horticulture de Paris en 1827, Nantes et Lille -1828, Rouen -1836, Le Havre -1853, Yvetot -1863.»[CTHS.fr]

A la découverte des vergers du pays de Caux, sur les pas  de Trudaine dont je viens de décrire le parcours et d'Arthur Young à la fin du 18e siècle, un an avant la Révolution française

 

"Arthur Young (1741-1820) est un agriculteur et agronome britannique : auteur de nombreux ouvrages, il eut de son vivant une grande renommée. Visitant la France entre 1787 et 1790, à chaque étape de ses trois voyages, il fournit des renseignements importants sur les techniques agricoles de l'époque mais également sur la situation sociale du pays, sur le déroulement de la Révolution, sur l'état des routes et celui de la population, avec souvent des éléments de comparaison à partir son propre pays . Il est souvent consterné par l'aspect arriéré de nombreuses campagnes françaises ou encore par la distance ou le désintérêt d’une certaine noblesse française vis-à-vis du monde rural ; il passa dans notre région en août 1788 : à Rouen, Le Havre, Harfleur, Barentin – à travers abondance de pommes et de poires et un pays meilleur que la manière dont il est cultivé – Yvetot – qui est plus riche mais plus mal administré – Dieppe ; il jugea fort mal le Pays de Caux, ou du moins avec beaucoup de sévérité : « Le Pays de Caux qui possède un des meilleurs sols du monde avec des manufactures dans chaque chaumière offre une scène continuelle de mauvaises herbes, d’ordures et de misère ; son sol est si mal administré que s’il n’était pas naturellement d’une fertilité inépuisable, il y aurait longtemps qu’il serait entièrement ruiné … » [Duboys Fresney, 2015]

  Yves Duboys Fresney à  ce propos souligne : 

 Le docteur Lepecq de la Cloture de Rouen confirme ces propos : « Cette contrée, le Pays de Caux, ne donne pas autant de production de denrée qu’il y en pourrait croitre avec une meilleure culture… »

"Son « Voyages en France », publié en 1792, eut un retentissement important et stimula les autorités pour un renouveau des méthodes ; ses écrits marqueront les esprits ; la comparaison entre les deux pays, souvent en notre défaveur, aura un effet déclencheur de notre conscience collective ; le 19ème siècle dans son ensemble relèvera le défi avec ses avancées technologiques et puis une volonté de réorganisation." [Duboys Fresney, 2015]

Sur les pas d'Arthur Young traversant le pays de Caux, de Rouen au Havre en passant par la récente voie royale Barentin, Yvetot, Bolbec et Le Havre projetée par Louis XV et achevée sous Louis XVI.

 

Je vous invite à une première immersion dans le pays de Caux, tout d'abord au cap de Canteleu, là ou le plateau du pays de Canteleu plonge en pente raide sur la vallée de la Seine à l'embouchure de la rivière Clairette se jetant dans le Cailly à Bapeaume. 

 

De Canteleu, Bapeaume - hormis Croisset, Dieppedalle et Biessard - en surplomb de la vallée du Cailly voici un petit verger de la cour plantée de l'ancienne masure forestière de la forêt de Roumare. au bout du village vers Sahurs un bois fut nommé Bois de Caux et aux sièclex dernierx un clos de Caux (verger)  appartenait aux Hospices de Rouen a proximité du Préventorium.

Le talus planté de hêtre de la masure forestière bordant la Sente aux lapins.

La Vaupalière, au sortir du village

Roumare village on discerne des vestiges de talus plantés de haute futaie.

Non loin un verger ancien de la Vaupalière et de Roumare, non loin de Pissy-Pôville

Nous commencerons peu avant Barentin à Pissy-Poville  très exactement  à l'endroit, peu après avoir passé le Cailly, ce village surplombe la vallée du Cailly et en perspective d'où nous apercevons Barentin.

Barentin est sur l'axe de la D6015, anciennement RN15 ayant remplacée la Voie Royale, dessinée par Trudaine.

La précision de l'Atlas Trudaine est époustouflante comparée à la Carte d'Etat Major du siècle suivant. 

Le paysage  de la campagne qu'a traversé Arthur Young  découvre les  hameaux  du pays de Caux. 

1787 : le voyageur agronome Arthur Young

« Le 14. Je m'avance vers Barentin à travers abondance de pommes et de poires, et un pays meilleur que la manière dont il est cultivé j'arrive à Yvetot qui est plus riche mais plus mal administré.

 

 

Pissy-Pôville

Environnement d'un village du pays de Caux

La Carte de l'Atlas Trudaine au mitan du 19e siècle présente le bourg de Pissy, nommé aujourd'hui Pissy-Poville qui était à cette époque qu'un assemblage et une mosaïque de masures et cours avec leus cours plantés dont il en reste un au Verger de la Quesnay chez M. Lambart, producteur de cidre du pays de Caux.

Nous ne pouvonspas  voir au-dessous de l'image le clos-verger car malheureusement il ne se  situe pas dans le périmère de cet Atlas Trudaine.

Les contours de Pissy ont peu évolués en 270 ans sinon que les pommiers ont pour la plupart disparu des cours sauf dans la masure de la ferme de M. Lambart (entre Pissy et Pôville) où le verger s'est même étendu y compris à Fresquiennes.

En revanche dans la figure suivante, il est possible de le distinguer sur cette  vue aérienne.

Ci-dessus, les points en rouge figurent l'ensemble du Verger de la Quesnay où l'on fait le ce cidre du pays de Caux. La figure suivante nous projete sur Barentin au passage de la vallée cauchois l'Austreberthe.

La carte d'Etat Major du mitan du 19e siècle  montre l'absence d'arbres le long des routes et chemins.

 

Aujourd'hui  la campagne a laissé place à l'expansion urbaine  et commerciale de Barentin, y compris sur le plateau de Caux

Ecales-Alix

Environnement d'un village du pays de Caux

 

Le Village d'Ecalles-Alix est situé près d'Yvetot, à 1 km à gauche de l'axe de la D6015, anciennement RN15 ayant remplacée la Voie Royale, dessinée par Trudaine.

La précision de l'Atlas Trudaine est époustouflante comparée à la Carte d'Etat Major du siècle suivant. La Vue aérienne d'IGN est d'une précision à l'égal de l'Atlas Trudaine qui n'a malheureusement pas couvert tout le territoire du Royaume de France sinon à proximité du tracé des voies royales au 18e siècle.

 

En 1764

Extrait de l' Atlas Trudaine Ecalles-Alix

En 1832

entre 1764 et 1832, on observe un peu plus de vergers

Extrait de la Carte Etat Major 1832 - IGN Remonter le temps

En 1961

Entre 1832 et 1961, on constate une sensible évolution et le déplacement de certains vergers  suite à un remembrement. Certains vergers se clairsement légèrement

Extrait de la  vue aérienne  n°  1109 - 01/08/1961 - IGN Remonter le temps

En 2012

Entre 1961 et 2012, on constate une nette évolution et la supression de cours et masures suite à un changement du PLU. Des talus plantés ont été démantelés. La plupart des vergers ont disparus au profit de constructions de maisons neuves et de lotissement : une artificialisation en marche.

Ce n'est quasiment plus le même paysage. 

Extrait de la  vue aérienne  n°1557 - 24/07/2012 - IGN Remonter le temps

 

Trois visages d'Ecalles-Alix  ces dernières années

On constate sur cette première vue (ci-dessus) qu'il reste quelques talus plantés

et quasiment plus de vergers

 

Yvetot et Sainte-Marie-des-Champs

Environnement du  hameau Mont-Asselin

 

Le Hameau du Mont-Asselin se situe sur la commune de Sainte-Marie-des-Champs et sur la commune riveraine d'Yvetot.

Flanqué sur le coteau du Val au Cène  remontant jusqu'à Sainte-Marie-des-Champs  il surplombe le vallon et au 15e siècle, entre le manoir et les bois de garenne  se trouvait le verger (closage). alentour se trouvait des corps de ferme et des cours et masures dont une possède encore un très beau colombier, rue du Mont-Asselin.

La précision de l'Atlas Trudaine magnifie l'endroit où étaient cultivés des pommier et  poiriers.

En revanche, depuis les années 70, si le hameau a peu changé, vers la D 6015 et la Rocade, l'artificilisation a  grignoté les terres agricoles remplacées par un centre commercial et des lotissements. Les quatre plans de situation le démontre magistralement. Là encore nous restons à proximité de l'ancienne voie royale dessinée par Trudaine.

 

En 1764

Extrait de l' Atlas Trudaine Ecalles-Alix

En 1832

entre 1764 et 1832, on observe à droite l'ancien emplacement du verger du manoir qui a disparu

Extrait de la Carte Etat Major 1832 - IGN Remonter le temps

En 1978

Entre 1832 et 1961, on constate une très nette évolution et la disparition  supplémentaire de certains vergers.  D'autres ont été remplacés par des lotissements à Sainte-Marie-des-Champs.

Extrait de la  vue aérienne 1978 - IGN Remonter le temps

 

 

En 2012

Entre 1978 et 2012, 

Ce n'est quasiment plus le même paysage : une masure a disparue  pour laisser place à la rocade sud, et les masures et cours ont perdu leurs pommiers à deux exceptions près. C'est là que l'on voit l'impact de l'artificicialisation  en pays de Caux en milieu péri-urbain.

 

 

Au lointoin un des deux vergers restants et un talus planté, côté Yvetot.

A droite, un des talus plantés côté masure du Mont-Asselin.

Ce chemin est celui de l'ancienne route de Rouen qui rejoint La Marche, puis Ecalles-Alix vers Rouen.

Ci-dessus l'entrée du Manoir du Mont-Asselin et une ancienne cour plantée et une autre perspective vue de la rocade.

 

Yvetot

Environnement d'une ville, capitale du pays de Caux

 

Yvetot, capitale du pays de Caux fut fondée aux alentours de 1021 et connu une prospérité dûe aux faits d'arme de son Sire qui parti à Hastings aux côtés de Guilleume le Conquérant et  du fait que ses successeurs  partirent aux Croisades jusqu'à l'époque de Saint-Louis. Sur ces faits les sires d'Yvetot gagnèrent leur Royaume.  Martin-du-Bellay, historien de François 1er organisa la transition du Royaume en Principauté au 15e siècle.

Il fit avec Isabeau de Chenu une principauté digne de leurs rangs avec un château, un parc, un mail de 900 mètres, plusieurs mares et un bois : tous les attributs d'un paysage d'un château et d'un parc de la Renaissance.

La précision de l'Atlas Trudaine magnifie l'endroit où étaient également plantés les pommiers, poiriers, les vergers, les pépinières  et le château que l'on retrouve en 1702 sur un très beau document iconographique. 

 

En 1702

Le château sur une motte entourée d'eau, l'église et le verger de fruitiers

 

En 1764

Yvetot, la ville verger

 

Sur ces deux plans de la ville, on discerne le centre historique d'Yvetot  dont l'actuelle  rue de la Gare, le borde au Nord ; l'actuelle rue de la Briquetterie et Mare Bridel, à l'Est ; l'actuelle rue Niatel , au sud ; et enfin l'actuelle rue des Chouquettes , à l'Ouest.

Yvetot était réputé être un centre renommé de la pomme (cidrerie, distillerie... et entrepôts de boisson dont les taxes étaient perçues au temps du paradis fiscal de la principauté), du cidre et des boissons.

Les vergers sont très visibles et nombreux comme vous pouvez le constater.

En 1832

 

En 1955

 

Entre 1955 et 2014, le visage de la ville d'Yvetot a énormément changé : d'un champ de ruine où beaucoup de petits vergers ont été rasés, la ville reconstruire et devint très minérale.

Seuls les mini vergers de la rue des Chouquettes, de la rue du Calvaire, de la rue Bellanger et de la rue Niatel ont survécus avant d'êtré mangé par l'urbanisme, rue Niatel.

 

En 2014

Il subsiste encore des jardins de cour, à l'arrière des maisons, le plus souvent à l'abri des regardsoù j'ai pu repéré quelques fruitiers en espaliers contre les murs.

 

 

Valliquerville 

Environnement d'un château

Valliquerville est voisine d'Yvetot, capitale du pays de Caux. Ce village possède un château adossé au bourg.  

La précision de l'Atlas Trudaine magnifie l'endroit où étaient également plantés les pommiers, poiriers, les vergers, les pépinières, un des seuls documents qui  figure ses anciens vergers du 18e. 

En 1764

 

Extrait de l' Atlas Trudaine, section Valliquerville

En 1832

Entre 1764 et 1832, on observe à gauche l'ancien emplacement du verger du château  et ceux des cours et masures du village se situant à droite.

Le futur tracé de la voie royale est devenu RN 15 puis D 6015.

En 1832

Entre 1764 et 1832, on observe à gauche la disparition des vergers du château alors que ceux du village sont encore préservés avec leurs des cours et masures. 

L'observation de ce village montre assez bien comment  le fléau de la maladie des fruitiers a impacté le pays de Caux  car vis à vis de 1764, les pommiers du château ont disparus et d'autres n'apparaissent plus en 1832 au coeur du village ce qui montre bien l'impact qu' a eu la maladie des fruitiers au début de ce siècle, la première décrite par le pépinier Prévost de Rouen-Boisguillaume.

En 1955

Entre 1832 et 1947, on observe à gauche le retour des vergers qui a du s'opérer au regain de l'activité cidrière  en milieu rural  après l'étape de la régénération des pommiers à cidre opérée par les nombreux pépiniers yvetotais, ce qui s'observe également  dans le village où s'est créé de nouveaux vergers entre 1875 et 1947, peu avant la prime à l'abattage des pommiers, après-guerre.

Les cours et des  masures sont encore quasiment intacts. 

En 2014

Entre 1947 et 2014, on observe à gauche à nouveau la disparition des vergers qui a du s'opérer après le remembrement  et la prime à l'abattage des fruitierds après-guerre.

Les cours et des  masures s'étiolent et ont laissé place à l'implantation de lotissements et de maisons modernes comme le figurent certains villages du pays de Caux dont certaines se sont cronstruitent à l'ombre des cours et masures.

 

Allouville-Bellefosse

Environnement d'un manoir

Le Fayel - Manoir

 

D'après les informations que l'on trouve sur internet, Allouville est attestée sous les formes Terram Turstini de Adelolvilla vers 1050 (Fauroux p. 366) ; Adeloldvilla en 1050 ; Allovilla en 1071 (Lot 99, 86, 127) ; Ecc. Sancti Quintini de Allouvilla entre 1130 et 1164 ; Ecc. de Alouville entre 1185 et 1207 ; Decimam de Alodivilla au XIIe siècle ; Par. Sancti Quintini de Aalouvilla en 1262 (Archives départementales de la Seine-Maritime, 16 H., cart. 309, v., 198, 200, 317) ; P. Cabot, unum quarterium apud Aelouvillam vers 1210 (H. Fr. XXIII, 645) ; Halovilla vers 1240, Alonvilla, Aalonvilla en 1266 (H. Fr. xxiii, 283) ; Alouvilla en 1337 ; Alouville en 1431 (Longnon 25, 84) ; Allouville en 1393 (Archives nationales P. 284, 90) ; Allouville en 1393 (Arch. nat. P. 284, 2. 142) et en 1484 (Arch. nat. P. 284.2.224) ; A Allouville en 1495 (Deville, Tancarville, 368) ; Saint Quentin d'Allouville en 1713 (Arch. S.-M. G 737) ; Alouville en 1715 (Frémont) ; Allouville en 1738 (Pouillé), en 1788 (Dict.) et en 1953 (Nom.).
Bellefosse qui est citée vers 1210 sous la forme latinisée de Bellam Fossam, est une ancienne paroisse de la commune.
Bellefosse est attestée sous les formes Ecclesia cum decima de Pulchra fovea en 1192 (Arch. S.-M. 54 H, Bulle de Célestin III) ; Terciam partem feodi unius apud Bellam Fossam vers 1210 (H. Fr. XXIII, 642) ; Bella Fossa vers 1240 (H. Fr. XXIII, 284) ; Bellafossa en 1337 ; Bellefosse en 1431 (Longnon, 26, 84) ; Bellefosse en 1319 (Archives S.-M. G 3267) ; Bella Fossa en 1342 (Arch. S.-M. 18 H) ; Bellefosse et Raffetot en 1398 (Arch. Nat. P. 303, 73) ; Ecc. parr. de Bellafovea en 1519 (Arch. S.-M. 54 H) ; Bellefosse en 1715 (Frémont) ; Belle Fosse1757 (Cassini) ; Bellefosse en 1953 (Nom., I.G.N.).
Elle est la première commune de Seine-Maritime dans l'ordre alphabétique et sa fusion avec Bellefosse s'est opérée en 1823 
La commune d'Allouville-Bellefosse est connue pour son chêne millénaire, pour le célèbre Pierre Belain d'Esnambuc, natif de la commune en 1585, qui prit possession de la Martinique en 1635 au nom du roi Louis XII. Le village d'Allouville possède un musée de la nature créé par Jean-Pierre-Jacques, fondateur du Centre d'hébergement et d’Études sur la Nature et l’Environnement (Chene).

La Confrérie du Gland est connue pour avoir contribuée au dynanisme de la cité après avoir été fondée après le tournage du film  "le chêne d'Allouville" dont quelques figures restent  connues comme Jean-Pierre-Jacques et de feu Roger Devaux.

C'est au contact de Jean-Pierre Jacques à Yvetot que j'ai eu la passion de la nature en général, derrière les talus plantés du quartier du Fay où il avait son atelier de taxidermiste et son  labo photo argentique avant qu'il déménage à Allouville-Bellefosse : je lui rend hommage ici.

Le Manoir d'Ismenil  reste aussi un des joyaux d'Allouville-Bellfosse du domaine privé. 

D'après le site chateau-fort-manoir-chateau,  Le manoir d’Isménil construit dans la première partie du XVIIIe siècle présente des éléments conçus par la famille d'Yvemesnil entre la fin du XVe siècle et le dédut du XVIe siècle. La façade encorbellée, encadrée par des pignons en brique, possède deux portes jumelées rappelant le style gothique. Les vantaux sont renforcés par des clous dorés en fleurs de lis. Le manoir connaît quelques restaurations au cours du XIXe siècle. Les parties agricoles datent de la deuxième moitié du XVIIIe siècle. On peut voir également sur le domaine d’Isménil les vestiges d’une chapelle transformée en grange et une orangerie. Cet ensemble appartenait à un manoir détruit durant la Révolution.

Ce que je peux ajouter après avoir visité sa cour, Yvemenil vient de l'étymologie Ivos, Ive, if.

Cette masure contenant un manoir dans l'ensembe nommé Le Fayel dont une avenue plantée le faisist rejoindre au bourg.  Acteuellement le manoir d'Ismenil abrite un if multi séculaire. 

 

1764

Le Fayel est un ensemble comprenant vraisemblablement un chateau (Le Fayel) et l'actuel manoir (Ismenil) qui y figure 

L'ensemble du Fayel était planté de vergers dans les cours et assemblages de cours et masures.

Entre 1764 et 1832, le domaine  relié avec le site de la Turgère s'est desolidarisé  comme la plaine le figure entre les deux corps paysagés et au Fayel, le paysdage est devenu agricole avec ses cours et masures plantés de vergers.

1832

 

1955

Ce qui a changé entre 1832 et 1955 est identique à ce que j'ai pu observé à Valliquerville.

Au Fayel et Isménil : Entre 1832 et 1947, on observe  le retour des vergers  constitués dans de nouveaux closage qui a du s'opérer au regain de l'activité cidrière  en milieu rural  après l'étape de la régénération des pommiers à cidre opérée par les nombreux pépiniers yvetotais. Là encore en 1955 on se situe juste avant la prime à l'abattage des pommiers. 

M. Duboys Fresney  nous raconte qu'en  «1807, il  y avait  presque deux millions de pommiers dans le pays de Caux ; seulement 300 000 en 2003 ; dans les années 1950, un plan de lutte contre l'alcoolisme est mis en place avec une subvention à l'arrachage, une autorisation nécessaire au-dessus de vingt arbres, une suppressions du privilège des bouilleurs de cru. » [Yves Duboys Fresney, Les fermes agricoles d'autrefois en Pays de Caux] 

 

2022

Entre 1955 et 2022, deux changements sont notoires : dans le contour d'Ismenil -Le Fayet 

les vergers ont disparu dans les closages, cependant une nouvelle culture s'est implantée à

droite de cet ensemble. Laquelle?

Depuis peu des cidres sont fabriqués à Allouville-Bellefosse dont un portant le nom des Calètes.

Est-ce donc le retour de nouveaux vergers à Allouville?

Un autre cidre serait fait également à Allouville ! à suivre...

Les Calètes est une gamme de cidre, de jus de pommes et d'apéritif de pomme. Les producteurs sont Luc Pollet et Francois Hariel d'Allouville Bellefosse, Pays de Caux, Normandie.

Quant aux trois autres producteurs installés sur le territoire d' Yvetot-Normandie, je vous en dirai plus très bientôt.

 

 

 

 

 

A ALLOUVILLE- BELLEFOSSE, il reste de belles cours et masures et des pommiers

Ici, route de Lillebonne

La masure du manoir d'Ismenil

Au loin la plaine, la masure

Un talus-fossé, rue verte à Allouville-Bellefosse avec entre le rideau d'arbres (hêtres) 

des pommiers

 

... Plus loin vers le Havre

 

Gonfreville l'Orcher

Environnement de la ferme du Pradon

 

 

Entre 1764 et aujourd'hui on observe l'emplacement du verger de la ferme du Pradon connue en 1809 sur le plan napoléonnien. 

On doit cet aperçu  au futur tracé de la voie royale devenue RN 15 puis D 6015.

 

1764

1888

2024

Après avoir emprunté les pas Arthur Young de Barentin vers le Havre, itinéraire qu'il emprunta  juste avant la Révolution française, nous retrouvons l'expertise de cet expert qui avec Tocqueville auront un regard critique sur l'impact au paln de l'Agriculture.

« La Révolution française redistribue les terres ce que constatent Young et Tocqueville qui affirme : « l’effet de la Révolution n’a pas été de diviser le sol, mais de le libérer pour un moment »

La Révolution met à plat les anciennes divisions administratives ainsi la communauté rurale, la paroisse, devient la commune.

C’est aussi l’abolition des droits féodaux. Certes, on abolit immédiatement les droits sur la personne et la dîme mais les paysans ne sont pas les mieux lotis en raison de leurs maigres revenus.

La propriété paysanne est, sous l’Ancien Régime, singulièrement importante. Arthur Young que l’on a vu arpenter le pays de Caux avant la Révolution Française et Tocqueville s’étonnent même qu’elle soit aussi importante, bien plus qu’en Angleterre même. « Vingt ans au moins avant cette révolution, on rencontre des sociétés d'agriculture qui déplorent déjà que le sol se morcelle outre mesure3. » Il y a « une immensité de petites propriétés rurales3 ». Young est frappé par « la grande division du sol parmi les paysans3 ». Il n’y a cependant pas de grandes propriétés paysannes, ou peu. Elles sont pour l’essentiel de tailles très médiocres, et de plus en plus petites avec la division du sol.

La Révolution apporte deux changements, la vente des biens nationaux et la division des biens communaux.

La vente du foncier rural du clergé n’a pas d’autres fins que de résorber le déficit et avantage les riches.

Le problème des communaux, lui, touche plus les paysans. Leur propriété passe à la commune. Leur vente entraîne des conflits intra communaux : les propriétaires aisés veulent inclure les communaux aux terres cultivées ; les paysans plus pauvres veulent les laisser communs, pour y faire paître leurs bêtes. Les constituants, peu au fait de la réalité des campagnes, sont partisans d’une division (décrets de juin 1793).

Ainsi il n’y a pas eu de vraie ouverture de la propriété foncière paysanne. Pour Tocqueville, « l’effet de la Révolution n’a pas été de diviser le sol, mais de le libérer pour un moment »

On constate un décalage entre la Révolution urbaine, parisienne, et la réalité des campagnes. On célèbre l’idéal du paysan-citoyen, qui correspond bien plus à l’image que l’on se fait du paysan, à Paris, que de la réalité.

L’apport de la Révolution à la paysannerie est indubitable : abolition des droits féodaux, ouverture relative de la propriété, etc. Mais le décalage entre le monde paysan et la bourgeoisie révolutionnaire est de plus en plus net, et la Révolution ne met pas fin aux crises de subsistances.

La vente des biens nationaux continue. Il ne s’agit toujours pas d’aider à accéder à la propriété, mais de trouver de nouveaux financements. On favorise donc les clients solvables : la bourgeoisie propriétaire aisée. La spéculation va bon train, mais laisse quand même les plus petites parcelles aux paysans, même si ce sont souvent les paysans les plus aisés.

Le système d’aspirations égalitaires de Babeuf ont échoué tandis qu’on reconstitue les anciennes Sociétés d’agricultures, bourgeoises et savantes.» [Wikipédia]

Globalement, il n’y a pas eu de vrai changement avant l’Empire.

Le début du 19e siècle fut l’avènement de la catastrophe au verger qui deviendra au mitan du siècle une cause nationale dont la solution sera trouvée à Rouen (Prévost, Du Breuil, Boisbunel, Collette…) puis au pays de Caux (Legran P., Godard F., Lacaille H. et F., Dieppois, Varin…) et résiduellement au Roumois (Power)

A la fin du premier Empire, en Normandie le pommier à cidre a connu une extension remarquable que commenta De le Morinière en 1795.

La finesse du cidre de Canteleu, réputée supérieure à celle de Montigny, quelques décennies plus tard, dans les premières années de la Révolution française, ce qui est confirmé par M et Mme Lejard en ces termes « En 1731, un arrêté du roi Louis XV, interdit la plantation de la vigne qui dans maints endroits avait été remplacée par les pommiers à cidre. D'ailleurs la cour de Louis XV  appréciait particulièrement le cidre de Canteleu et de Montigny .»[A&W Lejard ; 1989]

Concernant Canteleu, plus précisément le Clos aux Moines et la ferme de la Béguignière, en 1731, la plantation de la vignoble est interdite au profit des pommiers à cidre. Les fûts aynat transporté le vin de la région parisienne reparteraient remplis de cidre de la région rouenaise très apprécié à la cour. On y ajoutait des fromages. [Lejard, 1989]

Au 13e siècle  un vaste terrain fut défriché dans la forêt par les religieux. Le château et la ferme du Clos aux Moines - de Saint-Antoine

Thoams de Gade, Seigneur de Canteleu, Montigny et Garde du château du Pont de Rouen, accompagna Saint Louis dans ses deux croisades. On croit que le "clos aux Moines" appartenait aux religieux de Saint Ouen !!

Le château et la ferme attenante faisaient partie d'une vaste domaine à la lisière de la forêt de Roumare [...] le pressoir longue étreinte à la ferme sont toujours en place. Le paysage a été transformé. On aperçoit encore un peu le château entre de nouvelles constructions et des arbres centenaires.

La Béguignière

Comme le Clos aux Moines, la ferme de la Beguignière fut construite par des moines après essartage de la forêt de Roumare. Le Rez-de-Chassée de la ferme était du 15e siècle, le premier du 16e siècle. De son vivant, Saint-Louis avait accordé le droit de franche mouture aux Dames Emmurées de Rouen.

En 1430 et jusqu'à la Révolution, ce droit passa à la ferme de la Béguignière alors des Messieurs de Saint-Antoine. Elle fut exploitée jusqu'en 1966 et fit palce au lotissement auquel on a donné son nom. Monsieur et Madame Matura furent les deniers exploitants. [Lejard, 1989]

 

Jadis à Dieppedalle à Canteleu au Couvent troglodytique Sainte-Barbe

" A Dieppedalle, les pierres des carrières étaient acheminées jusqu’à Rouen sur des barges. Sur la rive, une grotte naturelle se logeait sous la forêt de Roumare. Les hommes l’ont découverte et l’ont investie. On y installe un couvent franciscain au XVe siècle à la place de la carrière de pierre. Elle devient « la grotte des pénitents « .

Une grande galerie est dédiée au pressage du cidre et à la gabelle. Plus tard, quand l’impôt sur le sel disparaît, la cave sert à déposer les vins de Bordeaux. Mais le couvent souffre des guerres de religion et il est saccagé.  Après la reprise en toute quiétude de la vie monastique, des bâtiments conventuels ont été ajoutés à l’extérieur ainsi qu’un cloître nécessaires à la vie monastique au XVIe siècle." in : www.ville-canteleu.fr

Une des parcelles identifiées sur un des plans de la paroisse de Canteleu avant la Révolution française se nommait  le clos de Caux, plantés de pommiers qui a été  ensuite cédé par la commune de Canteleu aux Hospices de Rouen en 1823 et qui par la suite est revenu  en partie à la commune puisque un tiers du Clos de Caux est devenu la seconde parcelle du cimetière communal.

Joseph Noël  de la Morinière est rédacteur en chef du Journal de Rouen (ex-Affiches de Normandie, devenu Journal de Normandie, puis de Rouen) de 1792 à l'an VIII. Il est alors un petit notable et un érudit local, membre de l'Académie de Rouen (et de bien d'autres), et l'un des fondateurs de la Société d'Émulation de l'Agriculture, du Commerce et des Arts de la Seine-Inférieure.

Philippe Minard livre quelques éléments biographiques de Noël de la Morinière, auteur de d’œuvre controversée en revanche à propos de ce qui est qualifiée d’encyclopédie départementale, il est rapporté qu’« Au-delà du journalisme, l'activité de Noël est surtout celle d'un observateur. Ses deux substantiels Essais sur le département de la Seine-Inférieure de 1795 et 1796 procèdent à un inventaire topographique détaillé, nourri par une patiente expérience de voyageur-géographe. Chaque étape de l'itinéraire sert de prétexte à de longs développements sur l'histoire, la géographie et les activités du lieu. Il dessine un paysage rural recomposé au prisme d'une sensibilité préromantique très nette. » [Minard, 2004]

(L’historien Philippe Minard, spécialiste de l’économie de l’époque moderne, élève de Daniel Roche, professeur à Paris-VIII et à l’EHESS, est mort brutalement, à Paris, le 22 mars 2024. Il avait 62 ans.)

Evoquant les vergers cauchois, il s’attarde sur celui à Veules sur la route portant le nom du Petit Veules :

« je me complaisais à admirer la grande quantité de pommiers répandus et rangés en longues allées sur tous les points et les sites de la campagne qui se déployaient au loin sous mes regards ; voyageur pédestre, un cortège de pensées douce accompagnoit mes pas silencieux ; parfumé de l’odeur balsamique des fleurs du pommier … »[De la Morinière, 1795]

Dans son tome 2, à propos du cidre, De la Morinière cite le cidre de Canteleu, commune voisine de Montigny : « On a devant soi une superbe lisière de côteaux qui se portent de l’Est à l’Ouest et dont les effets sont très pittoresques. Canteleu est assis sur la partie Nord-Est de cette lisière. On vante beaucoup la finesse du cidre de son cru, qu’on assure l’emporter encore sur celle des cidres d’Hénouville et de Montigny, dont j’ai parlé dans mon premier essai. » [De la Morinière, 1795]

Concernant le cidre d'Hénouville, de la fin du 18e siècle,  qui avait bonne réputation,  il est facile de penser que le passé cidricole d'Hénouville soit associé  à l'activité du siècle précédent où le Curé d'Hénouville, l'abbé Le Gendre brilla par l'art du semis, de la greffe et surtout des techniques des fruitiers en espalier...qu'il réalisait dans son presbytère.

Ce qui est  décrit par De la Morinière correspond à une réalité tangible car à l'examen des plans de Canteleu, on s'aperçoit l'ampleur des vergers sur la paroisse de Canteleu avant de devenir commune à la Révolution française.

La paroisse comptenait 5 fiefs dont Biessard, Dieppedalle, Bapeaume. Le château des deux Lions datent de 1649.

Dès le 17e siècle, essartages et défrichages pacifient cet ancien repaire de brigands ce qui a permis  la construction de somptueuses demeures et châteaux. Canteleu-la-Forêt est devenu un village de campagne, entouré de fermes, de cottages.

« du toponyme "Canteleu" s'entend à l'oreille et ne laisse aucune ambiguité quant à sa composition normano-picarde, voire cauchoise (car c'est à Canteleu  que se termine, par cet enfoncement calcaire, le pays de Caux.[...] Le sous-sol argileux de la forêt de Roumare (4000 ha) est formé en surface par un loess dont la caractéristique est un limon fin, calcaire, perméable, d'origine éolienne.» [Guide de ville Canteleu-la-Forêt, 2003]

Le dernier bâtiment témoin de l'activité cidricole  est signalé par A.W. Lejard dans "Regards sur le passé, 1989.

«Au fond de la cour , côté Seine subsistent qielques anciens bâtiments qu'il sera peut-être difficile de restaurer dont un de ceux-ci qui abritait la réserve de pommes sur le sol carrelé du premier étage .» [Canteleu aux multiples facettes Tome 1,  A.W.Dejard] Ce bâtiment n'a pas survécu.

 

La grange de la ferme du château de Canteleu, dit des deux lions au 20e siècle

avant qu'elle soit  démontée en état de péril.

 

Elévation géomètrique du château de Canteleu, 1649. [Prevost, 1889]

Thomas Corneille le décrit ainsi dans son Dictionnaire géographique 

«Château en Normandie, situé sur le haut d'une montagne à une petite lieùe au-dessous de Rouen. Il est assez grand et d'une belle apparence, orné de pavillons, dont celuy du milieu est couvert en manière de dôme. On dit qu'il y a autant de fenêtres que de jours en l'an. Ce château est en bon air, accompagné de jardins , de terrasses , d'avenues d'arbres et d'un bois. La rivière de Seine passe au pied, et il offre une vue charmante , puisqu'on découvre de là toute la ville de Rouen et ses dehors ; le Grand et le Petit-Quevilly ; le Grand et le Petit-Couronne , avec plusieurs autres villages et maisons de plaisance ; des prairies, des isles , des bois, des terres de labour, et plus de quatre lieues du cours de la Seine. » [Corneille, 1708]

 

 

Canteleu, le village-forêt-verger

 

Vue du château de Canteleu en 1696 [www.rotomagus.fr]

 

Cote 12Fi675/11 - Paroisse de Canteleu, plan du hameau de Bapeaume - 1700-1789 ADSM 76

Précédemment nous évoquions le rôle qu'à joué l'Evêché  de Rouen tout comme celui de l'abbaye Saint Georges de Boscherville à Cantelu, ce plan montre les vergers de coteau à Bapeaume adossés au chemin menant à Montigny. Canteleu possédait d'inombrables vergers à l'égal de  ceux de la principauté d'Yvetot.

Ci-dessous, suite vers Maromme

 

A l'autre bout de Canteleu à Biessard

 

Cote 12Fi675/2 - Paroisse de Canteleu, plan du hameau de Bapeaume - 1700-1789 ADSM 76

Cote 2Fi675/1 - Paroisse de Canteleu, plan du hameau de Biessard - 1700-1789 ADSM 76

Dieppedalle- Canteleu

Cote 12Fi675/3 - Paroisse de Canteleu, plan du hameau de Dieppedalle - 1700-1789 ADSM 76

Cote 12Fi675/4 - Paroisse de Canteleu, plan du hameau de Dieppedalle - 1700-1789 ADSM 76

Haut de Canteleu adossé au Clos aux moines et à la Béguignière

12Fi675/8 - Paroisse de Canteleu, plan du haut de Canteleu - 1700-1789 ADSM 76

Ci-dessous la localisation du manoir u clos aux moines et de sa ferme enchassé entre la forêt et la ferme de la Béguignière en rouge

en vert l'exact emplaclement du noyer de la ferme de la Béguignière, aujourd'hui  disparu depuis 1995.

Source extrait - IGN remonter le temps, 1944.

 

Plus de 200 ans  après Canteleu en 1944,  reste encore un immense verger.

 

Cote 12Fi675/7 - Paroisse de Canteleu, plan du Haut de Canteleu - 1700-1789 ADSM 76

Attardons-nous un instant sur ce plan qui nous permete de situer ce qui est devenu après la Révolution française une parcelle des Hospices de Rouen, c'est à dire à lémplacement sur ce plan du Clos de Caux dont l'accès se faisait par l'impasse Bouton Feuillu.

On peut remarquer à droite le bois qui se trouvait au niveau de la ferme du Captot nommé Bois de Caux.

d'après les plans de Canteleu - ADSM 76 ; IGN Remonter le temps et Géoportail

 

Ci-dessus la carte postale du logis du Clos de Caux à Canteleu, demeure qui n'existe plus.

Démolie apres-guerre  cette dépendance du préventorium-aérium  abritait des logements  des directeurs dans les années 1950. [S. Léonard, 2009]

 

Cote 12Fi675/6 - Paroisse de Canteleu, plan du haut de Canteleu - 1700-1789 ADSM 76

 

12Fi675/5 - Paroisse de Canteleu, plan du haut de Canteleu - 1700-1789 ADSM 76

 

Le noyer de l'ancienne ferme-verger  de la Béguignière  en 1996 : son dernier printemps.

Dans le bulletin municipal de la ville  - Cantelu-Infos - en juillet-août 1995 il est noté ceci : 

Le vieil arbre se meurt...la fierté de tout le quartier de la Béguignière et de Canteleu montre les plus visibles signes de sénilité. Et malgré les soins attentifs, il ne pourra probablement pas être maintenu en vie !  Cet ancêtre vénérable.

en 1996, il fut encore là mais son avenir fut compté (probablement en 1997)

Comme la durée de vie d'un noyer peut atteindre  trois cent ans, il est certain qu'il a été planté  environ en 1700.

Le verger de la Béguignière avec ses pommiers et son noyer qui figurera comme arbre remarquable jusqu'en 1995 date à laquelle il fut abattu et remplacé en face de la rue par un nouveau noyer limitrophe au parking de la piscine municipale (source M. Lejard, 1989).

Probablement le pressoir du manoir  du clos au moines (source M. Lejard, 1989), autrement nommé Casa Bianca.

Evoquant l’activité cidricole du département de la Seine-Inférieure, il décrit les caractéristiques du cidre du pays de Caux tout en précisant une liste des zones géographiques concernées :

« Le district de Cany, ceux de Dieppe, d’Yvetot et de Montivilliers, ne produisent qu’une boisson maigre, claire et peu substantielle. […] Le district de Rouen, au contraire, en compte un grand nombre où se trouvent d’excellents crus. Montigny passe en général pour donner un cidre nouveau, la liqueur la plus ambrée, la plus saine et la plus légère de tout le département ; mais il est vrai de dire qu’il se dément en peu de mois. Les crus d’Auzouville, Epreville, Bois d’Ennebourg, Houpeville, Quincampois, Isneauville sont très estimés, ceux de Préaux, la Vieux-Rue, Quevreville, Mesnil Rault, Laneufville Champ-d’Oisel, les pommes de ces deux dernières communes surtout, bien pilées et le brassage bien fait, rendent un fort bon cidre, dont Paris tire la majeure partie pour sa consommation ; presque tous sont moins délicats que celui de Montigny, mais ils soutiennent mieux leur qualité, surtout s’ils sont brassés sans eau. On peut mettre dans la classe suivante des cidres de ce district, ceux de Varengeville, du Houlme, de Barentin, de Pavilly, de Pissy, etc. »

De la Morinière ajoute un fait qui à l’examiner de près me parait intéressant à propos des arbres, qui croissent hors des forêts, mais sur un sol qui en dépend selon la définition du mot excru :

« Dans le commerce et pour l’usage, on préfère la boisson provenue des fruits excrus en plaine ou sur les côteaux, à celle des pommes des vallées. Les communes de Salmonville, Servaville, Blainville, etc. etc., donnent une mauvaise liqueur, le cru de chacune d’elles est un peu inférieurs que je connaisse. Dans ces derniers temps, où l’eau-de-vie de vin est devenue extrêmement rare, on a fait bouillir beaucoup de cidres dans tous ces cantons, pour les convertir en eaux-de-vie. » [De la Morinière, 1795]

Aussi le cidre demeurait la production essentielle nous raconte J.Vidalenc :

«on en faisait déjà presque dans tous les cantons et ceux-ci rivalisaient pour la réputation de leurs produits. La qualité tenait, semble-t-il, autant au choix des pommes qu'aux méthodes utilisées pour la préparation, et peut-être à une tradition » et ajoute « le cidre varie pour le goût et la qualité suivant la nature du sol où croît le pommier […] on retrouvait dans la Seine-Inférieure des crus plus ou moins célèbres, au premier rang desquels venaient ceux de l'arrondissement de Rouen, de Mesnil-Raoult et de la Neuville Champ d'Oisel, entre autres, qui s'expédiaient déjà dans la région parisienne. » [ Vidalenc, 1957]

L'enquête de 1807 sur le nombre de pommiers et de poiriers en Seine Maritime rédigée par Daniel Fauvel  viendra compléter à ce stade le contexte  historique et agricole. 

 Après   que les premiers signes de  dépérissement au verger ait été  constaté en 1793 : 

« La Convention nationale confia au Muséum d'Histoire naturelle par décret du 10 juin 1793, le soin de réunir et de décrire toutes les variétés d'arbres fruitiers, tant indigènes qu'étrangères et de les soigner pour leur permettre de fournir des greffes destinées à être distribuées dans les départements. Plus tard le Ministre Chaptal confia des attributions analogues aux pépinières du Luxembourg établies sur l'emplacement des anciens jardins des Chartreux.

Le 19e siècle a vu se réaliser l'inventaire de toutes nos richesses pomologiques, décrites dans les magnifiques ouvrages de Desfontaines, de Loiseleur-Deslongchamps, de A. Poiteau et Turpin, de J. Decaisne, de André Leroy, de M. Mas, de Ch. Baltet, de F. Vuiillermoz   [ Chevalier, 1921]

 

Nous en sommes au 19e siècle, Prévost s'oppose à l'invasion des pommiers à cidre d'Outre Altantique pour palier au chaos des vergers français atteints de dégénérescence. Legrand, Lacaille, Godard, Dieppois... œuvront 30 ans plus tard pour commencer à régénérer 1/3 des variétés de pommes à cidre en pays de caux qui repartiront dans les années 1884 dans tous les vergers conservatoires des pays cidricoles.

 

 

en 1899, le pays de Caux contribue au rendement en jus

"Sur la surface du plateau, au milieu des champs, se dressent, de ci delà, des lignes d'arbres droits et élancés qui limitent de toutes parts l'horizon et à distance paraissent former la lisière d'une forêt ininterrompue, ce sont les « hètrées » ou « brise-vents ».

Les pommiers auxquels le climat humide du Pays de Caux convient admirablement, parce qu'il fait grossir leurs fruits et augmente leur rendement en jus, se rencontrent un peu partout à la surface du plateau mais tendent à se concentrer dans les cours-masures. Leur culture dans les champs offre en effet un double inconvénient qui ne se présente pas dans les enclos la violence des vents fait tomber au printemps une grande partie des rieurs des pommiers plantés en rase campagne et diminue d'autant la quantité de pommes qu'ils seraient susceptibles de produire ; et d'autre part, l'ombre des arbres nuit aux moissons qu'ils abritent en les empêchant de mûrir. Dans les enclos ces deux inconvénients ne se produisent pas." [Lecarpentier, 1899]

Statistiques de nombre de pommiers en Seine-Inférieure

Archives du Département de la Seine-Maritime ADSM 76

Cote 6M 1071

Les statistiques comprennent que certains cantons du département dont ceux des arrondissements du Havre et d'Yvetot soit 18 cantons.

 

Le rapporteur de ces statistiques donne ces informations concernant les vergers, les cidres et poirés
« Le nombre de poiriers est à peu près à celui du pommier comme un est à vingt. Les poiriers sont remplacés par les pommiers. […] On n’ente en écusson que les pommiers. […] on peut produire 500 corbeilles à l’hectare qui peut produire de dix barriques à 30 de cidre […] Les cultivateurs mêlent leurs pommes douces avec les amères. […] Le cidre est une boisson nourrissante, laxative. […] On hâte la clarification du cidre avec de la craie délayée dans du cidre. […] On doit supposer qu’un hectare de terres bien planté contient deux cents pommiers qui peuvent vivre et rapporter de 25 à 60 ans. »

 

Nom de la commune

Nb de pommiers dans les masures

Nb de pommiers dans les champs

Nb de poiriers dans les masures

Nb de poiriers dans les champs

Alliquerville

1200

50

600

9

Anxtot

400

400

30

4

Bernières

3060

320

40

10

Beuzeville

3000

560

68

 

beuzevillette

1079

441

34

8

Bielleville

1100

400

100

50

Bolbec

2000

800

600

100

Bolleville

2139

652

147

3

Gruchet

2700

740

700

30

Guillerville

1700

300

50

10

Lanquetot

2190

340

75

36

Lintot

6450

885

385

20

Nointot

10170

730

500

10

Parc d’Anxtot

3100

300

150

 

Raffetot

4200

320

130

20

Rouville

8700

770

150

 

St J de la Neuville

6720

550

420

12

Trouville

1000

500

150

60

Angerville l’Orcher

11000

300

200

 

Beaurepaire

3000

500

200

50

Benouville

215

100

28

5

Berneval

150

60

20

 

Bordeaux

2296

10

200

4

Criquetot

10000

600

319

 

Cuverville

2400

400

150

 

Ecultot

2500

120

300

 

Ecriquetot

1200

60

40

 

Englesqueville

2988

370

 

 

Etretat

200

150

90

 

Fongueusemare

1400

400

 

 

Gonneville

3000

464

1000

 

Nom de la commune

Nb de pommiers dans les masures

Nb de pommiers

dans les champs

Nb de poiriers

dans les masures

Nb de poiriers

dans les champs

Hermeville

1800

260

70

 

Heuqueville

4725

50

356

 

La Potterie

2400

10

600

4

Le Couvray

800

65

50

 

Le Tilleul

5670

70

630

10

Pierre Fiquer

4000

600

400

 

St Clair

400

 

100

 

St Jouin

6030

300

250

 

St Marie aubosc

2210

168

230

1

St Martin du Bec

3288

441

257

 

Turretot

1050

100

80

 

Vergetot

2010

240

250

 

Villainville

1200

300

200

 

 

 

 

 

 

Criquebeuf

1825

5

138

 

Epreville

5600

200

200

 

Fecamp

5500

800

100

 

Froberville

5600

300

100

 

Ganzeville

1400

150

40

20

Gerville

1500

290

155

9

Igneauville

940

80

30

 

Les Loges

6000

129

800

25

Maniquerville

1200

100

100

 

Mesmoulins

440

60

 

 

St Léonard

6400

150

190

10

Tourville

2000

300

100

 

Vattetot sur mer

2836

140

320

15

Angerville Bailleul

1350

620

87

14

Annouville

2200

200

50

 

Nom de la commune

Nb de pommiers dans les masures

Nb de pommiers

dans les champs

Nb de poiriers

dans les masures

Nb de poiriers

dans les champs

Auberville Larenault

2000

600

150

50

Baigneville

895

255

10

 

Bec de Mortagne

2778

120

105

 

Benarville

3400

215

90

16

Bornambusc

2000

215

90

16

Breauté

5000

300

150

 

Bretteville

10000

10000

1000

500

Cretot

2000

300

100

 

Daubeuf …

5276

188

96

14

Ecrainville

7740

1248

 

 

Emalleville

1600

120

 

 

 

 

 

 

 

Goderville

4000

600

50

100

Gonfreville Caillot

2064

233

64

 

Grainville

6200

850

50

 

Houquetot

3000

100

200

 

Le Bertelay

2900

300

100

 

Mainnerville

2200

800

50

 

Mentreville

586

120

20

 

Mirville

2000

400

300

 

St Maclou

2300

308

90

10

St Laurent

1000

150

70

 

 

 

 

 

 

Sauseusemare

5000

600

400

 

Serville

200

60

50

 

Tennemare

2600

50

60

 

Tocqueville

4500

300

100

 

Sassetot sous Beaumont

4520

600

 

 

Vilmesnil

1950

432

62

8

Nom de la commune

Nb de pommiers dans les masures

Nb de pommiers

dans les champs

Nb de poiriers

dans les masures

Nb de poiriers

dans les champs

Virville

600

80

20

 

Ymeauville

900

80

50

 

 

 

 

 

 

Bleville

8632

370

818

80

Grasville

16600

1600

3600

150

Ingouvillr

950

93

195

18

Lheure

1500

300

500

 

Ste Adresse

1400

80

180

15

Sanvic

3042

108

580

49

 

 

 

 

 

Auberville la Campagne

6000

400

300

100

Grandcamp

5000

500

500

40

La Fresnaye

10000

5000

300

100

La Trinité Dumont

1500

250

100

 

Le Mesnil

1500

500

30

 

Lillebonne

1800

300

200

 

Melamare

2400

380

120

30

Norvillr

4331

522

41

 

Notre Dame de Gravenchon

3000

2000

350

50

Pethiville

4000

600

400

 

Radicatel

943

24

33

2

St Antoine

8724

280

200

15

St Denis

2000

300

100

30

St Georges

4000

600

500

50

St Jean de Folleville

3000

1000

300

100

St Maurice

1900

500

100

25

St Nicolas

14432

800

328

32

St Sylvestre

1930

240

180

 

Triquerville

2500

480

240

20

Valasse

2992

298

60

10

Nom de la commune

Nb de pommiers dans les masures

Nb1 de pommiers

dans les champs

Nb de poiriers

dans les masures

Nb de poiriers

dans les champs

Buglise

3000

60

250

8

Cauville

2000

36

200

1

Epouville

3200

209

100

50

Fontaine

3000

500

400

100

Fontenay

4000

800

300

 

Gainneville

2400

300

120

 

Gonfreville Lorcher

3632

738

123

6

Gournay

140

60

10

 

Harfleur

1800

600

200

600

Maneglise

3000

500

600

100

Mannevillette

4000

217

270

2

Montiviliers

5500

940

420

90

Notre Dame du Bec

1502

208

172

6

Octeville

14000

450

2419

506

Raimbertot

2993

118

360

25

Rolleville

4983

372

250

14

Rouelles

3280

580

162

 

St Barthelemy

1100

1000

250

 

St Martin du Manoir

4000

600

500

 

St Suplix

1240

88

245

23

 

 

 

 

 

Beaucamp

1800

300

500

 

Cramesnil

2100

100

30

12

Epretot

1803

820

150

37

Etainbuc

1200

200

120

 

Gommerville

5721

872

152

16

Graimbourville

1200

150

110

 

Grosmesnil

1000

500

100

50

La Cerlangue

10200

1200

800

300

La Remuée

2660

980

230

18

Nom de la commune

Nb de pommiers dans les masures

Nb de pommiers

dans les champs

Nb de poiriers

dans les masures

Nb de poiriers

dans les champs

Les Trois Pierres

1400

600

160

4

Loiselière

400

60

30

10

Oudalle

4500

1120

115

10

Pretot

419

79

26

 

Rogerville

979

310

55

 

Routot

1414

744

62

 

St Aubin

2000

600

200

80

St Eustache

4500

500

200

 

St Gilles

1700

200

100

 

St Jean Dabettot

1425

361

43

1

St Jean des Marts

2112

211

22

 

St Laurent

6000

1200

800

50

St Michel

1200

500

100

20

St Romain

7000

1000

300

150

St Vigor

4100

300

200

30

St Vincent

3000

206

100

 

Sandouvillre

700

500

250

50

Sennerville

2000

550

85

10

Tancarville

800

150

50

12

Nom de la commune

Nb de pommiers

dans les masures

Nb de pommiers

dans les champs

Nb de poiriers

dans les masures

Nb de poiriers

dans les champs

Grasville

16600

 

 

 

St Nicolas

14432

 

 

 

Octeville

14000

 

 

 

La Cerlangue

10200

 

 

 

Angerville Lorcher

11000

 

 

 

Nointot

10170

 

 

 

La Fresnaye

10000

 

 

 

Criquetot

10000

 

 

 

Bretteville

10000

 

 

 

Nom du canton

Nb de pommiers

dans les masures

Nb de pommiers

dans les champs

Nb de poiriers

dans les masures

Nb de poiriers

dans les champs

11-Bolbec

60908

8698

4349

392

7-Cany

78621

4328

2219

81

3-Caudebec

85022

12800

9774

2240

8-Criquetot

75932

61389

6200

74

13-Doudeville

59159

12643

3111

229

6-Fauville

80551

10115

5209

387

15-Fécamp

49701

2704

2279

79

17-Fontaine

40567

2925

3255

143

1-Goderville

92759

11379

3874

702

18-Ingouville

32124

2551

5973

312

4-Lillebonne

81952

14973

4352

604

10-Montivilliers

68770

8376

7351

984

12-Ourville

60422

5171

2084

223

5-Saint Romain

81333

14313

4640

860

16-Saint Valery

45811

2008

4054

19

2-Valmont

92639

6341

4154

130

9-Yerville

74037

15042

5546

771

14-Yvetot

53728

10189

1534

369

Total 1 et 2  

670557

543479

81556

69132

40940

38832

4592

3997

Total Général

18 cantons

1 214 036

150 688

79 772

8 589

Le début du 19e siècle fut donc l’avènement de la catastrophe au verger suite au constat du pépinier Prévost de Boisguillaume.

La maladie du pommier, dès 1811, contribue au dépérissement et à la dégénérescence des variétés à cidre, un fléau dont on cherche les causes au début du 19e siècle : un siècle pour sauver la filière du cidre en France, en Europe.

M. Prévost de Rouen et de Boisguillaume (pays de Caux-Rouen) fut le premier en France – ce que j’ai découvert en explorant les archives de la Société Centrale d’Agriculture du premier volume au dernier sur plusieurs années.

Plusieurs premières constations témoignent du fléau qui va frapper les vergers dans les départements cidricoles dont celle consignée dans le tome 1 du Bulletin de la Société Centrale d’Agriculture de la Seine-Inférieure en 1919 par M. Prévost, pépiniériste à Rouen, suivie par celle de M. Bosc au plan national de la Société d’Agriculture de Paris en 1821.

Le rapport de M. Prévost extrait d’un mémoire sur les ulcères des pommiers note ceci, tout en se détachant des premières conclusions évoquées par les naturalistes les attribuant aux engrais et/ou sols :

«La maladie qui exerce ses ravages sur les pommiers prenant continuellement de l’accroissement, M. Prévost a voulu approfondir quelles en pouvaient être les causes. Il a pensé avec raison que des vices intérieurs devaient être bien plutôt la source du mal dont on se plaint. Il croit que l’épaississement des fluides ou leur décomposition séjournant dans quelques parties délicates de l’arbre y occasionnent des effets désastreux, parce que le séjour de ces liqueurs corrosives tendent à détruire le tissu des parties où elles se corrompent, elles s’ouvrent un passage au travers de la zone qui enveloppe le bois parfait. Cette zone se compose de vaisseaux lymphatiques, du tissu cellulaire, des vaisseaux propres remplis d’une liqueur particulière, d’utricules où s’élabore cette liqueur, et enfin de trachées par lesquelles l’air circule dans l’intérieur. On conçoit que la décomposition de ces organes délicats doit nécessairement résulter l’ulcère coulant. » [SCA 76, 1819]

Dans ses conclusions M. Prévost n’exclut pas le rôle que peut jouer la nature et la qualité des engrais, entre autres. Il propose d’emblée de faire des essais pour savoir si les espèces les plus sujettes aux ulcères n’apportent pas avec elles en naissant les germes de cette maladie et de rapporter à la Société ses résultats. En attendant les résultats, il conseille de faire avec intelligence le choix des pépins qu’on destine aux semis. De ces arbres indifféremment levés dans les semais, les uns annoncent une végétation précoce, les autres une végétation tardive, qu’en les greffant aussi indifféremment, il en résulte une incohérence : les tardifs implantés d’une greffe précoce, et les précoces d’une greffe tardive, sont les uns et les autres opérés en sens inverse et de cette subversion il note des principes de la végétation l’avortement presque continuel des fleurs de certaines espèces, alors il recommande aux pépiniéristes à observer l’analogie qui existe entre les différents sujets qu’ils soumettent à l’opération de la greffe. Il constate par ailleurs que la greffe en couronne est reléguée aux vieux arbres dans l’intention de les rajeunir. [SCA 76, 1819]

M. Prévost attribuant à la greffe en fente des chancres et la pourriture du corps ligneux, il démontre l’avantage de la greffe en couronne sur celle en fente pour plusieurs motifs : la greffe en couronne est plus expéditive, plus promptement soudée avec le sujet, que la plaie se recouvre facilement, attendu qu’elle a lieu au moment où le mouvement d’ascension et de descension de la sève est dans sa plus grande activité et qu’enfin on peut s’affranchir de la fente à faire au corps ligneux pour l’introduction de la greffe. [SCA 76, 1819]

« La première et la principale induction de ces avantages est qu’ils contribuent nécessairement à la santé et à la longévité  des arbres, parce que, comme l’observe judicieusement l’auteur, la plaie se refermant de suite, le corps ligneux n’ayant été ni fendu, ni entaillé, ni meurtri, aucune portion du bois ne doit mourir, tandis que le tige d’une infinité d’arbres greffés en fente  est viciée au centre par le seul effet de l’ouverture de la fente trop souvent meurtrie par les instruments lors de l’opération, inconvénient grave qui s’oppose au développement de l’arbre et contribue à l’altération des fruits. » [SCA 76, 1819]

Sur ces résultats menés en 1811 il préconise qu’il faut préférer la greffe en couronne car même en cas d’échec on peut recommencer l’opération à la même hauteur avantage que n’aura pas la greffe en fente devant être rabattue de 5 à 6 pouces car la qualité du pommier se voit à la hauteur de tige pour l’entretien du verger et de rendre hors de portée les braches de la dent des bestiaux. [SCA 76, 1819]

Le second rapporteur fut un breton nommé M. Cavoleau rélaté par M. Bosc le 4 mars 1821 en séance de la Société d’Agriculture de Paris à propos de la maladie des pommiers :

« M . Cavoleau a communiqué à la Société une notice sur la culture du pommier à cidre aux environs de Dinan, à la suite de laquelle on lit le paragraphe suivant : « Les pommiers sont assujettis à une maladie contre laquelle nous ne connaissons pas de remède. Elle les attaque lors- qu'ils sont encore très-jeunes. On la reconnaît à des durillons gommeux et remplis d'une poudre blanche, laquelle, enlevée par les vents, est portée sur les autres pommiers, qui présentent bientôt les symptômes du même mal. » [SAP, 1821]

Le troisième rapporteur fut rétrospectivement Charles Brioux qui en 1910 énonce les problèmes de maladie dans les vergers du début du 19e siècle.

« Dès 1827, on retrouve la trace, dans les bulletins de la Société Centrale d’Agriculture, des préoccupations que causaient déjà à ce moment les attaques du puceron lanigère ; en 1830, notre Société instituait un prix de 300 francs pour récompenser les meilleurs Mémoires relatifs aux variétés de pommes donnant le meilleur cidre, et à celles dont le mélange est le plus convenable pour augmenter la qualité de cette boisson. En 1832, elle mettait au concours la question suivante : « A quelle cause peut-on attribuer la dégénérescence et même la disparition de plusieurs espèces de pommes, telles que celles dites de Peau-de-Vache, d’Orange, de Reinettes, etc., et quels sont les moyens de rétablir ces diverses espèces ?  Ces prix ne purent être décernés parce que les esprits n’étaient pas encore suffisamment portés sur les études pomologiques ; mais la Société Centrale d’Agriculture n’en persista pas moins à chercher un remède au dépérissement d’un certain nombre des plus anciens fruits de pressoir… » [Brioux, 1910]

Je pourrai ajouter à cette liste la fameuse pomme Montigny dont la variété a dû disparaître depuis la période de la post Révolution française dont les qualités de cette pomme cultivée à Montigny et à Canteleu près de Rouen la mirent sur la table des deux derniers rois de France ou est-ce du au fait qu’il fallait comme toute autre chose supprimer tout souvenir de l’ancien régime ? On pourrait ajouter également nous dit Georges Dubosc en 1932, la pomme de Richard, que le duc Richard 1er, au dire de la Chronique de Normandie, avait découverte dans une chasse en forêt, celle de la pomme Roger qui a disparu au 15e siècle, la pomme de Bosc ou de Bosquet, de Douche, Jacob, Passebon, Vilaine également disparues. [Dubosc, 1932]

Dubosc signale  par ailleurs celles qui existent encore comme la Peau de Vache était appelée Peau de vieille ; le Doux-Veret  un peu  semblable  à la pomme d’Argile connue en Seine-Inférieure sous le nom de Doux à l’aignel, Doux à Mouton et Rouge-Bruyère ; la Germaine  que l’on connait par ailleurs par Permaine citée en 1211 ; le Marin-Onfroy,  le Gros Doux, le Fréquin rouge de la fin du 15e siècle ; le  Sauger ; le Rouget qu’on appelle aussi la pomme à glanes ; la pomme de Suie, sans oublier la Belle Fille Normande du Pays de Caux, une des plus vieille espèces de Normandie !

Celles du Moyen-Âge : la pomme Pépin, le Capendu (à deux fins) … [Dubosc, 1932]

 

 

A l’aspect des branches envoyées par M. Cavoleau à M. Bosc, il remarqua les exostoses provenant de piqures de puceron lanigère, problème déjà remarqué en Angleterre selon M. Bosc. Ce même expert met en évidence le fléau du puceron lanigère pouvant causer la perte du pommier à cidre, puceron importé d’Amérique vers l’Angleterre puis en France avant 1812, ce qui eut pour conséquence d’abandon de la plantation de poirier à cuire dans tous l’Ouest de la France. De ce fait M. Bosc préconisa de surveiller les pommiers, leurs branches et les exostoses de sorte de distinguer le puceron lanigère des autres qui mettent les feuilles en courbe mais qui ne produisent pas d’exostoses dévastatrices et qui anéantissent en premier les feuilles ; et d’e rapporter leurs observations à la Société d’Agriculture de Paris. [SAP, 1821]

PRODUCTION DU CIDRE EN FRANCE EN 1829

 

In :Le cidre : traité rédigé d'après les documents recueillis de 1864 à 1872 gallica.bnf.fr

 

en Normandie

 

à titre de comparaison

sur les 8.582.474 hl produit en France

dans le département de la Seine-Inférieure cidre . 1.621.921 hl

soit 19% de la production française

dans le département du Calvados : cidre : 901 231 hl

dans le département de l'Eure  : cidre. 564.293 hl  de cidre contre 92 378 hl en poiré

dans le département de l'Orne : cidre : 472 334 contre  375 666 hl en poiré

dans le département de la Manche : cidre 562  668 hl contre 281 332 hl en poiré   

en Normandie se produit : 4 871 824 hl soit 56% du cidre français     

 

En 1840

dans le département du Calvados : cidre : 784 909 + 444 548 hl  soit   1 229 457  hl      dans le département de l'Eure  : cidre. 102 000 + 895 700 hl        soit      997 700 hl dans le département de l'Orne : cidre : 959 581 + 424 911hl        soit   1 384 492 hl

dans le département de la Manche :  cidre 1 322 606 + 455 000  soit    1 777 606 hl

dans le département de la Seine-Inférieure :  200 890 + 1 015 276 hl    1 216 166  hl 

 

En 1836, voici la description des cidres de cette période par répartition géographique du Département de la Seine-Inférieure

En 1836, dans l'ouvrage intitulé  Histoire des environs de Paris, tome 2 il est rapporté que les pommiers à cidre  et les poiriers fournissent à la plus grande partie des habitants une boisson  abondante et saine. Ils couvrent pour ainsi dire le pays :

« en chasse ou en allées, ils décorent les campagnes, qu'ils changent en jardins et en vergers. C'est surtout en allant de Dieppe au Hâvre qu'on rencontre de ces plantations dignes de fixer l'attention : on les appelle cours dans le pays ; elles sont environnées de fossés sur lesquels s'élèvent des arbres de futaie, pressés les uns contre les autres, et desrtinés à fournir des bois de construction et de chauffage. Ces arbres protègent les pommiers en opposant leur masse aux vents de mer qui, sans elle, détruiraient les fleurs et les fruits, briseraient les branches, ou renc=verseraient même les tiges. Quelquefois, les pommiers sont renfermés dans des clos que l'on nomme masures ; ils forment de petits parcs autour de l'humble habitation du laboureur, et après avoit longtemps abreuvé celui-ci du jus de leur fruit, après l'avoir chauffé de ses émondages, ils offrent encore à la menuiserie un bois dont elle peut faire de beaux ouvrages, et aux citadins un combustible d'un usage agréable.

Toutes ces contrées ne produisent pas également des cidres de bonne qualité. Ceux de la contrée des plaines du centre sont peu substanctiels ; ceux de la contrée de la vallée de l'est sont âpres, se fatiguent par le transport et perdent leur couleur. Cependant, les cidres de la vallée de Bray sont forts estimés  ; plusieurs communes des environs d'Eu en fournissent aussi de très beaux en couleur et forts agréables au goût, lorsqu'ils ont été gardés trois ou quatre ans.

La contrée des côtes n'offre, en général, que des cidres clairs et maigres : celle des rives de la Seine est mieux partagée. On trouve d'excellens crûs dans les environs de Rouen : celui de Montigny surtout donne, en cidre nouveau, la liqueur la plus saine et la plus légère du département. Plusieurs autres communes, telles que Préaux, Quévreville, Houppeville, etc., produisent aussi des cidres très estimés, quoique moins délicats que celui de Montigny. »  [Touchard, Lafosse, 1836]

Suite à ces constatations et ces appréciations, on remarque que de Rouen vers Dieppe et le Havre  hormis le pays de Bray  le cidre est médiocre qualité alors qu'ailleurs le cidre soit tiré de pommes  à deux fins comme du côté de Préaux ou de Montigny où il serait plutôt un cidre de cru c'est à dire avec la pomme de Montigny- dtant de 1300 comme nous en avons déjà  parlé au- , aujourd'hui éteinte, disparue et n'ayant pas très vraisemblablement été régénérée au profit de la pomme reinette de Dieppedalle. Pour le reste de l'interprétation des autres contrées, on peut supposer que l'effet du dépérissement  des pommiers constatés par M. Prévost n'a pas contribué au maintien du meilleurr goût de ce cidre cauchois dont les pommiers des  variétés mélangées (douces, amères et acides) étaient en grande souffrance ce qui justifiera non pas leur abandon mais la volonté de les régénérer au début de la décennie 1860 comme le voulait M. P.M. Legrand rêvant de sauvegarder le Doux à Lagneil pour la régénérer en Vagnon.

P.M. Legrand descendant d'une grande famille yvetotaise (Charles Legrand, escuyer du roi d'Yvetot) au temps de la royauté et principauté d'Yvetot sous Martin du Bellay  avait donc à coeur de sauver la doux à Lagniel qui fit jadis la réputation du cidre yvetotais : 

« Le cidre, lisons-nous dans un charmant petit livre ayant pour titre : La vie des fleurs et des fruits, par Eugène Noël, est en médiocre réputation chez ceux qui l'ont bu frelaté dans les villes ; mais qu'ils aillent le boire pur à la table des paysans normands, après quelques jours de bouteille, et ils savourent que, par son parfum, sa saveur onctueuse, il égale certaines espèces de vins ; qu'il les surpasse toutes par sa pétulance, son joyeux déboucher et son effervescence gazeuse ; qu'il pousse aux pensées généreuses et vives. Le grand Corneille fut un buveur de cidre. »

Le roi d'Yvetot, « peu connu dans l'histoire » comme dit la chanson, et que notre poète-chansonnier, Béranger a mis en relief, disait au roi de France : « Sire, je n'échangerais volontiers mes pommes de roquet et de doux-à-l'Agnel (9) contre les vignes de votre majesté. » [Pannier, 1871]

In : Extrait du Bulletin de la société d'horticulture et de botanique du centre de la normandie, années 1866-1877, pp. 209-229.

« Un roi du pays des pommes, le roi d’Yvetot, disait au roi de France : « Sire, je n’échangerais volontiers mes pommes de Roquet  et de Doux- à-Lagnel contre les vignes de votre Majesté.»

Roquet, synonyme de Marin Onfroy ;  Doux-à-Lagnel, synonyme d’abricot ou vagnon ;  Histoire du roi d’Yvetot.

In : Le Cidre : organe des pépiniéristes, M. Volet (Paris), 1895, Janssen, Édouard. Éditeur scientifique

 

C'est encore Chevalier qui brosse ce qui s'est déroulé en France, à partir des constats des pépiniers, de la Société de Pomologie et des Sociétés Centrales d'Horticulture naissantes après celles des Sociétés Centrales d'Agriculture au siècle précédent.

« Le 19e siècle a vu se réaliser l'inventaire de toutes nos richesses pomologiques, décrites dans les magnifiques ouvrages de Desfontaines, de Loiseleur-Deslongchamps, de A. Poiteau et Turpin, de J. Decaisne, de André Leroy, de M. Mas, de Ch. Baltet, de F. Vuillermoz. Ce dernier fut le promoteur du Congrès pomologique de France institué par la Société d'Horticulture du Rhône en 1856, et qui après avoir tenu des réunions dans les principales villes de France publia de 1863 à 1873, en huit volumes la description des 380 fruits de table les meilleurs. Le Congrès pomologique s'était proposé de chercher au milieu des variétés d'arbres fruitiers en nombre incalculable que produit la France celles qu'il convient de faire connaître et de vulgariser en en établissant la synonymie.

Cet aperçu serait incomplet si nous ne mentionnions le Catalogue de la Société pomologique de France, publié en 1887, qui énumère 141 variétés de poires et 65 variétés de pommes adoptées, enfin l'ouvrage publié par la Société d'Horticulture de France en 1907, donnant le tableau des meilleurs fruits de France au début du 20e siècle. »

« Nous ne devons pas oublier davantage le mémoire sur les Pomacées de Decaisne et son introduction à l'étude des Poiriers des collections du Muséum, puis la notice de Carrière sur les Pommiers microcarpes, l'étude de Dangeard sur les maladies du Pommier.

Notre pays peut cependant revendiquer le mérite d'avoir été un des premiers à entreprendre méthodiquement l'étude des arbres fruitiers en vue d'améliorer leur culture. C'est à Rouen qu'ont commencé les premières études vraiment scientifiques sur les fruits de pressoir et ce sera l'honneur de la Société d’Horticulture de la Seine- Inférieure d'avoir pris, dès sa fondation en 1836, l'initiative de ces recherches. » [Chevalier, 1921] ce qui est relaté dans l’ouvrage de A.Héron : l’œuvre pomologique de la Société Centrale d’Horticulture, Rouen, 1896.

« Tandis que le Congrès pomologique de Lyon étendait ses investigations à toute la France et effectuait l'inventaire des meilleures sortes de fruits de table de notre pays, la Société d'Horticulture de la Seine- inférieure, en étroite liaison avec lui, étudiait toutes les sortes de fruits cultivés sur les divers points du département. Des horticulteurs expérimentés comme Tougard, Prévost, Du Breuil, Boisbunel, Delaunay, Letellier-Binet, Michelin, s'occupèrent d'abord de faire l'inventaire des fruits à couteau cultivés dans la région. De 1839 à 1861 parurent divers mémoires faisant connaître la nomenclature de ces fruits. Dès cette époque, la Société centrale d'Horticulture de Rouen avait commencé une remarquable collection de fruits de table moulés, et en 1894 le catalogue qu'elle publie mentionne dans ses collections. » [Chevalier, 1921]

« Mais cette Société ne se contenta pas d'inventorier, de décrire et de représenter les variétés existantes : stimulée par l'exemple des fondateurs de la pomologie, l'anglais Knight, les belges Van Mons et Bouvier, elle tenta de produire ou d'introduire des variétés nouvelles  et, à cet effet, elle créa un jardin d'expérimentation à Rouen même.»

En 1837, ce sujet était déjà au coeur des constatations et des préoccupations des arboriculteurs, des horticulteurs et des semeurs et pépiniers  et c'est M.A. Puvis qui en fit la synthèse : extraits.

In : bibliotheque-numerique.hortalia.org

« La dégénération et de l’extinction des variétés de végétaux propagés par les greffes, boutures, tubercules, etc. et de la création des variétés nouvelles, par M.A. Puvis, Paris, 1837.

En préambule : « L’arbre, jeune embryon sorti de la graine, pendant ses premières années reste faible…il s’élève, pousse avec vigueur ; ses couches annuelles qui prennent d’autant plus de développement que l’(arbre grossit davantage ;  croissent encore même en épaisseur ; ses branches s’élancent de toutes parts dans l’espace ; mais après cette première vigueur qui appartient à sa jeunesse arrive l’âge de la fructification ; les  bourgeons nouveaux sont plus courtes, les couches annuelles plus minces ; bientôt le moment de la grande fructification est arrivé ; mais cet âge de maturité, pendant lequel l’arbre semble soutenir ses forces, sans les voir croître ni diminuer, n’est pas long : bientôt chaque année voit diminuer la longueur des bourgeons, l’épaisseur des couches annuelles ; la force de projection de la sève, cette force qui la pousse loin des racines jusqu’au sommet de l’arbre, cette force qui serait l’une des premières conditions de la vie végétale, diminue bientôt d’intensité : la sève ne monte plus qu’avec peine dans les branches du sommet ; bientôt l’alongement des bourgeons y cesse, le feuillage  y est moins vif, les fruits moins abondans : plus  tard, les boutons s’y éteignent et ne poussent qu’en petit nombre au printemps ; les feuilles jaunes une année ne reparaissent plus l’année suivante, etb la mort a déjà gagné la cime. Avec la force qui va en s’affaiblissant d’année en année, la mort descend et gagne les branches inférieures ; arrivée bientôt à peu de distance du tronc, la vie semble lutter encore contr’elle pendant quelque temps, mais bientôt elle a gagné les racines et le végétal a cessé de vivre. Mais cette cause de mort est loin d’être seule… » [Puvis, 1837]

« Pour revenir aux questions que nous avons un instant quittées, nous nous demanderions quelle serait la durée probable de ces variétés de différentes espèces de fruits qui naissent, vivent et meurent entre les mins de l’homme qui les cultive. Ces variétés, à ce qu’il semble, onjt une durée assez diverse, mais on pourrait croire, Avec Van Mons, que leur vie va en décroissant à mesure qu’elles se perfectionnent en qualité. Nous avons vu que Columelle se plaignait de la disparition des variétés cultivées du temps de Canton ; plus tard Palladius annonçait l’affaiblissement de variétés plus récentes ; il y aurait donc entre ces auteurs une durée de génération de ces variétés ; treize siècles après, Olivier de Serres ne retrouvait plus aucune des dernières variétés décrites : sans doute plusieurs générations de variétés nouvelles, dans tout cet espace de temps, avaient achevé leur carrière. La Quintinie qui a paru un siècle et demi après Olivier de Serres ne nous donne pas la moitié des variétés que nomme ce dernier ; Duhamel ne retrouve qu’une partie de celles de la Quintinie. […] De toutes ces diverses observations, nous devons conclure que la durée des variétés propagées par la greffe serait de plusieurs siècles ; mais cette durée est bien loin d’être uniforme. […] Van Mons, tout en accordant deux ou trois siècles de durée à nos variétés cultivées, restreint à ½ ou 2/3 de siècle celles des variétés améliorées par ses semis successifs […] Les espèces qu’on greffe sur ce sujet participent plus ou moins de son âge avancé, et par conséquent développent moins de vigueur et une durée moindre que si on les avait greffées sur des sujets venus de pépins. » [Puvis, 1837]

Puvis  dans cet ouvrage fait référence au maître des pépiniers belges : Van Mons.

Vous verrerz dans ce qui suit son rôle, son influence, son réseau en France dont Prévost de Boisguillaume à qui il attribuer a une poire nommé Prévost.

« M. Van- Mons a recueilli les excellentes variétés de Passe-Colmar et de Beurré de Hardenpont d'hiver et de printemps ; il donna l'impulsion dans ce pays où se multiplièrent des· semis en grand nombre : une société de pomologues se forma qui. donnait des médailles à ceux qui trouvaient de bons fruits ; plusieurs villes de la Belgique imitèrent Mons; on n'obtint pas partout de bons résultats' mais partout se popularisa l'idée que les semis peuvent fournir de nouvelles et bonnes variétés de fruits, et il est résulté en Belgique l'usage général -que, dans une pépinière de francs, on laisse, sans les .greffer, pour attendre leurs fruits, les sujets dont le port, le feuillage et le bois annoncent un bon fruit. Les choses en étaient à ce point lorsque, il y a plus de 5o ans, M. Van Mons commença ses études spéciales pour poursuivre en grand, par la voie de nombreux semis, la recherche et l'amélioration des variétés de fruits. Les semis naturels ou  de hasard, ou des semis spéciaux restés inconnus parce qu'ils étaient peu étendus, avaient donc suffi jusqu'ici pour remplacer les espèces qui s'éteignent et même beaucoup augmenter le nombre de nos variétés cultivées. »

 

« Nous disions que M. Van-Mons a le premier établi en grand et d'une manière suivie l'étude des semis des espèces fruitières ; cet homme remarquable qui, dès ses premières années, s' était recommandé par des travaux importants dans l' histoire naturelle et en chimie, en continuant de professer dans les diverses écoles les sciences qui avaient été l'étude de sa première jeunesse, s'est depuis plus de cinquante ans spécialement occupé de semis et de recherches de variétés de fruits; ses travaux ont été très productifs […] il a lui-même -produit un très-grand nombre de fruits de bonne qualité qui rivalisent dans nos jardins avec ·tout ce qu'on a de meilleur dans les anciennes variétés: pour donner une idée de ses résultats obtenus, des procédés qu'il suit et de l'ensemble systématique des opinions qu'il a admises comme le fruit de ses recherches, nous transcrirons une lettre qu'il nous écrivait en 1819. Il a depuis fait paraître- un premier volume où il consigne les résultats de ses travaux et de son expérience, mais son système se trouve en quelque sorte résumé clans sa lettre ; nous la donnons, par cette raison, avec empressement : " Mes recherches consistent à semer des pepins et des noyaux de fruits que · je veux renouveler ; je prends la graine sur les meilleures variétés des dernières procréations. J'ai reconnu que plus une plante qui se propage par d'autres voies que le semis, est propagée par le semis, plus elle s'éloigne de l'état de nature et plus elle se rapproche de l'art ; nous avons par cette voie conduit Je rosier à ne plus procréer que des fleurs pleines. "Le rosier, le poirier, le pommier des bois ou qui viennent spontanément dans un pays, ne peuvent, par les semis, quelque répétés qu'ils soient et successivement répétés des procréations du même type primitif, donner une variation sensible ; la première variation ne peut être éprouvée que dans un sol où la plante est exotique ; mais là elle l'éprouve à la première génération et elle continue de l'éprouver tant clans ce sol que dans celui même où elle est indigène. Le premier pas une fois fait dans le sens de l'art, une plante une fois détournée de la route de la nature ne peut plus y revenir, et je préfère le pepin d’une petite poire acerbe nouvelle au pépin d'une variété excellente : ce que je dis de la poire est vrai de tous les autres fruits. »[ Mons,1819 ;  Puvis, 1937]

« Après M. Van-Mons, nous devons citer Knight, président 'de la, Société horticulturale de Londres, pour ses recherches extrêmement intéressantes de variétés nouvelles de toute espèce; Van-Mons a obtenu toutes ses créations par le semis; Kni ght a gagné la plupart des siennes · par le croisement des variétés entr'elles et le semis des · graines modifiées.»[Puvis, 1937]

 

Le Plaidoyer de Prévot de Boisguillaume  pour le maitien des variétés locales et régionales

 

Suite à ses constatations et ses savoirs, en 1837, M. Prévost pris la parole à l'assemblée de la Société Centrale d'Agriculture du Département de la Seine-Inférieure  pour plaider contre la culture des pommiers américains encore peu connus en France. Il s'insurge contre les recommandations de M. de Maraize recommandant de greffer les pommiers normands, en écusson ou en fente, avec des pommiers  américains, la grande vigueur de ceux-ci devant raviver les autres. M. Prévost signale que les pommiers américains ne sont pas exempts de chancres. Il conclut sa plaidoyerie par ces mots :  

« Je ne pense donc pas qu'il y ait lieu à cultiver, à l'exclusion de nos pommiers, ceux d'Amérique, dont les fruits, d'ailleurs, nous sont encore peu connus. Il me semble plus sage dfe cultiver les uns et les autres de manière à pourvoir les comparer, non dans las pépinières et pendant trois au quatre ans seulement ; mais avec tout le temps nécessaire pour pouvoir prononcer avec connaissance de  cause. Prévost, Pépiniériste.» [SCA, 76, Tome VIII, 1837]

« On conçoit aisément que dans un tel milieu, dans un contexte d'émulation, à une époque où les sélectionneurs s'adonnaient avec tant de succès à la création de nouvelles sortes d'arbres fruitiers, le Pommier à cidre, le plus précieux de tous les arbres de Normandie, ne devait pas laisser indifférent la pléiade d'expérimentateurs groupés à la Société centrale d'Horticulture de Rouen.

 

En 1836, L. Moll, un voyageur ex-professeur d'Agriculture fit une excursion  dans le nord de la France dont le pays de Caux et le pays de Bray.

Après  les nouveaux découpages administratifs sous  l'administration de Napoléon figurant les 134 départements français en 1812 , L. Moll revient aux notions de "pays" et ses descriptions sont les premières  mêlant arrondissements et "pays" durant son périple de 1834 à 1835, publié en 1836.

Afin de parfaire sa formation d’améliorer ses connaissances du territoire français L. Moll entreprit un voyage agricole dans le nord de la France d’Est en Ouest.

Sa description des paysages traversés  font penser que de Rouen, plus on va vers la mer plus les cours, les talus et fossés protègent les habitats en se densifiant  et les habitants des aléas des vents forts à violents  de sorte que le plateau s'abaisserait de la mer vers Rouen. 

En réalité ,  Criquebeuf-en-Caux  a une altitude moyenne de 107 m, celle de Canteleu : 120 m ; Octeville-sur-Mer : altitude moyenne de 105 m  alors que l'altitude maximale de Villequier est de 147m ; Varengeville-sur-Mer  120m  pour 161 m en moyenne à Bois-Guillaume.

Les talus et fossés des cours existent à ces endroits (de moins en moins avec l'urbanisation)  ainsi plus on va vers la mer plus ces structures se renforcent face aux vents comme un rempart.

 

Arrivé à Beauvais, il observe que la plaine est uniforme interrompue par les seules allées de pommiers. Il constate qu’ici de même qu’en Normandie, le cidre est la boisson ordinaire et que tous les chemins, plusieurs champs même, sont garnis de pommiers. Il ajoute :

« On les considère comme étant d’une qualité moindre, d’un crû moins bon, comme on dit ici, que dans la Normandie ; cependant j’ai bu de fort bon cidre dans ce pays. Du reste, ces pommiers, qui sont d’un assez grand rapport, nuisent passablement aux récoltes de même qu’aux chemins […]. » [Moll, 1836]

Plus loin dans son périple :

« En quittant Rouen […] je gravis une côte assez élevée qui sépare la vallée de la Seine de celle du Cailly où l’on descend à Maromme, gros bourg rempli, comme tous les bords de la rivière, de fabriques et d’usines. Le sol de ce plateau est toujours la silice argileuse reposant à plus ou moins de profondeur sur la craie que l’on voit à nu dans les vallées et sur les pentes des collines. Le Plateau que l’on parcourt ensuite jusqu’à la petite ville de baratin (comprendre Barentin), et qui sépare le Cailly de l’Austreberthe, est de même nature ; cependant la craie paraît s’enfoncer davantage, et le sol devenir un peu plus consistant. […]  à l’entour de Rouen et même jusqu’à Baratin à 5 lieues de distance […] les terres sont à un prix élevé, comme on peut bien le penser […] il faut dire que la culture aux environs de Rouen, quoique bonne, n’est pas aussi avancée que celle de beaucoup d’autres localités du département. […] De Barentin, je descendis le joli vallon de l’Austreberthe, rempli de fabriques et d’usines de toute espèce. […] j’arrivai au château des Vieux […] sur le sommet d’une colline et domine au loin la vallée et le pays alentour.  Il vit une charrue de Caux. […] La charrue cauchoise, au contraire a des dimensions énormes sans avoir beaucoup de solidité. […] Je quittai les Vieux, me dirigeant sur le village de Touffreville près d’Yvetot où réside M. Remarié fils. […] Je suis actuellement dans le riche et beau pays de Caux, il n’y a plus de village, ou plutôt toute la contrée ne forme qu’un immense village dont les habitants sont disséminés sur toute la surface du pays, et n’ont, de lien commun que l’église, qui, avec le petit groupe de maisons du curé, du maréchal, du marchand et du cabaretier qui l’entourent, frome seule, à proprement parler, le village. […] I y a cependant aussi dans ce département, surtout vers le nord, des villages plus réunis. On croit voir alors de loin une belle haute futaie. J’ay ai été trompé, même me trouvant au milieu du village. Avant que je fusse au fait, il m’est arrivé plusieurs fois de traverser de ces singulières forêts, comptant trouver au-delà le village qu’on m’avait indiqué, et lorsque n’en apercevant aucun indice, je m’en informais de nouveau : « Vous en sortez, » me répondait-on. […] Rien de plus original que la disposition des habitations de campagne dans cette partie de la France. »

« Depuis la Seine jusqu’au pays de Brai, de Rouen jusqu’au Havre, toutes, soit châteaux, maisons de plaisance ou exploitations rurales, sont modelées les unes sur les autres. Elles sont placées dans une enceinte plus ou moins vaste, une cour comme on l’appelle ici, plantée de pommiers, et entourée d’un fossé derrière lequel s’élève un mur ou rempart de terre large et haut, sur lequel sont plantées trois ou quatre rangées de grands arbres, hêtres, ormes, chênes, etc., d’une belle venue. Cette ceinture garantit les bâtiments, les vergers, les jardins et même les champs, des vents impétueux de la mer. […] Ces enceintes ou cours ont depuis 2 à 12 hectares et plus d’étendue ; elles sont plantées en pommiers sous lesquels croît une herbe touffue qu’on fait pâturer au piquet ou tiers. Des issues sont pratiquées dans le rempart et sont fermées de barrières. Les bâtiments ne sont pas, comme ailleurs, réunis en un seul corps de ferme ; chacun est distinct et occupe remplacement séparé dans la cour. Celle-ci forme ordinairement un carré long. La maison d’habitation est au haut bout ; auprès ou autour se trouve le jardin entouré d’une haie vive, où, suivant l’expressions gracieuse du pays, l’on a réuni quelques roses pour la beauté, quelques pommiers pour la boisson, quelques poiriers pour les amis. »[Moll, 1836]

Le Mercredi 24 décembre L. Moll arrive à Fréville (Frétille dans le texte. ) On reconnait à la description qu'il découvre le Val au Cesne. « De Frétille, je passai à travaers un pays charmant, pittoresque, qui semblait plutôt appartenir aux Vosges qu'à la Seine-Inférieure, une suite de vallons profonds dont les flancs rapides et les somments sont couronnés de bois, et le fond garni de prés.[...] Au sortir du labyrinthe de vallons, le pays change d'aspect. Un vaste plateau s'étend aussi loin que le vue peut atteindre, borné seulement par de nombreux bocages qui forment le village de Touffreville. Des valoons on n'aperçoit pluis rine quelques distances du bord, et la plaine semble ne pas être interrompue. Tout ce beau pays offre des contrastes semblables. La plaine élevée et unie dont il est formé est déchirée en plusieurs sens par des vallons qui, en raison de leur peu de largeur et de l'égalité de hauteur des bords ; ne s'aperçoivent que lorsqu'on est tout près. Cette particularité doit donner lieu, à des inductions curieuses sur le creusement des vallées.[...]

La Seine-Inférieure, comme toute la côte de la Manche, est très sujette à des vents violent de l’ouest et du nord-ouest, qui en été font baisser la température subitement et amènent des pluies froides. En général, il tombe beaucoup d’eau, ou du moins il y a peu de jours sereins. Cette circonstance, jointe à la profondeur du sol végétal, explique la belle venue de l’herbe et des fourrages en général dans des lieux non arrosés, et pourrait excuser jusqu’à un certain point le peu d’emploi que l’on fait de l’irrigation. [...]

Le marnage des terres est rrès anciennement et généralement usité dans le pays de Caux. Cette opération est indispensable pour conserver le sol en état de fertilié. [...] Le sol reprend son activité. [...] Cette nécessité absolue du marnage dans le pays de Caux, prouve que les terrains d'une certaine consistance et situés sou sun climat humide ont besoin de parties calcaires pour ne pas acquérir un principe d'acidité que l'ammoniac même du fumier ne peut neutraliser.

Je vis, sur la route, beaucoup de nouvelles plantations de pommiers, non seulement dans les herbages, mais même dans les champs. Ces arbres sont, du resrte, d'un bon produite, surtout dans les environs du Havre, où les pommes l'emportent en qualité sur celles de l'intérieur des terres, et fournissent un cidre qui conserve sa douceur beaucoup plus longtemps. Aussi cette année, tandis que le boisseau (demi-hexctolitre) de pommes ne valait que 45 centimes à Yvetot, il valait le double auprès du Havre. Il faut dire néanmoins que la récolte ayant été très abonadnte cette année, la différence de prix en favour des qualités supérieures est plus considérable que de coutume. Le prix ordinaire du boisseau, à Yvetot, est de 1 francc ; le produit moyen d'un arbre en plein rapport est de deux boisseaux, avec lesquels on fait une demi-hectolitre de cidre. [...] 

Après m'être reposé quelques jours au Havre, je continuai ma route, me dirigeant vers Fécamp, passant par Montivilliers... Après avoir  traversé un pays plus ou moins accidenté, mais toujours varié par de nombreux bocages, j'arrivai au bourg de Goderville, et de là au château de Crétot. [...] Parti de Crêtôt le 1er janvier, j'arrivai le même jour à Saint-Léonard, exploitation de M. Argent,aîné, située sur les bords de la mer près Fécamp.

Les vents de mer sont quelqeufois d'une violence extrême dans ce lieu comme sur tout ce littoral. A Saint-Léonard ils empêchent d'une manière visible à la croissance des arbres. M. d'Argent a été  obligé  de faire du côté de la mer un relèvement de terre de 6 à pieds de hauteur pour protéger la bordure d'arbres qui entoure sa cour. La première brangée d'arbres dépasse à peine le mur, les autres s'élèvent insensiblement, de façon que la dernière a une trentaine de pieds de hauteur.

Arrivé sous l'action du vent, le tronc, qui jusque-là a conservé presque toute sa grosseur, est comme coupé, et les branches s'étendent latéralement comme si elles avaient touché à une voûte impénétrable.

Derrièreb ces abris les pommiers réunissent bien.

Le sol est, dans ces environs, plus silicueux qu'à Goderville, et le vent de mer y déchausse souvent le blé ; néanmoins on trouve aussi des terres fortes.[...]

Continuant ma route vers Dieppe, je passai près du haras de Valmont, appartenant à M. d'Hocquart, et connu par de nombreuses et belles productions. (...] A ouville, près Dieppe, je vis chez M. Vaudeville, habile agriculteur, un magnifique troupeau de mérinos d'une conformation et d'une finesse entièrement semblables, si ce n'est même supérieures, à celles du troupeau de M. d'Argent. [...] .»[Moll, 1836]

Vers 1840, la Société d'Agriculture de la Seine-Inférieure avait eu à s'occuper du dépérissement, malheureusement trop avéré, d'un grand nombre d'anciennes variétés de fruits de pressoir. Elle jugea comme urgentes des recherches qui devaient avoir pour objet de signaler aux cultivateurs les variétés à réformer et celles qui méritaient d'être propagées. Elle chargea donc deux spécialistes, A. Du Breuil et Girardin, d'étudier les fruits à cidre de la région.

1840

AMÉLIORATION DES CIDRES, COPIE D'UNE LETTRE ADRESSÉE A M. LE PRÉFET DE LA SEINE-INFÉRIEURE, par MM. DUBREUIL et J. GIRARDIN,
Professeurs à l'école d'agriculture et d'économie rurale du département.


« MONSIEUR LE PRÉFET,

La culture des arbres à fruits à cidre est, pour la Normandie, ce que celle de la vigne est pour les pays vignobles. Ces arbres méritent donc toute la sollicitude des agriculteurs de nos contrées, et il semble que le choix, la conduite de ces arbres, ainsi que la confection du cidre, devraient être pour eux l'objet de soins assidus. Il n'en est rien cependant, Monsieur le préfet ; aussi la liqueur qui sert de boisson habituelle à près du quart des habitants de la France, est bien loin d’acquérir, dans les mains de nos cultivateurs, toutes les qualités qu'elle pourrait offrir. Cela est dû, d'une part, aux pratiques vicieuses qu'ils emploient pour sa préparation, et, de l’autre, au peu de discernement qui préside au mélange des diverses variétés de fruits à piler.

Quant à la première cause, nous nous efforçons de la faire disparaître en indiquant, dans nos leçons, les procédés de fabrication qu'il convient de substituer aux anciens, et déjà nous avons pu remarquer avec satisfaction que nos observations ont été mises à profit dans quelques exploitations.

Mais la deuxième cause, le mauvais mélange des diverses variétés de fruits, est plus difficile à détruire.

En effet, pour pouvoir indiquer celles des variétés qui doivent être mélangées les unes avec les autres, ainsi que les proportions dans lesquelles ces mélanges doivent être opérés, il faudrait savoir distinguer nettement les variétés si nombreuses des pommiers. Or, dans l'état actuel des choses, cela est presque impossible, attendu la confusion qui règne dans la synonymie de tous ces arbres, confusion telle, que la même variété porte un nom différent dans chaque canton. Ce n'est que lorsqu'on aura débrouillé ce chaos, étudié d'une manière suivie toutes les variétés et déterminé la valeur comparative de leurs fruits, qu'il sera possible d'arriver à formuler des principes qui puissent servir de guide aux cultivateurs. Mus par le désir de remplir le plus complètement possible la mission dont vous nous avez chargés en nous confiant l'enseignement agricole dans le département, nous avons l'intention de nous livrer à cet utile travail. Mais, pour l'entreprendre et l'exécuter avec succès, votre concours, Monsieur le préfet, nous est indispensable.

Voici le plan que nous avons adopté, dans l'espoir de voir les résultats do nos recherches recevoir une application plus étendue.

1. Obtenir d’abord, par l'entremise de MM. les préfets, la collection complète des greffes des pommiers et des poiriers à cidre de chacun des cantons des treize départements dans lesquels on s'occupe de la culture de ces arbres sur une grande échelle.

Ces départements sont : la Seine-Inférieure, le Calvados, l'Orne, l’Eure, la Manche, composant l'ancienne province de Normandie […]

Une instruction sur la manière de récolter, d'étiqueter et d'emballer les greffes demandées, serait envoyée par nous à MM. les préfets.

2. Greffer ensuite, au jardin des plantes, dans l'espace concédé à l'école d'agriculture par l'administration municipale, les greffes qui nous seraient envoyées de cette manière.

3. Au bout de trois à quatre ans, ces greffes portant fruit, fixer la synonymie de chaque variété pour les différents cantons , étudier les qualités de chaque sorte de fruit, fixer ainsi les bonnes espèces à conserver, signaler les mauvaises à détruire, et déterminer, enfin, dans quelles proportions les bons fruits des divers solages doivent être mélangés pour obtenir le meilleur moût, et par suite, le meilleur cidre possible.

Voilà, Monsieur le préfet, l'immense travail que nous voulons entreprendre, et auquel nous apporterons l'ardeur la plus assidue, parce que nous sentons de quelle utilité il sera pour tous les pays à cidre. Mais, nous le répétons, il nous sera impossible de l'effectuer sans votre appui bienveillant et éclairé.

Ce que nous sollicitons de vous, c'est que vous veuilliez bien nous faire obtenir, par voie administrative, les greffes de toutes les variétés de pommiers et de poiriers cultivés dans le département, et que vous invitiez MM. les préfets des douze autres départements ci-dessus désignés, à réunir pour nous la même collection, et à nous l'adresser. […] Veuillez bien, Monsieur le préfet, agréer l'expression du profond respect avec lequel nous avons l'honneur d’être,


Vos très humbles et très-obéissants serviteurs,

 

J. GIRARDIN.                  A. DUBREUIL.

 

 

Une première collection de ces arbres fut greffée au Jardin botanique de Rouen et elle commença à fructifier en 1846. On put ainsi établir la synonymie et la répartition géographique dans le département de 181 variétés de pommiers et 128 de poiriers. Malheureusement ces études ne purent être poursuivies, parce que Du Breuil et Girardin quittèrent Rouen, le premier en 1848, le second quand il fut nommé en 1857 doyen de la Faculté des Sciences de Lille. En 1862, ces études furent reprises sous la poussée de M. de Boutteville, président de la Société d'Horticulture de la Seine-Inférieure. Une importante exposition de fruits à cidre fut organisée à Rouen en 1862 et en 1863. Encouragés par le botaniste Payen, président de la Société Impériale d’Agriculture de France les pomologistes de la Seine-Inférieure s'unissaient bientôt à ceux de l'Eure et du Calvados pour ouvrir en 1864 le Congrès pour l'étude des Fruits à cidre. Dès lors, l'étude des arbres constituant les vergers de Normandie entrait dans la voie scientifique.

Décadence des variétés anciennes

Nous possédons à l'heure actuelle en France aussi bien comme fruits à couteau que comme fruits de pressoir des variétés de premier choix. Outre que ces variétés sont encore perfectibles, un grand nombre sont de création ancienne et à de rares exceptions près, elles n'ont plus les qualités qu'elles avaient à l'origine.

« Les variétés anciennes, dit Van Mons, perpétuées dans leur existence par la greffe ne donnent plus que des arbres malades et des fruits mauvais. C'est de l'excédent de leur vie artificielle à leur vie naturelle que le mal provient. La greffe a prolongé leur existence au-delà du terme que la nature leur avait accordé. En, semant de nouveau, on fait à leur progéniture, commencer une autre carrière de vie, et on ramène l'espèce à ce qu'elle avait été à l'origine. On doit la refaire à neuf, la réhabiliter dans la fraîcheur de sa première jeunesse et la faire revivre à la santé. Cette régénération ne peut se faire au hasard. Il y a pour y réussir des règles à suivre [1]» .

« Knight, Poiteau, Sageret et presque tous les pomologistes du dernier siècle admettent aussi la dégénérescence des vieilles variétés.

Frédéric Palmer (Revue Horticole, 1872, p. 27) remarque aussi que la décadence ou mort prématurée des variétés multipliées par la greffe est bien une réalité, et il n'est pas douteux que dans certaines contrées, sous l'influence de cette cause, telles ou telles poires ont périclité et finalement ont totalement disparu. Cette décalence est causée par les sujets impropres, les terrains infertiles, les climats, etc. Nos arbres fruitiers sont en générai des hybrides. Le vieillissement, les changements dans la nutrition en amènent la disjonction progressive ou la disjonction brusque par variation des bourgeons.

Pour conserver intactes les bonnes variétés, il faudrait les cultiver constamment dans le milieu où elles ont été obtenues. Il faudrait aussi les greffer souvent en prélevant la greffe sur les rameaux à bois vigoureux et jeunes développés sur arbre sain. Il faut aussi se préoccuper des porte-greffes et ne pas les utiliser au hasard.

Utilité des semis

Mais il est préférable de recourir de temps en temps au semis pour produire de nouvelles variétés égalant ou dépassant en valeur les bonnes variétés que l'on possède. Le semis, peut donner des arbres fruitiers produisant des fruits excellents. Ce fait a été démontré par Van Mons en Belgique, Knight en Angleterre, Gàllesio en Italie, Sageret, Decaisne, Baltet en France.

Sageret était persuadé qu'on pouvait encore améliorer considérablement nos arbres fruitiers par la greffe multipliée et variée sur divers sujets comme moyens préparatoires, par la surgreffe, par la transplantation sur divers terrains, par le transport sous des climats [2]»

« Van Mons a perfectionné tous les arbres fruitiers dont il s'est occupé, mais il faisait en même temps de la sélection. Il recherchait pour ses semis, non pas les pépins provenant de variétés améliorées anciennes, mais les graines de pommiers ou de poiriers demi-sauvages, qu'il déterrait même dans les bois, mais sur lesquels il faisait déjà un triage en éliminant tout ce qui n'avait pas un aspect avantageux. L'aspect avantageux consistait à rappeler par la forme, le bois, la feuille, une variété ancienne ou demi-récente admise dans la culture à cause de sa bonté. C'est en se basant sur ces augures que Van Mons faisait de la sélection. Il donnait en outre la préférence aux poiriers qui avaient la fructification la plus précoce et semait les pépins des premières poires produites. Au bout de neuf générations, il était parvenu à obtenir des poiriers qui fructifiaient après 5 ans de semis ou 2 ou 3 ans de greffe. Les semis de pépins recueillis sur les arbres ainsi sélectionnés donnaient d'après lui et sans exception exclusivement des arbres avec des fruits de choix, pourvu que la variété fut encore récente. Pour les pommiers, il suffit d'après Van Mons de quatre générations pour arriver au perfectionnement. Aussi il n'admettait pas l'utilité de la greffe. Il croyait à la fixité de l'espèce. La variation pour lui ne se manifeste que dans une proportion inférieure à l */„ et ce sont les variétés d'apparition récente qui ont le plus de tendance à varier., Il paraît avoir créé ainsi 403 variétés nouvelles de poiriers dont il nomma environ 200 formes parmi lesquelles les variétés Diel, Louvain, Wurtemberg, Colmar, sont restées célèbres. Ces variétés ne peuvent se reproduire absolument semblables à elles-mêmes par le semis, mais elles conservent des qualités approchantes. Toutefois, Van Mons estimait qu'après avoir vieilli, ces variétés ne donneraient à leur tour que des fruits dégénérés et ne pourraient plus reproduire par graine la variété. D'où la nécessité de faire constamment des semis avec des pépins pris sur des arbres de plus en plus jeunes. Ces assertions n'ont été ni infirmées ni confirmées par la suite, et il serait nécessaire de reprendre ces expériences.

 

[1] In : Auguste Chevalier :  citation de Van Mons. Restauration des arbres fruitiers et amélioration des fruits. Arbres fruitiers, T. I, (1835). p. 158. www.persee.fr

Les sessions du Congrès eurent lieu à Caen en 1884, à Rennes en 1865, à Alençon en 1866, à Beauvais en 1867, à Saint-Lô en 1868, à Bayeux en 1869, à Yvetot en 1870.

En 1872, le Conseil d'administration du Congrès pensa que les études étaient assez avancées pour qu'un travail d'ensemble sur les variétés de fruits de pressoir et sur le cidre fut rédigé.

Ce fut l'origine du très important travail de L. de Boutteville et de A. Hauchecorne, Le Cidre, édité à Rouen en 1875. C'est une œuvre de grande valeur qui n'a point vieilli, et l'on peut dire que tous ceux qui jusqu'à ce jour se sont occupés du Pommier à cidre et qui ont accumulé une documentation considérable sur toutes les variétés de pommiers à cidre connues, n'ont pour ainsi dire point apporté d'idées générales nouvelles. On n'a presque rien ajouté à la manière précise de décrire les variétés qu'ils avaient adoptées, ni aux procédés d'analyse que A. Hauchecorne a le premier conçu pour déterminer la valeur de chaque sorte de fruits de pressoir. En 1868, à une époque où la plus grande obscurité existait encore sur les phénomènes de la fermentation et où l'on n'appliquait guère encore l'analyse chimique à la sélection de la canne à sucre et de la betterave, A. Hauchecorne, pharmacien a Yvetot, eut l'idée alors originale de soumettre à l'analyse chimique les fruits des plus importantes variétés. Dans chacune il dose la quantité de sucre alcoolisable, le tanin, le mucilage, l'acidité, les sels divers. Il note la couleur et le parfum du jus, enfin la densité du moût.

Les chimistes ne font pas beaucoup mieux de nos jours : de Boutteville et Hauchecorne ne sont arrivés à adopter l'analyse chimique des pommes comme moyen d'apprécier leur valeur pour la fabrication du cidre, qu'après de nombreuses recherches ; puis en 1868, Hauchecorne pose d'une manière précise les règles qui doivent être adoptées.

« II faut de toute nécessité, dit-il, le concours de l'analyse chimique pour arriver à. préciser les rapports de quantité qui notamment existent à l'égard du sucre, du tanin et du mucilage, car la quantité bonne ou mauvaise d’un fruit ne tient pas à la prédominance d'un élément unique, elle repose, au contraire, sur l'harmonie des proportions dans lesquelles se trouve associés plus particulièrement ses principaux éléments constitutifs. »

Il ajoute : « Les pommes qui méritent à bon droit d'occuper le premier rang sont les variétés parfumées, légèrement amères et peu acides, qui à une quantité notable de tanin ou principe astringent et de mucilage ou principe onctueux joignent une très forte proportion 'de sucre. . . Le sucre est de tous les éléments celui qu'il convient de rencontrer en plus forte proportion... On devra donc toujours accorder la préférence aux variétés de haute densité, car plus le densimètre accusera de degrés plus la richesse saccharine sera grande, l'alcool abondant et la boisson généreuse et durable... 

Et les deux auteurs concluent :

« II ressort de nos premières études sur la densité des moûts et sur leur composition, cet enseignement que nos plantations d'arbres à cidre sont encombrées d'une multitude de variétés défectueuses qu'il faut éviter de multiplier, malgré la fertilité exceptionnelle de quelques-unes, et que les nouvelles que l'on crée avec des pommiers obtenus de semis sans les avoir épurés par un choix très scrupuleux, ne donneront à leur tour que des produits très médiocres et constamment inférieurs à ceux qui proviennent d'arbres greffés en bonnes variétés anciennes.

« En présence d'un état de choses qui semblait présager la ruine d'une des plus intéressantes industries agricoles du Nord-ouest de la France, il nous paraît opportun de signaler à l'attention des hommes compétents les effets désastreux dûs au système tant vanté de nos jours, lequel consiste à planter sans les greffer et sans connaître leur mérite les jeunes pommiers de semis qui dans pépinière présentent des indices dits de bon augure, persuadés que si l'on ne remédiait, dès à présent, à l'abaissement considérable du niveau de la qualité des fruits amené par ce système, l'usage du cidre, au lieu de se propager, irait fatalement en se restreignant et que l'on verrait dans un temps peu éloigné, cette industrie pleine d'avenir aujourd'hui, réduite à la fabrication d'un produit de simple consommation locale. Aussi ne saurions-nous trop recommander aux pépiniéristes, aux fermiers, aux propriétaires, à tous ceux, en un mot, qui s'occupent de la culture des arbres à cidre de ne planter que des variétés qui fournissent des fruits de premier mérite. »

« Quant aux fruits de pressoir de notre pays (pommes et poires) ils ont été inventoriés surtout par de Chambray, Renault, Dubois, J. de Brébisson, Odolant-Desnos, de Boutteville et Hauchecorne, Hérissant, Leroux, Crochetelle, Power, Truelle, Lecceur, etc. » [Chevalier, 1921]

L'étude de L. de Boutteville et A. Hauchecorne eut pour résultat de provoquer des recherches dans tous les territoires où l'on cultivait le pommier à cidre.

L'Association pomologique de l'Ouest fut fondée en 1883 et sous l'habile direction de M. Lechartier, doyen de la Faculté des Sciences de Rennes, elle inventoria et analysa les variétés de pommiers à cidre spéciales à chaque région de la France. En même temps des chercheurs isolés entreprenaient pour leur propre compte, l'étude des fruits de pressoir donnant les crûs de cidre les plus renommés. Parmi ces études, celles de G. Power, de A. Truelle  et de Warcollier méritent une mention spéciale en raison de leur importance.

Le remarquable travail de Hauchecorne et Boutteville n'eut pas seulement pour conséquence de ramener l'attention sur d'anciennes variétés d'élite que l'on avait délaissées : le Bédan, le Marin-Onfroy, la Peau de Vache, le Fréquin, il incita quelques pépiniéristes de la région rouennaise à entreprendre la création de nouvelles variétés de pommiers à cidre ayant une teneur saccharine de plus en plus élevée. Ceux qui obtinrent les plus intéressants résultats furent Godard de Bois-Guillaume, Dieppois et Legrand d'Yvetot, David de Saint-Clair, Lacaille de Frichemesnil, G. Power de Saint-Ouen-de-Thouberville.

Environ le tiers des variétés de pommiers à cidre, aujourd'hui classées par l'Association française pomoiogique ont été obtenues par ces habiles praticiens (Legrand, Dieppois, David, Dieppois, Godard, Power...) En voici la liste  dont l'Ambrette; Marabot ; Amère Petit Bray,; Bramtot ; Martin Fessart ; Gris-Dieppois ; Antoinette ; Reine des Hâtives ; Médaille d'Or ; Saint-Laurent...  

Malheureusement tous ces sélectionneurs sont aujpourd 'hui disparus et il ne semble pas qu'ils aient été remplacés. » [Chevalier, 1921]

Création d'une école de Pommiers à cidre

« En 1861 la Société d'Horticulture de la Seine-Inférieure songea à constituer sous ses auspices un verger d'expériences, mais il fallut plus de vingt années pour faire aboutir le projet. En 1885, un membre de la Société, M. H. Lacaille, proposa d'adresser un vœu au Conseil général pour demander la création d'une école de Pommiers à cidre ». Le projet put aboutir en 1887 grâce à la cession faite au département par M. Dupré, vice-président de la Société, d'une ferme de 10 hect. 27 ares qu'il possédait à trois lieues environ de Rouen, dans la commune de Quincampoix au triage des Monts-Meslins . Quelques années plus tard l'enclos des porte-greffes comptait déjà 530 arbres et le verger 352. Les distributions de greffes de la Société d'Horticulture commencèrent en 1888. Elles furent d'abord tirées des vergers de M. G. Power et H. Lacaille, et quelques années plus tard des vergers des Monts-Meslins. Les distributions atteignirent 5000 à 6000 rameaux par an et allèrent jusqu'à 12000.

Depuis cette date d'autres vergers modèles pour le pommier à cidre se sont créés en France.

Aux environs de Rouen, outre le verger de Quincampoix, existe la plantation de la Station agronomique de Rouen et son annexe qui vient d'être établie.

Dans la Seine-Inférieure, on connaît encore le verger d'études de M. A. Pestel, situé à Marques.» [Chevalier, 1921]

Ce chapitre a vocation de retracer le parcours de ces artistes, ces semeurs, ses pépiniers nommés comme tels,  qui ont su régénérer des variétés anciennes et dont les travaux préliminaires sont partis de la région rouennaise (De Boisguillaume et du jardin des Plantes de Rouen)  selon  les travaux de Prévost, Boisbunel Dubreuil et Girardin, Sannier et Collette, puis  sous l’égide du président Michelin et de ses deux savants Hauchecorne et De Boutteville, éminents techniciens (confirmé par le botaniste  Auguste Chevallier dans son Histoire et amélioration des pommiers et spécialement des pommiers à cidre, publiée dans le Journal d'agriculture traditionnelle et de botanique appliquée,  Année 1921) - avant d’atteindre les pépiniers de la Société d’horticulture de l’arrondissement d’Yvetot dont les travaux ont été consacrés  à Yvetot où Godard, Legrand et Lacaille ont gagné leur lettre de noblesse et leurs galons de maitres pépiniers de variétés de collection d’élite        

La Société centrale d’horticulture de Seine-Inférieure

Née en 1836 sa fondation tient à un avocat Jérôme Tougard, rappelle B. Percheron dans laquelle il sera président épaulé par N.J. Prévost, vice-président. Son rôle sera d’encourager la culture des fleurs et des fruits. Cette société visite des jardins et conseils les jardiniers. Hormis le développement de la pomme de terre introduite par le rouennais Mustel en 1760, ses premiers axes sont la pomologie, la floriculture et la culture maraîchère.

B. Percheron informe que dirigée par la bourgeoisie libérale rouennaise, une seconde société, le cercle pratique d’horticulture voit le jour en 1844 suite à une « pomme de la discorde » s’opère une fusion en 1858 que dirigera J. Tougard puis plus tard notamment Lucien de Boutteville de 1859 à 1862 ; Pouyer-Quertier de 1868 à 1872 ; Alexandre Héron de 1883 à 1897.

Ces sociétés successives se sont fait connaître du grand public grâce à des expositions organisées chaque année à Rouen. Déjà dès 1840, des horticulteurs marchands et influents ont été remarqué comme Wood, Prévost et Boisbunel

Pour remplacer ces pertes, rapporte B. Percheron la société a cherché à provoquer la création de nouvelles variétés voire d’élite en se tournant vers les spécialistes étrangers tout en se défendant évincer les variétés les plus fragiles ou moins productives. C’est ainsi d’après l’étude de A. Héron les fruits à couteau ont retrouvé la qualité comme le renouvellement par Tougard, Boisbunel, de Boutteville ou Prévost.

Des collections de fruits moulés et coloriés ont complété les notices pour tous les fruits du verger : abricots, cerises, pêches, poires, pommes et prunes pour ces fruits de table. Au début des années 1860, la société se tourne vers l’étude des fruits de pressoir à l’occasion d’une exposition en 1862 qui aura pour but le souligne B. Percheron de donner une nomenclature aux fruits du cidre.

Boisbunel Louis (1783-1856)

« Important horticulteur de Rouen. Il est membre actif de la Société centrale d’horticulture de la Seine-Inférieure, dont il est conservateur des collections en 1860. Il est le créateur de plusieurs poires notamment de la passe-crassane, probablement la meilleure poire rouennaise du XIXe siècle créée à Rouen en 1843 et mise en fruit en 1855. Il est aussi à l’origine des poires Martin de Brie-Comte-Robert, Baronne Leroy ou encore de la Docteur André. La pomme Reinette de Bihorel créée en 1845[5] »

Boisbunel Théodore (1829-1895)

« Théodore Boisbunel continue dès lors seul le travail entrepris. Il exploite l’importance diversité créée en 1845 et 1846 et fait, chaque année, de nouveaux soumis, mais en petit nombre et en utilisant ses « gains » précédents. En 188, il écrit à Léon de La Bastie alors président de la Société Pomologique de France qu’il sème des pépins de poire de la 4e génération. Mais il ne semble pas qu’il ait connu le succès attendu avec ce qui constituait en fait un véritable programme de sélection.

Ainsi, semeurs selon la terminologie alors en usage, les Boisbunel sont les créateurs d’une cinquantaine de variétés (« gains ») dont au moins 43 poires parmi lesquelles, nous pouvons citer les plus connues : « Passe-Crassane », « Olivier de Serres », « Président Mas », « Baronne Leroy », mais aussi d’autres comme « Belle Rouennaise », « Doyenné du cercle », « Louise-Bonne de Printemps », « Milan de Rouen ».   Ils sont à l’origine de 7 variétés de pomme comme la « Calville blond », « Calville Boisbunel », « Reinette de Bihorel », Rouennaise hâtive » et aussi d’une variété de prune.

En 1862, la Société nationale et centrale d’horticulture de France décerne à Théodore Boisbunel sa médaille d’or pour ses fruits de semis. […] En 1869, deux articles signés Boisbunel sont publiés dans la Revue horticole : « Avantage de la greffe intermédiaire » et « Coloris du bois du poirier, etc. correspondant à la couleur du fruit » qui montrent toutes ses qualités d’observateur et de praticien ; […]  Les dernières obtentions de Théodore Boisbunel datent de 1872. En 1882, la Société Pomologique de France lui décerne sa médaille d’or lors de son congrès qui se tient à Rouen. […].

Prévost Nicolas-Joseph (1787-1855)

« Né à Rouen le 27 septembre 1787, Nicolas Prévost, […] dans le domaine de l’horticulture, il s’impose dans les années 1830 et 1840. En 1820, il devient membre de la Société centrale d’Agriculture du département de la Seine-Inférieure[…] En 1836, il prend par activement à la fondation de la Société d’horticulture de Rouen, dont il est vice-président de 1836 à 1849. En 1844, il devient le président d’une nouvelle société locale : le cercle pratique d’horticulture. Au départ d’A. Du Breuil en 1848, il devient professeur d’arboriculture au Jardin des Plantes en enseigne l’agriculture pour le département et l’école primaire centrale. Ces pépinières sont installées à Bois-Guillaume. Il est un des grands cultivateurs de roses de la région rouennaise. Il est l’auteur de nombreuses publications […] Traité pratique d’éducation et de la culture du pommier à cidre dans les départements de l’ancienne Normandie en 1852. »

« Nicolas-Joseph Prévost est né à Rouen le 27 septembre 1787. Tout jeune, il aide son père jardinier-pépiniériste  à Bois-Guillaume (Seine-Maritime). Ce dernier en fera son associé, puis son successeur à la tête de l’établissement familial. S’étant formé sur le terrain où il a développé de rares qualités d’observateur et une grande expérience pratique, c’est en autodidacte qu’il acquiert ses connaissances dans divers domaines touchant à l’histoire naturelle. Il développe avec succès une pépinière familiale et se voue entièrement à l’agriculture et la pomologie dont il deviendra un spécialiste reconnu (De Bavay 1855).  En 1820, il est admis à la Société centrale d’Agriculture du département de la Seine-Inférieure [...]. En 1836, il fait partie des fondateurs de la Société centrale d’Horticulture de Seine-Inférieure dont il sera président. Il y rédige les six premiers cahiers de pomologie de la Seine-Inférieure que la société publiera dans son bulletin, de 1839 à 1850 (sept au total).  Pour ce faire, il étudie et décrit nombre de variétés. Ce travail a d’ailleurs servi de référence à André Leroy qui cite fréquemment Prévost dans son Dictionnaire de Pomologie.

En 1844, […] il crée, à Rouen, le cercle pratique d’horticulture et de botanique afin de permettre à des jeunes gens d’acquérir les connaissances théoriques et pratiques nécessaires pour devenir jardiniers. A partir de 1849, il professe le cours d’arboriculture fruitière au Jardin des Plantes où il succède à Alphonse Dubreuil. […] Il est l’auteur de différents notes et ouvrages. Parmi ceux-ci, citons : Mémoire sur l’éducation et la culture du pommier dans les environs de Rouen (1822), Rapport sur la culture des pommiers américains en Normandie (1834), Notice sur le traité d’arboriculture publié en 1652 par l’abbé Legendre, curé d’Hénouville (1848) (Frère 1860). […] A Bois-Guillaume, dans sa pépinière, il sera l’obtenteur : on lui doit une trentaine de variétés de roses. C’est là qu’il décède le 24 septembre 1855. Prévost, pépinier au Boisguillaume.

 

Sur M. Joseph-Nicolas Prévost, professeur
d'arboriculture au Jardin des plantes de Rouen.

Par M. J. GIRARDIN.

Nicolas-Joseph Prévost, né à Rouen le 27 septembre 1787, est mort le 24 Septembre 1855, à la suite d'une paralysie. A voir cette vigueur de santé, cette activité juvénile qui caractérisaient cet homme éminent dans son art, en connaissant ses habitudes sobres et sévères, personne n'aurait pu supposer qu'en quelques mois une nature si richement douée se trouverait anéantie ! Il est mort véritablement comme le soldat au champ d'honneur, puisque, déjà atteint par la maladie,
il eut encore assez d'énergie pour terminer le cours d'arboriculture qu'il professait au Jardin-des-Plantes. Le sentiment du devoir dominait tellement chez lui qu'il y puisa les forces nécessaires pour maîtriser pendant quelques semaines le mal qui devait l'emporter.
Cette noble fin a dignement couronné une vie qui n'a été qu'une suite d'actes honorables, de durs travaux et de services rendus à la Société. Né dans une position modeste, destiné comme son père, simple jardinier bourgeois, aux rudes labeurs du jardinage, M. Prévost s'est
élevé peu à peu, par une volonté ferme et une louable ambition, jusqu'aux fonctions du professorat, et il a su inscrire son nom parmi ceux des horticulteurs et des agronomes les plus distingués. Des écrits sur la physiologie végétale, la botanique rurale, la floriculture, l'arboriculture, l'art des jardins, lui ont mérité des distinctions flatteuses de la part des Sociétés savantes de Paris et de la province. L'Académie de Rouen se l'était attaché, dès 1824, en qualité de membre résidant, et lorsqu'en 1838, par suite de son éloignement de la ville et de l'accroissement de ses occupations, il crut devoir résigner ses fonctions, l'Académie lui donna une preuve de son attachement et de son estime, en lui décernant le titre de membre correspondant. La Société centrale d'agriculture du département, s'empressa de se l'associer en 1820, peu de temps après la reprise de ses travaux, et en 1833, elle en fit son vice-président ; mais en 1834, il refusa l'honneur de la présider. Il fut un des fondateurs de la Société centrale
d'horticulture de Rouen, en 1836, et jusqu'en 1854, il siégea à son bureau comme vice-président. En 1844, cette Société lui décernait une médaille d'or pour sa collection d'arbres fruitiers. Deux ans auparavant, l'Association normande, siégeant à Rouen, récompensait ses travaux en horticulture et en arboriculture, par une grande médaille d'argent.
 
Mû par un sentiment philanthropique en faveur des jeunes gens qui se vouent au travail pénible de la terre, M. Prévost a créé pour eux, en 1844, le Cercle pratique d'horticulture et de botanique, qui leur offre les moyens d'agrandir leurs connaissances et de joindre de saines notions théoriques à la pratique manuelle de leur art. Président-né de cette excellente institution, notre confrère n'a rien négligé pour répandre , dans la classe des jardiniers, le goût des études scientifiques, et il y est parvenu, car aujourd'hui on peut constater avec satisfaction que les jeunes horticulteurs praticiens sont beaucoup plus habiles et plus instruits que leurs devanciers.
  
A une connaissance parfaite de son art, dans les diverses spécialités qu'il embrasse, M. Prévost unissait un profond savoir en histoire naturelle, et il avait acquis, à force d'études solitaires, le talent d'exprimer ses idées avec une clarté et une originalité de style qui donnaient un cachet particulier à ses ouvrages comme elles en imprimaient un à ses communications verbales. Les leçons d'arboriculture qu'il faisait au Jardin-des-Plantes depuis 1849, où il avait remplacé notre confrère, M. Alphonse Dubreuil, celles d'agriculture qu'il donnait â Sainte-Marie au nom de l'École départementale, ont exercé une grande influence sur les progrès de l'horticulture et de l'agriculture dans notre département

Les petits livres qu'il a rédigés sur l'éducation et la culture du pommier à cidre, sur la culture potagère rustique et facile ; ses instructions sur la culture du maïs en Normandie , comme plante fourragère ; sur l’éducation et la culture des arbres fruitiers pyramidaux, sur les diverses
espèces de rhubarbes cultivées en France ; ses observations sur les différents insectes qui nuisent aux végétaux ; son instructif Catalogue des rosiers, dont il possédait une des plus nombreuses collections ; l'intéressant Album de pomologie, qu'il a composé pour la Société centrale d'horticulture de Rouen ; ses nombreux articles et rapports inscrits dans les recueils de nos Sociétés savantes; tous ces ouvrages, aussi remarquables par le fond que par la forme, ont contribué grandement aussi, de leur côté, à faire avancer la science culturale, et méritent à leur auteur une juste renommée parmi les hommes utiles.

M. Prévost avait encore d'autres droits à l'estime publique ; il était recommandable autant par l'honorabilité de son caractère, sa loyauté parfaite dans les transactions commerciales, que par la bonté de son cœur et par ces vertus domestiques qui font la joie des pères et le bonheur des enfants. L'unanimité des regrets que sa mort a inspirés est la preuve que ses qualités et ses talents étaient bien connus et justement appréciés.
in : Annuaire des cinq départements de la Normandie / publié par l'Association normande 1857 

gallica.bnf.fr

Du Breuil Alphonse (1811-1890)

« Agronome de formation, il professe tout d’abord à l’Ecole d’agriculture de Rouen. Au Jardin des Plantes, il enseigne l’arboriculture et à l’école départementale d’agriculture de la Seine-Inférieure dès 1839. En 1848, il quitte Rouen pour devenir professeur d’arboriculture au Conservatoire national des Arts et métiers. […] Il est à l’origine de la création de la poire Du Breuil père, obtenue au Jardin des Plantes de Rouen en 1851. » Alphonse Dubreuil « Né à Rouen où son père était directeur du Jardin des Plantes, Alphonse Dubreuil est un éminent pédagogue et praticien en arboriculture fruitière. Il ne peut être véritablement qualifié de pomologue, son domaine étant davantage l’arbres que le fruit. Attiré très tôt par l’histoire naturelle et l’horticulture, il vient en 1825 à Paris pour poursuivre ses études au Muséum d’histoire naturelle et au Conservatoire national des arts et métiers. En 1835, il est de retour à Rouen où il enseigne l’arboriculture au Jardin des Plantes et crée la première école pour le soin des arbres fruitiers. Son enseignement est réputé ; dès 1846, il publie un Cours élémentaire théorique et pratique d’arboriculture. En 1848, il s’installe à Paris […] En 1868, il publie Culture des arbres et arbrisseaux à fruits de table. En 1883, il se retire à Lisieux et décède à Avranches où il est inhumé. »

Wandrille Collette (1814-1880) Collette, d, ch. M. Scott, rue d’Elbeuf, 51, Rouen - Collette Wandrille-Sidoine (1814-1880) 

« Pomologue amateur, il anime la société centrale d’horticulture de Seine-Inférieure pendant de nombreuses années. […] il est apprenti jardinier auprès de Prévost, pépiniériste à Sierville. Il a été, par la suite, pépiniériste chez des particuliers [avant d’être nommé chef du carré d’arboriculture du Jardin des Plantes en 1850. Il remplit cette fonction jusqu’en 1857. […] Il est à l’origine de la création de plusieurs variétés de pommes et poires. :. […] dont Wandrille-Sidoine Collette est à l’origine. »

« Wandrille-Sidoine Collette est né le 14 juillet 1814 dans le pays de Caux. Il était l’aîné d’une fratrie de jardiniers (Hyppolite et Edouard), d’où sa désignation dans la bibliographie en tant que Collette aîné (Cercle pratique d’horticulture et de botanique du département de la Seine-Inférieure 1851-1852). Chef du carré d’arboriculture au Jardin des Plantes de Rouen, il habitait 37, rue Hérisson à Sotteville. En 1851, il est préparateur de Léandre Prévost, professeur d’agriculture et d’horticulture au Jardin des Plantes qui est l’auteur d’un traité d’arboriculture fruitière intitulé Vases et gobelets (1900).

Arboriculteur expérimenté, il est aussi, il est aussi expert en fruits. Il est, avec Théodore Boisbunel et Arsène Sannier, membre de la commission de pomologie du Cercle pratique d’horticulture et de Botanique du département de la Seine-Inférieure. […] il participe activement à la reproduction des fruits nouvellement récoltés : moulage puis coloriage […] Ces fruits moulés et coloriés sont ensuite décrits par ladite commission dans le catalogue raisonné du CPHB du département (1851-1852) »

Liste des fruits obtentés par Wandrille Sidoine Collette : Celles décrites dans Fruits de Haute-Normandie : poire Edouard Collette ; poire Hippolyte Collette (en hommage à ses frères (Anonyme 1182) ; poire Collette (issue d’un semis de « Doyenné d’Hiver » réalisé en 1850) ; poire Bergamotte de Rouen (issue d’un semis de Bési tardif (Carrière 1870)) ; celles listées par Benedicte Percheron[14] : poire Président Pouyer-Quertier, poire Souvenir de Madame Collette, , poire Passe-Colmar Delanos, poire Bon-Chrétien-Prévost, poire Barillet-Deschamps, poire Docteur Delafosse, poire Madame Letavernier, poire Président d’Estaintot, poire Sucrée d’hiver ou encore poire Angélique Cuvier

Arsène Sannier : (18..- 19..)

Arsène Sannier  : « Son activité de semeur a commencé dans les années 1850. Il est l’obtenteur de la poire Pierre Corneille, issue d’un croisement de « Beurré Diel » et « Doyenné du Comice » et de plus de 150 autres variétés de poires parmi lesquelles : poire Cardinal de Bonnechose (1884) et poire Boildieu (1892).

Il publie « multiplication des arbres fruitier : méthode de M. Arsène Sannier ainsi qu’une note « Sur les moyens de hâter la mise à fruit des poiriers et pommiers de semis » Il est alors pépiniériste et dessinateur de jardins et installé 1 bis, rue Mare-au-Trou à Rouen. Mais il est surtout spécialiste d’arbres fruitiers dont il est l’obtenteur de « gains » (nouvelles variétés) poire Beurré Henri Courcellespoire Bergamotte Arsène Sannier, poire Souvenir de Sannier père et poire Beurré amandé. Il commercialise en 1907 la poire pierre Curie […]  En 1882, la Société nationale et centrale d’horticulture lui décernera […] sa grande médaille de vermeil pour l’obtention de quelque 155 variétés de Poire (May 1882) et la Société pomologique de France une médaille d’or en 1894.[…] en 1896 : « M. Arsène Sannier s’est acquis à juste titre une réputation européenne par les excellents  fruits qu’il a successivement  obtenus.[…] En 1899, il sera fait officier du Mérite agricole […]. »

Teinturier Michel

Il a été chef de carré de l’école d’arboriculture de Rouen et préparateur au cours de Dubreuil. Il est un des trois membres fondateurs du Cercle pratique d’horticulture et de botanique du département de la Seine-Inférieure.
Wood John  (1804-1882) 

Initialement ouvrier jardinier, il travaille tout d’abord pour le prince de Montmorency, installé au Grand-Quevilly. Il s’installe par la suite marchand-pépiniériste à son compte. En 1836, il participe à la création de la Société d’horticulture de Rouen, dont il est vice-président honoraire à sa mort, puis en 1845, au Cercle Pratique d’horticulture. Il a rempli les fonctions de vice-président et président de cette société. Il est l’auteur de nombreux articles publiés dans des Bulletins du cercle pratique d’horticulture et de botanique du département de la Seine-Inférieure […].»

 

Le dix-neuvième siècle si crucial qui a contribué à sauvegarder et perpétuer les variétés de pommes à cidre, en quelques dates.

 

1811 :

«La maladie qui exerce ses ravages sur les pommiers prenant continuellement de l’accroissement, M. Prévost a voulu approfondir quelles en pouvaient être les causes. Il a pensé avec raison que des vices intérieurs devaient être bien plutôt la source du mal dont on se plaint.»

1835 :

« Les variétés anciennes, dit Van Mons, perpétuées dans leur existence par la greffe ne donnent plus que des arbres malades et des fruits mauvais. C'est de l'excédent de leur vie artificielle à leur vie naturelle que le mal provient. La greffe a prolongé leur existence au-delà du terme que la nature leur avait accordé. En, semant de nouveau, on fait à leur progéniture, commencer une autre carrière de vie, et on ramène l'espèce à ce qu'elle avait été à l'origine. On doit la refaire à neuf, la réhabiliter dans la fraîcheur de sa première jeunesse et la faire revivre à la santé. Cette régénération ne peut se faire au hasard. Il y a pour y réussir des règles à suivre .» [Van Mons, 1835]

1836 :

Edition d'une excursion agricole en France par L. Moll ex professeur d'Agriculture dont son voyage traversa le pays de Caux et le pays de Bray de 1834 à 1835

Louis Constantin Eugène MOLL nait le 22 novembre 1809 à Wissembourg (Bas-Rhin). Son père, Jacques Antoine MOLL, alors âgé de 47 ans, est magistrat de sûreté de l'arrondissement de Wissembourg. (Archives départementales en ligne du Bas-Rhin).

« Depuis la Seine jusqu’au pays de Brai, de Rouen jusqu’au Havre, toutes, soit châteaux, maisons de plaisance ou exploitations rurales, sont modelées les unes sur les autres. Elles sont placées dans une enceinte plus ou moins vaste, une cour comme on l’appelle ici, plantée de pommiers, et entourée d’un fossé derrière lequel s’élève un mur ou rempart de terre large et haut, sur lequel sont plantées trois ou quatre rangées de grands arbres, hêtres, ormes, chênes, etc., d’une belle venue. Cette ceinture garantit les bâtiments, les vergers, les jardins et même les champs, des vents impétueux de la mer. […] Ces enceintes ou cours ont depuis 2 à 12 hectares et plus d’étendue ; elles sont plantées en pommiers sous lesquels croît une herbe touffue qu’on fait pâturer au piquet ou tiers. Des issues sont pratiquées dans le rempart et sont fermées de barrières. Les bâtiments ne sont pas, comme ailleurs, réunis en un seul corps de ferme ; chacun est distinct et occupe remplacement séparé dans la cour. Celle-ci forme ordinairement un carré long. La maison d’habitation est au haut bout ; auprès ou autour se trouve le jardin entouré d’une haie vive, où, suivant l’expressions gracieuse du pays, l’on a réuni quelques roses pour la beauté, quelques pommiers pour la boisson, quelques poiriers pour les amis. » [ Moll, 1836]

1840 : 

« Legrand  fit ses premiers semis de pommiers vers 1840. Son père, auquel il succéda en 1850, était lui-même pépiniériste, favorisant de grandes plantations de pommiers à cidre dans cette commune.»  [Traversat, 2001]

1852 :

« Normands, tous que nous sommes, nous avons quelque peu de cidre dans les veines, c’est une boisson aigre et fermentée et qui quelquefois fait sauter la bonde. » Il dit avoir dans le cœur « l’écume agitée des mers normandes » Lettre à Louise Colet [Flaubert, 1852]

1857

« Le cidre doux en bouteilles poussait sa mousse épaisse autour des bouchons, et tous les verres, d’avance, avaient été remplis de vin jusqu’au bord. » Madame Bovary [Flaubert, 1857]

« Il aimait le gros cidre, les gigots saignants, les glorias longuement battus. » Madame Bovary [Flaubert, 1857]

1861

« Ce que la Compagnie a voulu exécuter pour les fruits de table;, elle a l'intention de le faire également  popur les fruits de pressoir.  » [De Boutteville 1861 ; Héron, 1896]

1871 

« Le roi d'Yvetot, « peu connu dans l'histoire » comme dit la chanson, et que notre poète-chansonnier, Béranger a mis en relief, disait au roi de France : « Sire, je n'échangerais volontiers mes pommes de roquet et de doux-à-l'Agnel  contre les vignes de votre majesté. -Les pommes de Roquet ou de Marin-Onfroy et celles de Doux-à-l'Agnel fournissent un cidre agréable et délicat et sont encore connues et estimées, la dernière surtout, dans la Seine-Inférieure et dans toute la Normandie. »» [Pannier, 1871, Bulletin de la société d'horticulture et de botanique du centre de la normandie, années 1866-1877, pp. 209-229]

1882 :

« On s’assit à deux heures. A huit heures, on mangeait encore. Les hommes déboutonnés, en bras de chemise, la face rougie, engloutissant comme des gouffres. Le cidre jaune luisait, joyeux, clair et doré, dans les grands verres, à côté du vin coloré, du vin sombre, couleur de sang. […] Entre chaque plat on faisait un trou, le trou normand, avec un verre d’eau-de-vie qui jetait du feu dans le corps et de la folie dans les têtes... » Farce normande [Maupassant, 1882]

1883 :

« Il faisait chaud, très chaud, c’était un de ces jours brûlants et lourds où pas une feuille ne remue. On avait tiré la table dehors, sous un pommier ; et de temps en temps Sapeur allait remplir au cellier la cruche au cidre, tant on buvait. » Miss Harriet [Maupassant, 1886]

 

1884  - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 806 507 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1885

1885  - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 1 360 252 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1885

« Une odeur vague de pommes flottait auprès des cours, car c’était où on ramassait les plus précoces, les pommes « euribles » comme on dit aux pays du cidre. » Le père Amable [Maupas6ant, 1886]

1886  - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 669 744 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1887

1887  - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 1 246 914 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1888

1888  - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 805 294 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1889

1889  - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 518 773 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1890

1890  - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 755 222 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1891

1891  - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 454 991 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1892

1892 - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 1 236 117 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1893

1893 - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 1 543 010 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1894

1894 - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 1 339 985 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1895

1895 - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 1 247 848 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1896

1896 - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 1 121 774 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1897

1897 - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 525 917 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1898

1898 - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 571 950 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1899

1899 - Production de cidre en Seine-inférieure en hl : 909 937 In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, 1900

Les pépiniers de la Société d’horticulture de l’arrondissement d’Yvetot dont les travaux ont été consacrés  à Yvetot où Godard, Legrand et Lacaille ont gagné leurs lettres de noblesse et leurs galons de maitres pépiniers de variétés de collection d’élite en  sauvant un tiers des variétés de pommes à cidre.

P.M. Legrand, semeur-pépinier yvetotais

Extraits de l'article paru dans Apples & people du 8 octobre 2022

Copyright © Apples & People 2022 www.applesandpeople.org.uk/legrand M.Legrand , incubateur et créateur du « Michelin » Par Pascal Levaillant et Marie-Thérèse Mériot, Yvetot, septembre 2022

« Yvetot, autrefois l'un des hauts lieux de la pomme à cidre. Yvetot, ancienne principauté jusqu'à la Révolution française, a connu une activité florissante grâce à l'activité textile, grâce aux revenus de la vente en gros et au détail de boissons et liqueurs, au commerce des céréales, à l'activité de ses pépinières. Les cidreries et eaux-de-vie de cidre connurent alors une activité de substitution du XIXe siècle jusqu'au milieu du XXe siècle.

Au 17ème siècle Yvetot a une longue tradition de vente en gros et au détail de boissons et liqueurs, qu'il place vers 1657.

Au 18ème et 19ème siècle

Les pépiniéristes yvetotais ont travaillé sur les souches des variétés de pommes à cidre. On doit à Trudaine et Turgot d'avoir fondé la première Société d'Agriculture dans la généralité de Paris en 1761. Après Paris (1827) suivi de Nanted, Lille, Rouen, Le Havre, viendra la Société d'Horticulture Yvetot -1863. Yvetot possédait une cidrerie. Au 20ème siècle La plupart des pépinières d'Yvetot sont transformées en jardins familiaux, familiaux et privés. Au début du XXIe siècle, dans la cour plantée du manoir du Fay, la Ville d'Yvetot a replanté pommiers et poiriers. Les pépinières d'Yvetot et la célèbre pépinière Legrand, par Michel Traversat Le Pays de Caux est une haute terre d'excellence pour la pomme à pressoir, des arbres fruitiers pour la pomme à cidre, un territoire qui a vu naître Pierre-Michel Legrand "Le "Caux" est un plateau massif plongeant dans la mer par des falaises vertigineuses. Ce pays austère est fréquemment battu par des vents violents. Ces masures fermées sont délimitées par des pentes plantées d'arbres ; elles contiennent à l'intérieur, outre les bâtiments d'exploitation, des prairies plus ou moins grandes plantées de pommiers. Les agriculteurs ont toujours planté leurs arbres. [...] La Société d'horticulture de l'arrondissement d'Yvetot est fondée le 9 décembre 1863. […] En 1865 deux ans après sa fondation, l'entreprise compte comme Monsieur Legrand, horticulteur à Yvetot. (qui devint plus tard conservateur, archiviste en 1877). [...] En novembre 1891, le bureau change. Il est notamment composé de deux horticulteurs (Le Mail, senior (vice-président) et M. Valentin (conservateur et archiviste) et d'un pépiniériste (M. Legrand senior, vice-président).

Lors d'une première célébration d'une exposition horticole en juin 1865, les activités de la Société sont clairement identifiées : "Ayant pour objet l'Horticulture, […] La Société étudie, par analyse et culture, les meilleures variétés de fruits et les multiplie, en particulier les pommes à cidre." » "Monsieur Pierre-Michel Legrand est né à Yvetot en 1821. Il fit ses premiers semis de pommiers vers 1840. Son père, auquel il succéda en 1850, était lui-même pépiniériste, favorisant de grandes plantations de pommiers à cidre dans cette commune. Pierre a repris la direction de l'établissement familial à une époque assez critique et défavorable. Depuis une vingtaine d'années déjà, on constatait en Normandie que certaines espèces de pommiers des plus estimées et des plus répandues connaissaient une sorte de dépérissement progressif indiquant un épuisement par vieillesse. Les Sociétés d'Agriculture et d'Horticulture de la Seine-Inférieure, consultées sur le remède à apporter à cet état calamiteux, étaient d'avis « qu'il faudrait songer à rechercher des variétés nouvelles et jeunes qui pourraient remplacer avantageusement celles qui avaient leur temps est révolu."

L'enquête, qui resta ouverte de 1825 à 1843, permit de consulter un grand nombre de spécialistes, sans grand résultat. Ce n'est qu'en 1862 que la Société Centrale d'Horticulture de la Seine-Inférieure décide d'organiser l'étude sérieuse, approfondie, des fruits de la presse et de faire appel à l'aide dans cette entreprise difficile à tous ceux qui pourraient s'y intéresser. la culture des pommiers à cidre. M. Legrand est de ceux-là : l'unique objet de ses préoccupations est le remplacement de la meilleure des variétés, le Doux à Lagniel ou Vagnon, épuisée et ne donnant plus de bons produits, par une variété de la même espèce, mais régénérée… Ses convictions de semeur paraissent si sincères, si profondes qu'elles convainquent la Société d'Yvetot d'ouvrir, en 1871, un concours spécial de semis de fruits à cidre ; la médaille d'or proposée en récompense sera attribuée successivement à M. Godard, à M. Dieppois, horticulteur à Yvetot et à lui-même. Un peu plus tard, M. Legrand acheta un terrain où il ne planta que les pieds mères de ses gains les plus méritants afin d'obtenir, par hybridation, des variétés hautement perfectionnées. Plusieurs de ses grains sont devenus de beaux arbres, chargés de très beaux fruits. Quelques-uns ont été propagés et sont disponibles dans le commerce. Des travaux d'une telle importance, poursuivis sans interruption pendant plus de trente ans, ne peuvent manquer d'attirer l'attention des sociétés compétentes sur un personnage aussi persévérant.

De nombreuses récompenses lui sont attribuées : de 1862 à 1877, il reçoit 17 médailles. En 1878, à l'Exposition Universelle de Paris, outre la médaille d'or décernée à l'un de ses gains, il est proclamé premier lauréat du Concours International des Fruits de Pressoir. De 1881 à 1888, il y a quatre nouvelles médailles d'or et deux de vermeil. En 1888, M. Legrand est fait Chevalier du Mérite-agricole. Il ne croit pas devoir se reposer sur ses lauriers ; une nouvelle série de succès s'ouvre devant lui de 1890 à 1896, à l'occasion de l'obtention de variétés d'élite ; il se termine par une dernière médaille d'or décernée par la Western Pomological Association. M. Legrand décède le 2 novembre 1896, âgé de 75 ans. Son fils, ancien élève de l'Ecole d'Horticulture de Versailles, continuera à entretenir la juste réputation acquise par son père. Les variétés composant sa collection d'élite se retrouvent à sa mort un peu partout en France. Ils font également partie de la plupart des vergers conservatoires d'Angleterre, d'Autriche, de Belgique, de Hollande, d'Espagne, de Suisse, du Luxembourg et de certains États américains. Dans l'Histoire et l'amélioration des pommiers et surtout des pommes à cidre, par M. Aug. Chevalier, l'auteur insiste sur le rôle joué par Bouteville et Hauchecorne dans l'amélioration des pommes à cidre tout en insistant sur le rôle déterminant de la chimie appliquée au procédé de faire du cidre. Le rôle d'Hauchecorne, pharmacien d'Yvetot [1824-1905] « La Normandie est actuellement le centre pomicole le plus important du monde. Cette culture ne vise pas ici à produire des fruits de table, des compotes, des fruits secs ou du vinaigre, mais elle tend presque exclusivement à la production d'une boisson hygiénique, le cidre, largement consommé dans les provinces françaises qui font peu ou pas de vin, c'est-à-dire la Normandie, la Bretagne, le Maine, l'Artois […] Douze départements produisent chacun plus d'un million de quintaux de pommes chaque année pour la fabrication du cidre, ou accessoirement par distillation du cidre, la préparatiod du eau-de-vie de cidre ou calvados.

Les autres pays du globe qui fabriquent du cidre sont en Angleterre : les comtés du Herefordshire, du Devonshire, du Pays de Galles ; en Espagne : le Pays Basque (Biscaye, Navarre, Guipuzcoa) et la Castille ; en Allemagne […] Vers 1840, la Société d'Agriculture de la Seine-Inférieure doit faire face au déclin, malheureusement trop flagrant, d'un grand nombre de variétés anciennes de fruits de presse... Elle envisage des recherches urgentes qui doivent avoir pour objet d'indiquer à la cultivateurs les variétés à réformer et celles qui méritaient d'être propagées. […] « La très active Association Pomologique de l'Ouest a été créée en 1883. De nombreux auteurs ont contribué à dresser, vers la fin du XIXe siècle, l'inventaire des fruits de pressoir. Parmi les plus importants figurent : de Chambray (1765), Renault (1795), Dubois (1804), Odolant Desnos (1829), de Brebisson (1858) et surtout de Boutteville et Hauchecorne (1875), Hérissant (1893), Power (1893), Truelle (1895), Ragaine (1900), Lecoeur (1914), Warcollier (1920). Il faut aussi mentionner les noms de certains pépiniéristes qui ont très bien propagé les bonnes variétés, comme Chasset, Baltet, qui a beaucoup publié, Godard, Legrand, Lacaille, Baumann, Boisbunel, etc. »

Malheureusement, aujourd’hui, il n’y a plus de pépinière Legrand à Yvetot, mais l’héritage de Pierre-Michel se poursuit dans les variétés de pommes à cidre qu’il a élevées à partir de graines il y a plus d’un siècle et demi, dont la pomme Michelin prééminente.

En France, en Seine-Maritime par exemple, nous avons récemment trouvé la Michelin de Legrand avec des propriétaires comme M. et Mme Monville de Thérouldeville près de Fécamp et nous espérons l’observer bientôt aussi dans le verger conservatoire de Brémontier-Merval dans le Pays de Bray et ailleurs, in : domainemervalasso.fr -  De l’autre côté de l’Atlantique, le comté de Charlevoix tente aujourd’hui d’établir au Canada à Petit-Rivière-Saint-François de nouvelles variétés de pommes à cidre, dont celles du Pays de Caux dont Bramtot, Michelin de Legrand et Médaille d’Or de Godard, un autre pépiniériste de l’ancienne Seine-Inférieure. In: www.crammirabel.com - In : cjoliprsf.ca - Pour conclure, nous essayons maintenant de compléter l’histoire du voyage de la pomme Michelin en Allemagne, aux Pays-Bas, en Autriche, en Espagne... et surtout dans son lieu de création à Yvetot, il y a près de 150 ans, où elle reste peut-être très discrete dans un verger ou dans une cour à l’abri des regards.

La recherche continue ... .»

A ce texte pûblié par Apples & people on peut ajouter ceci : 

  • « Les Archives départementales de la Seine-Inférieure nous apprennent qu’en 1851 un certain Legrand Clément est jardinier âgé de 70 ans, né au siècle dernier. Il est encore cité dans une autre archive[2]  qu’il exerce en 1841 au quartier de Sainte-Marie et qu’un dénommé Legrand Xavier est jardinier au quartier Sainte-Marie à Yvetot, endroit que l’on retrouve sur le cadastre du début du 19e siècle à l’endroit de plusieurs pépinières indiquées ainsi sur le plan. Ces terres appartenaient déjà en 1566 à un dénommé Legrand, cité par L.A. Beaucousin dans sa transcription du terrier de la principauté d’Yvetot lorsqu’il indique que ce sieur avait des terres près de Sainte-Marie-des-Champs.

 

Pierre Michel Legrand a repris la direction de l'établissement familial à une époque assez critique et défavorable. Depuis une vingtaine d'années déjà, on constatait en Normandie que certaines espèces de pommiers des plus estimées et des plus répandues connaissaient une sorte de dépérissement progressif indiquant un épuisement par vieillesse.

  • En 1869, et repris en 1871, M. Michelin insiste dans son compte d’exposition de fruits de table et de pressoir à Yvetot (Seine-Inférieure) sur le rôle qu’il a joué dans la régénération des pommes à cidre : « M. Legrand, pépiniériste à Yvetot, dévoué à la cause de la boisson normande, a eu la bonne pensée de faire, au moyen de grands sacrifices, de nombreux semis en vue de recueillir des variétés de fruits bonnes, fertiles, vigoureuses et, à ce titre, propres à remplacer utilement d’anciennes variétés de premier choix dont les arbres s’affaiblissent et finalement que les cultivateurs renoncent à planter. Ces fruits composent un lot dont plusieurs échantillons ayant été appréciés seront recommandés aux planteurs. M. Michelin signale que pour lui, loin de luis la pensée de soulever à cette occasion la question débattue de la dégénérescence des arbres fruitiers propagés par la greffe ; mais il ne peut s’abstenir de citer comme preuve de l’utilité des semis un fait constaté par les cultivateurs d’arbre à cidre, l’appauvrissement de certaines variétés auxquelles on est obligé de renoncer et qu’il importe par conséquent de remplacer.
  • En 1871, Paul-des-Héberts est président de la société d’horticulture d’Yvetot.
  • En 1871, Au concours, M. Legrand reçoit une médaille d’argent grand module pour fruits de table sur arbre à haute tige et une médaille d’argent pour la collection la plus correctement nommée de pommes à cidre de première qualité.
  • En 1876 Pierre Legrand habite rue des Victoires à Yvetot
    • Un peu plus tard, M. Legrand acheta un terrain où il ne planta que les pieds mères de ses gains les plus méritants afin d'obtenir, par hybridation, des variétés hautement perfectionnées. Plusieurs de ses grains sont devenus de beaux arbres, chargés de très beaux fruits. Quelques-uns ont été propagés et sont disponibles dans le commerce.

      Le BEDAN-DES-PARTS, fut une variété nouvelle, obtenue de semis par M. Legrand. Cette variété a pris cette dénomination tirée de la ressemblance du fruit nouveau avec le Bédan et Clos-des Parts, dans lequel l’obtenteur a cultivé jadis ses gains les plus précieux, rue Clos-des-Parts dans une pépinière déjà décrite et identifiée dans le plan napoléonien d’Yvetot de 1808. -  Gain : en horticulture « rose nouvelle, venue de semis et consacrée par deux greffes successives ». Par extension, le terme convient à tous les végétaux. - Larousse, en 2 vol.-1922.

      La rue Clos des Parts à Yvetot : ce nom de rue d'Yvetot où grandit Annie Ernaux a été donné en hommage à l'hurzeux donateur Asselin des Parts qui  contribua à la création de l'Hospice d'Yvetot nommé Hospice Asselin Hedelin  en 1816 dans le quartier dit Clos des Parts.

      ASSELIN  Louis Jules, en 1785    Chevalier Desparts, Seigneur de Chant d'Oisel.

      En effet comme nous l'expose Laurence Abensur - Hazan dans son ouvrage YVETOT, mémoire en Images : 

      « l'Hospice Asselin porte  le nom de son fondateur Louis-Jules Asselin-Desparts, qui habitait Neuville-Champ d'Oisel, mais qui avait été temoin de la classe indigente et malheureuse d'Yvetot [Fromentin, 1844] qui par son legs de 100  000 francs décidé en 1816, permit sa création. Par une ordonnance du 7 mars 1817, Louis XVIII chargea le maire d'Yvetot, monsieur le baron Delallande, de veiller à ce que l'hospice obtienne bien la propriété de tous les objets compris dans le legs  fait par son fondateur. L'hospice fut dans un premier temps fondé dans la maison d'un sieur Isaac, rur Clos du Manoir, mais le nombre de malades ayant rapidement augmenté, il fut vdécidé d'acquérir en 1820 l'auberge à l'enseigne A la Ville de Rouen, située rue du Calvaire, dans laquelle l'hospice fut transféré. Devenu à nouveau trop petit eu égard au nombre de malades, un bâtiment  fut finalement construit et achevé en 1841 sur un terrain appartenant à son fondateur, au bord de la roure relaint Le Havre à Rouen.» (Abensur, 2007]

  • Les variétés composant sa collection d'élite se retrouvent à sa mort un peu partout en France. Ils font également partie de la plupart des vergers conservatoires d'Angleterre, d'Autriche, de Belgique, de Hollande, d'Espagne, de Suisse, du Luxembourg et de certains États américains.

Liste des variétés  obtenues par Pierre Michel Legrand répertoriées dans les catalogues de pommes à cidre :

1- Ambrette, obtenue de semis en 1873 ou (1869, Boré à Fleckinger) par M. Legrand, pépinièriste à Yvetot, in :  le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.225. ; selon Lecoeur Ambrette (Power) affinité avec la Bisquet et la Bramtôt selon Lecoeur, 1914

2- Argile-Nouvelle, variété nouvelle, semis de M. Legrand, pépiniériste d’Yvetot, vers 1870, in : le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.177.

3-Bédan-des-Parts, variété nouvelle, semis de M. Legrand, pépiniériste d’Yvetot, vers 1872 et vers 1869 (Boré et Fleckinger), in :  le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.201. ; Bedan des parcs (Power) origine habitat, répandue un peu partout (Seine-Inférieure) affinités : ressemble un peu au Bedan ordinaire in Lecoeur, 1914.

4- Belle-Cauchoise, variété nouvelle, semis de M. Legrand, pépiniériste d’Yvetot, vers 1863-1868 (1865, Boré et Fleckinger), in :  le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.211. et Culture du pommier, meilleures variétés,  Power 1893, p.9. ; La Belle Cauchoise Origine habitat : régionale : Seine-Inférieure, affinités de la Variété : se rapproche beaucoup du Binet rouge in : Lecoeur 1914.

5- Bonne-Amère, semis Varin, propriétaire à Yvetot, 1870, in : le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.199.

6- Boutteville, semis de M. Legrand, pépiniériste, in : Atlas Truelle, p.17. ; affinités de la Variété : variété intermédiaire entre les Bedans et la Bisquet, In : Lecoeur 1914.

7- Binet-Gris, semis de M. Legrand, pépiniériste d’Yvetot, vers 1870, (1868 pour Boré Fleckinger) in :  le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.185.

8- Bramtôt, obtenue de semis par M. Legrand, Yvetot, très répandue chez les propriétaires qui tiennent de bonnes variétés, in : Atlas Truelle, p.19. et in : traité de la culture du pommier et de la fabrication du cidre, par G.Power, Paris, 1893, p.17. ; Boré et Fleckinger (Legrand 1872) ; Bramtot (Power),  Originaire de la Seine-Inférieure, (Pays de Caux) propagée un peu partout, affinités de la Variété : se rapproche beaucoup de la Martin Fessart et de la Bisquet, in Lecoeur 2014.

9- Hauchecorne, Origine, habitat : Seine-Inférieure, affinités de la Variété : les plates avec les Bédans, les obconiques avec les Bisquets in Lecoeur 1914. Affiliée à Legrand, pépiniériste à Yvetot (Truelle ou le cidre d’Hauchecorne).

10- Marabot, obtenue de semis par M. Legrand, pépiniériste à Yvetot (76) vers 1868, Boré Fleckinger ; Marabot (Power), Origine, habitat : variété obtenue de semis par M. Legrand, pépiniériste à Yvetot (1868), affinités de la Variété : appartient au groupe du Bédan in Lecoeur 1914.

11Marie-Legrand, in : ADM BREMONTIER MERVAL

12- Michelin, obtenue par M. Legrand, pépiniériste à Yvetot, in : Atlas Truelle, p.64-65. ; Boré et Fleckinger ; Michelin (Power), origine, habitat : Seine-Inférieure, porte le nom d’un distingué membre de l’Association pomologique, affinités de la Variété : appartient au groupe des Bouteilles, in Lecoeur 1914 (cette variété ressemble beaucoup à la Petite Bouteille dont elle diffère surtotu par le cercle bistré autour de l’œil qui manque à cette dernière ; Michelin (la Lozière), in : ADM BREMONTIER MERVAL

13- Peau-de-Vache-Nouvelle, ou régénérée variété nouvelle obtenue par M. Legrand, pépiniériste à Yvetot, d’un semis dans lequel entraient des pépins de Peau-de-Vache, 1873, In : : le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.241 et in : Atlas Truelle, p.69-70, in : ADM BREMONTIER MERVAL   

14- Pomme-Bramtot, fruit nouveau, semis de M. Legrand, pépinièriste, Yvetot, 1866, dédiée pat l’obtenteur à M. Bramtot, propriétaire manufacturier à Yvetot, in : le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.213.

15- Pomme-Marabot, variété nouvelle obtenue de semis de M. Legrand, pépinièriste à Yvetot, 1868, dédiée par l’obtenteur au trésorier du Congrès, in : le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.223.

16- Pomme-Ridel, semis de M. Legrand, pépinièriste, Yvetot, 1870, in : le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.195.

17- Rosine, variété nouvelle, semis de M. Legrand d’Yvetot, 1873, in : le cidre Boutteville-Hauchecorne 1864-1872, p.191 et in : Atlas Truelle, p.73. ; Rosine (Power), Origine, habitat : dont Seine-Inférieure, affinités de la Variété : groupe des Fréquins doux, in Lecoeur 1914 ;

18- Rossignol, obtenue par semis de M. Legrand, plantée en verger vers 1880 et 1881, in : Atlas Truelle, p.39. et Culture du pommier, meilleures variétés,  Power 1893, p.3. ; Rossignol (Power), Origine, habitat : Seine-Inférieure, affinités de la Variété : groupe des Rousses amères, in Lecoeur 1914 ;

Dans tous le pays de Caux y compris à Goderville :  1851 

 

A propos des arbres à cidre et des maladies qui impactent certaines variétés.

Quelles sont les variétés de pommiers et de poiriers cultivées de préférence ?

On cultive, généralement, trois espèces de pommes : les tendres, les demi-tendres et les tardives ; mais c'est surtout l'espèce demi-tendre qu'on préfère. Une excellente variété était, autrefois, la peau-de-vaehe; mais, le puceron laniger l'ayant pour ainsi dire détruite, on a été forcé d'abandonner sa culture.

M. Guilmard indique, comme remède au puceron laniger, le passage sur le tronc de l'arbre, au printemps, d'un pinceau enduit d'huile de poisson.

Il signale aussi, comme moyen efficace de préservation, l'introduction sous l'écorce de l'arbre d'une solution de sulfate de potasse.

M. Corbière cite encore l'eau-de-vie camphrée comme produisant d'excellents résultats.

M. Girardin pense que ces moyens sont inapplicables en grande culture. Il croit que le flambage, employé avec précaution, est le moyen le plus prompt.

M. Mabire propose un moyen tout aussi économique moins dangereux, mais seulement applicable aux jeunes arbres : c'est le badigeonnage du tronc avec un lait de chaux.

Où doit-on les placer ? dans les herbages ? dans les terres labourées? sur le bord des routes ?—A quelle distance doit-on les mettre les uns des autres ? - Comment les préserve-t-on de l'atteinte des bestiaux ?- Comment planie-t-on, et quels soins donne-t-on dans le jeune âge des arbres ?

M. Guilmard pense que le meilleur mode de garantir les arbres de l'atteinte des animaux consiste à les entourer de trois lattes en chêne, armées chacune de trois pointes, faisant saillie en dehors d'environ 15 millimètres. Cette armure a l'avantage de ne coûter que 40 centimes, et de préserver surtout l'arbre de la morsure des animaux.

Plusieurs membres des départements voisins combattent ce système comme inefficace. Ils lui préfèrent, bien que le prix soit de beaucoup supérieur (environ 8 fr. par arbre),
une armure composée de trois pieux en chêne, reliés entre eux par des chevilles. 

C'est dans les herbages qu'on place principalement les pommiers ; on a renoncé à les planter dans les terres labourées.

La distance entre chaque arbre ne doit pas être moindre de dix à quinze mètres, suivant la nature du sol.

M. de Moy craint que la chute des feuilles ne fasse tort à la production et à la qualité des herbes. Il voudrait qu'on prît l'habitude de les ramasser lorsqu'elles viennent à tomber, pour en faire des terreaux, qu'on rapporterait plus tard sur les herbages.


In : Annuaire des cinq départements de la Normandie / publié par l'Association normande Association normande. 1851

 

 

Les pépiniéristes de l’arrondissement du Havre par Michel Traversat

1844 - 1875

Extraits : 

« Les premières pépinières à être visitées par la Société de Rouen, le furent à partir de septembre 1844.

François Louvel

« En 1844 ce pépiniériste de Fécamp a une surface de quatre hectares où il fait la culture des arbres forestiers, fruitiers et d’ornement. Il s’occupe de l’amélioration des arbres fruitiers au moyen de semis. Nous avons vu un semis assez nombreux de poiriers à couteau et de pommiers à cidre. En 1851 il possède des cultures sur 5 hectares où il se livre avec succès non seulement au semis des arbres fruitiers mais aussi à d’autres. […] Huit ans plus tard en 1862, M. Louvel soumet à l’examen de la commission, ses importantes cultures qui couvrent 7 hectares. Là tout s’y rencontre, arbre fruitiers forestiers… [Traversat, 2001]

Duval

M. Duval est pépiniériste à Bolbec. Sa pépinière, en 1844, est étendue d’un hectare et demi comprenant notamment des arbres fruitiers dont quelques fruits à couteau peu entretenus dans un espace restreint. En 1851, Ses cultures sont étendues à 4 hectares où se cultivent des pommiers à cidre. De jeunes pommiers à cidre d’un an de greffe sont de très bonne tenue.

Lemetais

M. Lemetais est pépiniériste à Bolbec. En 1851, ses cultures sont en mauvais état mais en 1859, sur ses 80 ares sont cultivés un carré de 900 pommiers à cidre ; 158 sujets du pays, greffés en tête, à 2 m. ; 650 pieds dits bas-normands, greffe en tête de deux ans ; 80 poiriers, greffe en tête, d’un an, très beaux ; un carré de poiriers de semis âgés de cinq ans ; 140 pommiers de semis, environ, âgés de sept et huit années. […] et des arbres de haute futaie…

Jacques Hattenville

M. Jacques Hattenville est pépiniériste à Ingouville.

Viste en 1844, sont cultivés des arbres fruitiers et des légumes. En 1851, sont cultovés des arbres sur cognassier et élevés par lui.

Victor Eude

Les pépinières de M. Eude occupent au Havre une étendue de 171 ares en trois parties dont celle rue ds Bourdaloue et du Commerce, contiennent un choix considérable d’essences fruitières de 25000 sujets : abricotiers, cerisiers… et cognassiers et dont 140 variétés de poiriers, 20 de pommiers, 9 de pruniers […].

Jouvet Adolphe Père

Jouvet, Adolphe a l’une des pépiniéristes les plus remarquables de ce canton de Montivilliers. Âgé de 80 ans en 1851, ce patriarche de l’horticulture cultive essentiellement des plants forestiers.

Jouvet Adolphe, fils

Jouvet, fils a ajout » un terrain en côte, à 6 kilomètres de Montivilliers planté de 25000 pieds de poiriers et pommiers francs et du même nombre de pieds d’arbres forestiers.

En 1854, visite à Montivilliers er à Notre-Dame-du-Bec des 25000 sauvageons de pommiers, 12000 semis de hêtres et de chênes, 400 belles tiges de pommiers greffés en tête offrant une peau claire et lisse, véritable indice de la vigueur des arbres.

En 18689, la nouvelle visite d’environ 300 poiriers greffés sur franc à haute tiges, en greffe d’un an, remarquables pour leur vigueur […]  Un carré d’environ 250 pommiers, fruits de table. L’établissement est bien pourvu en pommiers à cidre et arbres d’ornements et divers autres propres aux plantations agricoles. […]

Varet

M. Varet est pépiniériste au Havre rue Clovis où se trouvent un carré de pyramides de poiriers, plantés en baliveau d’un an en février 1859. Dans un autre enclos les allées sont bordées de pommiers en cordons horizontaux et d’abricotiers en contre-espaliers. »

Les Pépiniéristes de l'arrondissement de Dieppe

Michel Traversat signale que les pépiniéristes sont rares dans cet arrondissement au mitan du 19e siècle.

Extraits :

« La commission en visite deux à Avremesnil, canton de Bacqueville, en 1849.

 

Bourdon, père et fils

Elles contiennent 250 centiares. Elles ont été retrouvées parfaitement tenues et dans un état de propreté très satisfaisant, quoique nous ne fussions pas attendus.  Dans les espèces cultivées en plant sont les arbres dont les pommiers à cidre, les poiriers.

La société reconnaissant l'excellente direction de cette pépinière, décerne à M. Bourdon une médaille d'argent de grand module

M. Couplet est le successeur de M. Bourdon, pépiniériste à Avremesnil. Son exploitation est visitée le 5 octobre 1856

Sa pépinière de 3 ha. est une des plus importantes de département pour l'élève des pommiers à cidre et de plants forestiers

 

M. Alexandre :  La seconde pépinière est exploitée par M. Alexandre ; elle est visitée le même jour en 1849. »

1883 La tenue des congrès pomologiques cessa en 1872, mais fut reprise en 1883

L'étude des fruits à cidre est surtout fructueusement poursuivie depuis l'année 1862.

A cette date, la Société centrale d'Horticulture de la Seine-Inférieure résolut de l'entreprendre afin de répandre les meilleures d'entre eux et organisa depuis, à cet effet, des congrès annuels pour cette re-
cherche. Les travaux de ces congrès furent réunis en un traité d'ensemble : Le Cidre, par Boutteville et Hauchecorne.

Il en résulta une féconde émulation. Les variétés anciennes les moins intéressantes furent abandonnées au profit des meilleures, et d'habiles cultivateurs s'efforcèrent de produire, par semis et sélection, des variétés nouvelles améliorées.


L'Association pomologique de l'Ouest, qui devint, en 1897, l'Association française pomologique pour l'étude des fruits de pressoir et l'industrie du cidre. Elle publie chaque année plusieurs bulletins.

Parmi les variétés classées et recommandées par cette Association, le tiers environ a été obtenu dans le cours des soixante dernières années par des semeurs de grand mérite, tels que : Legrand, d'Yvetot, auquel on doit les variétés Ambrette et Marabot; Dieppois, d'Yvetot, qui a obtenu Amère-Petit-Bray (ou Martin-Fessart), Binet-blanc, Binet-rouge, Fréquin, Grise-Dieppois, Muscadet, Reine des hâtives, etc.; par Godard, de Bois-Guillaume, obtenteur de Médaille d'or ; par Power, de Saint-Ouen de Thouberville, auquel on doit la pomme Saint-Laurent. Citons encore parmi les pépiniéristes de la région rouennaise qui se sont distingués dans cette
même voie : David, de Saint-Clair ; Lacaille, de Frichemesnil, etc.

D'autres pomologistes se sont appliqués à l'étude des variétés, du point de vue de leur composition chimique, de leur classification, de leur culture ; parmi eux figurent au premier rang : Lechartier, Power, Truelle, Andouard, Hérissant, Mésange de Beaurepaire, Lecœur, Jourdain, Brioux, Warcollier, etc.

 

H. Lacaille, qui commencé à cultiver le pommier dans les années 1850 et F. Lacaille, semeurs pépiniers tous deux originaires de Belleville-en-Caux, se sont installés par la suite aux Authieux puis à Frichemesnil - Ormesnil.

 

(en construction)

Année 1884, année du rapprochement anglo-normand à Yvetot, grâce à la pomme à cidre

« Il y a, dans nos vergers, près d'une vingtaine de ces pommes dites normandes, et plusieurs de ces variétés sont devenues bien connues dans tout le comté et sont très appréciées. C'était décidé à les comparer aux vraies pommes de Normandie. [Hererfordshire]

Cette année (1884), un grand Congrès des Sociétés Pomologiques de France a été annoncé se tiendra à Rouen. La Société pomologique de France, en collaboration avec l'Association pomologique de l'Ouest a décidé de tenir sa Session à Rouen du 2 au 12 octobre ; avec la coopération de la Société Centrale d’Horticulture de la Seine-Inférieure, et d’autres Sociétés apparentées des départements de la Manche, d'Ille et Vilaine, etc.

Expositions des fruits de table et des fruits vintage ont également eu lieu, y compris le cidre et tous les autres produits du verger et machines de verger. Une invitation a été envoyée au Woolhope Club pour assister au Congrès […] et le Dr Bull de Hereford, a été nommé pour représenter le Club à Rouen et comparer les fruits du Herefordshire avec ceux de la Normandie. […] Son succès a été le plus gratifiant, et, comme on le verra, une médaille d'or a été décernée au fruit de table du Herefordshire ; une Médaille de bronze au Fruit du Verger ; une Médaille d'Argent Vermeil au Cidre de fruits mélangés, et une Médaille d'Argent au cidre fabriqué à partir d'une seule variété de pommes, et une grande médaille d'argent a également été décernée à un tas de raisins noirs d'Alicante du château d’Eastnor. […]

La comparaison des Fruits du Verger des deux pays concerne plus immédiatement La Pomona du Herefordshire. Les travaux du Comité ici, ont également été très efficaces et pratique. Ils ont prouvé dans la mesure du possible, que les pommes dites normandes Les Herefordshire ne sont pas vraiment des fruits normands […] La conclusion donc est que partout où le nom « normand » a jusqu'ici été attaché à un préfixe descriptif, il doit être immédiatement changé en « Hereford […] Les variétés suivantes, qui étaient exposées à Rouen perdront donc leur appellation normande […]

Le grand soin avec lequel le Comité s'est acquitté de sa prochaine tâche très importante, qui de sélectionner certaines des meilleures pommes normandes à introduire dans le Herefordshire […] Les pommes qu'ils ont sélectionnées sont Rouge Bruyère, Bramtot, Médaille d'or, Bedan-des Parts, Michelin, Argile Grise, De Boutteville, et Frequin Audièvre. […]

Les Vergers à travers la Normandie - tels qu'observés lors de longs trajets dans plusieurs directions sont bien entretenus, et la grande étendue de jeunes vergers plantés était très remarquable. C'est dit que l'offre de fruits à cidre est encore bien en deçà de la demande, en raison en grande partie de l'étendue du phylloxéra dans la vigne ; que ce soit de cette cause, ou de changements dans Commerce agricole, l'augmentation des pommiers semble être devenue une nécessité sur le domaine des propriétaires fonciers de l'Ouest de la France, et plus particulièrement de la Bretagne.

Avec l'aimable collaboration de Monsieur A. Hauchecorne (l'un des éminents auteurs de la grande œuvre française « Le Cidre » ; M. Michelin, de Paris (l'un des premiers promoteurs du Congrès nommé par le Gouvernement français pour l'étude des fruits à cidre) ; Monsieur Heron (Président de la Société Centrale d'Horticulture de la Seine Inférieure) ; M, Legrand, pépiniériste à Yvetot ; M. Lesueur, de Rouen ; et autres vignerons normands de Fruits à Cidre ; votre Comité a sélectionné huit variétés, qui répondent à toutes les exigences mis à leur disposition.

Des spécimens de leurs nombreux fruits ont été achetés de Normandie et ils ont été dessiné et coloré par Miss Bull sur la planche d'accompagnement pour illustrer leur détail la description. »

1884, Les pommes à cidre anglaises venues d’Yvetot - Extraits

Michelin, la mère française de l’industrie du cidre anglais

« Suite au succès des grandes expositions de pommes et de poires à Hererford et à Londres en 1883 et à la compilation de la splendie Herefordshire Pomoma, trois messieurs ont été envoyés à Rouen en Normandie, en France, pour représenter le Hereford’s Woolhope Club au Congrès des Sociétés Pomologiques de France. Le 8 Octobre 1884, MM. Hogg, BULL ET Piper rendirent compte au Woolhope Club des tâches qui leur avaient été confiées. […] pour savoir si les pommes qualifiées de « normandes » dans le Herefordshire étaient bien des variétés françaises. Ils n’ont trouvé aucune similitude concluant que « Norman » avait simplement été une terminologie mal utilisée pour décrire une pomme sauvage dans le Hereforshire […] Mais surtout, ils ont sélectionné huit des meilleures variétés de pommes à cidre des vergers normands pour les ramener à la plantation dans le Herefordshire. Sélectionnées pour la qualité de leur jus, leur croissance robuste et vigoureuse et leurs fruits à maturité tardive, les pommes ont été peintes par Elizabeth Bull et forment une assiette distincte dans le Herefordshire Pomoma.

L’un des huit, Michelin, est devenu la pomme à cidre par excellence du XXe siècle.

Michelin était à l’époque une plantation récente issue de semis par le pépiniériste Pierre Michel Legrand (1821-1896) à Yvetot en Normandie. Il a d’abord porté ses fruits en 1872, une pomme à cidre moyennement douce-amère avec une petite forme conique colorée de vert à jaune et rougissant lors de la maturation et du roussissement et des taches sur la peau. Sa valeur était déjà reconnue en France.

Il porte le nom du pomologue parisien Henri Michelin (vers 1810-1898) qui fut président du comité d’arboriculture de la Société nationale d’horticulture de France et conservateur en charge de ses collections.

« C’est une pomme du plus haut mérite et elle mérite bien une culture extensive »

Expert français du cidre Louis-Achille Hauchecorne d’Yvetot, cité dans le Herefordshire Pomoma.

 

Trouvé pour être très productif et annuel, c’est en fait dans le Herefordshire plutôt qu’en France que Michelin a ensuite été largement planté, devenant le pommier à cidre le plus populaire dans les vergers de brousse au Royaume-Uni. […] Derrière l’histoire de Michelin et des filles, il y a un rappel de la relation étroite entre les pommes et les gens et le soin et l’enregistrement nécessaires pour garantir l’authenticité d’un arbre greffé. Le Développement des test génétiques permet aujourd’hui aux scientifiques d’aider à démêler l’histoire de la pomme. […] l’analyse du génome de la pomme montre qu’au moins certaines des pommes Michelin cultivées au Royaume-Uni ne sont pas identiques à la pomme Michelin française, mais plutôt à une variété française plus ancienne, Bisquet, qui pourrait être un parent de Michelin. Comment et quand les variétés ont été confondues est perdu dans la nuit des temps. La recherche se poursuit grâce à la collaboration de scientifiques en génétique et d’experts en pommes du monde entier. […].

1885, Congrès des fruits à cidre, à Yvetot, ville normande

« Congrès des fruits à cidre.
La Société fondée à Caen le 11 novembre 1864, pour l’étude des fruits à cidre, doit tenir sa septième session à Yvetot (Seine-Inférieure), du dimanche 15 au mercredi 18 octobre, sous les auspices de la Société pratique d’horticulture de cette ville. L’association, après avoir soumis à son examen les fruits de diverses contrées productrices, de la haute et de la basse Normandie, de la Bretagne et de la Picardie, ne pouvait mieux faire que de porter son attention sur les produits de l’arrondissement d Yvetot. La réunion dans cette ville normande était d’ailleurs provoquée par une Société d’horticulture, qui s’est particulièrement occupée des fruits de pressoir et compte dans son sein un chimiste distingué, M. Hauchecorne, qui a lui-même entrepris une série d’expériences dans le but de savoir, en analysant les bonnes boissons, quelles doivent être les conditions à rechercher dans les fruits destinés à les fournir et quels sont les meilleurs moyens à employer pour extraire les jus, comme les soins à donner aux boissons préparées pour les conserver. Il paraît raisonnable dans cette circonstance de ne
pas marcher au hasard ou de se reposer uniquement sur l’influence du sol, et tout porte à croire que des études éclairées par la science et les observations judicieuses des praticiens, aideront les cultivateurs à planter des variétés d’arbres qui en produisent beaucoup de fruits, contiennent les éléments essentiels pour la formation des jus : ils devront aussi fixer les personnes qui brassent sur les procédés les plus avantageux pour la fabrication des boissons. Le programme des questions à traiter est le suivant :

Quelles actualités recherche-t-on dans les pommes et poires destinées au pressoir ?

Quelle est l’influence du terrain sur la qualité des fruits ?

Emploie-t-on les pommes acides ou sures ?

Dans quel cas le fait-on ? Dans quelles proportions ?

Quels avantages ou quels inconvénients présente leur emploi ?

A-t-on essayé d’obtenir du cidre des pommes de table ; quel a été le résultat de ces essais ? Connaît-on des sortes de pommes susceptibles de voyager sans détérioration, ou propres à la fabrication des cidres capables de supporter de longs voyages ? A quel degré de maturité emploie- t-on les pommes à cidre ? Quels sont les procédés en usage pour l’écrasement des fruits, et auxquels doit-on donner la préférence ? Quel est le mode usité pour extraire le jus ? Quelle portion de jus est extraite des fruits au moyen des diverses sortes de presses, comprise la presse hydraulique ? Comment doit-on diriger la fermentation des cidres ? A-t-on fait des expériences comparatives sur le meilleur mode de conservation des cidres, ou sur la lie, ou après les soutirages ? Quel a été le résultat ? Quelles sont les eaux préférables pour la fabrication du cidre ? Comme on le voit, les questions à l’étude sont nombreuses, et il est du plus haut intérêt de les résoudre : car elles portent sur une des branches les plus importantes de l’agriculture. –»

In : Journal de l'agriculture, Paris, 1866-1908

 

HIPPOLYTE LACAILLE

HORTICULTEUR A FRICHEMESNIL, PAR CLÉRES (SEINE - INFÉRIEURE)
Membre honoraire et lauréat de la Société centrale d’horticulture
de la Seine-Inférieure,
Membre fondateur et lauréat de l'Association pomologique de l'Ouest.

Cet ouvrage, qui a reçu la médaille d'argent du Ministère de l’agriculture
à l'Exposition du Congrès de l’Association pomologique de l’Ouest
en 1881, a été revu et considérablement augmenté par l’auteur.

ÉVREUX
IMPRIMERIE DE CHARLES HÉRISSEY
1886

 

Je cultive le pommier depuis trente-cinq ans, et j'ai pu me convaincre, pendant ce long temps d'études et d'observations, que les modes de culture, les soins intelligents donnés à cet arbre, étaient autrefois supérieurs aux procédés actuels. Il existait encore, il y a trente-cinq ou quarante ans, des pommiers d'un diamètre considérable, produisant 25 à 30 hectolitres de pommes. A mon estimation, ils comptaient de cent à cent vingt ans ; mais ils ont presque tous disparu dans l’espace d’une vingtaine d'années : quelques-uns, usés par l’âge ; le plus grand nombre frappé par un ébranchage exercé sans sagesse et sans mesure. Cet élagage, aujourd'hui devenu de mode, enlève souvent aux arbres des maîtresses branches, et il est une des causes les plus fréquentes de la mort des pommiers.
Les plaies les plus légères, que cet arbre peut arriver difficilement à recouvrir, même dans sa jeunesse , deviennent inguérissables lorsqu'il atteint un certain âge.
A mon avis, il est indispensable, pour obtenir des sujets sains, vigoureux et productif s, d'éviter les plaies trop considérables causées par un ébranchage excessif, ou par de mauvais procédés de greffe. Je ferai donc, dans cette étude, la critique développée des procédés suivis jusqu'à ce jour, et j'indiquerai quelles sont, suivant mon expérience, les méthodes les meilleures à appliquer à la culture du pommier.
Je traiterai également, à la fin de ce travail, la question de l’ébranchage des arbres de haute futaie, qui me parait pratiqué dans des conditions très défectueuses. Je dirai aussi un mot des herbages et de leurs clôtures.
Mais, avant d'entrer en matière, je réclamerai la bienveillante indulgence du lecteur.
Modeste horticulteur, j'ai cherché surtout à être clair, à résumer les observations d'une longue pratique, Sans avoir la prétention de les exposer dans un style correct et à l'abri de tout reproche.

HYPOLITTE LACAILLE

Culture du pommier, des herbages et de leurs clôtures, plantation et ébranchage des arbres à haute futaie : conseils d'un praticien / par Hippolyte Lacaille, 1886.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k30788475#


 

EXTRAITS

HIPPOLYTE LACAILLE

CULTURE DU POMMIER

PREMIÈRE PARTIE

DE LA MULTIPLICATION DU POMMIER


Le pommier doit se multiplier de préférence par semis. Les plus beaux plants se trouvent dans les départements de l’Eure et de la Somme, soit que les habitants les cultivent mieux, ou que la terre leur convienne davantage.

Pour obtenir de bonnes graines, il est utile de choisir des pommes bien développées, prises sur des arbres très vigoureux.  

POUR RÉUSSIR LES SEMIS
On devra laisser en jachère la partie de terrain qu’on veut ensemencer, et la fumer deux fois pendant la saison d’été, aux mois de mars
et de septembre, en la maintenant en bon état de culture.

DE L’EMPLACEMENT D’UNE PÉPINIÈRE
Le choix de l’emplacement d’une pépinière demande à être fait avec un soin particulier, car tous les terrains ne sont pas propres à cet
usage. On choisira de préférence une bonne terre à blé, à sous-sol perméable, bien exposée au grand air, exempte d’humidité, présentant une couche végétale d’environ 0”40 de profondeur, et en pente, s’il est possible.

POUR LA CRÉATION d’UNE PÉPINIÈRE
La préparation du sol est une opération à laquelle il importe de procéder avec soin.

DU CHOIX DU PLANT, DE LA PLANTATION ET DES DISTANCES A OBSERVER
Il faut avoir soin de choisir un beau plant, bien corsé, c’est-à-dire gros et court. Les lignes de la pépinière doivent avoir entre
elles un écartement de l m 20 alin que les pommiers puissent prendre un développement suffisant.

DE LA GREFFE
Si tous les genres de greffe sont bons, leur emploi doit être déterminé avec soin.
Ainsi, pour les greffes à pied, l’écusson à œil dormant est préérable.

DE LA GREFFE EN FENTE
La greffe en fente faite à pied doit être rayée des cultures ; elle endommage le sujet trop près des racines. Elle ne doit être prati
quée que sur les branches d’arbres à hautet ige; car dans ce cas, la fente ne se fait pas directement sur le canal médullaire de la tige.

DISTANCE A OBSERVER ENTRE CHAQUE POMMIER
La distance entre chaque pommier varie suivant la qualité du sol destiné à la plantation. Elle sera de 12 à 14 mètres en bon terrain, de 10 à 12 seulement dans une terre de seconde classe. Ces distances auront pour effet de conserver à l’herbage l’air et le soleil dont il a besoin.

PLANTATION DES POMMIERS DANS L’HERBAGE OU DANS LA CULTURE
Lorsqu’on effectuera une plantation, il sera indispensable de tenir le plus grand compte du tassement, qui se produit dans les terrains nouvellement remués. La proportion de ce tassement est d’un quart du défoncement, si l’on plante immédiatement après ; elle ne sera que d'un cinquième ou d’un sixième si la plantation n’a lieu qu’au bout de huit ou quinze jours, surtout s’il est tombé de l’eau.

DE LA PRÉPARATION DES TROUS DESTINÉS A RECEVOIR LE POMMIER
Le trou destiné à la plantation du pommier aura 2 mètres de diamètre au minimum ; s’il y a do la tourbe ou gazon qui le recouvre, on lèvera cette tourbe de 0 m 12 à O m 15 d’épaisseur, pour la déposer en quatre parties égales sur les lignes principales, toute la terre végétale sera mise entre ces quatre parties.

ARMURE DES JEUNES POMMIERS
Si les sujets plantés sont bien corsés et pas trop hauts de tige, ils seront en mesure de résister aux vents ; mais il sera toujours nécessaire de les protéger contre l’atteinte des bestiaux.
Une expérience déjà longue me permet de recommander l'armure suivante comme réunissant les conditions désirables de solidité et de bon marché.

SOINS A DONNER DANS L’HERBAGE
AUX JEUNES POMMIERS
Les jeunes pommiers doivent être cultivés quelques années encore après leur plantation, car leurs racines ne se développent facilement que dans un terrain toujours ameubli. Après trois ou quatre ans de plantation, les racines buttent contre la paroi du trou qu’elles pénètrent avec difficulté.

DE LA FORME A DONNER AUX POMMIERS PAR LA TAILLE
C’est une erreur généralement répandue de croire qu’il est bon de tailler les pommiers dans leur jeunesse, afin de mieux diriger les branches, et de leur donner une forme plus élégante. Une longue et sérieuse observation m’a démontré qu'il est préférable de laisser le pommier livré à lui-même, que toute direction et toute taille sont plutôt nuisibles que profitables. 

DU REGREFFAGE DES POMMIERS AGÉS
Lorsqu’une variété de pommes cesse de produire, soit par l’effet des gelées , soit par la rigueur de notre climat, et que les arbres sont encore en pleine vigueur, il serait utile de chercher les moyens de les conserver, au lieu de les remplacer par un jeune plant.
Cette question s’impose à l’examen, car nous avons vu à peu près disparaître des espèces renommées soit pour la qualité du cidre, soit pour l’abondance du produit, telles que le Vagnon, le Jaunet et la Peau de Vache.
On pourra, dans ce but, tenter le regreffage des vieux pommiers, avec des greffes dont la végétation aura lieu en même temps que celle de ces derniers. La méthode qui consiste à rabattre les pommiers très courts sur les branches de premier et de second ordre, et à ne laisser qu’une branche faible pour soutenir la végétation de l’arbre, est défectueuse, et doit être abandonnée ; elle détermine fatalement la mort du sujet.

HIPPOLYTE LACAILLE, suite

DEGRÉ DE PRODUCTION DU POMMIER
Le pommier vit facilement un siècle, mais il ne commence adonner des récoltes appréciables que dix ans après sa plantation, parce qu’on le plante généralement trop faible. De dix à cinquante ans, sa production est moins élevée et de moins bonne qualité que pendant la seconde moitié de son existence ; mais, dans les diverses époques de son développement, son rendement sera d’autant meilleur qu'il aura reçu des soins plus intelligents, mieux appropriés à la culture, soit au moment de la plantation, soit pendant sa croissance.

RÉCOLTE DES POMMES
il est regrettable que certains agriculteurs fassent la récolte des pommes en une seule fois, sans tenir compte de l’époque différente à laquelle chaque espèce arrive à la maturité. C’est d’elle, en effet, que dépendent le poids, le volume des fruits, et la bonne qualité du cidre. Pour faciliter la récolte des différentes espèces, il serait bon, au moment de la plantation, de faire suivre par ligne d’abord les variétés précoces, puis celles de la seconde saison, enfin celles de la troisième. La surveillance deviendra ainsi très aisée au moment de la récolte. Si, au contraire, les variétés n’ont pas été mises par saison, le cultivateur aura à rechercher et à marquer chacun des
arbres pour en recueillir les fruits au moment opportun.

Les espèces les plus renommées ont disparu tour à tour, et avant que l’expérience ait dé montré suffisamment quelles sont celles qu’il importe de retenir parmi les variétés anciennes et nouvelles, il en est quelques-unes qui peuvent être recommandées provisoirement,

savoir :

Blanc Mollet ; Reine des hâtives ; Muscadet hâtif ou gros ; Saint Laurent ; Muscadet rouge ; Amer doux ; Petit Amer de Bray ; Doux Évêque ; Doux. Vèret ; Argile rouge ; Amère de Berthecourt ; Martin Fessart ; Rouget ; Bramtot ; Rouge Avenel ; Pomme Godard ; Médaille d'or ; argile grise, Furcy-Lacaille ; Fréquin Lacaille 

Cette indication n’est qu’un guide provisoire des variétés rustiques, qu’on pout utilement cultiver, sans rien préjuger de l’avenir
d’une grande quantité d’espèces nouvelles soumises aujourd'hui à l’étude.

In : Culture du pommier, des herbages et de leurs clôtures, plantation et ébranchage des arbres à haute futaie : conseils d'un praticien / par Hippolyte Lacaille  

1885-1888 le rôle et la requête de M. Lacaille de Frichemesnil qui réussit à convaincre le Conseil Général de la Seine-Inférieure à la création d'une école de pommiers à cidre

 

« C’est ainsi que M. Lacaille de Frichemesnil, en 1885, réussit à convaincre le conseil général pour la création d’une école de pommiers à cidre selon l’expérience de De Breuil et Girardin menée au jardin des plantes de Rouen.

En 1887 vit tout d’abord l’accord par les autorités départementales de la création d’un verger école destiné à l’étude des meilleures variétés de fruits de pressoir et à leur propagation par distribution de greffes mais finalement annexé à un autre projet d’école pratique d’agriculture à Aumale avec l’ajout d’une école d’arboriculture à l’école pratique.

L’étude et l’examen final du projet initial à Quicampoix sur 11 hectares.

La commission chargée en novembre 1887 fut constituée notamment de Gustave Power, de H. Lacaille, de Lesueur…

Les plantations commencèrent dès l’hiver 1887-88 pour atteindre 530 porte-greffes pour l’enclos et de 352 pour le verger.

S’y trouvait des Bédan, des Amers, des Argiles des Fréquins des variétés que l’on trouvait référencées dans les ouvrages de Hauchecorne, de Truelle, de Power…

 

Des retours d’expérience de ces variétés cultivées hors de la Seine-Inférieure sont revenues des Ardennes, de l’Aube, de Charente-Inférieure, du Doubs, de la Drôme, de l’Eure, du Finistère, de Haute-Marne, de Haute-Vienne, du Loir-et-Cher, de Mayenne, de Meurthe-et-Moselle, de la Nièvre, de l’Oise, de l’Orne, de Saône-et-Loire, du Pas-de-Calais, de Sarthe, de Seine-et-Marne, de Seine-et-Oise, des Vosges, de l’Yonne et bien sûr de Seine-Inférieure.

L’espoir de la Société est d’évaluer d’ici quelques années les résultats et de poursuivre l’œuvre entreprise afin que la culture du pommier et la fabrication du cidre deviennent la principale ressource des campagnes dès 1862 par tant de distingués pomologues. [2]» En 1889, La revue agricole et Horticole[3] présente un article sur les pommiers à cidre et pépinières de la Seine-Inférieure et de la Somme. Cet article fait suite à une visite de plantations et de pépinières dans ces deux départements. La commission a distingué deux établissements dont celui de M. Legrand à Yvetot. Son activité a été remarquée pour le bon état de ses arbres et pour le nombre de variétés qu’il a pu obtenir à partir de semences qui sont passées dans la culture.  La pépinière importante de M. Valentin a été remarquée pour l’état de ses arbres prêts à être transplantés. Les greffes y sont faites en tête comme la commission a pu l’observer. Le travail de M. Dieppois d’Yvetot a été également valorisé.  Ainsi localement la commission a récompensé la propagation des meilleures variétés de fruit de pressoir auquel concoure les planteurs et pépiniéristes d’Yvetot comme de Frichemesnil (M. Lacaille).

 

En Novembre 1891, le bureau change. Il est composé notamment de deux horticulteur (Le Mail, père (vice-président) et de M. Valentin (conservateur et archiviste) et d'un pépinier (M. Legrand père, vice-président).

Entre 1878 et 1901, on comptait les horticulteurs par spécialités : jardiniers, horticulteurs, arboriculteurs, pépiniers, maraîchers.

 

 


[1] Liste de ces pommiers et poiriers, de la page 45 à 48

[2] In : L'Oeuvre pomologique de la Société centrale d'horticulture, par A. Héron,... Date de l'édition originale : 1896 

[3] In : La revue agricole et Horticole, La ferme et le Verger, n°3 du jeudi 17 janvier 1889, Paris, p.21-22 

1888 - M. Michelin

Le Cidre : organe des pépiniéristes

Extrait de l’article « Pommiers à cidre et pépinières de la Seine-Inférieure et de la Somme »

 

M. Michelin, secrétaire de la 5e section ; de la Société des Agriculteurs de France, nous communique le rapport d'une visite de plantations de pommiers à cidre et de pépinières faites dans la Seine-Inférieure.

la plantation est encouragée par la faveur dont jouit le cidre, appelé à remplacer dans une large proportion le vin, dont la production est réduite par les maladies […] Les plantations se font généralement sur de grands espaces ; la Commission en a vu sur des terrains de dix à douze hectares. On recherche pour les établir des endroits abrités et bien exposés, on peut dire toujours sur des herbages entourés de clôtures faites économiquement et solidement avec des fils de fer, soit simples, soit épineux, dits ronces, qu'on tend sur des pieux ou des poteaux. […]

La Commission a visité des établissements de pépiniéristes s'occupant particulièrement de l'élevage des arbres à fruits à cidre, et dont l'action peut être efficace sur l'amélioration des vergers puisqu'ils livrent aux planteurs des arbres de six et sept ans d'âge, prêts à planter à demeure ; sons ce rapport, elle a distingué deux établissements, celui de M. Legrand, à Yvetot, et celui de M. Lacaille, à Frichemesnil.

 

Ce qu'on remarque chez M. Legrand, outre le bon état de ses arbres, c'est le nombre de variétés qu'il a obtenues par semences, au milieu desquelles on peut citer des gains ayant une valeur qui a été confirmée par la notoriété. Ou compte au moins une trentaine de variétés de pommes provenant des semis de M. Legrand et qui sont passées dans la culture.

Legrand (Pierre-Michel), horticulteur-pépiniériste à Yvetot (Seine-Inférieure) : a fait les premiers semis de pommiers vers 1840, et obtenu pour ces cultures de nombreuses récompenses dans les concours.

M. Valentin, à Yvetot, a une pépinière importante dont une partie se compose d'arbres bons à être transplantés ; les greffes, comme chez M. Legrand y sont faites en tête ; enfin, chez M. Dieppois, d'Yvetot, la Commission a vu les arbres-mères de quatre variétés qui ont mérité leur place dans les plantations.

 

La Commission a terminé par la visite des pépinières, de M.Lacaille à Frichemesnil , celui-ci s'adonne exclusivement à la préparation des pommiers à cidre et y consacre entièrement  deux hectares 32 ares divisés en trois enclos distincts.

Les greffés sont faites au pied et maintenues dans cet état, quand la végétation s'annonce bien ; dans les cas contraires M.Lacaille greffe au pied une variété intermédiaire vigoureuse en tête de laquelle il pose une greffe: de la variété qu'il veut élever.

Les arbres : sont beaux, bien conduits, le choix des variétés comprend un nombre sagement limité et judicieusement fondé sur l'expérience acquise, des fruits tant anciens que nouveaux, sans parti pris et en tenant compte de la valeur des uns et des autres.

 

M. Lacaille a en outre introduit dans la culture un petit nombre de variétés de pommes obtenues par lui de semis et qui tendent à se répandre.

 

Au résumé, MM. Legrand et Lacaille, suivant chacun une voie qui leur est propre, rendent des services en concourant efficacement à la propagation des meilleures variétés de fruits de pressoir.

 

MICHELIN.

 


In : Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique

Voilà les débuts du cidre de en France  montré à Viry (en Haute-Savoie) en 1889 et essayé à Rennes en 1890

Quid de l'origine canadienne : à eux de le prouver!

 

 

1889

Le Cidre amélioré par le froid : aujourd'hui nommé cidre de glace produit en pays de Caux.

 

Le Cidre amélioré par le froid

Dans certaines parties du midi, on connaît depuis longtemps et on applique le moyen d'améliorer le-vin par le froid.
Quelques personnes ont, appliqué ce système au cidre et s'en sont bien trouvées.

M.Fondent agriculteur distingué raconte que le hasard fit découvrir cette application du froid au cidre à un fabricant de Viry, M. Paquet. Il eut, il y a quelques années un tonneau de cidre complètement gelé.

Le croyant perdu, il le laissa de côté, mais quelque temps après, toujours en pleine gelée, il eut l'idée de regarder ce que la gelée avait produit. Il perça la glace avec un fer rouge et fut surpris de voir couler du cidre ; il y goûta et sa surprise augmenta encore en trouvant un véritable sirop de pommes. Il en mit en bouteilles.


Cette liqueur ressemblait à du vin d'Espagne. Quelques jours après le dégel il voulut goûter les glaçons fondus, ce n’était plus que de l'eau malpropre. Nous pouvons tous faire cet essai en exposant un petit fût de cidre à l'action de la gelée.

In : Le Cidre : organe des pépiniéristesM. Volet (Paris), 1889-01-10,  Janssen, Édouard. Éditeur scientifique, Gallica, BNF.

1890

LA CONGÉLATION DU CIDRE

Il arrive souvent qu'après la transformation totale de son sucre en alcool,
le cidre redevient le siège de fermentations secondaires.

Ces fermentations peuvent avoir deux résultats :


1° Rendre le cidre paré et dur, ce qui empêche de le rendre facilement buvable à partir de l'été, époque où les consommations des villes le demanderaient au contraire en fortes quantités s'il avait conservé ses qualités de douceur, primitive ; 2° développer la fermentation acétique :

M. Lechartier, directeur de la station agronomique de Rennes a fait diverses expériences sur la congélation des cidres dont voici le résultat :

Lorsqu'on juge que la quantité de glace formée est suffisante, on arrête l'action du froid et on laisse écouler le liquide non congelé, tandis qu'on retient la glace dans le vase qui contient le cidre.

On recueille alors un liquide riche en couleur, dont la densité est bien supérieure à celle du cidre primitif bon et corsé, par sa couleur foncée, sa force et sa saveur, il se différencie peu des produits des meilleurs crus de Normandie.

Les résultats ainsi obtenus sont tous différents de ceux que produirait une addition de sucre aux moûts. L'addition du sucre aux moûts a seulement pour effet d'élever le titre en alcool. Au contraire, par la congélation, on concentre tous les principes provenant de la pomme, en même temps que la saveur et l'arôme. Il est même un degré de concentration qu'il ne faut, pas dépasser, et l'on ne doit opérer que sur dos cidres parfaitement nets de goût, ne possédant
aucune saveur spéciale, un peu prononcée de terroir ou autre. On concentre tout, qualités et défauts, et il ne faut pas que ces derniers deviennent assez appareils pour diminuer la valeur de la liqueur obtenue.

L'industrie possède les moyens de produire de la glace : ces procédés sont employés clans les brasseries ; les appareils n'auraient à subir que des modifications peu importantes pour être appliqués à la congélation des cidres ; enfin, des cidres relativement légers et de saveur agréable prennent ainsi des qualités qui leur donnent, une plus-value ; considérable.

En revanche, la congélation est absolument impuissante à empêcher les fermentations secondaires et à stériliser les moûts. Mais M. Lechartier a prouvé qu'il est possible, en appliquant le chauffage au cidre, après le premier soutirage de détruire toute fermentation dans sa masse et de le conserver pendant un certain temps avec les qualités de douceur qu'il possède à ce moment et que si, dans cette opération, il prend une saveur de cuit, on le fait entièrement disparaître en rétablissant la fermentation avant de le livrer à la consommation. 

In :  Le Cidre : organe des pépiniéristes, M. Volet (Paris), 1890-03-01, Gallica, BNF

1889 - Le cidre d'Yvetot reconnu de grande qualité  dans le pays de Caux

 

Le cidre d’Yvetot reconnu de grande qualité dans le pays de Caux

 

Mode de pression. — Dans presque toutes les fermes et ménages du pays de Caux, de toute la Seine-Inférieure et probablement aussi dans d’autres départements, on se sert, pour presser le marc des pommes, des poires, d'un tablier ou plancher muni à son centre d’une forte vis en fonte, avec un écrou de même métal, et qu’on nomme faisselle ou maie. […]

 

Du cidre renourri. — Indépendamment du soutirage des jus et du soufrage des fûts, qui sont deux excellents moyens de conservation des cidres et boissons, il existe un autre moyen en usage dans la partie du pays de Caux qui a Yvetot pour centre. C’est de le renourrir, selon l’expression consacrée. Voici en quoi consiste cet excellent procédé de conservation et d’amélioration. On soutire le cidre ou la boisson qu’on veut renourrir dans un autre fût très propre, sans odeur et fraîchement rincé et soufré, puis on achève de remplir le fût avec un cinquième ou un quart de cidre doux pur, provenant d’un marc de pommes de même qualité et qu’on prend parmi les derniers seaux venus parce que ce sont ordinairement les plus sucrés. On répète cette opération tous les ans, au plus tard tous les deux ans.

Les cidres traités de cette façon peuvent parvenir à une longévité presque séculaire, sans rien perdre de leurs précieuses qualités.

 

C’est ainsi, du reste, que notre père A-J-Lefèvre traitait les cidres si délicats qu’il fabriquait et- vendait ensuite aux habitants d’Yvetot, et qui lui ont valu la réputation méritée de producteur du meilleur cidre de tout le pays de Caux. En effet, ses cidres fabriqués avec les plus grands soins de propreté et par la méthode des longs cuvages et des soutirages répétés et fréquemment renourris étaient toujours richement colorés, limpides, très doux et très parfumés.

 

Mélange des cidres des trois saisons. — Feu notre père, réputé pour un des meilleurs producteurs de cidre des environs d’Yvetot, avait l’habitude de mélanger ensemble vers la fin de janvier tous ses cidres des trois saisons. Il disait que ce mélange leur faisait acquérir des qualités nouvelles. D’un autre côté, MM. de Boutteville et A. Hauchecorne affirment que M. Amable Dubuc, propriétaire à Yvetot, a pratiqué ces mélanges avec succès pendant plus de quarante ans. Il y a donc là une excellente pratique que nous recommandons chaudement à nos lecteurs.


In : Guide élémentaire et pratique pour la fabrication du cidre et du poiré et la culture du pommier à cidre à l'usage des cultivateurs qui veulent elles-mêmes fabriquer leur cidre par P.J. Lefevre 1889 

1889

DE L’INFLUENCE DU TERRAIN SUR LA QUALITÉ DU CIDRE

On peut obtenir  du bon cidre dans tous les terrains en choisissant les variétés en conséquence, mais la différence sera très grande sous plusieurs rapports.

Disons de suite que les terrains marneux ou de sable donnent un cidre léger, bon, mais il ne se conserve pas longtemps.

On choisira des variétés parfumées, moitié pommes douces ou moitié sucré amer, ou amer.

Pour les bonnes terres profondes à sous-sol perméable, le pommier s'y développe rapidement, devient très fort, et par la suite très fertile. On doit ne planter dans ces terrains, que des variétés parfumées et de haute densité, environ 2/3 de pommes sucrées et un tiers de pommes amères.

Lorsqu'on voudra obtenir un cidre excellent pouvant acquérir une marque supérieure, on choisira dans la ferme ou domaine, les terres inférieures comme culture, qu'elles soient en pente, pierreuses, schisteuses, terres rouges, argileuse, à sous-sol presque imperméable à l'orientation. Est, Sud ou Ouest. Dans ces terrains, les pommiers devront être plantés sur terre, ou aussi élevés que possible.

On aura soin de Ies nettoyer souvent, afin que les mousses et les lichens né les envahissent pas, ce travail se fait avec une brosse de chiendent pendant le repos de la végétation par un temps de brouillard ou d'humidité constante.

Dans ces terres de qualité inférieure, le pommier se développe moins, donne plutôt un produit de qualité, le rendement sera en rapport de la nourriture donnée sous forme de fumure.

Dans ces sortes de terres inférieures, il ne faudra mettre que des variétés, de pommes sucrées et sucré amer et parfumées.

Les pommes amères auraient souvent l'inconvénient: de donner trop d'amertume au cidre et ne conviendrait pas à tout le monde (Le goût de terroir y étant déjà suffisant).

Le propriétaire ex le cultivateur aura tout avantage à choisir ses ferres de médiocre qualité pour créer des herbages plantés de pommiers parce qu'il conserve pour la culture des céréales, les meilleures terres beaucoup plus faciles de cultures et d'un rendement plus assuré avec économie de chevaux et harnais.

Les terres inférieures donneront environ autant d'herbe et de pommes que les bonnes terres, mais surtout un cru bien supérieur.

Un autre avantage qui est souvent considérable, c'est que le plus souvent on pourra obtenir dans ces herbages, des réservoirs d'eau suffisants pour le bétail de l'exploitation.

De l'utilité des abeilles au point de vue de la récolte des pommes.

Il est incontestable que la culture des abeilles est lucrative par elle-même, et lorsqu'un cultivateur possède une grande quantité de pommiers, il aura grand intérêt à cultiver les abeilles; elles trouveront, dans la fleur de ces pommiers la cire nécessaire pour former leurs alvéoles sans un grand déplacement, ce qui facilite leur travail.

D'un autre côté les abeilles faciliteront et activeront la fécondation des fleurs des pommiers et en assurent beaucoup mieux la réussite.

D'un côté la récolte du miel ramassé
par les abeilles?

- D'un autre côté la récolte des pommes
plus abondante?

Le cultivateur ne peut hésiter.

H. LACAILLE

In : Le Cidre : organe des pépiniéristes, M. Volet (Paris), 1889-06-27, Janssen, Édouard. Éditeur, Gallica, BNF.

1889

FABRICATION DU CIDRE DESTINE A ETRE MIS EN BOUTEILLES

par Hauchecorne L.A.


La fabrication du cidre mousseux est aujourd'hui l'objet d'un commerce, dont l'importance s'accroîtjchaque année d'ans
des proportions inespérées ; l'essor pris par cette industrie toute nouvelle et très rémunératrice pour le cultivateur qui s'y livre, nous fait un devoir d'exposer avec une précision rigoureuse le mode opératoire à suivre par les. brasseurs en vue d'assurer le succès constant de ce produit appelé à devenir dans un temps prochain l'un des plusavantageux de la ferme. 

On sait que le cidre pur obtenu dès jus a 1075 ou'10° B.. est loin d'être une agréable boisson ; si donc on veut savourer le parfum de la pomme, ce n'est point au gros cidre qu'il faut le demander, mais au cidre mousseux dont la densité primitive du jus s'élevait de
1050 à 1052 au plus 7° Beaumé. '

On doit rechercher, pour cette fabrication, les variétés mûrissant en octobre et pi^emière quinzaine de novembre à cause de leur plus grande richesse en parfum, puis écraser finement les fruits mûrs à point, sains et propres, pressurer la pulpe énergiquement après un cuvage de lO à 12 heures, entonner le jus pur dans des fûts bien rincés et dépurvus d'odeur ; en prendre la densité qui sera probablement de 1060 à 1062, démonter le marc, le diviser à la pelle et l'arroser de 15 litres de bonne eau par hectolitre de pommes employé, le  pressurer de nouveau après cuvage, réunir le second jus au premier, les mélanger à l'aide d'un bâton fendu en quatre et prendre une seconde fois la densité du liquide. Elle sera proche de 1050 à 1052.

Si la densité constatée était supérieure à ce dernier chiffre, il conviendrait, dans la macération suivante, de porter à 20 litres, au lieu de 15, la quantité d'eau; si, au contraire, la densité était inférieure à 1050, on se servirait encore de 20 litres d'eau, mais alors on les passerait successivement sur deux marcs ; et si, en définitif, on n'arrivait pas à la densité voulue, il
faudrait la parfaire en ajoutant, à chaque hectolitre, autant de fois 215 grammes de sucre qu'il manquerait de points densimétriques.

La fermentation tumultueuse achevée et le moût devenu calme et reposé, il faut procéder au soutirage et coller le cidre en y versant, par  chaque hectolitre, 5 grammes do tannin à l'alcool dissous dans un litre d'eau tiède; on favorise le mélange intime par l'agita-
tion du liquide, on lait le plein du fût et on le ferme avec une bonde facile à enlever.

 

Un mois après, on s'assure de la densité et eu même temps de la diaphanéité du liquide ; si celle-ci n'est pas parfaite, on maintient le cidre au  repos jusqu'à ce qu'il soit arrivé au clair fin ; il pèse alors  de 1018 à 1016 et est prêt au tirage.

La pulpe pressurée n'ayant pas été Mandes complètement épuisée, on peut la mélanger pour le quart, avec de la paille hachée et la donner aux bestiaux, notamment aux vaches qui sont très
de cette nourriture.

 MISE EN BOUTEILLES.;

Les bouteilles qui:; conviennent le mieux à la conservation du cidre mousseux sont celles à col allongé comme  les bouteilles à vin de Champagne, les cruchons à bière, les bouteilles vides d'eaux minérales naturelles, en un mot, toutes celles qui ne sont pas à épauleraient à la naissance du col parce qu'elles ne peuvent résister à la pression du gaz acide carbonique.

On devra préférer toutefois la forme champenoise verre rouge pour loger le cidre mousseux destiné au commerce.

Il faut aussi n'employer que de très bons bouchons qu'on a soin de tremper, à mi-hauteur, dans de l'eau-de-vie pour faciliter leur passage dans le col de la bouteille; on les consolide à l'aide de
ficelle ou de fil de fer, puis les bouteilles sont mises en place et tenues constamment couchées.

Ainsi préparé le cidre mousseux est chargé d'une quantité suffisante de gaz pour chasser le bouchon sans le suivre ; il a donc une explosion discrète, il est tout mousse dans le verre et le parfum du fruit se dilate longuement sur le palais.

Si à 1018 de densité, le cidre n'était pas arrivé au clair-fin, il faudrait le laisser en repos jusqu'à 1015, mais alors introduire dans chaque bouteille, au moment du tirage, 10 grammes de
sucre blanc ou de sucre candi.

On a le tort généralement, dans les ménages comme dans les brasseries de mettre les cidres et les poirés trop tôt en bouteilles ; les liquides manquent de limpidité et laissent toujours un dépôt de lie assez considérable dans les bouteilles, ce qui nuit beaucoup au place- ment de ces boissons chez les débitants.

Six semaines après la mise en bouteilles le gaz est formé et le cidre peut s'expédier à la clientèle.

On obtient un cidre légèrement gazeux fort agréable pour la table en embouteillant la boisson de ménage lorsqu'elle pèse encore 1012 au densimètre et si l'on veut la convertir en boisson de dessert tout à fait inoffensive, on verse dans chaque bouteille, au moment du tirage 40 grammes de sirop préparé avec eau et sucre blanc à parties égales.
A. HAUCHECORNE.
Extrait. du Cidre. Ch. : XXII. p. 83.

 

In : Le Cidre : organe des pépiniéristes,  M. Volet (Paris), 1889-05-02,  Janssen, Édouard. Éditeur scientifique, Gallica, BNF.

Pépiniéristes en 1901-1902 Seine-Inférieure, 

République Française, Ministère de l’Agriculture, Direction de l’Agriculture

Liste des pépiniéristes, Paris, Imprimerie Nationale 1902

Arques-la-Bataille  - Mahieu-Sanson  Horticole

Auberville-le-Manuel – Horville, Horticole et Pépinière

Avremesnil (1887) - Françoise (Veuve) 

Auzouville-L’Esneval – Segain Aimable, Horticole et Pépinière Mail aîné pépinièrte

Bléville  (1887)  Avenel

Bois-Guillaume - Poulain Jeune, Horticole et Pépinière

Bolbec (1887) Mail aîne pépinière

Boudeville – Lavoinne frères, Horticole et Pépinière

Bosville – Loqué Pacifique, Horticole et Pépinière

Cailleville – Lieury Frédéric, Horticole et Pépinière 

Canville-les-deux-Eglises  Jean Alleaume, Horticole et Pépinière 

Cany – Lecuyer-Emery Mme Veuve, Horticole et Pépinière ; Lhérondel Emile, Horticole et Pépinière ; Rabaux, Horticole et Pépinière

Caudebec-en-Caux – Lemonnier, Horticole et Pépinière ; Mail, Horticole et Pépinière

Criquetot-sur-Ouville – Petit Louis, Horticole et Pépinière

Criquetot l'Esneval (1887)  Hauguel Albert  pépinière

Dieppe - Brunet frères, Horticole et pépinière ; Deperrois, Horticole et Pépinière ; Mercier, Horticole et Pépinière ; Sutton Mme Veuve, Horticole et Pépinière ; Travaillien, Horticole et Pépinière

Doudeville, Rousseau, Horticole et Pépinière

Ectot-l’Auber Courtel, Horticole et pépinière

Esclavelles – Gendron, pépinière

Etainhus (1887)  Paney pépinière

Etalleville, Houdeville, Horticole et Pépinière ; Lemercier Fortuné, Horticole et Pépinière ; Thirel Désiré, Horticole et Pépinière

Etretat (1887) - Pays Dominique Pépinière

Fauville – Devaux Alexandre, Horticole et Pépinière

Fécamp – Beaufils, Horticole et Pépinière ; Lecanu, Horticole et Pépinière ; Sampin, Horticole et Pépinière ; Mail Léon, Horticole et Pépinière

1887 Lecanu-Louvel ; Mail

Foucart – Metayer Alexandre, Horticole et Pépinière

Frichesmesnil – Lacaille, Horticole et Pépinière

Goderville (1887)  - Lelannier pépinière

Grainville-la-Teinturière – Tauvel Tranquille, Horticole et Pépinière

Graville-Sainte-Honorine – Hoizey Mme Veuve, Horticole et Pépinière ; Jacqueline, Pépinière ; Hoizey, Horticole et Pépinière ; Vimont, Horticole et Pépinière

1887 : Marical ; Jacqueline ; Haizey ; Vimont

Guerres – Forget, Horticole et Pépinière

Gueutteville – Cartenet (Arsene), Horticole et pépinière ; Cartenet (Francois), Horticole et pépinière

Hautot-sur-Mer – Vaillant, Horticole et Pépinière

Héricourt-en-Caux - Désert, Horticole et Pépinière ; Dubuisson Honoré, Pépinière

La Gaillarde – Dubos, Horticole et Pépinière ; Renioult, Horticole et Pépinière ; Roussel, Horticole et Pépinière

La Vaupallière – Doucey Alexandre, Horticole et Pépinière ; Doucey Baptiste, Horticole et Pépinière

Le Havre – Fauquet et fils, Horticole et Pépinière ; Lequesne, Horticole et Pépinière ; Planchenault, Horticole et Pépinière ; Paroisse ; Pineau ; Varet

1887, Angammare ; Bist ; Boulard ; Carel ; Cossé ; Devin ; Fouquet  et Fouquet; Greverie ; Lecsesne ; Leprévost

Luneray - Blondel, Horticole et Pépinière ; Bréard, Pépinière ; Frémont fils, Horticole et Pépinière ; Poulain Th., Horticole et Pépinière ; Landins, Horticole et Pépinière ; Lardans, horticole et pépinière

Manneville (1887) Lefebvre pépinière

Neville - Martot, Horticole et Pépinière

Notre-Dame-de-Bondeville – Duquesne, Horticole et Pépinière

Offranville – Lefebvre, Horticole et Pépinière

Ouainville - Auger (Juste), horticole et pépinière ; Deneuve, Horticole et Pépinière

Ouville-la-Rivière, Chenu, Horticole

Roncherolles-le-Vivier, Deschamps, Horticole et pépinière ; Delaporte, Horticole et pépinière ; Guéroult, Horticole et pépinière ; Guilalins -Mme Ve. horticole et pépinière ; Bouteiller, pépinière ; Caveli, Horticole et pépinière

Sainte-Marie-des-Champs - Corroyer Horticole et pépinière

Saint-Martin-aux-Buneaux – Barthélémy, Horticole et pépinière

Saint-Sylvain – Lieury,Mme et fils, Horticole et Pépinière

Sanvic – Tévenel, Horticole et Pépinière

1887 - Téterel ; Moulin ; Sandré ; Angammare ;  

Sausseuzemare  1887- Lavigne (veuve) pépinière

Thérouldeville - Baillieul (Maximilien), pépinière

Theuville-aux-Maillots – Bardin (Achille), Pépinière et Achille Cardin

Valmont – Pépin Désiré, Horticole et Pépinière

Yébleron - Toutain Valentin, Horticole et Pépinière

Yerville – Bréant (Anthime), Horticole et pépinière ; Cauchois (Antoine), Horticole et pépinière

Yvetot – Legrand Mme Veuve, Horticole et Pépinière ; Mail, Horticole et Pépinière ; Malhouitre, Horticole et Pépinière ; Menard, pépinière ; Valentin Auguste, Horticole et Pépinière

​​​​​​​1887 - Mail père ; Valentin ; Legrand

à suivre Godard, Dieppois, Varin, David, Audièvre...

et les autres  pépiniers  du pays de Caux et de la Seine Inférieure

 

1908 - Le Poirier à cidre associé au cidre « bon ordinaire »

 

« Plusieurs contrées associent le Poirier à leurs pommeraies, dans la proportion d'un dixième, pour la fabrication d'un cidre « bon ordinaire ».

« Pour déterminer la valeur de quelques variétés préférées, nous emprunterons les résultats suivants au laboratoire de M. Hauchecorne, savant pharmacien d'Yvetot, qui s'est dévoué à la recherche scientifique et à la vulgarisation des fruits de pressoir les plus méritants pour le cultivateur et le consommateur :

 

De Croixmare . — Arbre vigoureux, à tête élevée pour plantations de routes ; très fertile.

Fruit petit, très bon, surtout pour la fabrication de l 'alcool, faible en tannin ; mûrissant en septembre et octobre.

Jus incolore ; densité 1,075

 

De Navet. — Arbre vigoureux, très élevé ; pour plantations routières ; fertile. Fruit petit, bon pour le poiré, riche en sucre (221 grammes par kilogr.) ; excellent pour la fabrication de l'alcool (rendement 13 à 14 p. 100); mûrissant à la mi-octobre. Son moût, mélangé à celui de la poire de Souris, fournit un poiré de premier choix. Jus incolore, agréable ; densité 1,090.

 

De Souris. — Arbre vigoureux, à branches verticales ; pour plantations routières ; très fertile.

Fruit petit, excellent pour le poiré ; mûrissant fin octobre. Son poiré, riche en tannin (3 gr. 772 dans 1 kilogr. de jus), peut être associé à d'autres variétés plus douces ou parfumées, de Navet, de Croixmare, de Cerciaux, Masuret, Sabot, etc. Jus ambré, parfumé ; densité 1,075.

 

Harpanne. — Arbre bien vigoureux ; bien fertile. Fruit de fin octobre, bon pour le poiré. Jus ambré, de bon goût ; densité 1,060.

 

Carisi. — Arbre robuste, à branchage semi-conique ; très fertile. Fruit moyen ou assez gros, très bon pour le poiré, mûrissant fin octobre et novembre. Le moût, riche en tannin, contribue à la salubrité de la boisson. Jus incolore, parfumé ; densité 1,063. Variété répandue dans les fermes de la Brie.

 

De Cerciaux. — Arbre assez vigoureux, à branches étalées ; très fertile.

Fruit de fin octobre et novembre, bon pour le poiré et pour le séchage. Jus ambré, parfumé, de saveur agréable ; densité 1,067.

 

D'Oignonnet (du Calvados). — Arbre vigoureux, au port pyramidal ; pour plantations routières ; fertile.

Fruit de fin octobre et novembre, bon pour le poire mousseux.

Jus citrin, parfumé ; densité d,060.

Les plantations routières du Calvados possèdent également la poire Rousselet, d'octobre, pour poiré mousseux, au jus incolore et parfumé ; densité 1,067.

 

De Branche (pays d'Auge, Bocage, Bessin). — Arbre très vigoureux, d'une grande production.

Fruit de fin octobre et novembre, bon pour poiré mousseux. Jus incolore, très parfumé ; densité 1,065.

 

Masuret. — Arbre très élevé, pour plantations routières ; fertile.

Fruit de fin novembre, bon pour poiré mousseux. Jus très parfumé, qui se colore à l'air ; densité 1,067.

 

De la Tour. — Arbre d'une bonne vigueur et d'une bonne production. Fruit de novembre et décembre, bon pour poiré. Jus ambré, parfumé ; densité 1,065.

Saugier. — Originaire du Gâtinais, où il est répandu ; arbre robuste et productif, se couronnant facilement. Fruit petit, bon pour le poiré.

 

M. J. Girardin a analysé, en 1834, le jus de cette poire et a constaté qu'il contenait 8,33 p. 100 d'alcool absolu.

Voici encore quelques variétés réputées pour le poiré ; l'analyse de leur jus nous manque.

D'Angoisse ; du Calvados et de l'Eure. — Arbre productif ; poiré spiritueux.

De Chemin ; pays d'Auge et pays de Caux. — Arbre fécond ; poiré délicieux.

De Cirole ou Sirolle, de la Brie et de la Beauce. — Arbre vigoureux et fertile ; cidre recherché.

De Crapau ; d'Ille-et-Vilaine. — Arbre élevé, pour les plantations d'avenues ; boisson spiritueuse.

De Fer ; de l'Eure, du Calvados, de l'Orne. — Arbre robuste et tardif ; boisson solide, de longue durée.

D'Entricotin ; de la Normandie-Ouest. — Arbre d'une grande production ; poiré vineux, excellent.

De Maillot ; de l'Orne et du pays de Caux. — Arbre très productif ; boisson colorée, capiteuse.

De Roux ; Orne. — Arbre vigoureux, productif ; boisson douce, agréable, à consommer promptement.

Grosse Malice ; Aube et Yonne. — Arbre élancé, rustique, pour avenue ; jus immédiatement potable, bon pour tonifier les vieux cidres. Densité 1,060.

Sabot ; Normandie et Picardie. — Arbre robuste, de grande production ; son poiré plaît au goût, il est de bonne garde.

 

La Basse-Normandie et le Maine possèdent d'énormes poiriers à cidre. »

 

 


 Traité de la culture fruitière commerciale et bourgeoise (2e édition entièrement revue) ; Baltet Charles (-1908), Paris, 1889, 

Depuis la fin des travaux de la société pomologique française de la fin du 19e siècle un socle commun de savoirs étaient connus de tous. A la suite du Second Empire la Troisième République accompagna cette transition jusqu'à la 1ere Guerre Mondiale où à nouveau s'est produit une autre catastrophe au verger par manque de bras, par le conflit lui-même et les priorités nationales de circonstance.

Mais en 1911, les vergers cauchois étaient paisibles et les variétés nommées ci-dessous donne une idée des pommes admises en certains endroits du pays de Caux. On différenciait à cette époque les pommes du pays de Caux de celles du pays de Bray, de Seine, du Roumois ou encore du Vexin.

Jules Félix s'en fait le témoin en s'appuyant sur les travaux de Brioux.

 

1911 - 

Les meilleures pommes de la Seine-Inférieure dont celles du pays de Caux associé au Petit-Caux. 

Des distinctions sont à noter entre les variétés du pays de Caux, du pays de Bray et de l'Inter Caux et Vexin

L'Association française pomologique pour l'étude des fruits de pressoir et l'industrie du Cidre a tenu l'an dernier son concours et son Congrès au Havre. Parmi les communications les plus intéressantes et les plus remarquées, il convient de signaler celle de Brioux, ingénieur agronome, sur les variétés de pommes cultivées dans le département de la Seine-Inférieure.

La culture du Pommier à cidre dans la Haute-Normandie ne date guère que de latin du 15e siècle ; les cultivateurs ont entouré leurs champs de hautes levées de terre, véritables remparts qui protègent les arbres contre les vents d'ouest, et donnent au pays sont aspect original. Mais la culture n'a pris un essor considérable que depuis le commencement du 19e siècle ; son extension a été motivée par l'accroissement de la consommation, le développement des voies ferrées et un peu plus tard par la diminution des étendues consacrées au colza et au lin. On cultive en Normandie un grand nombre de variétés de pommes ; certaines sont très répandues, ce sont des variétés fondamentales, alors que d'autres se trouvent en quelque sorte localisées.

M. Brioux a eu l'excellente idée de faire la monographie des principales variétés ; comme il le dit lui-même, son travail n'est pas complet, mais il pourra servir de base à des études ultérieures et tel qu'il se présente, il rendra déjà de signalés services aux disciples de l'aumône. Le département de la Seine-Inférieure comprend deux principales régions agricoles le pays de Caux et le pays de Bray.

 

1910 - Le peuplement des vergers du pays de Caux par Charles Brioux

 

Découvrant et exhumant au fur et à mesure les archives de la Société Centrale d'Agriculture, prenant connaissance de la monographie de M. Ch. Brioux, un des éminents spécialistes en Agriculture, Directeur de la Station agronomique de la Seine-Inférieure (1891-1928), Membre non résidant de l'Académie d'Agriculture de France, juillet 1930, Brioux Charles (1872-1963). Chimiste et directeur de la Station agronomique de. Seine-Inférieure de 1908 à 1940. Ses nombreux travaux publiés après Hauchecorne et De Boutteville sont des points de repères pour sa génération comme nous le verrons pour évoquer les savoirs du début du 20e siècle.

Dans le bulletin trimestriel de la Société Centrale d’Agriculture du département de la Seine-Inférieure publié pour la période d’octobre à décembre 1910, Charles Brioux expose sa monographie de la pomologie de la Seine-Inférieure.

Charles Brioux commence son étude pomologique par le peuplement des vergers de la région d’Yvetot car dit-il on y trouve toutes les bonnes variétés disséminées dans l’ensemble du pays de Caux.

 Il rappelle qu’Yvetot fut un centre actif d’études pomologiques.

  • En 1e saison Charles Brioux cite le Blanc-Mollet, le Précoce-David, la Reine des Hâtives, Le Vagnon-Legrand, le Vagnon-Tretel
  • En 2e saison : Bramtot ou Martin-Fessart, Fréquin-Lajoie, Fréquin rouge, Godard, Hauchecorne, Médaille d’or, Muscadet, Rouge-Bruyère d’Yvetot, Reine-des-Pommes, Saint-Laurent
  • En 3e saison : amère-de-Berthecourt, Argile Grise, Bedan ancien, Bedan-des-Parts, Grise-Dieppois, Marin-Onfroy, Paradis, Peau-de-Vache ancienne, Peau-de-Vache musquée et Peau-de-Vache, Petit-Hébert.

 

Charles Brioux signale les variétés les plus appréciées : Blanc-Mollet, Vagnon-Tetrel, espèce locale poussant bien ; le Bramtot et Martin-Fessart, variétés voisines quasi identiques (beaux arbres, vigoureux, rustiques et fertiles) ; Muscadet, Godard, Marin-Onfroy, Bedan, Saint-Laurent, Fréquin rouge.

Charles Brioux indique de la Grise-Dieppois et la Reine-des-Hâtives obtenues à Yvetot conviennent surtout aux terres légères.

La Médaille d’or s’avère chancreuse dans la région d’Yvetot - est plutôt délaissée.

Le Bedan-des-Parts donne un bon fruit.

Le Petit-Hébert appréciée en 3e saison. Elle est originaire d’Etalleville, près de Doudeville et se répand autour d’Yvetot.

Dans la région d’Yvetot, Charles Bridoux indique les variétés qui sont en déclin en 1910 :  Peau-de-Vache ancienne ; le Rouge-Bruyère ; le Paradis ; le Marin-Onfroy.

 

Yvetot est signalé comme un centre important d’expédition pour les fruits de pressoir ; les cultivateurs font du cidre pour leur propre consommation mais le surplus est vendu.

Il rapporte qu’en région d’Yvetot la culture des pommes de 1e saison sont délaissées car qu’elles viennent trop tôt en maturité. Ce sont les variétés de 2e saison (50 %) qui prédominent pour leur expédition et les 3e saison (30%) servent à la fabrication du cidre localement.

Charles Brioux poursuit son étude pomologique par le peuplement des vergers de la région de Doudeville

On y retrouve le Blanc-Mollet, les Vagnons, le Bramtot, l’Amère-de-Berthecourt, Le Marin-Onfroy, la Médaille d’or, le Rouge-Bruyère et le Bedan. Viennent nouvellement compléter la liste : en 2e saison - l’Osier, l’Antoinette, le Gros-Muscadet, la Grise Tardive, et l’Ameret.  Le Rouge-Bruyère se comporte mieux que dans la région d’Yvetot.

Les cidres de cette région de Doudeville sont droit comme goût, c’est-à-dire sans aucun terroir, mais ils durcissent vite (en raison du manque d’entretien des tonneaux)

 

Le blanc-mollet, le Muscadet, le Rouge-Bruyère peuvent être brassés seuls. Le meilleur cidre est donné par le mélange Ameret et Bedan, les autres variétés sont mélangées entre elles, suivant leur époque de maturité.

Dans le canton voisin d’Ourville une variété spéciale dite « la pomme de Roi » est très répandue et est très fertile

 

Peuplement des vergers de la région de Saint-Valéry-en-Caux.

Au bord de la mer on retrouve les mêmes variétés que celles de la région d’Yvetot : le Bedan Hellouin introduit au château de Neville par M. Hellouin ; le Rouget ou pomme à glanes ; le Massé très répandu dans le canton de Cany et de Saint-Valery.

Celles qui déclinent sont les mêmes que citées précédemment.

Aux environs de Dieppe, les variétés les plus cultivées sont le Blanc-Mollet, l’Amère, petite de Bray, le Muscadet, le Rouge-Bruyère, le Jaunet, le Bedan, le Roquet, ancienne variété de 3e saison produisant tous les deux ans.

Peuplement des vergers de l’arrondissement du Havre.

Le climat vif et humide où l’argile à silex présente des affleurements importants, nous ne retrouvons pas les mêmes que le pays de Caux centre oriental. Le nombre des variétés est plus restreint.

  • 1e saison : Blanc-Mollet, Gros-Papa, les Vagnons
  • 2e saison : Amer-gris, Fréquin-Barré, Médaille d’or, Reinette douce, Rouge-Bruyère, Saint-Michel, Saint-Nicolas
  • 3e saison : Bedan ancien, Marin-Onfroy, Reine-des-Pommes, Peau-de-Vache ancienne et nouvelle.
  • Le Gros-Papa est l’arbre le plus répandu dans toutes les exploitations mais qui doit être brassées aussitôt. Le Saint-Nicolas est très apprécié (1/4 des plantations) ; le Fréquin-Barré et dans la région de Saint-Romain de Colbosc, le Bedan est réputé. (1/3 de verger) mélangé au Marin-Onfroy.

La Reinette douce est appréciée, la peau-de-vache nouvelle, le Vagnon, le Saint-Michel complètent la liste

En cette région nous dit Charles Brioux il y a un pourcentage d’un tiers de pommes de 1e et 2e saisons réunies. Les surplus sont absorbés par les cidreries havraises.

La tradition du poirier à cidre doit être réservée aux plus estimées : Carisis, Souris et Navet.

Charles Brioux en brossant cet inventaire tient à signaler qu’il faut constater que parmi les nombreuses variétés citées, il y en a beaucoup d’excellentes qui figurent sur la liste des variétés étudiées et classées par l’Association Française Pomologique originaires pour beaucoup de la Seine-Inférieure.

Parmi les plus d’un tiers des variétés classées on compte l’Ambrette, Amère petite-Bray, Bramtot ou Martin-Fessart, Binet rouge, Fréquin-Lajoie, Grise-Dieppois, Marabot, Médaille d’or, Muscadet ou Antoinette, Reine-des-Hâtives obtenues par Legrand, Godard de Boisguillaume et Dieppois et Saint-Laurent.

Charles Brioux recommande aux cultivateurs producteurs de ne pas privilégier la productivité au dépend de la qualité.

Pays de Caux  : étude par Felix d'après les premiers travaux de Charles Brioux établis en 1909-1910

Le pays de Caux, de beaucoup le plus important, est formé de l'arrondissement du Havre de la plus grande partie de l'arrondissement d'Yvetot et d'une partie des arrondissements du Dieppe et de Rouen; son étendue approche de 341.000 hectares.
C'est un vaste plateau irrégulier et ondulé, découpé par des vallées étroites et profondes, constitué par une épaisse couche d'argile reposant sur de fortes assises de craie.
Les pommiers sont cantonnés dans les herbages enclos de levées de terre couronnées d'arbres; on donne à ces champs le nom de « masures ».

En raison de la variabilité de la composition des vergers, M. Brioux a examiné la répartition des variétés dans les principaux centres du pays cauchois.

La région d'Yvetot cultive les variétés suivantes

Première saison Blanc Mollet, Précoce David, Reine des hâtives, Vagnon Legrand, Vagnon Tétrel.

Deuxième saison Bramtot ou Martin-Fessart, Fréquin Lajoie, Fréquin rouge, Godard, Hauchecorne, Médaille d'Or, Muscadet, Rouge bruyère d'Yvetot, Reine des Pommes, Saint -Laurent.

 

Troisième saison : Amère de Berthecourt, Argile grise, Bedan ancien, Bedan des Paris, Grise Dieppois, Marin-Onfroy, Paradis, Peau-de-Vache ancienne, Peau-de-Vache musquée et Peau-de-Vache nouvelle. Petit Hébert.

Les variétés les meilleures et les plus productives sont le Blanc Mollet, le Vagnon Tétrel, le Bramtot ou Martin-Fessart, le Muscadet, la Pomme Godard, le Marin-Onfroy, le Bedan, la Saint-Laurent et le Fréquin rouge. Pour les terres légères, on recherche la Grise Dieppois et la Reine des Hâtives.

On reproche à la Médaille-d'Or d’être sujette ait chancre et d'avoir un bois cassant à la Bedan des Parts ses branches retombantes. Sont abandonnées, parce qu’elles dégénèrent, les variétés Vagnon ancien, Peau-de-Vache ancienne, Bouge bruyère, Bedan ancien et Paradis.

Les variétés de seconde saison, qui murissent d’octobre à novembre, sont de plus en plus cultivées et les fruits en sont expédiés pour la fabrication du cidre. On conserve pour le pays les pommes fournies par les variétés de 3° saison et l'on cultive très peu les variétés de 1e saison 1 à 2 dixièmes de 1e saison ; 5 dixièmes de 2° saison ; 3 dixièmes de 3e saison.

Dans la région de Doudeville et de Saint-Valéry-en-Caux, on trouve le Blanc Mollet, les vagnons, les Bramtot, l'Amère de Berlherourt, Ie Marin-Onfroy, le Rouge Bruyère et le Bedan.

A signaler quelques variétés locales estimées : l'Osier (2e: saison), l'Antoinette ou Abondance 2e  saison, le Gros Muscadet.

Notons que le Blanc Mollet, le Muscadet et le Rouge Bruyère peuvent être brassés seuls, les autres variétés doivent être mélangées.

Si l'on passe à la région de Saint- Valéry, on note les mêmes variétés que dans la région d'Yvetot et en plus : le Bedan Hellouin, de 3e saison, à fruit doux amer ; le Rouget à fruit, sucré, qui mûrit en décembre.

Comme variété spéciale au Petit Caux, il y a la pomme de Cal que l'on utilise seule, la préparation d'un cidre mousseux apprécié.

L'arrondissement du Havre, dont le climat est plus humide, offre un choix limité.

Première saison : Blanc Mollet, Gros-Papa, les Vagnons.

Deuxième saison Amer gris, Fréquin barré, Médaille d'Or, Reinette douce, Rouge Bruyère, Saint-Michel, Saint Nicolas.

Troisième saison : Bedan ancien, Marin-Onfroy, Reine des Pommes, Peau-de-Vache ancienne et nouvelle.

Le Gros-Papa, de 1ere saison, se trouve dans toutes les exploitations. La Saint- Nicolas de 2e saison, à fruit amer doux, se répand de plus en plus ; le Fréquin barré, de 2e saison également, est aussi très estimé. Le Bedan qui, brassé seul, donne un cidre rouge de clarification lente, est mélangé au Marin-Onfroy à jus plus blanc.

Dégénèrent la Peau-de-Vache ancienne, le Vagnon et la Saint-Michel.

(À suivre) Jules Félix. - La Gazette du village : journal républicain, politique et agricole du 5 février 1911.

SUITE

Les meilleures pommes de la Seine- Inférieure.

Pays de Bray.

Le pays de Bray est beaucoup moins étendu que le pays de Caux il ne comprend dans la Seine-inférieure que 80.000 hectares (le canton de Gournay, la presque totalité de celui de Forges-les-Eaux, une partie des
cantons de Neufchâtel-en-Bray, Argueil, Londinières et Saint-Saëns). On y voit des successions de collines couvertes de prairies chaque herbage est entouré d'une ceinture d’arbustes avec çà et là quelques beaux arbres. Les meilleurs herbages se trouvent sur les marnes et les calcaires argileux on en rencontre également sur la glaise. Voici les principales variétés cultivées :

Première saison, Railé Varin. Blanc Mollet.

Deuxième saison Amer doux, Barbary ou Raile rouge, des Bénard, Croix de Bouelles, Jaunet de Gournay, pomme Dieuzy ou Rouge de Landel, Rouge Bruyère de Gournay, Petites Prévotes.

Troisième saison Amère petite de Bray, Amer Gauthier, Amer blanc ou Quièvre court, Dameret ou Longues Branches, Orgueil ou Coudran, Quentin, Roquet blanc et rouge.

La Railé Varin est à port dressé elle est fertile, convient à tous terrains, donne un fruit doux amer, La Croix de Bouelles à port élancé, très fertile, est à fruit aplati a la base, doux amer. La Pomme Dieuzy donne des fruits doux, les branches sont divergentes. L'Amer Gauthier, à floraison très tardive, donne un cidre excellent. Petites Prévotes est un bel arbre productif ; l'Amer blanc a le bois grè!e, mais non cassant, le Dameret est à bois cassant. Dégénèrent la Pomme d'Orgueil et le Roquet rouge.
Parmi les variétés d'introduction nouvelle et réussissant bien dans le pays de Bray, M. Brioux signate Blanc Mollet, Reine des hàtives, Moufin-à-vent, Fréquin Lacaille, Godard, Medaille-d'Or, Rosine, Bedan des
Parts, Fréquin Audièvre, Martin-Fessart, Muscadet, Callouel, Longbois.

Les cidres les plus estimes viennent sur les terres silico-argileuses.

Autres régions du département, L'Entre-Bray et Picardie ; 

 

L'Entre-Caux et Vexin est formé des cantons de Boos, Darnétal et Buchy, ainsi que d'une partie du canton dArgueil au total 70.000 hectares. C'est un plateau vallonné où l'argile a silex affleure souvent. On y cultive : 

Première saison Blanc Mollet, Roumois.
Deuxième saison Binet Gris, Bramtot, Grise Dieppois, Rouge bruyère, Sonnette.
Troisième saison Amère de Berthecourt, Amère petite de Bray, Bedan, Benne des Authieux, Binet violet, Châtaignier, Gros Fréquin, Fréquin tardif, Marin-Onfroy, Matois de Bernay, Peau-de-Vache, Terrier gris. 

[...]
Cette nomenclature des fruits de la Seine-Inférieure montre combien est grand le nombre des variétés de pommes et combien diverses sont leurs exigences, puisque telle variété qui réussit bien dans un pays, ne
prospère pas ddns un autre. On a vu qu'un certain nombre de variétés dégénèrent, sont la proie des maladies et des insectes ; c'est le lot commun de toutes les variétés, multipliées par la greffe. Heureusement, le semis est là, qui permet l'obtention de variétés nouvelles appelées à remplacer les disparues.

JULES FÉLIX.

La Gazette du village : journal républicain, politique et agricole du 12 mars 1911 

Brioux  de la Seine-Inférieure et Warcollier de la Basse-Normandie sont les spécialistes et experts de l'acticité cidricole et pomologique  de l'avant 1ere Guerre mondiale à la Seconde Guerre mondiale : voici leur état des lieux

 

Charles Brioux fixe les limites cidricole, pomologique, climatique et géologique du cidfre du pays de Caux.

 

Brioux, Felix et Warcollier analysent la période et les conséquences de la 1ere Guerre mondiale sur l'état des vergers et des pommiers (variétés)

 

 

1935 :

« Le cidre, boisson nationale pourrait-on dire. Le meilleur est celui du pays d’Auge ; mais il en est d’excellent tout au long des rives de la Seine, dans le Roumois et le pays de Caux.  » [Dumesnil, 1935]

1939 :

« Boisson : (Prononcer : Bouèsson). Cidre léger, par opposition à « gros » qui est le cidre pur.

« J’ons fait dix siâs d’gros pis chin barriques d’ bouèsson » [Raymond Mensire, 1939] 

 

Nous sommes en 1910, Charles Brioux propose une aire géographique pertinente au cidre du pays de Caux qu’il publie en 1910 dans les bulletins de la Société Centrale d’Agriculture de la Seine-Inférieure.

Après cet état des lieux qui fera date, repris après-guerre, il constituera malgré tout un socle pour cette période entre-deux guerres.

Malheureusement il faut prendre en compte les dommages collatéraux de la 1ère Guerre mondiale qui constitue un premier revers au développement de l’économie du cidre normand et cauchois.

 

 

Plusieurs raisons sont à expliciter selon les études produites au 20e siècle et début du 21e siècle.

Comme nous l’avons vu pour l’avènement du cidre du pays de Caux daté après la Guerre de Cent Ans au 15e siècle, il faut constater que le 20e siècle connaitra un déclin fulgurant en un siècle à peine entre 1918 et 1980. A cela il est possible d’identifier plusieurs raisons

La première raison fut le contexte de la 1ère Guerre mondiale.

- Le premier point à identifier tient au fait que le paquetage du soldat de la Grande-Guerre contenait en boisson du vin. Le soldat conservera le goût de cette boisson potable sur le front et l’adoptera à son retour du front dans sa chaumière y compris si le cidre était la boisson courante. Ce phénomène évolutif dans les habitudes de consommation pris du temps.

La  seconde raison est le fait de  remarquer que la production de cidre pour la distillerie fut captée par l’Etat pour contribuer à l’effort de guerre : la fabrication des explosifs

La  troisième  raison tient au fait que certains les vergers sont un peu à l'abandon par manque de bras voire d’entretien 

 

Revenons à la première raison : 

- Le premier point à identifier tient au fait que le paquetage du soldat de la Grande-Guerre contenait en boisson du vin. Le soldat conservera le goût de cette boisson potable sur le front et l’adoptera à son retour du front dans sa chaumière y compris si le cidre était la boisson courante. Ce phénomène évolutif dans les habitudes de consommation pris du temps.

« Au début du XXe siècle, le vin n’était pas connu des familles paysannes de Bretagne. C’est la guerre de 1914-1918 qui a fait connaître aux soldats cette nouvelle boisson issue du raisin (dont le goût ne leur a pas déplu), suite à la volonté du gouvernement de soutenir la production viticole et de refuser le cidre dans la ration alimentaire des poilus moyens, puis pour les moments festifs et les cérémonies. » [Le Bras, 2018]

« Ces boissons alcoolisées (eaux-de-vie, liqueurs, vins, cidres, apéritifs, bières) sont tout autant constitutives de plusieurs identités régionales, voire de l’identité française dans son ensemble : la France, déjà au début du xxe siècle, est un pays « du boire ». Portée par la symbolique régionale (le cidre par exemple en Bretagne-Normandie) ou l’instrumentalisation politique (le « Vin de la République » célébré tout au long du xixe siècle4), la filière des boissons alcoolisées bénéficie alors d’un large rayonnement, tant en termes de puissance économique que de valorisation communautaire. »[Le Bras, 2018]

« Dès les premiers mois de guerre, l’ensemble des soldats mobilisés au front se voit allouer une quantité de vin (qui devient très vite le « pinard ») et d’eau-de-vie (la « gnôle ») pouvant être remplacés si besoin par du cidre ou de la bière, tandis que le champagne est abondamment consommé pour célébrer une victoire ou un jour de fête » [Le Bras, 2018]

« En mai 1915, le sénateur de la Manche Gaudin de Villaine demande au ministre de la Guerre pourquoi il n’organise pas de réquisitions de cidre en Normandie. Ce dernier lui répond qu’étant donné la difficulté de transport et le faible degré alcoolique du cidre, il est difficile d’« envisager la consommation de cette boisson par les troupes de la zone des armées » en dépit de sa présence dans la liste des boissons fournies dans la ration quotidienne des soldats. Le cas du cidre est intéressant car, à plusieurs moments, il met en lumière les concurrences qui existent entre les différentes boissons nationales. Ainsi, en 1917, une carte postale envoyée d’un hôpital finistérien présente un poilu breton et un congénère en habit traditionnel. Celui-ci lui verse du cidre dans sa gourde avec les mots suivants : « C’est pas du pinard mon gas [sic], mais du bon cidre de chez nous qui donne de la force à tous les poilus de Bretagne » [Le Bras, 2018]

« Édouard Barthe en novembre 1915. Il se plaint auprès du ministre de la Guerre que dans certains hôpitaux de la IIIe région (autour de Rouen) du cidre soit servi aux malades, et non du vin. Le ministre lui répond qu’il s’agit de la boisson locale, donc peu chère et, au même titre que le vin, hygiénique (c’est-à-dire qui peut être consommée sur des bases régulières) […]  Le Normand Gaudin de Villaine, lui, est secondé dans son effort l’année suivante par Charles Baudet, député des Côtes-du-Nord, demandant à nouveau au ministre de l’Agriculture s’il n’y aurait pas intérêt à réfléchir à une distribution de cidre auprès des armées » [Le Bras, 2018]

«[…] rapidement les intérêts particuliers ont prévalu sur l’intérêt collectif. C’est le cas dans la filière viticole, mais également dans les autres. Ainsi, dans les milieux cidricoles, on cherche tout autant à profiter de la situation. En juillet 1918, le ministère de l’Agriculture et du Ravitaillement, relayant les constatations du député du Morbihan Joseph Le Rouzic, dénonce les grandes quantités de cidre alors distillées45. Celles-ci sont passées de 10 439 hectolitres en 1915-1916 à 68 664 en 1917-1918, une augmentation sans commune mesure avec la croissance de la production, plus limitée. Selon le rapport, la raison est toute simple : il s’agit de réaliser des bénéfices supérieurs en vendant de l’alcool, bien plus rémunérateur. Or les distillateurs ont déjà « réalisé des bénéfices importants » pendant le conflit et la récolte à venir semble décevante, risquant de provoquer un déséquilibre sur le marché du cidre. Dans la foulée du rapport, un décret interdisant toute distillation entre le 15 juillet et le 15 septembre 1918 est alors édicté. » [Le Bras, 2018]

 Une industrie patriotique ? La filière des boissons alcoolisées pendant la Grande Guerre  - Stéphane Le Bras in : https://books.openedition.org/igpde/4921

Revenons à la seconde raison 

- Le second point à faire remarquer que la production de cidre pour la distillerie fut captée par l’Etat pour contribuer à l’effort de guerre : la fabrication des explosifs

 

C’est Arnaud Didier qui en 2018 nous raconte dans son étude du renouveau de la filière cidricole aux Editions Etudes Normandes, 2018 :  

"En effet, la fabrication des explosifs nécessaires aux hostilités nécessite de grandes quantités d’alcool. Or les combats ayant dévasté la quasi-totalité des régions du Nord-Est, jusqu’alors productrices des betteraves qui fournissaient le sucre nécessaire aux distilleries, ce sont les fruits qui deviennent la matière première tant recherchée. Les pommes à cidre trouvent donc tout naturellement un nouveau débouché, qui assure par ailleurs un revenu non négligeable à leurs producteurs." [Didier, 2018]

 

Warcollier rapporte ceci  dans le Bulletin de l'Association pomologique de l'Ouest, Association française pomologique pour l'étude des fruits de pressoir et l'industrie du cidre, 1921

in : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5568548w/f164.item

 
"Les industries de la pomme ont subi les conséquences de l'état de guerre, conséquences qui ont eu des répercussions profondes sur leur développement, sur leur vie même." [Warcollier 1821]

 

Année 1914 :

La récolte de fruits de pressoir, évaluée à 24 254 140 quintaux, correspondait à une bonne récolte moyenne :

« En résumé, rien de saillant, à noter à propos de cette campagne cidricole ; retenons seulement les faits suivants : récolte de fruits opérée avec quelques difficultés, fabrication du cidre déjà négligée à cause du manque de main-d'œuvre chez le propriétaire récoltant, vente du cidre presque nulle. »

Année 1915.Comment se présentait, l'année 1915 au point de vue cidricole. Une récolte extraordinairement abondante en fruits de pressoir, 37.354.960 quintaux, coïncidait, avec une année très déficitaire en vins.

On prévoyait que l'Administration de la Guerre aurait besoin, pour l'alimentation des troupes, de cidre pour remplacer le vin devenu rare et très cher, d'eau-de-vie qui entre de temps en temps dans la ration du soldat, de marmelades, confitures ou compotes. Enfin la fabrication des explosifs allait demander aux industries de fermentation de grandes quantités d'alcool.

Il semblait donc que, sans perdre de temps, les efforts allaient tendre vers une utilisation immédiate des pommes de nos vergers.

Notons enfin qu'en 1910, on vit l'ouverture de fabriques de marmelades, gelées, confitures pour l'armée. C'est la première fois que la pomme à cidre est vraiment utilisée en confiture sur une grande échelle.

En 1916 :

La récolte de pommes s'annonce comme faible, elle ne sera en effet que de 8.826.100 quintaux. Une crise sérieuse de transports sévit el paralyse en grande partie les transactions.  Rien de saillant à noter pour la campagne cidricole 1916.
Le cidre est utilisé dans les régions de production ; la fabrication des eaux-de-vie est peu importante ; celle des confitures se trouve aussi contrariée.

En 1917 :  

La recolle de pommes s'annonce comme excellente (elle sera en effet de 34.865.600 quintaux). On se préoccupe d'utiliser au mieux tous ces fruits, el l'on pense distiller les excédents pour fabriquer de l'alcool de guerre. La campagne, cidricole commence. La main-d’œuvre est insuffisante pour assurer la récolte des fruits ; beaucoup de fruits de première saison de maturité pourrissent, sous les arbres.

Signalons en passant que' les distilleries travaillant des pommes à cidre établissent qu'il leur faut en moyenne 2.350 kilos de pommes pour produire un hecto d'alcool pur. Le Service des Poudres admet 2.500 kilos. Certaines distilleries (distillerie de Raffetot) arrivent à utiliser 2.200 kilos seulement, avec des pommes de bonne qualité.

En 1918 :

Résumons maintenant les caractéristiques de Tannée 1918.

Il faut enregistrer comme un fait. Très important les hauts prix atteints par l'eau-de-vie amenés par les besoins très grands du commerce en liqueurs alcooliques. Comme conséquence, les industriels distillateurs font de gros bénéfices, il s'ensuit une ère de prospérité pour l'industrie cidrière. Les capitaux gagnés restent, en grande partie dans les indus- ries de la pomme et cela se traduit par des améliorations importantes des cidreries existantes : agrandissements, transformations de l'outillage et du machinisme. Création de nouvelles cidreries, de distilleries pour la fabrication de l'alcool de pommes, de confitureries, de sécheries de fruits, etc.

En 1919 :

La récolte des pommes s'affirme en 191g comme excellente (36.567.000 quintaux), et les événements montrent qu'en absence de moyens de transport suffisants pour assurer l'écoulement des fruits, si on n'autorise pas la libre distillation des cidres, la plus grande partie .de la récolte de pommes sera perdue.

En 1920

La production des pommes à cidre, en 1920, fut faible (12.545.ooo quintaux), et insuffisante pour les besoins. Les prix furent élevés. Au début, 200 à 225 francs la tonne, puis 275 francs ; en octobre, à Rouen, les prix sautent de 270 à 34o francs à quelques jours d'intervalle. 

En 1921

Le mouvement de baisse sur le cidre et les eaux-de-vie, se poursuit.

Quelles sont les caractéristiques de l’année 1921 ? L'année 1921 est caractérisée par une très abondante récolte de pommes dans toutes les régions de la France, de sorte que d'une manière générale les fruits devront être en grande partie utilisés sur place.

En conclusion Warcollier insiste sur plusieurs points

Notre production fruitière a subi une régression momentanée sérieuse, du fait de la destruction d'une grande partie des vergers des régions dévastées qu'on est heureusement en train de restaurer. C'est un travail de longue haleine, et il faudra attendre une vingtaine d'années pour voir les nouveaux arbres atteindre leur développement normal.

Bulletin de l’Association pomologique de l’ouest de  1920 à 1937 où figurent pour la Seine-Inférieure quelques cauchois :

  • Bouctot, député, conseiller général, propriétaire, à Canteleu, par Déville-les-Rouen, et 226, boulevard Saint-Germain, à Paris (7°).
  • Brioux (Ch.), directeur de la Station agronomique, à Rouen.
  • Fortin (Henri), agriculteur, à Manéglise, par Montivilliers.
  • Quirié, propriétaire, à Valliquerville, par Allouville-Bellefosse.
  • Michel Alfred, 78 rue de la Chaîne, Darnétal
  • Quevenne (Maurice), chef de culture au Préventorium de Canteleu
  • Langlois (Henri), propriétaire, à Bourdainville, par Yerville
  • Labruche, Abbé J. Curé de Sainte Helene par Colleville
  • Lavenu Marcel agriculteur ferme du Petit-Boc à Saint-Jean-de-la-Neuville par Bolbec
  • Une étude des années 1920 atteste de l'effondrement de l'effort produit depuis 1870

 

Etat des lieux par Charles Brioux, extraits du Bulletin de l’Association pomologique de l’ouest en 1925, édition 1926 – in : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5572841f/f92.item

« Depuis 1910, la grande guerre est d'ailleurs venue interrompre bien des initiatives, les pépinières ont été négligées et parfois laissées à l'abandon faute de main-d’œuvre ; elles commencent seulement aujourd'hui à reprendre leur prospérité ancienne. L'état des vergers de
la Seine-Inférieure en 1925, ne diffère donc pas beaucoup de ce qu'il était lors du précédent Congrès ; on fait peu de plantations nouvelles, mais on s'est néanmoins efforcé de combler les vides et d'entretenir en bon état les anciennes plantations.

Nous devons aussi rappeler la mémoire des savants pomologues Hauchecorne et de Boutteville, ainsi que des praticiens distingués tels que Power, de Saint-Ouen de Thouberville, Legrand et Dieppois, d'Yvetot, Godard, de Boisguillaume, Lacaille, de Frichemesnil, qui contribuèrent beaucoup à la diffusion des bonnes espèces dans le département de la Seine-Inférieure, diffusion qui fut aussi, par la suite, largement facilitée par la création des vergers d'études et des pépinières de porte-greffes de la Société Centrale d'Horticulture et de la Station agronomique de
Rouen, qui distribuent 'gratuitement chaque année plusieurs milliers de greffons des meilleures variétés.

A l'heure actuelle, le département de la Seine-Inférieure se classe au quatrième rang parmi les départements cidricoles.

Les pommiers sont presque exclusivement cantonnés dans les herbages ; les vergers ou herbages plantés se répartissent ainsi entre les différents arrondissements, d'après les statistiques dressées par la Direction des Services agricoles.

En résumé, les vergers occupent un peu plus du dixième de la surface totale du département.

Tel est, dans ses grandes lignes, le peuplement actuel des vergers de la Seine-Inférieure.

Ceux-ci renferment, comme je vous l'ai montré, un assez grand nombre de bonnes variétés dont les noms sont familiers aux Membres de notre Association.

La pépinière de porte-greffes de la Société Centrale d'Horticulture de la Seine-Inférieure, et celle de la Station agronomique, récemment reconstituée à Mont Saint-Aignan, ont contribué et contribuent encore dans une assez large mesure à leur propagation, mais les agriculteurs qui greffent et élèvent eux-mêmes leurs entes sont la minorité.

Il faut reconnaître que ce sont les pépiniéristes qui fournissent la majeure partie des jeunes pommiers destinés aux nouvelles plantations ou au rajeunissement des anciennes.

Ils peuvent exercer l'influence la plus salutaire sur la composition des vergers de leur région, comme l'ont fait autrefois les Legrand, les Lacaille et les Godard, s'ils ont à cœur de n'élever que des variétés de choix, au détriment de celles qui n'ont d'autre mérite que leur facile et rapide développement.» [Brioux, 1925-1926]

 

(suite)

Le Pays de Caux, malgré l'uniformité de sa constitution géologique, est trop vaste et soumis à des influences climatiques trop différentes, suivant la plus ou moins grande proximité de la mer, pour que la répartition des diverses variétés de pommiers soit la même d'une extrémité du plateau à l'autre, aussi, pour étudier sa pomologie, nous examinerons successivement la composition de quelques vergers pris dans les principaux centres Cauchois ; à côté de quelques variétés fondamentales, nous trouverons des variétés locales caractéristiques limitées à un certain rayon.

RÉGION D'YVETOT. — Nous commencerons par l'examen du peuplement des vergers de la région d'Yvetot, qui fut il y a cinquante ans, un centre actif d'études pomologiques ; aussi l'on y trouve un assez grand nombre de variétés bien connues.

On y cultive peu de pommes de première saison (environ 1/6), parce qu'elles viennent à maturité trop tôt avant la période des achats ; ce sont celles de deuxième saison qui prédominent, pour la vente en nature, tandis que celles de troisième saison sont surtout réservées pour la fabrication du cidre destiné à la consommation locale.

Les variétés les plus répandues sont par ordre de maturité :

1° saison. — Blanc Mollet, Reine des Hâtives, Vagnon
Legrand, Vagnon Tétrel.

2° saison. — Bramtot, Fréquin Lajoie, Fréquin rouge,
Muscadet de la Seine-Inférieure ou Antoinette, Médaille d'Or, Gros Muscadet, Rouge Bruyère d'Yvetot, Reine des Pommes, Rosine, Saint-Laurent.

3" saison. — Argile grise, Amer doux, Bedan ancien, Grise Dieppois, Marabot, Marin-Onfroy, Paradis, Peau de vache ancienne et nouvelle, Petit Hébert.

Le Vagnon Tétrel est une espèce locale appréciée, mais à bois un peu cassant. La Reine des Hâtives et la Grise Dieppois obtenues de semis à Yvetot par M. Dieppois,
conviennent surtout aux terres légères ; nous avons vu quelques beaux pieds de la seconde de ces variétés dans les vergers de M. Quirié, à Valliquerville, ils sont régulièrement productifs mais un peu sujets au dépérissement de l'extrémité des branches.

Le Gros Muscadet est très apprécié pour son cidre doux et parfumé, convenant à la bouteille, on le brasse soit seul, soit en mélange avec le Blanc Mollet.

La Médaille d'Or, qui s'était beaucoup répandue, chancre assez facilement dans la région d'Yvetot, aussi on l'abandonne peu à peu à cause de ce défaut et à cause aussi de son bois trop cassant.

Le Petit-Hébert est une variété locale de troisième saison, originaire d'Etalville, qui se répand peu à peu autour d'Yvetot.

Signalons comme pomme d'importation réussissant très bien près d'Yvetot, le Joly rouge, originaire des environs de Lisieux ; nous avons vu de très beaux arbres vigoureux et chargés de fruits dans les vergers de M. Quirié, précédemment mentionnés ; cette variété pourrait être propagée dans la région. A noter aussi la bonne réussite et la productivité d'une pomme à deux fins, originaire du Calvados, dénommée Gros Démange ; elle paraît bien adaptée au sol et au climat.

A l'est d'Yvetot, aux environs de Frichemesnil, Clères, le Furcey-Lacaille et l’Amère de Berthecourt sont assez répandus et donnent de bons résultats, mais on apprécie surtout l'Amer doux, variété de troisième saison, susceptible d'atteindre un grand développement et régulièrement fertile.

Variétés dégénérées. — Quelques bonnes variétés sont aujourd'hui totalement usées ou en voie de dégénérescence et ne doivent plus être multipliées ; nous citerons en première ligne le Vagnon ancien ou Doux à Laignel, complètement épuisé, l'Ameret Saint-Çôme, le Marin-Onfroy,
la Peau de vache ancienne donnant un cidre très coloré et très parfumé, le Bedan ancien, autrefois renommé, mais qui donne sur le plateau des arbres chancreux se dégarnissant à l'intérieur. Le Rouge-Bruyère d'Yvetot faiblit aussi depuis quelques années par le dépérissement de l'extrémité des rameaux.

RÉGION DE DOUDEVILLE ET DE SAINT-VALÉRY-EN-CAUX.

Si d'Yvetot nous nous dirigeons vers la côte en passant par le canton de Doudeville, nous retrouvons dans les vergers la plupart des variétés précédemment citées, mais nous avons à noter quelques variétés locales nouvelles : l'Osie, de deuxième saison, très saine, très vigoureuse, très fertile, de rapide mise à fruit, avec une pomme verdâtre un peu
grosse, de densité plutôt moyenne ; l'Abondance, de floraison très hâtive et de deuxième saison comme maturité, à fruits d'assez haute densité, et l'Ameret, bonne variétémalheureusement épuisée.

A signaler, dans le canton voisin d'Ourville, la pomme« de Roi » qui y est très répandue, le pommier est très fertile et atteint un grand développement.

Au bord de la mer, dans le canton de Saint-Valéry-en-Caux, nous pouvons noter, comme variété locale, le Bedan Hellouin, arbre très vigoureux, de grand développement et fertile, introduit au château de Néville par M. Hellouin ; cette variété a tendance à se propager, nous en avons rencontré aussi dans l'arrondissement de Fécamp.

Aux environs de Dieppe, les variétés les plus cultivées sont le Blanc Mollet, le Muscadet, l'Amère petite de Bray, le Jaunet de Bray, le Bedan, le Rouge Bruyère et le Roquet ancien, sorte de Marin Onfroy.

Signalons en outre comme spéciale au Petit-Caux et très répandue dans les cantons d'Eu et d'Envcrmeu, la pomme de Cat, de deuxième saison, .se prêtant particulièrement à la fabrication d'un cidre mousseux très apprécié des étrangers qui passent l’été sur la côte normande.

ARRONDISSEMENT DU HAVRE. — Si nous nous reportons à l'extrême pointe ouest du Pays de Caux, région au climat à la fois vif et humide, où l'argile à silex présente des affleurements importants, nous ne retrouvons plus toutes les variétés signalées dans le centre du Pays de Caux ; le nombre en est plus restreint et quelques variétés locales prédominent.

Le peuplement des vergers est ainsi composé :

1° saison. — Blanc Mollet, Gros papa, Vagnons divers.

2° saison. — Amer gris, Fréquin barré, Fortin, Médaille
d'or, Reinette douce, Saint-Nicolas, Saint-Michel.

3" saison. — Argile, Bedan ancien, Marin Onfroy, Reine
des Pommes, Peau de vache ancienne et nouvelle, plus un
certain nombre de variétés que nous n'avons pu déterminer.

Le Gros papa est une variété locale de première saison se retrouvant dans la plupart des exploitations des cantons de Saint-Romain et de Lillebonne ; l'arbre est vigoureux, productif à port retombant ; ses pommes sont assez grosses, d'un blanc verdâtre piqueté de taches brunes ; on doit les brasser aussitôt la cueillette car elles sont sujettes à la pourriture noire et se conservent assez mal.

Le Saint-Nicolas est plus apprécié et plus uniformément répandu dans tout l'arrondissement. C'est une variété de deuxième floraison et de deuxième maturité ; l'arbre réussit dans tous les terrains, il est vigoureux, rustique, à port un peu retombant, très fructifère ; les pépiniéristes
lui reprochent de fournir des tiges un peu tordues. Les pommes peuvent au besoin se brasser seules et donnent un cidre agréable, coloré, de bonne conservation.

Le Fortin est une autre variété locale, à grand développement dont le fruit ressemble à un Fréquin.

Le Saint-Michel, à fruits très estimés, est considéré comme usé ; ses jeunes pousses meurent chaque année .

Dans la région de Saint-Romain de Colbosc, le Bedan ancien reste en général plus vigoureux et plus productif que dans le centre du Pays de Caux et il occupe presque un quart des peuplements ; on brasse ses fruits en mélange avec ceux du Marin Onfroy que l'on continue à multiplier également.

Dans les cantons de Fécamp, de Valmont, de Cany, une variété de première et deuxième saison, le Vagnon-blanc ) est très appréciée ; nous en avons vu de très beaux arbres vigoureux et très productifs dans le verger de M. Brindel, situé entre Fécamp et Ganzeville. La pomme d'un blanc
jaunâtre teinté de rose a une chair très douce et très parfumée, et donne un cidre excellent. Nous croyons que l'on aurait intérêt à propager cette variété. Dans le même verger, nous avons remarqué des Blancs Mollets, des Binets rouges et des Binets violets vigoureux et productifs ;
l'Amère de Berthecourt y réussit également, ainsi que la Reine des Pommes, par contre, la Grise Dieppois se montre assez peu productive et ses fruits se conservent mal. A noter encore, comme espèces locales, l'Ameret Saint-Côme et le Galopin.

En résumé, les vergers de la pointe ouest du Pays de Caux comprennent environ 1/3 de pommes de première et deuxième saison, et 2/3 de pommes de troisième saison ; en dehors de la consommation locale, tous les fruits sont absorbés par les cidreries du Havre.

In : Bulletin de l'Association pomologique de l'Ouest, Association française pomologique pour l'étude des fruits de pressoir et l'industrie du cidre. Éditeur :  L. Caillot (Rennes), 1925, p. 90 à 104

1927 - la pépinière départementale de porte-greffes à Mont-Saint-Aignan par Charles Brioux

 

La Pépinière départementale de porte-greffes de la Seine-Inférieure

En vue de l'amélioration de la population de nos vergers, l'Association Française Pomologique et l'Office agricole de la Région du Nord se sont préoccupés, au cours de ces deux dernières années, d'organiser dans les différents centres pomologiques, des distributions de greffes des meilleures variétés de fruits à cidre.

Notre Association a dressé, pour chacune des principales régions cidricoles, la liste des variétés considérées actuellement comme les plus méritantes, et elle a organisé des centres de distribution de greffes là où il n'en existait pas jusqu'ici.

Deux systèmes, ayant chacun leurs avantages particuliers, peuvent être préconisés pour l'obtention d'un nombre suffisant de greffons présentant toutes les garanties désirables d'origine.

Le premier, qui peut être d'une application pour ainsi dire immédiate dans toute région où résident des Membres de notre Association, connaissant parfaitement les meilleures variétés de pommiers existant dans leurs vergers, consiste à prélever chaque année des rameaux sur les arbres les plus sains et les plus vigoureux et à les étiqueter soigneusement.

La distribution de ces rameaux peut être faite par les soins du Bureau de l'Association ou ides Groupements locaux qu'il y aurait intérêt à voir se créer dans les principaux centres pomologiques.

Il est certain que ce mode d'obtention ' des greffes est celui qui exige le moins de frais ; mais il est à craindre que, parfois, il ne soit difficile de satisfaire à des demandes nombreuses et de quelque importance pouvant se chiffrer, comme en Seine-Inférieure, par plusieurs milliers de rameaux, car il n'est pas rare de voir de beaux pommiers en pleine production ne donner annuellement qu'un petit nombre de pousses susceptibles d'être prélevées pour le greffage.

 

Enfin, la récolte des greffes est dans ce cas assez longue et peut mettre à l'épreuve la bonne volonté des producteurs.

Le second système, qui est appliqué en Seine-Inférieure depuis une quarantaine d'années, consiste à organiser des vergers d'études ou plus simplement dos pépinières de porte-greffes, dans lesquelles chaque variété est représentée par quelques sujets taillés spécialement pour la production du bois et sur lesquels la récolte des greffons se fait en peu de temps avec la plus grande facilité.

 

Il faut, dans ce système, compter avec les frais d'organisation du début et avec des frais annuels d'entretien qui, si l'on se limite à un nombre suffisamment restreint de bonnes variétés, sont loin d'être aussi élevés qu'on pourrait le supposer ; on obtient facilement, avec relativement peu de sujets, un grand nombre de rameaux vigoureux, conservant entièrement pour l'avenir, ainsi que l'expérience l’a prouvé, leurs qualités fructifères.

Le premier Verger-Ecole avec pépinière de porte-greffes fut créé de 1888 à 1895 par la Société centrale d'Horticulture de la Seine-Inférieure, à Quincampoix, suit- une petite ferme d'une dizaine d'hectares offerte à la Société par l'un de ses Vice-Présidents, M. Dupré, moyennant paiement
d'une rente viagère.

Ce verger important, qui comportait à l'origine 530 porte-greffes de pommiers et poiriers à cidre, appartenant à un peu plus de cent variétés et 350 pommiers et poiriers de haute tige, n'a pas cessé, depuis sa création, de faire des distributions annuelles de greffes.

Un second Verger d'études fut créé à la même époque à la Station agronomique de la Seine-Inférieure, de 1888 à 1890 par son Directeur, M. Houzeau. Installé sur une surface beaucoup plus restreinte, il comprenait à la fois des porte-greffes de pommiers et poiriers à cidre et des porte-greffes d'arbres à fruits de table : cerisiers, pruniers, pommiers et poiriers qui permettaient de satisfaire de nombreuses demandes de greffons.

Mais ce verger avait malheureusement été installé sur un sol d'alluvion léger et graveleux, aride l'été, convenant peu pour les fruits à pépins, et au voisinage d'une agglomération d'usines dont les fumées souillaient de plus en plus l'atmosphère.

Les arbres périclitaient et étaient constamment envahis par les pucerons malgré des traitements énergiques et fréquents ; aussi après la .guerre, il fallut envisager soit la suppression pure et simple du verger, soit sa reconstitution en meilleure exposition et en meilleur sol.

Le Conseil général de la Seine-Inférieure ayant décidé de maintenir un Service de distribution de greffes, comme aidant puissamment à la propagation des bonnes variétés de fruits, mit à la disposition de la Station agronomique et de l'Office agricole départemental, qui prit à sa charge tous les frais de la nouvelle installation, une portion d'herbage d'une ferme départementale située à Mont Saint- Aignan, sur le plateau dominant Rouen.

Je crois devoir donner ici quelques détails qui pourront être utiles à ceux qui désireraient installer une petite pépinière de porte-greffes comportant les meilleures variétés de pommiers de leur région.

La nouvelle pépinière départementale possède toujours des porte-greffes pour fruits de pressoir et des porte-greffes pour fruits de table; cette seconde section a été maintenue en raison des demandes toujours très nombreuses qui émanent, non seulement des banlieues de Rouen et du
Havre, mais aussi des centres ruraux.

La surface totale de la pépinière est d'environ 4.000 mètres carrés ; elle occupe, comme indique le plan ci-joint, un rectangle de 82 mètres de long sur 46 mètres de large, avec une grande allée centrale et des allées latérales de 3 mètres de large.

En résumé, -le verger-pépinière actuel comporte en tout 348 porte-greffes appartenant à 134 variétés qui se répartissent ainsi :

Nombre de variétés de porte greffes

Pommiers à cidre :  46

Pommes à deux fins : 6

Poiriers à cidre : 7

Charles Brioux, Directeur de la Station agronomique
de la Seine-Inférieure.

 

 

Warcollier, en 1927 sélectionne les fruits suivants pour le pays de Caux

Région d’Yvetot toutes saisons confondues : Blanc-Mollet ; Précoce David ; Reine des Hâtives ; Vagnon Legrand , Vagnon Tétrel ; Bramtot ; Fréquin Lajoie ; Fréquin rouge ; Godard ; Hauchecorne , Médaille d’Or, Rouge Bruyère d’Yvetot ; Reine des Pommes, Saint-Laurent, Rosine, Gros-Muscadet de la Seine-Inférieure ou Antoinette ; Amère de Berthecourt, Argile grise Bedan ancien, Bedan des Parts, Grise Dieppois ; Marin Onfroy ; Paradis ; Peau de Vache ancienne, Peau de Vache Musquée ; Peau de Vache nouvelle ; Petit Hébert ; Amer doux.

Région de Doudeville et Saint Valéry-en-Caux, toutes saisons confondues : Blanc Mollet ; les Vagnons, Bramtot, Marin Onfroy ; Rouge Bruyère : Osier ; Antoinette ou Abondance ; Gros Muscadet ; Grise Tardive ; Ameret de Roi.

Région de Saint-Valery : mêmes variétés que dans la région d’Yvetot et ; Bedan Hellouin, Rouget ou pommes à glanes, Massé.

Environ de Dieppe : on trouve principalement : Blanc Mollet, Amère petite de Bray, Muscadet, Rouge Bruyère, Jaunet, Bedan, Roquet, de Cat

Région du Havre : Blanc Mollet, Gros Papa ; les Vagnons ; Amer gris ; Fréquin Barré ; Reinette douce, Rouge Bruyère, Saint-Michel, Saint-Nicolas, Fortin ; Bedan ancien ; Marin-Onfroy, Reine des pommes, Peau de Vache ancienne et nouvelle ; Argile.

In : https://edepot.wur.nl/276317

- Le troisième point tient au fait que certains les vergers sont un peu à l'abandon par manque de bras voire d’entretien :

« Depuis 1910, la grande guerre est d'ailleurs venue interrompre bien des initiatives, les pépinières ont été négligées et parfois laissées à l'abandon faute de main-d’œuvre ; elles commencent seulement aujourd'hui à reprendre leur prospérité ancienne. » [Brioux ? 1926]

D’autres acteurs de l’activité cidricole contemporaine vient souligner  les affres de l’entre-deux guerres

« Dans la première moitié du 20e siècle le cidre devient la seconde boisson la plus consommée par les français (20 millions d’hectolitres) derrière le vin (50 à 60 millions d’hectolitres) et devant la bière (15 millions d’hectolitres). »

 

« La situation s’aggrave avec les deux guerres mondiales : l’Etat français réquisitionne les pommiers pour répondre aux besoins d’alcools de l’industrie et de l’armement, notamment pour la fabrication de poudre. En parallèle, sur le champ de bataille, les combattants prennent goût au vin, par ailleurs plus facilement transportable que le cidre. 1 Cf. lettre de saisine en annexe 1 Avis 10 La destination de l’alcool d’Etat va être une véritable aubaine pour les planteurs, qui vont pouvoir livrer d’énormes quantités de calvados pour la fabrication de poudre. » [La filière de la pomme en cidre en Normandie _ CESER, 2024]

https://ceser.normandie.fr/sites/default/files/2024-11/LafilieredelapommeencidreenNormandieCESER.pdf

 

 

1929 à propos des cidres

La qualité des cidres était en 1929 très supérieure à celle des années précédentes. Le Jury, à l'unanimité décerna le premier prix et un diplôme de médaille d'or à M. Lemarié de Saint-Ouen-de-Thouberville dans la catégorie des producteurs, et le même prix à M. Calle, de Bléville (Le Havre) dans la catégorie des marchands. Ces deux cidres présentaient des qualités incontestables et faisaient le plus grand honneur à notre Normandie ; il serait à,souhaiter que tous nos producteurs à cidre fabriquent de tels breuvages, le cidre de Normandie, déjà si célèbre, acquérait une réputation qui en accroîtrait singulièrement les débouchés. Il est rapporté que la plupart des méthodes employées sont primitives ou empirriques, les fruits sont mal sélectionnés, et ce ci explique les irrégularités de qualité, la mauvaise conservation du cidre, son inaptitude au transport, défauts qui le font discréditer et ne rendent pas toujours rémunératrice la production des pommes. Dans les eaux-de-vie, la palme rtevint à M. Dupuis d'Offranvielle dont l'excellent calvados vieux fit les délices des jurés. [SCA, 1929]

 

 

1935 , à propos des cidres

Les cidres étaient en général d'un goût agréable et d'une qualité très supérieure à celle des cidres que l'on trouve dans la plupart des fermes. C'est une coantatation intéressante, qui prouve que les bonnes méthodes commencent à pénétrer un peu partout, chez les fabricants comme chez les producteurs, et que la propagande active, qui est faite actuellement en faveur du cidre, porte ses fruits. Le Jury ne peut départager les trois premiers cidres en boutelles, et donna un premier prix ex aequo à M. Paumelle, précité , à M. Rafin, à Bourgtheroule, et à M. Lebaillif, du Havre. Derrière eux suivent de près M. Gosselin, de Neufchâtel, second prix devat M. Pernel, du Hulme, Mme Mény, précitée, et M. Levasseur, à Eturqueraye. [SCA, 1935]

 

1938 à propos des cidres

"la revanche" d'un duclairois sur Rabelais,  quelques siècles plus tard.

 

Les cidres étaient, si l'on peut dire, de qualités diverses rapporte la Société Centrale d'Agriculture.  Il y en avait de trèds bons, des moyens et des médiocres, mais il y en avait  pas de qualité inférieure, comme nous en avions trouvé l'an dernier. M. Gilbert, à Duclair confirma son classement de 1937, ce qui prouve qu'il tient la bonne méthode, il distança d'un point M. Eugène Gruchy, à Pissy-Pôville, derrière lequel se tenaient de près MM. Rouas, à Bourg-Achard, Penel, au Houlme, Pommel et Haubert. M. Haubert présentait, en outrer, une boisson qu'il serait à souhaiter de trouver sur toutes les tables ; le Jury lui accorda une mention spéciale. [SCA, 1938]

La liste des membres de la Société Centrale d'Agriculture de la Seine-Inférieure en 1938  du pays de Caux  sont : 

Canton de Bacqueville : Leprince Adrien ; Leforestiet André ; Flaman, Gaston ; Poulain Jean ; Floutier F. ; Mlle Deschamp Mathilde ; MM. Lheureux Louis ; Maurisse Jules.

Canton de Buchy  : Leblond Edmond ; Banse Emile ; Roberge Alfred ; Dupressoir Paul ; Belhen Ernest.

Canton de Cany : Lucas Eugene ; Van Collen ; Neuville Léon ; Laine Daniel ; Lange Edmond ; Leconte Maurice ; Rocquigny Henri ; De Sancy de Rolland ; Lepicard Bernard.

Canton de Caudebec-en-Caux : Troupli Léon ; Dr Lanos ; Duhamel La Picotière

Canton de Clères : Faucon Edouard, Fauvel Daniel ; Fauvel René ; Thierry Jules ; Dr de l'Etablissement départemental de Grugny ; 

Canton de Ciquetot-l'Esneval :  Pasquier Charles ; Edouard Marcel ; Leforestier Désiré ; Edouard Paul ; Bureau, Député.

Canton de Darnétal :  Liot Raymond ; Lecoeur; Duboc Henri, Ponchy Théodore ; Périer René ; Courtois Ambroise ; Fromage Georges ; Boisanfray ; Duthil : Houssaye Jean ; Ratel Jules ; Lainé Maurice ; Piette ;  Gaillard René ; Duval Gustave ; Dumont Eugène. 

Canton de Dieppe : De Ladoucette ; Prince Sturza Michel ; Bérard André ; Le Directeur des Etabl. Normands d'Approv. pour l'Agriculture ; Dr Cassel ; Courmaontagne; Bertheuil ; Duramé ; Boissière Marcel ; Leclerc Raymond.

Canton de Doudeville : Lavoinne André ; Lavoinne Emile ; Stackler André ; Rousselet Armand ; Boullier Gustave ; Maupaix ; Lemercier Joseph ; Blondel André ; Lavoinne Bernard ; Vickers Douglas ; Follet Albert ; Chevalier Marcel ; Leforestier Pierre : Savoye ; Charron Robert ; Lambrard Jean.

Canton de Duclair : Lucas Georges ; Bigot Emile ; Dupond ; Gransire Daniel ; Robert Georges.

Canton de Fauville : Depoily François ; Legros Georges ; Louvet Napoléon ; Couture Jules ; Eudier Maurice ; Maupas ; Thélu ; Fenestre Paul ; Déve André ; Huré André ; Vittecoq Henri ; Paquin Joseph ; Geneviève Armand ; Carpentier Charles ; Renault Charles ; Huré Gaston ;  Lainé ; Lepicard Jacques ; Depoilly Hubert ; Lepicard André.

Canton de Fécamp : Gayant René ; Tesnière Paul ; Legrand Eugène ; Lanctuit Henri, Golain ; Ediuard Eugène ; Loisel Eugène ; 

Canton de Fontaine-le-Dun :  Gilbert Roger ; Ouvry Georges ; Olivier G ; De Montalembert ; Lheureux Frères ; Ouvry Fernand.

Canton de Goderville : Vittecoq Joseph ; Lemonnier Emile ; Bellet Edouard ; Decultot Philippe ; Leroux ; Catherine Léon.

Canton de Lillebonne : Gashet ; Hanisyde Pierre ; De Illers ; Berge René ; Roussel Bernard ; Forthomme Jules.

Canton de Maromme : Desrez ; Sasle ; Dauge Adrien ; Lemercier Eugene ; Roussel Aldric ; Deschamp Patrice.

Canton de Montivillers : Jacqueline Sylvain ; Tranchant Gaston.

Canton d'Ourville :  Deneuve ; De Beauvoir ; Capperon Cyr ; Lange Felix ; Lepicard Jean ; Lavoinne Andre ; Mme Lange Gustave; Séry Louis.

Canton d'Offranville : Dubosc Jean ; Levasseur Emile ; Sulpice Pierre ; Dubosc André ; Dupuis Proper ; Avenel ; Terrien Eugène ; Leclerc françois ; Leclerc Louis ; Le Rond de Davaye ; Mme Lange Cécile ; M. Brimont.

Canton de Pavilly : Badin Georges ; Levaillant Paul ; Bullot Emile ; M. Paumier Charles ; Seyer Pierre ; Lapierre Adrien ; Gransire Emile ; Carpentier Léon ; Govare ; Peltier.

Canton de Rouen : extrait - Brioux Chales ; Deconihout Jules ...

Canton de Saint-Romain : Bertel ; Sanson Edouard ; Sanson Bernard ; Laffrat ; Thirel Léon ; Leberquier ; Du Douet de Graville.

Canton de Saint-Valery-en-Caux : Briard Antoine ; Néel Jules ; Retel ; Leforestier Adrien ; Bletry Jean ; Monville René.

Canton de Totes : Lemoine ; Lacointe Paul ; Legrand ; Denisse Gérard ; Bruxelle Robert; Delamare Julien ; De Belloy ; Delacroix Henri ; Delacroix Gaston ; Du Luart.

Canton de Valmont :  Le Clercc Robert ; Le play Marcel ; Leplay Alexandre ; Drouet Emile ; Tesnière Fernand ; Olivier Eugène; Tesnière Adrien ; Monville Louis ; Lerebours Robert; Vittecoq Alphonse.

Canton d'Yerville : Lepicard Charles ; Cabot Edouard ; Lecoeur Constant (fils) ; Gilles Jacques ; Lecoufle Joseph ; Rousselet Jean ; Desmares Joseph ; Duparc ; Quilbeuf Joseph ; Leroux Edmond; Clastot ; Selle Médéric.

Canton d'Yvetot : Demonchy André : Georges Gustave ; Séry Jules ; Monville Gaston (fils) ; Delavigne Roger ; Beux ; Monville Gaston ; Nion Paul ; Evrad ; Quesnel Louis ; Coddeville Armand ; Coddeville Georges ; Coddeville Joseph ; Bretteville ; Bréhier Louis ; Delarue ; Laloy ; Larson Paul ; Leroux ; Romain & Vieillot ; Cuisot ;Lecoeur Constant; Fercoq Alexandre ; Sery René ; Levasseur ; Duval Eugène ; Dodelin Bernard ; Langlois ; Monville Adrien; Langignon Robert; Landais Gustave ; Guillemot-Treffainguy ; Dodelin Raoul ; Dodelin Léon; Mouy.  [SCA, 1938]

17 ans après-guerre il faut réorganiser les vergers :

fumures, regreffage, élagage 

Les vergers de plein vent en 1937 : la réorganisation

(en construction)

Après la Première guerre mondiale le verger français  n'est plus exportateur mais importateur car les vergers ont vieilli et faute de soins la production est tombée. La consommation des fruits augmentent en fruits  à couteau. Il est alors question en 1937 de renouveler le verger.

Les vergers-prés sont nombreux en Normandie. Les vergers-prés en Seine-Inférieure occupent 72 000 hectares. dont une partie importante de pommier à cidre alors que par exemple dans le Nord on fait prioritairement de la pomme à deux fins.

- La priorité sera  d'obtenir un meilleur rendement par des fumures appropriées au sol et aux sujets ;

- le recours au regreffage de pommiers ayant une végétation suffisante et en éliminant les sujets en voie de dépérissement. Faire face à l'expérimentation longue de nouvelles variétés. 

Les variétés emblématiques de la Seine-Inférieure : 

Reinette Baumann, Reine des Reinettes, Bénédictin ou Reinette normande, Reinette d'Espagne, Reinette de Caux,  Reinette de Bailleul, Cramoisie de Gascogne.

Par ailleurs la diversité vaut mieux que de se limiter à quelques variétés.

- l'élagage  est un bon recours à l'amélioration des vergers : il faut maintenir la pénétration de l'air et de la lumière afin d'éviter les refuges de parasites et poour supprimer le bois malade, cicatriser les plaies au goudron.

Tout ceci contribue à l'augmentation de la production sachant que la pomme à couteau ne se traite pas comme la pomme à cidre. [SCA, 1937]

Beau type de greffage sur sujet de 60 ans  - Greffage en couronne [SCA,1937]

Pommier soigneusement elague - tres belle production - variété Double Bon Pommier [SCA, 1937]

 

Pommier non elagué [SCA, 1937]

 

En 1942  par Francis Yard

« Pays de Caux. Goût de terroir. Pays de Bray.  Plateaux, cidre coloré ; Vallées, cidre faible et pâle. Vexin. Plateaux, terroir, vallées, cidre faible. Pays d’Auge. Cidre puissant et vertueux. Cotentin. Cidre excellent. » [Yard, 1942]

 

La paix retrouvée n'eut pas le même effet sur les pommiers et la boisson appelée cidre connut tout juste l'effet inverse contrairement à la période de la paix retrouvée à la fin de la guerre de Cent Ans

Premier sujet "tabou"

Le cidre, les pommes et l'après Seconde Guerre mondiale

Le démantelement des vergers : un de plan destruction massive

« La situation s’aggrave avec les deux guerres mondiales : l’Etat français réquisitionne les pommiers pour répondre aux besoins d’alcools de l’industrie et de l’armement, notamment pour la fabrication de poudre. En parallèle, sur le champ de bataille, les combattants prennent goût au vin, par ailleurs plus facilement transportable que le cidre. 1 Cf. lettre de saisine en annexe 1 Avis 10 La destination de l’alcool d’Etat va être une véritable aubaine pour les planteurs, qui vont pouvoir livrer d’énormes quantités de calvados pour la fabrication de poudre.» [La filière de la pomme en cidre en Normandie _ CESER, 2024]

La seconde Guerre mondiale :

Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte

Les bombardements de la seconde guerre mondiale détruisent plus de la moitié des vergers normands. Il faut désormais nourrir la population en produisant massivement. Les vergers basse tige remplacent alors les hautes tiges souvent arrachés pour cause de rendements moins importants.

En raison de l'après-guerre 39-45 :

1 - La politique étatique du remembrement qui a bénéficié à l'agriculture intensive au détriment des petits producteurs agriculteurs de cidre dans leurs masures et alentours : encouragement a faire autre chose que du cidre

2 - Cas particuliers du cidre de Longueville mais qui ne correspond pas au  goût du cidre de terroir aux nombreuses variétés  douces amères et acides des trois saisons, le cidre doux de Longueville se faisant avec peu de variétés

3 - L'arrivée de l'eau potable au robinet

4 - La prime à l'arrachage ou à l'abattage   NOTAMMENT pour la raison suivante : Le cidre, transformé en alcool va alors à l’industrie de la poudre à canon. Après 1945 la fabrication de la poudre change et l’état organise l’arrachage des vergers.

5 - On remplace plus ou moins les poiriers à cidre

6 - des talus-fosses disparaissent, de grands hangars rognent sur les vergers anciens pour mettre des tracteurs plus imposants et des machines agricoles plus volumineuses.

7 - Le vin remplace le cidre suivi par la bière

- Fin des années 1980 : les particuliers (producteurs) brassent beaucoup moins

On se tourne plus vers le vin et la bière et l'eau potable coule à flot au robinet,

- de plus l'exode rural des ruraux vers la ville précipité l'abandon de faire son cidre chez soi (encore moins en immeuble ou zone pavillonnaire

Et on arrive à vous dans les années 1990 où les producteurs de la nouvelle génération ont la volonté faire du cidre du pays de Caux qualitatif, de terroir avec un cahier des charges plus précis avec la volonté de sélectionner les pommes emblématiques du terroir du pays de Caux

Ainsi plusieurs contextes ont fait chuter la consommation de cidre au 20e siècle.

La consommation du cidre bouché s'est toutefois maintenue.
 

 

 

 

Premiers éléments de réponse  par Philippe Morice en 1955.

On aura une idée de la production de pommes et poires à cidre en Normandie par le tableau ci-dessous, mais il ne s’agit que d’évaluation du Ministère de l’Agriculture, puisqu’il n’y a aucune déclaration de récolte obligatoire en matière cidricole.

Philippe Morice indique qu'en 1939 la production avoisinait en milliers de Quintaux : 1600  ; en 1944 :  3000 ; en 1945 : 250 ; en 1946 : 800 ; en 1947 : 1500 ; en 1948 :300 ; en 1949 : 1300 ; en 1950 : 2500 ; en 1951 : 620 ; en 1952: 3000 ; en 1953 : 2151

tableau estimatifs de production de pommes et poires à cidre en Seine-Maritime.

Concernant les pommes à couteau en 1954, c'est l'invasion des pommes  d'Argentine via le Havre, toutes calibrées. L'importation est féroce et comment résister en Seine Maritime car la culture intensive des pommes de table les vergers basses-tiges sont très rares, il en existe à peine 100 ha en Seine-Maritime.

Concernant le Cidre : 

Avant la guerre de 1914-1918, la majeure partie des récoltes de pommes, en Normandie, était utilisée pour la fabrication du cidre. Beaucoup de familles, même en ville, possédaient leur pressoir, leurs fûts et fabriquaient tous les ans la boisson de l’année.

la consommation  chute en campagnes de 4 321 642 hectolitres en 1947-1948 à 3 830 019 en 1953-1954.947-1948 à 359.449 en 1953-1954

En Seine-Maritime de 380 097 hos en 1947-1948 à 419 215 en 1953-1954.

Cidres dits de monovariété

Indépendamment de ces principes très généraux, certains essais privés ont été tentés pour arriver à des cidres de monovariété.L'essai le plus concluant a certainement été fait  en Seine--Maritime, à Anneville-sur-Scie.

La section cidrerie, fondée en 1950, est une des branches de la Société Anonyme Distillerie de la Vallée de la Scie, constituée en 1925.

en construction

« […]  la profession ne va pas chercher à résister au « retour du vin », notamment car les exploitants ne cherchaient pas de débouché alternatif. Cela aura pour conséquence une suspension des travaux de recherche sur le matériel végétal, les pratiques culturelles… Cela aura des conséquences lourdes pour l’avenir de la filière, notamment après la seconde guerre mondiale, ou des producteurs indépendants vont disparaitre, en l’absence du débouché militaire. Les années 1950 vont donc être marquées par une régression du verger, que ce soit par le découragement des producteurs, mais également par la politique française, qui inaugure en 1953 une politique d’arrachage des pommiers, puis un abandon progressif des quotas d’Etat. Ce mouvement va s’accentuer dans les années 1970 avec la spécialisation laitière des exploitations, la mécanisation et la transformation des terres de labour. La crainte des producteurs d’une crise des approvisionnements, justifiée par la diminution du nombre de pommiers, les amène à se tourner vers les vergers basse-tige, c’est-à-dire poussant plus vite, plus rentables, et dont la récolte est mécanisable. Cette décennie voit également une restructuration de la filière avec la pénétration de groupes industriels et financiers sur le marché, avec notamment le groupe Pernod-Ricard, qui va racheter beaucoup de cidreries. »

In : La filière de la pomme à cidre en Normandie Octobre 2024, OCTOBRE 2024 ; CESER Normandie, https://ceser.normandie.fr

On constate à la fin du 19e siècle la rareté des pommiers sauvages 

Dans les ETUDES POMOLOGIQUES Monsieur E. VIMONT, directeur du journal le Cidre, Paris, transmets une information sur la rareté des pommiers sauvages : 

"Je vais vous donner quelques renseignements utiles sur les observations que i’ai faites, observations remarquables sur les fruits de semis dont la richesse alcoolique s’est révélée d’une façon extraordinaire sur tous les fruits existant dans nos vergers depuis bientôt un siècle ou davantage.
La cause que je constate est, je pense, le progrès accompli dans le choix des variétés douces et amères, les pommes acides et sauvages ayant disparu, par suite du progrès agricole, du défrichement des haies et des forets. La sélection toute naturelle faite par les abeilles a seule, à mon avis, transformé les fruits de semis qui sont à peu près 1/3 plus riches en sucre et alcool, tanin, qu’une partie
les anciennes variétés.[Vimont, 1894]

 

En 1952 on étudie encore le pommier sauvage, ce dont nous reparlerons  pour les années 2010 à 2025.

Généralités :

Il est rapporté que la patrie historique du pommier se situe dans le vaste territoire s'étendant de la Mer Caspeinne jusqu'en Europe Centrale. Répendu en France on y reconnait deux types principaux : le malus aserba et le malus paradisica. Au 1er siècle en Gaule on y trouvait les mêmes fruits qu'en Italie. Pline cite la" pomme gauloise". Il est rappelé dans cette présentation que le professuer A. Chevalier  soulignait que ce pommier devait être entretenu par les Celtes à travers les forêts, et que ceux-ci devaient faire des pommes de bois une boisson fermentée. Au Moyen-Âge, le cidre normand fait avec des pommes de bois a très mauvaise réputation.

Il est dit qu'il ya l'espèce pure mais celle aussi provenant de pépins de variétés cultivées tombés par hasard en forêt et que celles-ci peuvent donner des formes dites sauvages, citant l'abbé Fournier.

On sait aujourd'hui lit-on, que les pommiers à cidre à deux fins, à couteau proviennent d'un groupe d'hybrides issus de Malus domestica  = malus communis contrairement aux idées reçues. C'est avec un grand bon sens que le professeur A. CHevalier déclare que chaque forêt doit avoir ses pommiers sauvages propres. Le pommier poussant à l'état sauvage était abondant au moyen âge dans les forêts normandes. Il a beaucoup diminué depuis. Aujourd'hui, pour la forêt du Rouvray et celles citées autour de Rqouen, Barbier de la Serre, conservateur des Eaux et Forêts le note comme assez commun.

La petite histoire du pommier sauvage aux environs de Rouen. (extraits)

On assure que jusqu'au 11e siècle, on n'avait bu que du cidre de pommes sauvages en Normandie. les pommiers de sbois étaient soumis à des règlements qui permettaient leur conservation  (Lois saliques, dîme sur la cueillette). 

Pour les environs immédiats de Rouen, Charles Robillard de Beaurepaire nous montre qu'au 15e siècle on connaissait deux variétés de pommes de Bosquet, dont l'une recueillie dans les bois ne seravit qu'à faire du cidre. Il nous indique qu'en 1339, les moines de Saint-Ouen cueillaient des pommes de la forêt Verte à Quincampoix pour le "verjus". En 1486, l'archevêque de Rouen fit cueillir, dans les bois de Déville-lès-Rouen, 70 boisseaux de pommes de Bosquet qu'il envoya au pressoir de Saint-Gervais pour faire du verjus de pommes dont on hâte la fermentation par addition de sel. (Nous sommes allés dernièrement dans ce qui reste de ces bois, Bois de l'Archevêque, et nous n'avons rencontré aucun malus).

La conservation des pommiers de bois n'étant plus soumise aux anciens règlements, ceux-ci disparurent petit à petit de nos forêts normandes. On les enlevait pour les utiliser comme porte-greffes ( ce qui, maintenant, n'est pas recommandé).

L'importance du pommier sauvage en Normandie est confirmée par les noms populaires donnés aussi bien à cet arbre qu'aux fruits. Ch. Joret, dans sa flore populaire de Normandie pour la région mentionne pour l'arbre  : Boquet, Boquetier, Sauvagin ; pour les fruits : Boquette, Bignette.

en 1952 des analyse du moût ont été faites à Rouen.

[Bulletin de la Société Générale d'Horticulture du Département de la Seine-Inférieure, 1952]

 

en construction

 

Le sujet "tabou"

1 - le remembrement

Après la seconde Guerre mondiale, le remembrement, politique visant à réorganiser les terres cultivables pour améliorer leur rendement, entraîne la disparition de la plupart des petits vergers. Perçus comme des obstacles à une utilisation rationalisée des sols, ils sont arrachés, malgré l’opposition des agriculteurs les plus modestes.  In le cours de l’histoire, remembrement histoire d’une politique au taille-haie

https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-cours-de-l-histoire/remembrement-histoire-d-une-politique-au-taille-haie-9100320

Le remembrement : échanges de parcelles pour une agriculture davantage motorisée avec des tracteurs plus imposants

Des années 1950 aux années 1980, le remembrement recompose radicalement le paysage agricole français pour agglomérer des parcelles et les agrandir, au profit d'une logique d'efficacité et de rentabilité. Le mode de vie des paysans en a été profondément bouleversé. In : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-cours-de-l-histoire/remembrement-histoire-d-une-politique-au-taille-haie-9100320

En 1918 et 1919, les lois Chauveau sont un premier cadre législatif, qui doit permettre le remembrement des terres. Celui-ci entend rassembler différentes parcelles agricoles afin d'améliorer leur rendement et l'efficacité de leur exploitation. "Le morcellement du paysage agricole devient très important à la fin du 19ᵉ siècle et au début du 20ᵉ siècle, notamment lors des successions. Pour marquer les limites de propriété, on construit des haies, et donc du bocage, ce qui complique l'activité agricole. Des parcelles sont contenues dans d'autres parcelles, ce qui oblige à passer chez le voisin. [...] La propriété est complètement émiettée : une ferme est constituée de multiples parcelles, parfois à des kilomètres les unes des autres", rapporte la journaliste et documentariste Inès Léraud, autrice avec Pierre Van Hove de Champs de bataille, l'histoire enfouie du remembrement (Delcourt, 2024). In : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-cours-de-l-histoire/remembrement-histoire-d-une-politique-au-taille-haie-9100320

LIRE / https://www.terrestres.org/2025/01/22/le-remembrement-agricole-cest-tout-un-monde-qui-est-bouleverse/

Cependant en Pays de Caux les vergers étaient majoritairement dans les cours et masures

Cela a peut-être moins impacté les cauchois d’autant que les vergers-prés  ne sont pas majoritaires.

1954 :

« C’était la saison du cidre. On « pilait ». En ville vous dites que vous brassez » [le Povremoyne, 1954]

en construction

2 - Cas particuliers du cidre de Longueville et du Calvados Boulard d'Yvetot  : des produits fabriqués dans le pays de Caux mais avec  spécifiquement des variétés  sucrées du Pays d'Auge ou bretonnes (cidre doux)  et de la cidrerie Clastot d'Yvetot :  avec la fameuse et emblématique "Vagnon" de Legrand qui a pu être régénérée de la Doux à Lagniel qui était en voie de disparition.

 

Avènement d'un cidre doux qui s'écarte radicalement du cidre du pays de Caux, cidre de terroir.

 

Le cidre de Longueville

Cidre de longueville un genre de cidre, admis par les plus farouches partisans de l’antialcoolisme, aura ceci de particulier qu’il pourra être distribué au consommateur comme le sont la bière ou les boissons gazeuses concurrentes directes du cidre, c’est-à-dire — qu’à condition de ne pas être logé dans des récipients de plus d’un litre.

 

"La section cidrerie, fondée en 1950, est une des branches de la Société Anonyme Distillerie de la Vallée de la Scie, constituée en 1925.

L’originalité de cette société, qui comprend 159 actionnaires, réside dans le fait que ses membres sont en quasi-totalité à la fois producteurs de fruits à cidre et membres d’une société coopérative agricole, créée en 1909.

Son but est de produire dés cidres purs titrant 5°5 à 8° (alcool acquis et alcool en puissance). M. Auclair, qui la dirige, est hostile à toute filtration, centrifugation et pasteurisation qui altèrent, à son avis, le bouquet et la saveur des cidres.

Une section fruitière a été créée, dont le premier travail a consisté à rechercher les meilleures variétés cidricoles connues 

D’accord avec ses adhérents — et c’est là une initiative fort intéressante — la section fruitière contrôle 1.000 hectares de pommiers et arrive, peu à peu, à rénover les vergers, autrefois négligés.Pour ce faire, elle s’occupe des commandes d’entes pour le remplacement des sujets défec tueux et assure entièrement le surgreffage.

Comme les jus conservés sous pression ne sont jamais mélangés, il est possible de présenter des cidres de monovariété, Muscadet, Mettais, Argile rouge, etc...

De plus, le cultivateur n’a aucun mal à écouler sa production, la cidrerie surpayant les pommes de variétés sélectionnées., à condition qu’elles soient cueillies à point, conservées avec soin et livrées séparément (3.500 francs la tKmne en 1952 au lieu de 2.000 francs cours moyen).

Il y a là une tentative intéressante et rentable pour tout le monde, la question « commerciali¬ sation » passant au second plan, puisque l’usine dont il s’agit ne produit jamais assez, quoique en constante progression. Si nous nous sommes quelque peu étendu sur cette entreprise relativement récente, c’est pour en montrer la progression continue, ce qui ne veut pas dire qu’il n’existe pas d’autres cidreries plus importantes en Normandie. 

En Seine-Maritime, la Cidrerie Gavrel sort 40.000 hectos annuellement et les Brasseries de la Manche, à Eu, traitent 2.500 tonnes de pommes par an et fabriquent ou commercialisent 20.000 hectos de cidre, ce qui est un chiffre intéressant pour une affaire surtout spécialisée dans les bières. Bien entendu, il existe de nombreuses cidreries de moindre importance dans les cinq départements normands" [Morice, 1955]

Le cidre de Longueville créé en 1955  a maintenu une activité cidricole sur des centaines d'ha au nord du pays de Caux,  mais ce cidre s'est toujours apparenté à un cidre breton ou du pays d'Auge en raison du peu de variétés le constituant et pour les cauchois, quoiqu'il ait été fabriqué en pays de Caux  avec deux ou trois  variétés principales dont le Muscadet de Dieppe, le Bedan et le gros-œillet voire encore l'Antoinette pour autant   il n'a jamais  été considéré comme un cidre du pays de Caux par les cauchois habitué culturellement à un cidre brut, peu acidulé, légèrement amère et acide, de couleur plutôt jaune pâle et peu sucré.
un récent article a complété l'ajout de nouvelles variétés comme argile rouge pour les doux auxquels est venu s'ajouter dernièrement le binet rouge ; bedan comme demi-sec, et pour les bruts, antoinette, groseillier et, dernier-né, clos renaux publié par le Figaro-Magazine, in : SAVEURS ET COULEURS DIEPPOISES, Par P.F. et I.F. article publié le 14 août 2009.
 

Ce cidre dit de Longueville, dit cidre doux  a périclité ces dernières années et l'abattage a commencé mais s'est stoppé dernièrement pour des problématiques environnementales.
Le cidre doux de Longueville,  dit-on,  plaisait aux parisiens dont les habitudes ont changé ces dernières décennies.

 

Le calvados Boulard :  par Louis Lapert.

une eau-de-vie produite en pays de Caux avec des variétés du pays d'Auge

 

L’un des plus beaux aspects que la France offre à la face du monde, c’est son infinie variété de ressources sur les différents plans : intellectuel, industriel, commercial ou agricole, cette vérité lui assurant de très nombreux avantages. Ainsi ses campagnes, ses vallées, ses montagnes fournissent de multiples sortes de céréales et de légumes propres à la consommation, ainsi qu’une diversité non moins surprenante de fruits dont ceux des vignobles et des pommeraies qui font les uns la réputation du Sud, les autres, celle de l’Ouest. Dans cette contrée en particulier, qui est celle de la Normandie et de la Bretagne, les pommes, les cidres, les eaux-de-vie de cidre et les calvados représentent de grandes possibilités de ressources, qui depuis plusieurs années ont accru dans des proportions considérables l’économie de ces régions.

Le Calvados Boulard est connu et célèbre dans toute la Normandie, car il est d’une des marques d’eau-de-vie de cidre les plus réputées de la province. Cette renommée s’étend d’ailleurs dans toute la France dont les camions et les panneaux publicitaires jalonnent les routes : dans les restaurants et hôtels les plus cotés comme dans les auberges les plus humbles, on trouve toujours le flacon à forme spéciale et à étiquettes bordées or, à côté des bouteilles de cognac, d’armagnac ou de marc de Bourgogne.

Mais l’estime dont jouit le Calvados Boulard, s’est faite seule : son seul mérite est le fruit d’une longue expérience et du sérieux de sa fabrication. L’origine de la Maison remonte à 1825 : un entrepositaire s’établit alors à Yvetot, en ce coin du Pays de Caux si réputé par la richesse de son sol et de ses produits agricoles, entre autres de son cidre et de ses eaux-de-vie de cidre. C’était l’entrepôt Decaux, auquel s’associa un nommé Lacaille. Après de multiples changements de direction, l’entrepôt devint en 1875 la propriété d’un Pierre Boulard, qui est l’ancêtre des Boulard actuels. Ce Pierre Boulard était un homme patient, tenace et organisé : ses descendants héritèrent de ses qualités : la Maison s’agrandit par l’apport de maisons concurrentes qui pour des raisons diverses disparaissaient. En 1900, Raphael et Gustave Boulard[1], ses successeurs, affermissaient la solide réputation de l’eau de vie de cidre qu’ils exploitaient : les deux frères Maurice et Lucien surent par la suite faire fructifier les résultats obtenus en insistant surtout sur la qualité du produit. C’est pourquoi ils portèrent leurs recherches sur les crus de la région du Calvados proprement dite, en particulier du Pays d’Auge, où ils trouvèrent les qualités vers lesquelles tendaient leurs aspirations. La Maison Boulard avait trouvé sa voie et depuis lors c’est de cette région du Pays d’Auge que viennent les Calvados si réputés de la Société. Aujourd’hui les fils de Maurice et de Lucien, Pierre et Jacques, suivent les traces de leurs parents et de leurs aïeux : leur calvados, apprécié en France, ne l’est pas moins à l’étranger, dans les pays anglo-saxons ou scandinaves, en Afrique comme en Amérique. […]

Dans l’Almanach 1897 du Roy d’Yvetot, Annuaire de la ville d’Yvetot et des cantons à la rue de l’étang est cité Boulard Raphael et Boulard Gustave, entrepositaires, Archives famille Lapert. Un autre entrepôt Vins et eaux-de-vie Georges Gouay, 29, Rue Vallaville, Yvetot

Conditions requises pour une bonne eau-de-vie de cidre.

Ce n’est qu’au milieu du 19e siècle que l’eau de vie de cidre du Calvados prit une place marquante :  seules jusqu’alors les eaux-de-vie de vin avaient le droit de circuler. Il y a donc un siècle à peine que les qualités du Calvados ont été pleinement mises en valeur : on s’est aperçu que ces qualités, du climat et surtout du mode de fabrication des eaux-de-vie  elles-mêmes. Le Calvados Boulard répond à toutes les eaux-de-vie de cidre, même originaires du département du Calvados.

Sol.

Les qualités des eaux-de-vie de cidre varient avec les diversités du sol : les cidres récoltés sur des terrains argilo-sablonneux ne sont pas les  mêmes que ceux des sols siliceux, calcaires ou ferrugineux : le goût de « terroir »  n’est pas un effet  d’imagination des récoltants normands : la limpidité des eaux-de-vie de cidre le prouve et celles qui proviennent  des coteaux caillouteux du pays d’Auge ont un degré d’alcool plus élevé que les simples calvados venant des sols crayeux dont les cidres sont très difficiles à distiller. D’ailleurs les exploitants agricoles savent que les meilleures pommes à cidre sont celles dont les pommiers sont enracinés dans les sols caillouteux.

 

Climat.

Le climat a lui aussi son influence. Sans doute la Normandie en général et en particulier la région du département du Calvados sont douces et humides à souhait. Leur climat est dit tempéré. Mais l’exposition des vergers a son importance et ce n’est pas sans raison que les clos sont si remarquablement entrecoupés soit de haies vives, soit de vents ou des ardeurs du soleil en été.

Fruits.

Les Normands qu’une solide réputation dote du sens de l’observation savent choisir en général leurs plants de pommiers avec beaucoup de circonspection, de façon à avoir des essences de pommes nettement mariées :

Trois catégories de pommes à cidre sont ainsi établies :

  • Les pommes de première maturité qui donnent un jus peu coloré…
  • Les pommes douces ou de seconde récolte donnant un jus plus dense…
  • Les pommes amères, de maturité tardive, dont le jus peut  marquer…

Dont la « Jeannetonne » qui sent la violette ; la peau de vache nouvelle qui a un parfum d’amandes amères ; « le binet doré » qui a l’odeur du miel ; « la fenouillette » qui sent l’anis ; « le muscadet » l’arôme musqué, sans oublier» le bérat rouge », le « fréquin », « le marin Onfroy » tec… qui tous ont leur parfum délicat et personnel.

Ces subtilités dans le choix des pommes, subtilités basées sur des nuances et des finesses auxquelles les exploitants attachent beaucoup d’importance, sont à l’origine des propriétés exceptionnelles que possèdent les véritables Calvados, comme celui de la Maison Boulard.

 

Préparation à la distillerie et la distillerie elle-même

Les pommes choisies en raison de la variété des terrains et de leurs propriétés, doivent être récoltées à maturité. Les « solages », ainsi mélangés, les pomme sont broyées et écrasées. Dans certaines régions du Calvados, comme le Pays d’Auge dont le pur est reconnu supérieur, à cause du sol, à celui des régions voisines, on est resté attaché à des méthodes de brassage qui, pour anciennes qu’elles soient, permettent de conserver au cidre obtenu le bouquet inhérent aux espèces de pommes. Il y a aussi une réglementation officielle de cet acte du brassage contenue dans l’article 2 du décret numéro 606 du 23 février 1942.  L’article 1er spécifie d’ailleurs dans quelles conditions l’appellation contrôlée « Calvados du pays d’Auge » est exclusivement réservées aux eaux-de-vie de cidre qui proviennent de pommes récoltées et de cidres fabriqués et distillés sur des territoires nettement définis. Le Calvados Boulard a sa provenance dans cette délimitation officielle et répond donc bien à ses prétentions de véritable Calvados.

Voici ce que dit l’article 2 de ce décret du 23 février 1942 concernant le broyage et l’extraction du jus de pommes :

« Les eaux-de-vie visées par l’article 1er devront provenir exclusivement de cidre (ou de poiré) ou de boissons de cidre (ou de poiré) obtenus avec des appareils réalisant :

  1. Le broyage des fruits par écrasement ou rapage sans séparation du jus
  2. L’extraction du jus par l’emploi d’un pressoir à système discontinu. L’emploi des presses dites continues est interdit

 

« L’extraction du jus peut être facilitée par macération de la pulpe avec de l’eau où le produit des extractions précédentes, selon  des procédés traditionnels agricoles du « rémiage » (qui consiste à ajouter   de l’eau au marc, à laisser macérer ce marc mouillé , puis à en extraire de nouveau la jus par la presse).

« La fermentation du jus devra s’effectuer naturellement sans chauffage et durer au moins 12jours à compter de l’extraction du jus. Seuls seront autorisés les produits chimiques tolérés pour les cidres de consommation, à l’exception de tout produit hâtant la fermentation et en particulier du phosphate d’ammoniaque »

 

Comme on le voit l’Institut National des appellations d’origine maintient les procédés traditionnels de production des eaux-de-vie de cidre, procédés qui n’ont guère variés depuis près de 100 ans : les vieux alambics sont toujours en usage dans la province normande.

 

Mais avant que l’opération distillation elle-même soit réalisée, il faut noter que la fermentation du pur jus ou cidre doux obtenue par le broyage et l’extraction doit présenter un degré d’alcool qui, selon l’article 3 du 23 février 1942, présente « les caractère généraux d’une boisson saine et loyale ». Cette fermentation doit se faire avec une présence d’air et une température ni trop basses ni trop élevées, pour que la transformation s’opère lentement et naturellement. C’est pourquoi pendant un an les cidres sont conservés dans de vastes tonnes en chêne, abritées dans des caves fraiches et bien orientées : ainsi le cidre ne risque pas de prendre de l’acidité.

 

On procède ensuite à la distillation qui elle aussi a une réglementation bien précise. Pour le Calvados du Pays d’Auge, comme celui des Etablissements Boulard, la distillation est une véritable épreuve de patience. On utilise l’alambic charentais à repasse qui seul permet d’obtenir des eaux-de-vie de grande finesse. Cet alambic est chauffé avec du bois de vieux pommier, qui est en la circonstance le meilleur combustible. Pendant que cette « chauffe » se produit, le distillateur surveille amoureusement son alambic et la montée des températures successives. C’st une méthode, qui, répétons-le, n’est pas très rapide parce qu’ancienne, mais elle prouve l’attachement à un système qui donne des résultats garantis. On lui reproche aussi une certaine     lenteur et un débit très faible, mais la qualité exceptionnelle du produit obtenu peut compenser aisément l’archaïsme du procédé.

La première distillation permet d’obtenir « la petite eau » à faible degré ; une deuxième opération, la « repasse » donne l’eau-de-vie. Pendant cette opération les alcools se séparent selon leur volatilité. On recueille à part ceux qui coulent au début et à la fin de l’opération : ils sont appelés alcools de tête et alcools de queue.

Restent les alcools de cœur qui constituent le plus grand volume et qui seuls sont conservés, car ils ont toutes les qualités pour faire de bons et vrais Calvados.

On comprend dès lors pourquoi tant d’attentions sont demandées en même temps qu’une grande expérience, à ce moment de la distillation des cidres doux. Les cidreries industrielles comme celle du Calvados Boulard ont développé leur production pour répondre aux besoins de leur commerce. Nous avons vu au début de cette étude que le Calvados Boulard doit faire face chaque année à d’importantes commandes tant sur le plan français qu’étranger. Aussi une industrie comme celle-là est-elle obligée d’i=utiliser des appareils à plus grand débit, mais qui fonctionnent uniquement suivant la conception des procédés des petites exploitations.

De toutes façons l’article 4 du décret n°606 du 23 février 1942 doit être respecté :

«  Seules auront droit à l’appellation contrôlée « Calvados du Pays d’Auge » les eaux-de-vie distillées au moyen d’alambics à repasse dits charentais, permettant d’écarter les têtes et les queues conformément aux usages locaux, loyaux et constants ».

Autre condition à observer, c’est celle qui est stipulée dans l’article 5 du même décret :

« Seules auront droit à l’appellation contrôlée « Calvados du Pays d’Auge » les eaux-de-vie présentant le degré alcoolique (à 15 °C)

  1. A la sortie des appareils : 72 ° G.L. au maximum
  2. A la vente au consommateur : 42° G.L. au minimum

« Dans tous les cas elles devront avoir une teneur en non alcool, totale de 400 gr. Au minimum par hectolitre d’alcool pur, dont 110 gr. D’éther… »

Le Calvados Boulard pèse à la vente 43°.

Reste ensuite la période de vieillissement où le Calvados, enfermé dans des tonnes « foudres » en chêne, conserve sa saveur et sa force et acquiert  un « fumé » que les autres eaux-de-vie de cidre ne peuvent posséder naturellement.

Les véritables Calvados selon la législation en vigueur

Il est bon de rappeler le texte de l’article 7 du décret du 23 février 1942 qui fait comprendre à quelle législation sévère le véritable « Calvados du pays d’Auge », comme l’est le Calvados Boulard,  se trouve astreint :

«  les eaux-de-vie de cidre pour lesquelles au terme du présent décret sera revendiquée l’appellation contrôlée « Calvados du Pays d’Auge », ne pourront être déclarées pour la fabrication, offertes au public, expédiées, mises en vente ou vendues, sans que dans les déclarations, les annonces, sur le prospectus, étiquettes, factures, récipients quelconques, l’appellation ci-dessus soit accompagnée de la mention « Appellation  contrôlée en caractères très apparents »

En regard de ce texte il convient de signaler ce à quoi s’engagent les contrevenants, les commerçants qui falsifient leur eau-de-vie de cidre en apposant une dénomination de Calvados, alors qu’il s’agirait de Calvados du Calvados ou de Bretagne par exemple.

« L’emploi de toute indication ou de tout signe susceptible de faire croire à l’acheteur qu’une eau-de-vie de cidre a droit à l’appellation contrôlée « Calvados du Pays d’Auge »  alors qu’elle ne répond pas aux conditions fixées par le présent décret sera poursuivi conformément à la législation générale sur les fraudes et sur la protection des appellation d’origine (Articles I et 2 de la Loi du 1er Août 1905 ; article 3 de la Loi du 6 mai 1919 ; article 13 du décret du 19 août 1921) sans préjudice des sanctions d’ordre fiscal, s’il y a lieu ».

 

Quelques applications du Calvados Boulard

Le Calvados, le vrai Calvados, comme celui des Etablissements Boulard à Yvetot, est un digne et bon compagnon de table. Aussi a-t-il trouvé de nombreux chantres, souvent anonymes, qui ne tarissent pas d’éloges sur les vertus de cette spécialité normande. Parmi les trouvères de notre époque, Curnonsky, prince des gastronomes, n’est pas le moindre de ceux qui ont su apprécier et célébrer les joies d’un verre de bon Calvados, d’un Calva, comme on dit communément. […]

Il faut aussi mentionner les magnifiques soufflets au fromage et à la crème dans lesquels quelques cuillérées de de Calvados Boulard rendent la pâte onctueuse, légère et délicieuse. On pourrait aussi citer les crêpes flambées au Calvados, etc… […] Qu’on ne s’y trompe pas et qu’on ne croit pas que le Normande fasse un usage exagéré de ce que la Providence a bien voulu mettre à sa disposition. Il sait seulement qu’il peut, sans risque, puiser dans son Calvados les idées saines que son sol natal lui donne, car l’un et l’autre, Calvados et consommateur, sont du même cru.

Le rôle des exploitants, donc celui des établissements du Calvados Boulard, est de porter loyalement ce témoignage en faisant prospérer la terre qui les a vus naître.

Louis Lapert, propos sur le Calvados Boulard d’Yvetot, janvier 1957.

 

 

On peut relever dans divers almanachs du pays de Caux l'activité  Boulard à Yvetot : 

  • Boulard Maurice, industriel rue du calvaire, 1950, 1954
  • Boulard Philippe, clerc de notaire, rue Clovis Cappon 1950, industriel rue Clovis Cappon, 1954
  • Boulard Philippe clerc de notaire rue du Calvaire 1950
  • Boulard Jacques Paul, distillerie rue du Calvaire 1968
  • Boulard Philippe Marie agent immobilier rue Clovis Cappon 1968
  • Boulard Pierre Marie distillateur rue clovis Cappon 1968
  • Boulard frères eaux de vie de cidre, 1922, rue de l’étang 1949, cidrerie distillerie Boulard rue de l’étang, 1950, 1954, 1967 , vins et spiritueux, 1967,  distillerie  Ste Calvados Boulard, rue de l’étang 1968
  • Boulard rentier, rue du Calvaire 1922
  • Entrepositaires
  • Boulard frères, rue de l’étang 1897, 1922, 1949, 1950, 1954, 1967, 1968
 

[1] Didier Clatot rapporte que le 18 mars 1895, M. Raphael  Boulard, de la maison Boulard frères, demeurant rue de l’Etang ; Dépôt de cette marque au tribunal de commerce d’Yvetot. In : si Yvetot m’était conté… Textile et industries, Didier Clatot, Edition Caravel, 2016, p.77.

Puis dans les années 1970, le Calvados Boulard a déménagé et s'est installé en pays d'Auge. Ses entrepots servirent à la Société Hangard avant de rester en friche jusqu'à ce qu'un complexe immobilier vienne s'ériger à cet endroit, effaçant définitivement une activité cidricole florissante au 19e et 20e . 

Didier Clatot  en 2016 est revenu  sur l'évocation de  la Société Boulard :

" L'installation de cette entreprise est unique dans la région. Le travail des pommes est entièrement mécanique. A cette brasserie est attenante la distillerie dont les appareils perfectionnés et puissants produisent des alcools et des eaux de vie de cidre très appréciés d'une clientèle qui augmente journellement. In : Dictionnaire biographique, industriel et commercial de la Seine-Inférieure.

et de la cidrerie Clastot :  par Didier Clatot

La cidrerie Marcel Clastot, située rue de la Briqueterie, fondée en 1882 par Auguste Clastot, père, sous la marque déposée du "Roi d'Yvetot" fut rachetée par les établissements Boulard. Elle fabriquait des cidres et distillait des eaux-de-vie de cidre. Spécialiste de cidre mousseux Vagnon pur et fine cauchoise.​​​​​​​

Le cidre de cru cauchois : la cidreie Clastot 

En 1887, M Clastot obtint dans la catégorie 2e classe en cidres et poirés, dans la 3e section, 1e catégorie un quatrième prix pour ses cidres faits avec une seule variété de pommes, cidres en bouteilles, d'une seule espèce, de fût ou en bouteilles. In le Journal d'agriculture pratique, de jardinage et d'économie domestique, Librairie de la Maison rustique du 19e siècle, Paris, 1887, Gallica, BNF.

En 1892 M. Clastot est membre de l'Association Pomologique de l'Ouest , in Association française pomologique pour l'étude des fruits de pressoir et l'industrie du cidre, Paris, 1893, Gallica BNF.

En 1892, la cidrerie Cauchoise est mentionnée à Paris, r. de Rennes comme celles en Seine-Inférérieure à ErnementBuchy : Hébert ; Le Havre : Dubuffet ; Saint-Valéry-en-Caux : Jolly , Pigny, Sampic ; Yvetot : Clastot.. In l'Agenda répertoire du commerce des liquides, vins, spiritueux et boissons diverses..., Administration des annuaires commerciaux, Paris, 1892, Gallica, BNF.

M. Clastot est mentionné dans la revue  "le Cidre" : organe des pépiniéristes, 1894, Paris, Gallica, BNF.

M. Clastot est également mentionné dans l'Annuaire des cinq départements de la Normandie en 1928, association normande de Caen, Gallica, BNF : Au titre des industries nouvelles : les cidreries et distilleries de MM.Clastot et Boulard.

" La plupart des herbages entourant les masures sont plantées de pommiers à cidre dont les variétés sont nombreuses et varient d'ailleurs d'une localité à l'autre. Lorsque la récolte est supérieure aux besoins de la consommation (chaque ferme fabrique son cidre), le surplus est vendu et souvent expédié dans d'autres régions. Toutefois, il existe dans l'arrondissement, notamment à Yvetot même quelques cidreries industrielles qui pratiquent surtout la distillation"

 

In : Annuaire-almanach du commerce, de l'industrie, de la magistrature et de l'administration : ou almanach des 500.000 adresses de Paris, des départements et des pays étrangers : Firmin Didot et Bottin réunis
Éditeur  :  Firmin-Didot frères (Paris), 1894, Gallica, BNF.

 

dans divers Almanachs, Clastot était cidrier rue de la Briqueterie, almanach 1909 – 1912 et eaux de  vie de cidre en 1912, eaux de vie de cidre Clastot clos de l’étang 1922, clos de l’étang 1949, en 1950 Clos de l’étang, marcel Clastot, rue de l’étang 1954.

La Cidrerie Clastot d’Yvetot
"LA CIDRERIE CAUCHOISE A YVETOT

Il est à remarquer que la plupart des documents que l'on possède sur le cidre, au treizième siècle et au quatorzième, sont relatifs aux vallées de la Risle et de la Touque ; aucun d'eux ne parle des localités situées sur la rive droite de la Seine. On en a conclu que ce fut en basse Normandie et surtout dans ces deux vallées, que s'est tout d'abord développé la culture du pommier à cidre.

De la basse Normandie, la culture du pommier à cidre s'étendit peu à peu au-delà de la Seine ;
elle passa même en Angleterre. Mais, jusqu'au quinzième siècle, les plants de pommiers se trouvaient surtout dans les bailliages de Caen et du Cotentin ; on constate cependant que dès cette
époque la culture des pommiers à cidre n'était pas négligée dans la haute Normandie. A la fin de ce siècle, et surtout au siècle suivant, les plants de pommiers se multiplièrent sur divers
points du pays de Caux et du pays de Bray. Encore aujourd'hui, ce sont les crus de ces deux pays, ainsi que ceux du Roumois, qui sont les plus estimés.

C'est le pays de Caux qui produit les cidres renommés dont nous avons à parler aujourd'hui.
L'établissement d'où sortent ces cidres porte même le nom de Cidrerie cauchoise, et, installé à Yvetot, il a pour enseigne Au Roi d" Yvetot, souvenir de la vieille et célèbre légende popularisée par une chanson de Béranger.

Cette cidrerie appartient à M. Clastot, propriétaire récoltant, qui, il y a seize ans, s'établit hôtelier à Yvetot. C'est encore lui qui dirige l'Hôtel des Victoires, le plus ancien hôtel d'Yvetot,
vieux de plus d'un siècle, fort bien organisé, fort bien tenu, possédant tous les avantages : omnibus à tous les trains, chambres confortables, salles de billard, grand café, jolie table d'hôte. Cet hôtel, fréquenté par les voyageurs, est le plus connu et le plus estimé d'Yvetot.

Mais ce n'est qu'incidemment que nous parlons de l'Hôtel des Victoires ; le sujet de cet article,
c'est notre visite à la cidrerie de M. Clastot, située route du Havre, et où l'on fabrique d'excellents cidres connus dans toute la France.

Nous ferons remarquer ici que M. Clastot n'a rien de commun avec beaucoup de marchands de
cidre qui ne sont qu'entrepositaires. Lui ne met en vente que les produits de sa fabrication. Tous
les ans il achète leurs récoltes aux propriétaires du pays, dont, comme nous l'avons vu, les crus
sont parmi les plus célèbres de Normandie. Il est ainsi absolument sûr de la qualité des pommes qu'il emploie, et qui sont exclusivement des fruits de la contrée.

Toutes ces pommes sont amenées dans l'établissement de la route du Havre, où elles sont
-emmagasinées dans des réserves situées au premier étage. Au milieu de ce magasin circule
un wagonnet sur rails, qui sert à transporter les pommes devant un grand entonnoir en bois. Le
wagonnet bascule, et le contenu tombe dans un concasseur situé en bas, où les pommes se trou- vent réduites en morceaux, ce qui permettra d'en exprimer le jus plus facilement et plus complète- ment.

Dans une immense salle, au rez-de-chaussée, - sont rangées les cuves. Au centre, un wagonnet circule sur des rails, et vient prendre chacune des cuves pour l'amener sous le concasseur, d'où
les pommes broyées tombent dans ce récipient. Les pommes y sont disposées par couches de
quinze centimètres d'épaisseur environ, entre lesquelles on interpose un disque en bois, disposition qui permettra d'obtenir une pression plus facile et plus régulièrement répartie que si l'on pressait sur une masse inégale.

Lorsque la cuve est remplie, le wagonnet reprend sa course, et porte son chargement sous la
presse. Cette presse, qui est à mouvement différentiel, a été établie sur les plans de M. Clastot,
et elle est munie de contre-poids qui en rendent la manœuvre très douce.

Sous l'effet de la pression, le jus des pommes s'écoule par des rainures verticales établies sur 
le bord interne de la cuve, passe par une ouverture inférieure, et se rend dans un citerneau établi au pied du pressoir. Une pompe élève ce jus de la pomme dans un filtre établi au premier
.étage du bâtiment, et qui, au moyen de toiles métalliques très serrées, retient toutes les impuretés. De ce filtre le liquide redescend par des tuyaux en cuivre dans des foudres installés en bas.
Ces foudres sont débarrassées de leur contenu quand le moment opportun est arrivé, c 'est-à-
dire quand la fermentation est terminée. On le met alors en bouteilles ou en fûts, et il en résulte
un cidre mousseux, pétillant comme du Champagne et d'un goût exquis au débouchage.

Lorsque les foudres sont vides, on procède à leur nettoyage. Un homme pénètre dans l’ immense futaille par un trou spécial lave les parois à grande eau et les enduit d'une couche d'huile
d'olive, qui a pour but d'empêcher le prochain liquide d'acquérir un goût de moisi.

Une des choses qui nous ont le plus frappé dans cet établissement, c'est la propreté vraiment
exceptionnelle qui règne dans toutes ses parties, et les soins méticuleux qu'on y prend pour obtenir un cidre entièrement pur et d'une limpidité parfaite, soins qui sont d'ailleurs couronnés d'un complet succès.
Les cidres en bouteilles sont classés en trois catégories : royal mousseux, pommé mousseux,
cidre mousseux. Ils sont livrés par vingt-quatre ou cinquante bouteilles, ou cent bouteilles avec
une réduction. On peut aussi s'en faire expédier une caisse de six bouteilles assorties comme
échantillon.

D'autre part, le cidre est livré par fûts de cent quatorze pu deux cent vingt-cinq litres, en quatre
qualités : pur jus choix extra, supérieur 1ere qualité, bonne qualité, cidre de ménage.

Les bouteilles sont fort gracieuses. Avec leur cachet doré ou argenté, elles ont tout l'aspect de
bouteilles de Champagne.

Quant aux fûts qui servent aux expéditions, ils sont au préalable nettoyé à la vapeur, au moyen
d'un échaudoir installé spécialement pour cet usage.

Ces cidres sont expédiés dans toute la France, en Algérie, en Espagne, etc. La Belgique en con-
somme de grandes quantités en bouteilles. M. Clastot livre beaucoup non seulement à la clientèle bourgeoise, mais encore aux hôtels, restaurants, cafés, etc.

Dans un local spécial, il fabrique des eaux-de- vie de cidre excellentes, d'une pureté absolue, et
que nous avons dégustées avec un vif plaisir. Ce sont des eaux-de-vie de premier jet, résultant de la distillation dans un alambic du système Deroy, et qu'on laisse vieillir dans des foudres, où
elles prennent une saveur et une concentration étonnantes. Actuellement, M. Clastot possède trois catégories de cette eau-de-vie, qu'il appelle Fine Cauchoise : elles sont des années 1884, 1880 et 1874. Il a aussi de l'eau-de-vie de cidre ordinaire. Les personnes qui voudraient connaître ces eaux-de-vie n'ont qu'à lui en demander des échantillons.

La supériorité de ces produits, cidres et eaux-de-vie, est tellement évidente, qu'aujourd'hui M. Clastot n'arrive plus à produire assez pour répondre aux demandes qu'il reçoit. C'est ce qui l'a décidé à acquérir une magnifique propriété, dont plusieurs hectares sont plantés de pommiers et qui s'appelle le Clos de l'Etang.

Dans cette propriété, il va faire installer une cidrerie énorme, dans laquelle il pourra travailler cent soixante hectolitres de pommes par jour.

L'installation comprendra deux presses, un moteur à air chaud actionnant la pompe à eau, à cidre et un broyeur.

Tout en conservant le matériel existant, soit 50 foudres de 50 hectolitres chaque, il va acquérir dix foudres énormes dont chacun contiendra 128 hectolitres.

On peut déclarer hardiment qu'il est impossible de trouver de meilleurs produits que ceux de cette maison, qui contribue puissamment à répandre la vieille renommée du cidre de Normandie.

GRANT.

In : Le Panthéon de l'industrie : journal hebdomadaire illustré, 1892 - http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb32831811r

 

3 - L'arrivée de l'eau potable au robinet

(en construction) 

en construction

 

4- La prime à l'arrachage ou à l'abattage   notamment pour la raison suivante : Le cidre, transformé en alcool va alors à l’industrie de la poudre à canon. Après 1945 la fabrication de la poudre change et l’état organise l’arrachage des vergers.

 

 

 

Une politique étatique soit disant en lutte contre l'alcoolisme entre 1953 et 1966 pour resteindre la production et par une amélioration en qualité favoriser un regain de consommation.

"Le décret-loi des 21 et 22 Mai 1955 vient de leur donner satisfaction, en grande partie, en définissant le cidre doux. C’est un cidre qui, respectant les normes générales des cidres de consommation, doit peser 5° au minimum d’alcool total, mais sur ces 5° l’alcool acquis ne peut dépasser 3°, .le reste étant de l’alcool en puissance sous forme de sucre." [Morice, 1955]

1953 

Ce décret de Mai 1955 complète heureusement ceux des 9 Août et 30 Septembre 1953 qui tendaient, d’une part, à restreindre la production d’alcool d’Etat et, d’autre part, à donner un regain à la consommation du cidre dont le degré minimum a été fixé à 5. La vente de la boisson de cidre, c’est-à-dire du cidre mouillé avant fermentation, a été interdite, comme le sont depuis longtemps, les piquettes, en matière de vin.

Il est à souhaiter que les efforts du Syndicat des Cidriers, et ceux des pouvoirs publics, pour revaloriser notre boisson régionale, soient secondés par des initiatives privées. Pourquoi les restaurants urbains ou champêtres ne feraient-ils point des repas « cidre compris » ? Le touriste ne demanderait pas mieux que d’en profiter, notre économie régionale y gagnerait certainement et cette publicité vivante pourrait amener un certain courant d’exportation.[Morice, 1955]

 

1955

Les décrets-lois des 9 Août et 30 Septembre 1953, le décret du 7 Octobre 1954, celui du 20 Mai 1955 assurent l’égalité des prix pratiqués par les industriels et limitent la fabrication d’alcool, mais ils tendent à revaloriser la pomme et le cidre.

Une prime à l’arrachage des mauvais pommiers ou de variétés secondaires est prévue et dès à présent le choix des variétés est simplifié.

Lorsqu’un producteur aura bien compris que, par des méthodes de reconversion (surgreffage pour de jeunes plants de 20 ans environ ou plantation nouvelle), les vergers de pommes à cidre deviendront de nouveau rentables, il n’y aura plus de perte de richesse.

Pour ce faire, il faudra évidemment encourager les cidriers à produire des boissons, de qualité et les syndicats professionnels s’y emploient.

Nous en arrivons donc à la même conclusion que pour les pommes de table : qualité d’abord et l’écoulement devient facile. Puisse cette vérité première enrayer la désaffection des consommateurs français qui utilisaient 6 millions d’hectolitres il y a quelque 10 ans pour 3 millions 800.000 seulement en 1953-54. Et n’oublions pas que les cinq départements normands seraient les premiers à profiter du développement de la consommation puisque, sur le million d’hectolitres représentant le stock commercial moyen annuel, ils en détiennent plus de la moitié.

Décret n° 55-578 du 20 mai 1955 relatif à !'assainissement du marché dès fruits à cidre eu à poirés et à la reconversion du verger cidricole


EXPOSE DES MOTIFS
Les décrets nos 53-703 et 53-97S des 9 août et 30 septembre 1953 ont profondément modifié l'orientation et l’équilibre du marché cidricole.
La structure et la juxtaposition des divers organismes administratifs existants entravent l'action des pouvoirs publics dans ce domaine qui intéresse l’équilibre économique et social de tout l’Ouest de la France. Il apparaît donc nécessaire de leur substituer un organisme unique bénéficiant de la taxe parafiscale antérieurement affectée au groupement national interprofessionnel des fruits à cidre.
Le décret du 9 août 1953 ayant décidé la réduction des achats d'alcool par l’Etat en précisant qu’une indemnité serait versée aux distilleries dont les contingents seront réduits ou supprimés, le présent décret précise les conditions de celle indemnisation et la subordonne à une sélection et à une meilleure imptanlation des moyens de production, dans le cadre d'un plan rationnellement établi.
Les décrets de 1953 rendent également nécessaire un effort important de reconversion du verger des fruits à cidre: la réduction du contingent laisse en effet 3 millions de quintaux de fruits a cidre sans débouchés avec, de «surcroît, le risque qu'une partie de ce tonnage soit transformée en alcool de bouche. Il paraît souhaitable que les indemnités d’arrachage prévues à l’article 21 du décret du 9 août 1953 s’insèrent dans le cadre plus large d’un effort de modernisation et d’amélioration agricoles. En tout état de cause, pouj
sauvegarder le patrimoine foncier en même tempe que les intérêts des exploitants, il est prévu un remploi obligatoire sur le fonds même des indemnités qui seront accordées. Tels sont les principes dont s’inspire le présent décret.

Titre Ier

 Comité des fruits à cidre et des productions cidricoles. Art. 1er. — En remplacement du groupement national interprofessionnel des fruits à cidre créé par la loi n° 713 du 28 juillet 1942 et de la commission consultative des cidres et poirés de consommation créée par l’article 1er du décret n° 53-978 du 30 septembre 1953, il est institué un comité des fruits à cidre et des productions cidricoles. Ce comité doté de la personnalité civile a pour mission d’étudier, de suggérer et de faciliter la mise en œuvre de toutes mesures d’ordre économique et technique relatives: A la reconversion, à la sélection et la réduction du verger des fruits à cidre et à poirés; A l’orientation et à Fassanissement de la production cidricole.

Art. 2. — A compter du 1er août 1955, le comité prévu à l’article 1er ci-dessus se substitue aux droits et obligations du groupement national interprofessionnel des fruits à cidre, notamment pour la perception de la taxe instituée au prolit de ce groupement en vertu de la loi n° 713 du 28 juillet 1952. Les modalités d’assiette et de taux de cette taxe seront lixées par arrêté dans les conditions prévues par l’article 4 de la loi n» 53-633 du 25 juillet 1953 portant aménagements fiscaux.

Art. 3. — Des arrêtés conjoints du ministre des finances et des affaires économiques et du ministre de l’agriculture détermineront les modalités d’application des articles 1er et 2 ci-dessus et fixeront en particulier la composition, l’organisation et le fonctionnement du comité des fruits à cidre et des productions cidricoles. Titre II Plan de fermeture et indemnisation de certaines distilleries autorisées à 'produire des alcools de pommes et de poires réservés à l’Etat.

Art. 4. — Dans un délai d’un mois à compter de la publication du présent décret, les organisations professionnelles les plus représentatives des distillateurs d’alcool de pommes et de poires établiront un plan de fermeture de certaines distilleries autorisées à produire des alcools réservés à l’Etat. Ces organisations seront désignées par arrêté du ministre de l’agriculture. Ce plan devra ramener de 6.993 à 4.000 hectolitres-jour, au plus, le chiffre de la capacité de production des distilleries d’alcool de pommes et de poires, telle qu’elle est définie par l’article 5 du décret n° 53-1004 du 7 octobre 1953. 11 sera soumis à l’approbation du ministre de l’agriculture qui staluera dans le délai d’un mois après avis des organisations professionnelles les plus représentatives des producteurs de fruits à cidre et à poiré.

 Art. 5. — Si le plan prévu ci-dessus n’est pas établi ou si, étant établi, il n’est pas agréé par le ministre de l’agriculture dans le délai visé au dernier alinéa de l’article précédent, une commission sera chargée de proposer avant le 15 août 1955 un plan de fermeture. Cette commission est ainsi constituée: Un conseiller d’Etat, président; Le directeur de la production agricole ou son représentant; L’inspecteur général, chef du service de l'inspection générale de l’agriculture, ou son représentant; Le directeur général des impôts, ou son représentant; Le directeur du service des alcools, ou son représentant; Le directeur général des prix et des enquêtes économiques, ou son représentant; Deux représentants du syndicat général des fabricants d’alcool de pommes et de cidres, dont un représentant des entre- { irises individuelles dont la production ne dépasse pas vingt îectolitres-jour ; Un représentant du syndicat national des cielriors et des fabricants d’eaux-de-vie de cidre et de moûts concentrés de pomme; Deux représentants de la Fédération nationale des producteurs de fruits à cidre.

 Le plan définitif de fermeture sera arrêté par le ministre de l’agriculture le lor octobre 1955 au plus tard.

Art. 6. — Par application du décret n° 53-703 du 9 août 1953, une indemnité de 320.000 F par hectolitre-jour sera versée aux distillateurs qui cesseront leur activité à compter de la campagne 1955-1950.

Art. 7. — A compter de la campagne 1955-1956, la marge des distillateurs d’alcools de pommes et de poirés sera diminuée, pour tenir compte de l’aibaissement des prix de revient des distilleries continuant leur activité. Titre III Reconversion du verger cidricole.

Art. 8. — Une indemnité de reconversion du verger cidricole sera versée dans les conditions du décret n° 53-703 du 9 août 1953 aux producteurs des régions dont les plantations de pommiers et de poiriers seront diminuées par suite de la réduction des contingents d’alcool de fruits à cidre.

Art. 9. — A cet effet pourront être déterminées avant le 31 décembre 1955 des zones de modernisation fixées par arrêté, our lesquelles un plan d’amélioration des cultures et des herages sera établi après avis du comité prévu à l’article 1er. Le versement de l’indemnité sera subordonné à l’exécution de ce plan.

Art. 10. — Pour toute exploitation non comprise dans les zones définies à l’article 9 ci-dessus, l’indemnité sera accordée pour toute reconversion portant sur une ou plusieurs parcelles entières. Elle sera proportionnelle au nombre d’arbres en plein rapport qui auront fait l’objet d’arrachages. Elle sera versée à un compte courant ouvert au nom du bénéficiaire :\ la caisse régionale de crédit agricole mutuel qu'il aura désignée. L’intéressé ne pourra en disposer que lorsqu’il aura justifié de l’exécution d’un programme de réemploi sur l’exploitation dans des conditions qui seront fixées par arrêté conjoint du ministre de l’agriculture et du ministre des finances et des affaires économiques.

Art. 11. — L’octroi de l’indemnité sera subordonné à un engagement de non-replantation pendant une durée de 15 ans selon des modalités qui seront fixées par décret.

Art. 12. — Le ministre des finances et des affaires économiques, le garde des sceaux, ministre de la justice, le ministre de l’agriculture, le ministre de la santé publique et de la population, le ministre de la France d’outre-mer, le secrétaire d’Etat aux finances et aux affaires économiques et le secrétaire d’Etat aux affaires économiques sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent "decret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 20 mai 1955.

EDGAR FAURE.

Par le président du conseil des ministres:

Le ministre des finances ot des affaires économiques, PIERRE PFLIMLIN.

Le ministre de Vagriculture, JEAN SOURBÈT.

Le garde des sceaux, ministre de la justice, SCHUMAN.

Le ministre de L'inteneur, MAURICE BOURGBS-MAUNOURY.

Le ministre de la France d’outre-mer, PIERRE-HENRI TEITGEN.

Le ministre de la santé publique et de la population, Bernard Lafay. 

Décret n°55-576 du 20 mai 1955 ASSAINISSEMENT DU MARCHE DES FRUITS A CIDRE OU A POIRE ET RECONVERSION DU VERGER CIDRICOLE
JORF du 21 mai 1955

 

 

1966 : suite et fin de l'orientation la production cidricole et à la commercialisation des cidres et des poirés

 

MINISTERE DE L'AGRICULTURE Décret n° 58-62 du 20 janvier 1956 relatif aux indemnisations d’arrachage des pommiers à cidre et des poiriers à poiré. Le président du conseil des ministres, Sur le rapport du ministre de l'agriculture et du ministre des finances et des affaires économiques,

Vu le décret n° 53-703 du 9 août 1953 relatif au régime économique de l’alcool et portant organisation d'un plan sucrier ;

Vu le décret n° 53-978 du 30 septembre 1953 relatif à l'orientation de la production cidricole et à la commercialisation des cidres et des poirés ;

Vu le décret n° 55-576 du 20 mai 1955 relatif à l’assainissement du marché des fruits à cidre ou à poiré et à la reconversion du "Verger cidricole ; Le conseil d’Etat (section des travaux publics) entendu, Décrète :

Art. Ier. — Dans les régions où, par suite de la réduction des contingents d’alcool, les possibilités d’utilisation des fruits à cidre et à poiré se trouvent diminuées, une indemnité est, en application des dispositions des articles 21 du décret du 9 août 1953 et 8 du décret du 20 mai 1955 et dans la limite des crédits ouverts à cet effet, versée aux propriétaires de pommiers et de poiriers qui établissent un projet de reconversion ou d'amélioration de leurs exploitations agréé par le directeur des services agricoles du département du siège de l’exploitation.

Art. 2. — Ne peuvent donner lieu à l’attribution de l’indemnité prévue à l’article 1er ci-dessus que les parcelles dans lesquelles il est procédé à l’arrachage intégral des pommiers et poiriers. Les demandes d’indemnisation doivent, pour être recevables, porter sur un minimum de 20 arbres et être accompagnées d’une déclaration des plantations de pommiers et de poiriers existant sur l’ensemble de l’exploitation, ainsi que d'un engagement de non replantation pendant une durée de quinze ans. rEn cas de fermage ou de métayage, les demandes doivent être présentées conjointement par le propriétaire et le fermier ou le métayer.

Art. 3. — L’indemnité allouée pour l’arrachage de la totalité des arbres contenus dans une parcelle est Axée à 1.000 F par arbre de plein rapport. L’état des arbres est constaté préalablement a tout arrachage par la direction des services agricoles du département. L’indemnité ne peut excéder 100.000 F par hectare.

Art. 4. — Dans la limite de la subvention budgétaire accordée en application de l’article 8 du décret n° 703 du 9 août 1953 pour favoriser la reconversion des vergers cidricoles, un arrêté du ministre de l’agriculture et du secrétaire d’Etat aux finances et aux affaires économiques pris après avis du Comité des fruits à cidre et des productions cidricoles, prévu à l’article i9r du décret n° 55-576 du 20 mai 1955, fixera pour chaque département compris dans les régions visées à l’article 1er ci-dessus le montant des crédits affectés au financement des opérations d’arrachage.

Art. 5. — L’ingénieur en chef directeur des services agricoles de chacun des départements intéressés, assisté de deux représentants producteurs de la commission régionale du comité des fruits à cidre et des productions cidricoles statue sur les demandes d’indemnité de reconversion du verger cidricole qui lui sont présentées ainsi que sur l’emploi de celles-ci. Les frais de gestion entraînés par l’examen et la liquidation des dossiers peuvent être imputés dans la limite d’un maximum de 2 p. 100 sur les crédits alloués au département.

Art. 6. — Les demandes d'indemnité doivent être présentées pour la campagne 1955-1956 avant le 31 mai 1956, pour la campagne 1956-1957 avant le 31 mai 1957 et pour la campagne 1957- 1958 avant le 31 mai 1958. L’indemnité n’est versée que si les arrachages de pommiers et de poiriers sont effectués au cours de la campagne suivant celle au titre de laquelle la demande d’indemnité a été faite. Pour les demandes présentées au cours de la dernière période, le taux de l’indemnité est ramené à 800 F par arbre.

Art. 7. — Les modalités d’application du présent décret feront l’objet d'arrêtés conjoints du ministre de l’agriculture et du ministre des finances et des affaires économiques.

Art. 8. — Le ministre de l’Agriculture, le ministre des finances et des affaires économiques et le secrétaire d’Etat aux affaires économiques sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret qui sera publié au Journal officiel de la République française.

 

Fait à Paris, le 20 janvier 1956. EDGAR FAURE. Par le président du conseil des ministres : Le ministre de l’Agriculture, JEAN S0URBET-. Le ministre des finances et des affaires économiques, PIERRE PFLIMLIN. Le secrétaire d'Etat aux finances et aux affaires économiques, GILBERT-JULES.

 

« un reportage des Actualités françaises datant de 1957 justifie l’arrachage des pommiers à cidre par la nécessité de mettre un terme à une production agricole « génératrice d’un alcoolisme rural avant-coureur de misère et de maladie »1 ; on ne peut qu’être interpellé. A en croire la télévision, donc, la situation serait celle-ci. Chaque printemps, des « millions de pommiers à cidre font de la France de l’ouest un énorme bouquet » avec leurs parures de fines fleurs roses. Mais celles-ci, une fois devenues des pommes, se caractérisent par « leur piètre qualité, leur cours si bas, qu’à peine valent-elles le coût du ramassage ». Dès lors, le paysan n’a d’autre choix que « l’alambic pour seul débouché ». Le remède à cette situation serait donc sans appel : « mieux vaut sans doute remplacer cette production, ou déficitaire, ou justifiable d’un emploi sans utilité pour l’industrie ».

Chose dite, chose faite : les images du reportage montrent les agriculteurs arracher leurs pommiers en tirant dessus avec leurs tracteurs, « stimulés par les primes gouvernementales », laissant ainsi « à ces mêmes places de larges prairies où l’élevage assurera un revenu très supérieur » »

In : 1 INA. « Anti alcoolisme en France », Les Actualités françaises, 15 mai 1957, en ligne.

Au final, on voit bien que l’argument hygiéniste de lutte contre l’alcoolisme rural ne tient pas longtemps la route dans la justification de la politique d’arrachage des pommiers à cidre menée dans les années 1950. Ce sont bien les arguments économiques qui prévalent dans l’abandon de cette production d’alcool, au profit de l’élevage ou de l’arboriculture fruitière, activités conhuguées sur le mode intensif. Tout comme, de manière inversée, on justifie aujourd’hui la nécessité de soutenir le secteur viticole, en tant que fleuron économique français à l’exportation.

Thomas PERRONO

In : http://enenvor.fr/eeo_actu/argoat/l_arrachage_des_pommiers_a_cidre_dans_les_annees_1950_lutte_contre_l_alcoolisme_ou_modernisation_agricole.html

 

 

5 - On remplace plus ou moins les poiriers à cidre

 

Les poiriers à cidre en voie de disparition.

Alors que ces poiriers ont une durée de vie bien supérieure aux pommierds, peu plantés depuis deux générations et ayant fortement souffert de la tempête de 1999, les poiriers à hautes tiges ont fortement diminué  en Normandie, y compris en pays de Caux. Aujourd'hui les particuliers et les vergers conservatoires en replantent mais il semble que la tradition d'en incorporer à hauteur de 10 % dans le cidre du pays de Caux, s'éteigne.

Personnellement j'en vois disparaître au fur et à dans des cours et masures que je connais bien.

 

6 - des talus-fosses disparaissent, de grands hangars rognent sur les vergers anciens pour mettre des tracteurs plus imposants et des machines agricoles plus volumineuses.

Je constate encore aujourd'hui des abattages et des suppression de talus-fossés plantés alors qu'il serait opportun de les maintenir autour des masures et cours cauchoises.

 

En 2008, Virginie Maury, Architecte-paysagiste au Conseil d'Architecture, d'Urbanisme et d'Environnement de la Seine-Maritime, nous alerte sur l'avenir des fossés cauchois :

"depuis la seconde moitié du XXe siècle, le paysage local évolue. Les clos-masures se transforment profondément sous l'influence de facteurs agricoles, urbains et économiques. Les pommiers sont arrachés, les bâtiments abandonnés, les mares rebouchées, les arbres abattus et les talus arasés.

"Les talus plantés constituent le patrimoine arboré majeur du Pays de Caux: Pourtant, sous l'influence de multiples facteurs, ces fameux fossés cauchois disparaissent lentement mais durablement de notre paysage." [Maury, 2008]

 

"Ces levées de terre, pouvant atteindre 2 m de hauteur et bordées de deux fossés en creux, sont appelées localement fossés. Elles sont plantées de hêtres, de chênes ou de frênes et parfois de charmes ou de châtaigniers. Les arbres sont très serrés, disposés le plus souvent sur deux rangs, en quinconce. Des alignements à plat (donc dépourvus de talus) se rencontrent encore ponctuellement, à l'avant ou à l'arrière. du. talus, à l'ouest ou au nord, côtés vents dominants. Autour des manoirs et des châteaux, les talus peuvent compter jusqu'à trois alignements d'arbres et être doublés de plusieurs alignements à plat. Dans les clos-masures plus modestes, et notamment dans les villages et les hameaux, les talus sont quelquefois discontinus, remplacés par des haies basses taillées. Ces ceintures de verdure dissimulent l'intérieur des cours et abritent du vent hommes, pommiers et bétail. [...] Juxtaposés les uns aux autres, les clos-masures forment les villages et les hameaux. Ces groupements, dispersés dans les plaines agricoles, apparaissent de loin comme des masses boisées. A la périphérie des villages, les talus plantés créent des ceintures de verdure. A l'intérieur, ils composent des cloisons arborées qui donnent aux routes des allures de chemins creux. L'arbre est omniprésent. Il souligne et signale les lieux habités autant qu'il les dissimule et les protège. L'habitat cauchois traditionnel présente un aspect boisé caractéristique, qui rompt avec les horizons ouverts des plaines environnantes." [Maury, 2008]

 

Dès les années 1970, les talus plantés sont soumis à des abattages intempestifs. A cette époque, la graphiose, maladie spécifique de l'orme, affecte de nombreux alignements. Les ormes dépérissent, des alignements entiers doivent être abattus. Par la suite, des coupes ponctuelles ou plus massives se multiplient. Face à l'apparition de nouvelles énergies (fioul et gaz), le talus planté perd sa fonction économique. De plus, la main-d'œuvre agricole est devenue insuffisante et trop onéreuse pour curer le fossé, relever le talus, entretenir les arbres et replanter les arbres exploités. Enfin, lorsque le talus devient gênant pour construire un hangar de stockage ou une stabulation libre, il est arasé.

Lors de replantations, de nouvelles essences, à croissance plus rapide comme le peuplier, ou à feuillage persistant comme les thuyas, sont utilisées. Elles modifient fortement la perception des clos. Parallèlement, de nombreux clos-masures perdent leur vocation agricole. Ils sont divisés, voire lotis. Les arbres deviennent indésirables, dès qu'ils se situent trop près des bâtiments agricoles reconvertis en habitation ou des pavillons nouvellement construits. Ils ombragent excessivement les parcelles, leurs feuilles « bouchent » les gouttières, ou encore l'on craint souvent de les voir tomber sur les maisons, lors des tempêtes. La société évolue, et les talus plantés semblent ne plus correspondre ni aux nouvelles pratiques de l'espace rural ni aux attentes individuelles.

Depuis les années 1960, la campagne cauchoise est soumise à une forte urbanisation et à une évolution des pratiques agricoles. Les clos-masures et les prairies, délaissés par l'agriculture, sont soumis à une vive pression foncière. Les lotissements et les zones 

d'activités s'implantent en périphérie des bourgs et des villages, sans prise en compte du paysage, imposant leurs propres logiques (voiries en impasses, stéréotypes architecturaux, clôtures artificielles, haies de persistants...). Ces nouvelles formes bâties s'inscrivent en décalage avec les formes paysagères pré-existantes.

Les franges vertes qui ceinturaient les villages se réduisent rapidement. Constituées de prairies ouvertes, plantées de pommiers, ceinturées de talus plantés ou closes de haies basses, elles formaient des zones tampons entre les espaces habités et les espaces cultivés. Aujourd'hui, zones agricoles et zones urbanisées se juxtaposent. Les villages perdent leur caractère boisé, offrant un paysage désorganisé où l'arbre n'a plus sa place.

Depuis 1991, le Département de Seine-Maritime accorde des subventions pour encourager les communes et les particuliers à replanter des haies.  [Maury, 2008]

La conclusion de Virgine Maury: 

En Pays de Caux, les vieux arbres des fossés ont, pour la plupart, plus de cent ans. Les élagages inadaptés, les blessures causées aux racines, les problèmes sanitaires ou la sécheresse engendrent un dépérissement des alignements et accélèrent leur régression. La question du renouvellement de ce patrimoine arboré se pose, aujourd'hui, de façon cruciale. Pourtant, elle ne doit pas être un prétexte à des abattages non justifiés. Assurer le renouvellement du patrimoine arboré du Pays de Caux apparaît, en ce début du XXIe siècle, une nécessité."

 

In : Quel avenir pour les fossés cauchois ? Virginie Maury, Etudes Normandes, 2008, pp. 71-78

7 - Le vin et la bière  devant  le CIDRE 

Malheureusement la guerre 1914/1918 stoppa net cet élan, d’une part par la découverte du vin et de la bière par les soldats, d’autre part par le début de l’exode rural qui provoqua peu à peu le déclin des vergers. En moins d’un siècle, la consommation de cidre passe de 60 litres par habitant à moins de 2 litres.

in : https://www.patrimoine-normand.com/article-145527-cidre-normandie.html

 

1972 :

« Le cidre était la boisson courante. […] Un petit fût était rempli de pur jus que l’on mettait plus tard en bouteilles que l’on muselait. C’était le fameux cidre bouché, ou encore le « pas-poli » des facétieux qui pour les horsains ébahis, précisaient complaisamment : « du cidre qui pète en société », tout en éclatant bruyamment de rire. On n’en buvait que dans les grandes occasions. » [Désert, 1972]

 

1974 :

« Après fermentation, l'époque où les bondes sautent des barriques dans une brouée de mousse épaisse, giclera des fossets fins taillés dans les pots et les cannes de grès, le cidre splendide du pays de Caux : rouge ou jaune, sucré, piquant, un peu sur pour vous gaillardir le ventre et vous mêler au sang le sang même de la Normandie. » [Le ¨Povremoyne, 1974] 

 

1981 :

« C’est toute une image du pays de Caux, avec […] les déjeuners commencés à midi et qui s’achèvent à cinq heures avec de l’eau-de-vie de cidre et des chansons, parfois en chœur, mais parfois aussi tout seul […] » [Bouchard, Le Scour, 1981]

en construction

La renaissance (1980 à 2010)

Travaux de synthèse d’Arnaud Didier : 

« La renaissance (1980 à 2010) Au début des années 1980, la profession fait le constat d’un déclin alarmant des surfaces de verger traditionnel en Normandie. L’abandon des contingents d’alcool d’État (alcool destiné à la fabrication d’explosifs) est accompagné d’une politique d’incitation à l’arrachage des pommiers. Renforcée par la diminution du nombre d’exploitants agricoles, la diminution des surfaces de vergers fait craindre aux transformateurs une réelle pénurie de fruits à moyen terme. À partir de 1977 se développe alors, grâce à l’impulsion de l’interprofession et à des aides publiques, un nouveau type de verger dit spécialisé (ou basse-tige), permettant d’assurer un approvisionnement plus régulier des unités de transformation. Les surfaces de verger spécialisé en Normandie passent ainsi d’environ 200hectares en 1980 à 4 692 hectares en 2001. Parallèlement, la production fermière tend à se concentrer et à se spécialiser. En effet, l’activité cidricole, jusqu’alors simplement complémentaire d’une activité d’élevage bovin, devient pour bon nombre d’exploitations une réelle spécialité, une activité principale voire unique. Cette spécialisation des exploitations s’accompagne naturellement d’une recherche de qualité permettant d’assurer de meilleures ventes et donc un fonctionnement viable de l’activité. C’est donc à cette époque, entre la fin des années1980 et des années 1990, que les producteurs se regroupent en syndicats ou associations pour réfléchir et avancer collectivement sur les sujets qui les questionnent fortement, la qualité des produits et la communication principalement. Naissent ainsi des syndicats de producteurs comme dans le pays d’Auge, le Cotentin, le Perche, le pays de Caux, appelés à devenir plus tard des ODG (Organismes de défense et de gestion) avec la reconnaissance des AOC/ AOP. » [Didier, 2018]


Ainsi la reprise de vergers à des fins cidricoles chez les producteurs porteurs du projet AOP cidre du pays de Caux a permis une campagne de replantation qui leur permet aujourd'hui de produire un véritable cidre du pays de Caux. Jadis la ferme produisait en interne, en autarcie son propre cidre et parfois les pommes en surplus étaient vendues dans les cidreries locales comme il y en a eu sur Yvetot, par exemple, d'autres surplus partait pour la fabrication du cidre de Longueville, selon des témoignages.


Arnaud Didier poursuit son analyse en évoquant la période la plus récente sans pour autant se focaliser sur le cidre du pays de Caux :

« Grâce à toutes ces évolutions qu’a su gérer la filière, les nouvelles tendances de consommation, avec notamment la recherche de produits nobles, «naturels», ancrés dans des terroirs régionaux, dont on peut identifier les producteurs, trouvent une réponse parfaite dans l’offre cidricole normande. Il en résulte un dynamisme réel dans l’activité des producteurs, qui ont su s’adapter à ces nouvelles att entes. Le passage d’une génération à l’autre, de celle des producteurs de la renaissance des années 1980 à celle du renouveau des années 2000, a grandement facilité cette adaptation. La filière a vu arriver depuis quelques années un réel sang neuf, incarné soit par des enfants ou petits-enfants de cidriculteurs qui avaient à cœur de pérenniser le travail de leurs parents ou grands- parents, soit par des néo-ruraux, ou encore par des as du marketing qui croient dans le potentiel du cidre et en proposent désormais de nouvelles versions. [Didier, 2018]

« Les années 1990 sont marquées par une transformation de l’outil industriel avec la fermeture de plusieurs cidreries. Le groupe Pernod-Ricard, implanté depuis les années 1980, achète des cidreries et procède à la fusion et à la fermeture de certains établissements. La filière est alors confrontée à un problème d’absorption de la production des vergers basse-tiges dont la contractualisation était antérieure aux différents rachats. Ce double mouvement amène à une baisse des marges et un désengagement au fur et à mesure du groupe Pernod-Ricard, qui croyait de moins en moins au produit. Ce rapide historique explique le besoin, au début des années 2000, d’une restructuration importante de la filière. Or, les divergences de point de vue entre acteurs sur l’avenir à donner à la filière amènent à un blocage. Pour le dépasser, ils se tournent vers le Conseil Economique Social Régional de Basse-Normandie, qui produira une étude en 2002 sur la question de la filière pomicole. Ce rapport exhaustif est rattaché au présent avis. »

https://ceser.normandie.fr/sites/default/files/202411/LafilieredelapommeencidreenNormandieCESER.pdf

1972 :

« Le cidre était la boisson courante. […] Un petit fût était rempli de pur jus que l’on mettait plus tard en bouteilles que l’on muselait. C’était le fameux cidre bouché, ou encore le « pas-poli » des facétieux qui pour les horsains ébahis, précisaient complaisamment : « du cidre qui pète en société », tout en éclatant bruyamment de rire. On n’en buvait que dans les grandes occasions. » [Désert, 1972]

 

1984 :

"Des vaches du matin à celles du soir, les rasières de pommes qu'on bascule au pressoir, la fiente des poulaillers ramassée à larges pelles, avoir chaud et soif. Mais aussi la galette des rois, l'almanach Vermot, les châtaignes grillées, Mardi gras t'en va pas nous ferons des crêpes, le cidre bouché et les grenouilles pétées avec une paille. » [ Ernaux, 1984]

 

1986 :

« La proportion de fruits amers et doux peut varier selon le goût du consommateur. Le pays de Caux était renommé pour ses cidres amers et désaltérants, alors que le pays d’Auge était réputé pour ses cidres plus sucrés qui conviennent qui conviennent plus aux citadins. » [Chaïb, 1986]

 

1998 :

« : les pommes dites douces impropres à la consommation et destinées à la fabrication du cidre ; les pommes sûres ou pommes à couteau, on les nommait pommes d’hôpital, elles étaient soit consommées en famille soit en partie vendues. » [Morin, 1998]

Michel Morin, Itinéraire d’un enfant du pays de Caux, 1998

Les producteurs de cidre Pays de Caux sont regroupés au sein d'un syndicat présidé par Emmanuel Palfray. Cet organisme rassemble une douzaine de producteurs désireux de faire valoir leur produit local et d'obtenir une appellation d'origine protégée (AOP).

en construction

Naissance du projet AOP cidre du Pays de Caux

 

Compte tenu de ces éléments cartographiques, des témoignages recueillis sur le terrain me font penser que beaucoup de vergers des cours et masures ont périclité par abandon de la pratique de "faire son cidre soi-même" ce qui était courant et généralisé avant la prime à l'abattage, avant la période du remembrement, l'abandon des talus-fossés.


Depuis les années 1990 des tempêtes ont causé  la chute de pommiers ;  le nécessaire besoin de  place dans les cours pour construire de plus grands bâtiments agricoles afin d'y mettre à l'abri de plus gros tracteurs et engins agricoles ; les pommiers se sont vu encombrés de boules de gui ce qui a précipité leur chute ; les pommiers étant moins entretenus, taillés,  ils sont devenus pour certains moins productifs ; beaucoup de ruraux ont quitté la campagne pour venir habiter en ville et près des centres  urbains ce qui a causé l'abandon de pratiques cidricoles familiales.

Tous ces constats inscrits dans notre époque entre 1990 et 2005 me font penser que l'activité cidricole d'un cidre de pays aurait pu péricliter sans le travail et la volonté de cette quinzaine de producteurs locaux qui ont redonné une vitalité à notre boisson cauchoise, à l'heure du regain du brassage de bières tous azimuts aux goûts de terroir. 

 

en construction

Les producteurs du pays de Caux lancent le projet AOP en pays de Caux

un des pionniers : M et Mme Vittecoq, d'Azouville-Auberbosc.

 

Aux premiers temps du projet AOP Cidre du pays de Caux : M. Vittecoq d'Auzouville-Auberbosc, un adepte de l'agriculture non conventionnelle, sans chimie.

Jean-Pierre Vittecoq inacarne à la fois l'authenticité du terroir du pays de Caux et cette renaissance du cidre du pays de Caux.

Patrimoine Normand lui a consacré plusieurs colonnes dans son  dossier " Vive la pomme de Normandie ! " publié  en 2002 dans le numéro 41

 

Démonstration de taille et technique de greffage par Claude Beaune.

A gauche, M. Vittecoq. (Photo Alexandre Vernon © Patrimoine Normand.)

 

""L'authenticité du terroir :

Jean-Pierre Vittecoq et son épouse, dans le manoir de la Poulaillerie à Auzouville-Auberbosc en nplein coeur bdu Pays de Caux, ont constiyué de leurs mains, et sans aide d'aucune sorte, un verger conservatoire unique de quelques 1200 variétés anciennes de pommes, spécifiques de la région Haute-Normandie, dont sur 3 ha plus de 200 de pommes à cidre. Toute sa vie a été consacrée à la pomme, passionément. Ce fut un travail de longue haleine. Mais le résultat est là aujourd'hui avec ces belles pommes rondes et joufflues bien de chez nous, retrouvées dans leur ambiance et leur prospérité, celles que l'on croyait disparues à jamais, les Bailleul, Boskoop, Hôpital, Melrose, Richard, Calville, etc. et les inombrables Reinettes.

"Il faut sauvegarder les vieilles variétés caractéristiques de notre région. Il faut planter, et replanter sans cesse, pour que nos prairies retrouvent leur identité et leur saveur. Et que l'on reprenne goût à la pomme, la vraie, celle qui nous donne équilibre et santé." nous a dit M. Vittecoq, de toute sa conviction.

Tout en parcourant ses herbages émaillés de pommiers de haute tige à la tête ébouriffée - nous étions au Printemps et les  pétales tombées sur l'herbe semblaient  comme des flocons de neige - il ajouta : " A la suite de mes parents, c'est a un travail de sauvegarde que j'ai entrepris depuis des années, plantant des pommiers sélectionnés, inscrivant sur ordinateur la couluer, le goût, l'aspect et la qualité de chaque variété de pomme. Un travail qui n'a jamais été réalisé jusqu'alors. Mais, en plus, je recherche toujours quelques variétés anciennes disparues pour les faire fructifier. Ainsi en est-il de la pomme "court pendu rouge" qui date de 1423, et de quelques autres... D'ailleurs grâce à toutes ces variétés de pomme anciennes nous sommes en train de créer pour notre cidre l'appellation "AOC Pays de Caux" délivrée par le Comité des Pommes à cidre à Sées dans l'Orne"

Bien entendu, il n'est pas question d'utiliser des engrais chimiques. Pour le puriste, le seul traitement valable doit être naturel et il utilise depuis toujours exclusivement le purin d'orties pour son apport en azote et aussi le purin de fougères contre les pucerons lanigères. Bien entendu, il convient de prendre grand soin de la taille des arbres comme de la sélection des greffons. C'est pourquoi Monsieur et Madame Vittecoq organisent dans la région des journées pomologiques au printemps et à l'automne, des démonstrations de taille et de greffe au cours desquelles des spécialistes de la pomme donnent leurs conseils avisés. Les belles pommes de chez nous sont alors exposées, que l'on damire, tenté des les croquer : les Reinettes de toutes sorte, grises, blanches, d'Angleterre, de Bihorel...les Melrose de la vallée de la Seine, les Pigeons de Jérusalem du Pays de Bray qui ont la forme d'une poire, les Calville rouge d'automne ou blanches d'hiver, les Bénédictins tardifs, toutes mordorées et croquantes, les Belles de Boskoop, rouges de fierté et d'émotion... [...] 

La meilleure : la pomme de Normandie

"" L'histoire de la pomme ne s'arrête pas là. Car le fruit chéri des dieux est en perpétuelle évolution. Des producteurs de Seine-Maritime, regroupés au sein de l'Association "Norm'envie", pratiquant une culture raisonnée avec le concours d'une assistance technique très poussée, ont choisi de commercialiser leurs pommes sous la marque "Croquine", afin de garantir leur fraicheur et leur authenticité. Mais il est un conseil que nous a donné M. Vittecoqq, un véritable passionné de la pomme, c'est celui de respecter le calendrier de consommation. "Il ne s'agit pas de manger n'importe quelle pomme  n'imprte quand, chaque variété ayant sa meilleure période de maturation.""

In : Patrimoine Normand, n° 41 - février-mars-avril 2002, p.42-46.

A propos de Norm'envie

Norm'envie pommes et poires à couteau de normandie association Charte couteau région Bois-Guillaume

Informations et situation de l'association Norm'envie pommes et poires À couteau de normandie Exploitants agricoles, élevage, horticulture, aviculture ... dans la ville de Bois-Guillaume. thèmes : Charte, couteau, région

 Chemin de la Breteque 76230 Bois-Guillaume 76232 Bois-Guillaume

 

  • Siège de l'association :

     Chemin de la Breteque 76230 Bois-Guillaume

  • Date de création : 14/09/1999
  • Date de publication : 02/10/1999
  • Economie et développement local
  • Objet de l'association : promouvoir les produits de la région en regroupant les producteurs de fruits à couteau afin de s?organiser et d?échanger au mieux les informations lors de la commercialisation des fruits et en adhérant à la charte qualité

A propos du manoir de la Poulaillerie


Ce manoir à pans de bois, situé dans le hameau du même nom sur la route de Fauville, date du XVIème siècle.
Jadis couvert d’un toit en chaume, sa toiture aujourd'hui ardoisée ne retire rien au style cauchois qui le caractérise : colombages d’un brun foncé sur murs très blancs, verticaux au rez-de-chaussée et en croix de Saint-André à l’étage, petites ouvertures jumelées typiques de la région, boiseries en encorbellement sculptées avec sur l’extremité du bâtiment les silhouettes de Saint-Pierre et Saint-Paul, au-dessus de la porte d’entrée des anges.
A l'intérieur, une cheminée massive en pierre au-dessus de laquelle sont sculptés des médaillons de personnages avec au milieu une levrette héraldique, témoins d’une présence Renaissance, un buffet vitré, typiquement cauchois daté de 1836, avec une corniche sculptée de fleurs et de fruits, une table rustique, des assiettes de Rouen, un escalier de style Louis XIII...
Au-delà des grands arbres qui entourent la maison s’étendent des pommeraies.

In : https://www.auxpaysdemesancetres.com/pages/haute-normandie/seine-maritime-76/auzouville-auberbosc.html

 

Le verger familial Vittecoq

 

 

 

Pendant ce temps, dans le Pays de Bray, Fernand Bazerque entreprend une démarche similaire à Jean-Pierre Vittecoq avec son projet de verger conservatoire de pommes et de variétés anciennes du pays de Caux et du pays de Bray.

 

Fernand, sa vie, son oeuvre : Création du verger conservatoire à Bremontier Merval en 2001, création d'un verger conservatoire, rue de la Haie à Bois-Guillaume et d'un verger à Isneauville en 2018.

 

 

 

Fernand Bazerque : Passion et conviction

Post categor

Un fils de Paysan se met au service de fils d’agriculteurs et de leurs pères avec passion. Fernand quitte une région de châtaigner pour une région de pommiers, une autre passion s’amorce, qu’il assouvira dès la retraite en réunissant sur les terres de Merval plus de 400 variétés à cidre et à couteau

On vit dans le châtaignier, on vit de la châtaigne

Né en 1926 à Izaux, village des Hautes Pyrénées, Fernand est fils de paysans. Dans la maison trois générations se côtoient ; ses parents cultivent et conduisent le petit troupeau, sa grand-mère entretient la châtaigneraie familiale, son grand père aide chacun, et greffe les châtaigniers.

Un jour qu’il revient par la montagne avec 2 ou 3 jeunes châtaigniers sur l’épaule, son grand père se retrouve face à un loup menaçant. Laissant tomber les arbrisseaux, il frappe l’une contre l’autre la pelle et la pioche. Apeuré, le loup s’enfuit…

La maisonnée est rythmée par le travail, la châtaigne est l’essentiel du repas. D’autres en France connaissent la pomme de terre et le pain issu de farine de blé, ici c’est le pain de châtaigne, la soupe de châtaigne. On naît dans le châtaigner, on vit dans le châtaigner, on termine dans un cercueil en châtaigner.

Un petit garçon prometteur

À l’école déjà Fernand se distingue, bien sûr par les notes obtenues, mais aussi par son intérêt des études. Tous les sujets sont cautions à questionnements, son institutrice prend le parti de s’en ouvrir aux parents du jeune Fernand. « Que fera votre fils sur votre fermette ? Il a la capacité à poursuivre ses études, et aura un beau métier »

Fernand, au second rang, 3ème personne à gauche, sous le mot parloir

Instituteur, en Pays de Bray

Après le certificat d’études, puis le lycée, Fernand poursuit donc l’école normale d’instituteurs. Mais dans ce département de faible population il y a plus de diplômés que de postes d’instituteurs. Et c’est en 1949 (il a 23 ans) que Fernand sera recruté  directement par le recteur d’académie de Rouen, chez lequel il habitera même quelques jours avant de rejoindre son poste à Haudricourt.

Fernand a toujours gardé un souvenir ému de ces quelques années : Se lever tôt pour allumer le poêle à bois et réchauffer la salle glaciale, accueillir ses « petits » et leur ôter galoches et bandelettes en guise de chaussettes pour les faire sécher près du poêle…

« Mon Dieu, que ça sentait fort dans ma salle de classe » dira Fernand 50 ans après.

L’agriculture, autre passion

Très rapidement Fernand s’engage auprès des agriculteurs. Ses connaissances, rapidement reconnues, font de lui un « professeur » sans le titre. Il va enseigner tantôt dans les salles communales ou mairies, tantôt chez l’agriculteur.

Et là, Fernand se voit proposer un détachement de son ministère de tutelle pour rejoindre le ministère de l’agriculture, et enseigner aux enfants du petit centre de formation d’apprentis de Forges les Eaux.

Il poursuivra néanmoins à vulgariser ses connaissances auprès des agriculteurs.

Colette et Forges les Eaux

Léone, elle aussi institutrice organisera la rencontre entre Colette et Fernand. Colette est enseignante à l’école ménagère de Forges les Eaux, et bientôt le mariage est célébré, leur fille unique Danièle voit bientôt le jour.

Colette et Fernand dispenseront leurs cours dans leurs écoles respectives, s’épaulant l’un l’autre au besoin, attentifs aux enfants dont ils avaient la charge, avec tellement d’amour et d’attentions que, bien des années après, les adultes qu’ils sont devenus en parlent encore !

Le verger du Pays de Bray en péril

Fernand sait que l’agriculture du Pays de Bray a évolué ; certains agriculteurs délaissent les vergers, des pommiers disparaissent. Ajoutez à cela les primes à l’arrachage, la fin des marchés de pommes à cidre vers l’Allemagne et l’Angleterre, la fin du café Calva, le désintéressement du consommateur pour le cidre … Bref : il y a urgence !

Sauvons les, sauvons les !

1987 : A Brémontier Merval le projet de lycée agricole porté par l’association du Domaine de Merval avance à grand pas. Tout juste à la retraite, Fernand est sollicité pour greffer devant le château toutes les variétés qu’il pourra récupérer en Pays de Bray. Séduit par cette proposition, l’amoureux des pommes va sillonner ce Pays de Bray qu’il connaît si bien au volant de sa 2 CV !

Fernand le passe murailles

Fernand connaît tout le monde, et tout le monde connaît Fernand ; forcément, en 40 ans de carrière, il a formé les agriculteurs d’aujourd’hui, et Colette a enseigné aux jeunes femmes à tenir une maison, une famille, et faire la comptabilité…

Alors toutes les portes s’ouvrent, et Fernand prélève les greffons, enquête dans les vergers, pose des questions aux anciens, rencontre les « pomologues » les plus avertis (il parle souvent de Léon Grisel) et les obtenteurs de variétés par semis.

Il se procure les ouvrages nécessaires pour identifier les variétés et lorsqu’il n’y parvient pas, la pomme porte le nom de la personne auprès de laquelle il l’a récupérée (c’est ainsi que des pommes sont baptisées « Elie » « Grisel » et autres)

Le maître de la pomme expose

1990, première exposition de la collection sous la serre du lycée lors de journées « vivre la pomme » Déjà plus de 300 variétés. Pourtant Fernand avait promis qu’à 300 il arrêterait… Plus tard il dira de même lorsqu’il arrivera à 400.

Un brouillard terrible, mais les visiteurs sont nombreux. Et devant son exposition, Fernand est loquace, son accent pyrénéen détonne et enchante, sa voix résonne sous la serre. Le public charmé reçoit les informations en retenant son souffle, puis les questions fusent. L’orateur répond à chacun, donne des exemples, raconte une histoire. Fernand est un conteur pédagogue.

Papi Pommes

Au lycée chacun connaît Fernand, et parfois des élèves le rejoignent dans le verger. Alors Fernand leur parle des pommes et, généreux, les invite à les goûter, choisissant les meilleures. « Ces petites pommes pigeon, mes élèves en avaient dans la poche de leurs pèlerines. C’était leur 10 heures, leur goûter préparé par la grand-mère »

Paul, mon rayon de soleil

Depuis la retraite installés à Isneauville, Colette et Fernand reçoivent régulièrement Paul leur petit fils unique. Pour Fernand c’est un bonheur sans nom de passer du temps avec le garçonnet. Tous deux profitent de ces moments privilégiés de partage. Paul suit son grand-père partout, y compris dans les « chasses » aux carabes ou champignons. Fernand parle de Paul comme de son « rayon de soleil »

Un dernier bonheur

Mais voilà, le temps passe, Fernand a collecté 420 variétés de pommes qu’il laissera en héritage à Merval. Colette a compris et accepté sa passion chronophage (en automne Fernand est tous les jours à Merval)

Fin 2008 Fernand est hospitalisé dans un état critique, il a 82 ans seulement.

L’avant-veille de sa mort, Colette lui propose de regarder un reportage sur France 3, une courte émission se passant dans un lycée agricole. Et là, surprise, devant l’alambic de Merval : des élèves mettent en bouteilles du Pommeau, tandis que le journaliste pose des questions à François, son ami avec lequel il a passé tellement de temps, et qui transforme la pomme à cidre au lycée.

Fernand aura un très gentil mot à son adresse, ce seront ses derniers.[ ADM, 2025]

 

 

J'ai relaté à l'occasion de cette histoire du cidre du pays de Caux, de l'utilité et du recours au pommier sauvage et au sauvageon au 19e siècle ce qui a permis  la régénération des meilleures variétés de pommes  - de table et à cidre et à deux fins - 

l'histoire de nos pratiques agricoles et sylvicoles ont  contribué à dessimer ces pommiers sauvages et comme nous avons pun le lire précdemment, leur rareté est avérée depuis pour plusieurs raisons dont les défrichements, l'arrachage massif des haies, les besoins en porte greffes au siècle dernier. Aujourd'hui c'est la menace du rechauffement climatique qui peut affecter cet arbre légendaire, ce que nous expose Amandine Cornille en 2021, avec son aimable autorisation.

 

 

Le pommier sauvage : vie, survie et sauvegarde

Etat des lieux

par Amandine Cornille, Chercheure CRCN CNRS, Laboratoire génétique quantitative et évolution - Université Paris-Saclay, Inrae, CNRS, AgroParisTech, GQE - Gif-sur-Yvette, 2021

Les tribulations
en Eurasie
du pommier cultivé

 

Domestiqué en Asie il y a plus de 4 000 ans,
le pommier cultivé s’est ensuite hybridé
plusieurs fois avec des pommiers sauvages
durant son voyage jusqu’en Europe.


Ces pommiers sauvages sont aujourd’hui menacés
et des programmes de conservation
sont mis en place pour les préserver.

« Aujourd’hui, le pommier sauvage européen est menacé par la destruction
et la fragmentation de son habitat ou encore l’hybridation avec les pommiers cultivés »

 

"Une histoire de domestication complexe.  Quelle est l’origine des variétés de pommes que nous mangeons dans nos assiettes ? Des analyses génétiques d’échantillons de feuilles récoltés par des chercheur(e)s et le grand public depuis 2009, ont permis de répondre à cette question. Ces analyses ont montré que le pommier cultivé, Malus domestica, a été domestiqué entre les 10 000 et 4 000 dernières années, dans les montagnes du Tian Shan en Asie Centrale à partir de l’espèce locale de pommier sauvage, Malus sieversii.

Cette dernière présente des pommes aux goûts et aux formes très variés, et dans certains cas, très proches des pommes cultivées (Figure n° 1). Par la suite, le pommier cultivé a été amené en Europe, le long des routes de la soie, traversant ainsi l’Asie, le Caucase, puis l’Europe. Lors de ces tribulations en Eurasie, des échanges de gènes ont eu lieu entre le pommier cultivé et les espèces sauvages locales, tout d’abord, de manière anecdotique avec le pommier sauvage Caucasien, Malus orientalis. Le pommier sauvage européen, Malus sylvestris, est ensuite entré en scène relativement récemment, lorsque le pommier cultivé
a été amené en Europe par les Grecs et les Romains, il y a environ 1 500 ans. À ce moment-là, le pommier cultivé a été massivement introgressé1 par le pommier sauvage européen. Les deux espèces sauvages, européenne et caucasienne, présentent des fruits petits et acides.

(Figure n° 1) [1, 2].

 

Le pommier sauvage européen, cinq populations

À nouveau grâce à des marqueurs génétiques, l’histoire du pommier sauvage européen a pu être reconstruite depuis la dernière grande glaciation du Pléistocène. Ces marqueurs génétiques ont permis de montrer que, par le passé, le pommier sauvage européen a résisté au changement de climat. Il y a 20 000 ans, lors de la dernière glaciation, la baisse des températures a entraîné la migration des populations de pommier sauvage européen vers le sud de l’Europe. Plusieurs groupes se sont ainsi formés : en Scandinavie, dans les Balkans, à l’ouest et à l’est de la France et en Italie. Ces groupes ont évolué séparément et leurs génomes se sont différenciés. Il y a 10 000 ans, sous un climat qui se réchauffe à partir de l’Holocène, les pommiers sauvages ont regagné l’ensemble de l’Europe en conservant leurs particularités génétiques. (Figure n° 2, voies de migrations suivies par le pommier sauvage)
en conservant leurs particularités génétiques. De ce fait, on observe à présent cinq groupes généti ques de pommiers sauvages en Europe (Figure n° 3 et 4).

 

Le pommier sauvage européen menacé par les activités humaines
Aujourd’hui, le pommier sauvage européen est menacé par la destruction et la fragmentation de son habitat ou encore l’hybridation avec les pommiers cultivés. Les échanges de gènes des vergers de pommiers cultivés vers les populations naturelles de pommiers sauvages en forêt sont en effet massifs en Europe [3]. Ces flux de gènes peuvent menacer l’intégrité génétique à long terme des pommiers sauvages, alors même que cette espèce est déjà considérée en danger en Belgique et en République tchèque du fait de la fragmentation des paysages qui diminue drastiquement ses effectifs. Il est donc urgent de l’étudier, de le conserver et de le protéger.
Plateau de Saclay : une collection patrimoniale vivante de pommiers sauvages
Un projet multi-acteurs (académiques et non académiques, locaux, nationaux et internationaux [4, 5]) et multi-objectifs (recherche, conservation, pédagogie et paysager) a vu le jour : la mise en place d’un verger conservatoire, expérimental et
pédagogique sur le territoire du plateau de Saclay. Ce verger s’inscrit à terme dans un projet de conservation de la diversité du pommier sauvage en France, et plus largement en Europe, de sa reforestation, et de la compréhension de l’impact du
changement climatique chez les arbres fruitiers. Ce verger de pommiers sauvages du plateau de Saclay vise à répondre aux questions suivantes : Quelles sont les capacités de réponse des arbres fruitiers au changement climatique et aux attaques
de ravageurs ? Comment, dans un contexte de changements globaux (perte de biodiversité, changement climatique, fragmentation des habitats, déforestation), conserver de manière raisonnée les ressources génétiques du pommier sauvage
pour les futurs programmes de réintroduction dans les forêts et d’amélioration variétale de la pomme ? Ce site est aussi en cours de réplication en France (à plus petite échelle avec 100 pommiers par réplicat). Il est aussi à noter que les espèces
sauvages dans le Caucase et en Asie Centrale sont menacées. Des programmes de conservation sont aussi envisagés. 

[Amandine Cornille, 2021]

1 Introgression : Transfert de gènes ou d’allèles d’une population ou
espèce vers une autre.

Voir aussi du même auteur : www.jardinsdefrance.org/
pommier-sauvage-limpact-du-climat-sur-sa-genetique/

BIBLIOGRAPHIE
[1] Cornille A, Giraud T, Smulders MJM, Roldán-Ruiz I, Gladieux P.
The Domestication and Evolutionary Ecology of Apples. Trends in
Genetics 2014;30:57-65, doi:10.1016/j.tig.2013.10.002.
[2] Cornille A, Antolín F, Garcia E, Vernesi C, Fietta A,
Brinkkemper O, Kirleis W, Schlumbaum A, Roldán-Ruiz I. A
Multifaceted Overview of Apple Tree Domestication. Trends in
Plant Science 2019;24:770-782, doi: https://doi.org/10.1016/j.
tplants.2019.05.007.
[3] Cornille A, Feurtey A, Gélin U, Ropars J, Misvanderbrugge K,
Gladieux P, Giraud T. Anthropogenic and Natural Drivers of Gene
Flow in a Temperate Wild Fruit Tree: A Basis for Conservation
and Breeding Programs in Apples. Evolutionary Applications
2015;8:373-384, doi:10.1111/eva.12250.
[4] Vidéo sur le verger : www.youtube.com/watch?v=QzP_HPDUEbA
[5] Site internet du verger

Les producteurs de cidre Pays de Caux sont regroupés au sein d'un syndicat présidé par Emmanuel Palfray. Cet organisme rassemble une douzaine de producteurs désireux de faire valoir leur produit local et d'obtenir une appellation d'origine protégée (AOP).

en construction

L'activité des producteurs inscrits dans la démarche et le projet d'appellation AOP Cidre du pays de Caux avec l'état des lieux de leurs exploitations, de leurs vergers en s'appuyant sur l'ancienneté cidricole et pomologique de leurs endroitsles producteurs impliqués bdans le projet AOP CIDRE DU PAYS DE CAUX

 

Dans la plupart des cas les vergers existaient dans les masures closes et plantées.
Les plans et cartes anciennes du 18e au 20e siècle démontrent qu'à leurs endroits l'activité cidricole peut être attestée.



C'est le cas par exemple pour le verger du Clos d'Estain à Touffreville qui avec le temps a perdu de 1832 à 1947 la moitié de sa superficie pour disparaitre quasiment jusqu'en 2014. En 2024, la masure a retrouvé ses pommiers sur les 3/4 de sa superficie.

"Estelle GAGNEUX

Fille d’une mère sud-coréenne et d’un père français, je suis maintenant normande depuis plus d’une dizaine d’années. J’aime l’idée de pouvoir et savoir produire quelque chose de ses propres mains et de pouvoir le partager au plus grand nombre. J’aime aussi l'idée de devoir suivre le rythme imposé par la nature et d’apprendre à être à l'écoute de notre environnement. J’apprécie pouvoir exercer une activité qui me permet d’intégrer ma famille et leur montrer à quel point nous avons une nature généreuse mais fragile. 

Romain LUCAS

Originaire du Pays de Caux, je suis passionné par le monde agricole. J’aime ma région et plus particulièrement ce qui s’y fait en termes de pratiques agricoles. J’apprécie de développer mes connaissances techniques et d’apprendre par la pratique. Travailler un produit vivant demande beaucoup d’humilité et d’observation, c’est pourquoi j’ai très vite été attiré par la production de cidre." [Closd'Estain, 2025]

LE CLOS D'ESTAIN

Romain LUCAS
733 Rte d'Yvetot
76190 Touffreville-la-Corbeline
06 22 87 54 71

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Concernant le domaine cidricole d'Ocqueville qui  depuis le début du 19e siècle n'a cessé d'étendre la superficie du verger sauf à voir disparaître à la fin des années 1960, une partie importante de la plantation  et de revoir une campagne de plantation qui s'est amorcée  depuis 2008.

"Nous vous accueillerons dans notre corps de ferme typiquement cauchois, les moutons pâturant sous les vergers de pommes, et là, vous pourrez aussi, déguster nos produits issus des pommes à cidre du terroir." [Hédouin, 2025]

M. Hédouin a répondu au questionnaire : 
Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ?

Ceux que l'on a défini dans le cahier des charges pour l'aop cidre du pays de caux 

Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ?
3 éléments : la mer et ses falaises, sur les plateaux les champs de lin en fleurs au mois de juin et les clos masure avec leur pommiers.

Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ?
Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ?

Ermenouville, chaumière clos masure

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ?

Clos masure
Quels arbres associez-vous au pays de Caux ?

Les hêtres sur les talus, le pommier a cidre

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ?

Un p'tit coup de cidre

Comment décririez-vous votre propre cidre ?

Cidre en fermentation naturel, équilibré avec une touche d' acidité qui le rend frais et désaltérant. 

Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  en quelle circonstance ?

A ma communion entre 11 & 12 ans

-----------------------------------------------------------------------------------------------
Agriculteur et producteur de cidre de façon professionnelle depuis 20 ans, j' exploite un verger de 7 ha en basse tige et 1,5 ha en haute tige.

Je produis a partir des pommes à cidre du jus de pommes, cidre, apéritif de Normandie, eau de vie de cidre et différentes gelée de pommes poires cidre et confit de pommes que je propose dans mon magasin a la ferme le samedi de 10h a 17h.

Mes coordonnées HEDOUIN Richard 25 route de catteville 76450 Ocqueville [Hedouin, 2025]

SCEA HEDOUIN

Richard HEDOUIN
25 Rte de Catteville
76450 Ocqueville
06 85 06 57 34

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Concernant le clos du Pradon (Gonfreville)  dite ferme du Pradon a connu en son clos un verger qui n'a jamais cessé d'être depuis 1700- 1750, ce qui est le meilleur exemple de la continuité pomologique et cidricole  durant tout ce temps avec un déclin qui est à observer entre 1991 et le début des années 2000, courte période qui a amorcé  de nouvelles plantations dans la totalité de la masure dite du Pradon.

"Niché aux confins du Pays de Caux dans la commune de Gonfreville l'Orcher, aux portes du Havre, le Pradon est un véritable clos-masure du XVIIéme siècle. C'est en 1872 que la famille PALFRAY arrive au Pradon et, depuis cinq générations, elle façonne et construit l'histoire de cette ferme typique. C'est aujourd'hui Emmanuel qui perpétue la tradition : betteraves sucrières, blé, lin textile et pommes de terre pour les cultures, poulets, pintades, dindes et oies pour l'élevage.

Emmanuel PALFRAY, un agriculteur typique pour un parcours atypique. Sensibilisé depuis toujours par ses parents à la situation complexe de cette ferme péri-urbaine, Emmanuel décide avec eux d'accueillir le magasin des Huit Fermes dans l'ancienne écurie, en 1986, alors qu'il prépare son installation. A cette époque l'exploitation s'étend sur 90 hectares et est essentiellement tournée vers la production de pommes de terre de consommation à destination du marché des Antilles. Les céréales, le lin textile et les betteraves sucrières complètent les cultures.

Après un séjour de 2 ans au Tchad où il travaille comme technicien animateur d'un projet de gestion de l'eau (création de puits, de micro barrages, de petits ouvrages anti-érosifs...), il revient pour s'installer avec ses parents. Les bovins disparaissent en 1990 pour laisser place à la production de cidre qu'Emmanuel a décidé de développer pour répondre à un besoin du magasin et en prévision des diminutions de surfaces cultivables liées à l'agrandissement de la ville.

Cette passion pour cette boisson typiquement normande le conduira à devenir membre actif du Syndicat de Promotion des Cidres Fermiers de Haute Normandie et à œoeuvrer activement pour l'obtention de l'AOP des Cidres du Pays de Caux. Au bout de 15 ans d'un long combat autant administratif que technique, cet objectif sera bientôt atteint.

Au vue de la fragilité des sols et du besoin de matière organique, Emmanuel s'intéresse dès 1997 à la valorisation des déchets verts en compost pour améliorer la structure de la terre, avec pour aboutissement la création d'une plate-forme spécialisée pour le compostage en 2009. Afin de professionnaliser cette activité, il s'engage auprès de l'association des Agriculteurs Composteurs de France ( ACF) qui reconnaît, par la charte des bonnes pratiques du compostage, une qualité validée par Ecocert. Avec Terr'avenir, un autre groupe d'agriculteurs, il s'engage dans une démarche qui permet de certifier la plate-forme de compostage ISO 14001. Enfin,c'est pour valoriser ses productions de volaille et les produits à base de pomme qu'il crée Les Normandises du Pradon en 2012." [Palfray, 2025]

EARL DU PRADON

Emmanuel PALFRAY
13 B RTE DEPARTEMENTALE 6015
76700 Gonfreville-l'Orcher
02 35 30 42 41
06 23 15 56 24

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en trois siècles

------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Concernant les vergers de Valmont, ils sont visibles sur les plans de part et d'autre de la rivière Valmont, plus importants sur la rive droite au 20e siècle pour  devenir plus importants rive gauche de la Valmont.

"Olivier Ruette, producteur de 2 000 à 3 000 bouteilles de cidre par an avec d’anciennes variétés de pommes à Valmont (près de Fécamp) [Paris-Normandie, 2021]

 

RUETTE OLIVIER

Olivier RUETTE
17 Rte de l'Europe
76540 Valmont
02 35 28 84 70

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Concernant les vergers d'Heuqueville, au hameau de Epaville, les parcelles (vergers) ont changé de place plus au nord pour être transférés -  bien plus tard après leur disparition -  plus au sud sur d'autres parcelles sans pour autant perdre de la superficie sauf entre 1978 et 1994. Les nouvelles parcelles au sud du hameau ont vu le jour à partir de 1995.


Production cidricole artisanale utilisant les techniques traditionnelles. Une sélection d'une dizaine de variétés de pommiers pour un cidre équilibré sur un petit verger de 2,6 hectares à Heuqueville.
Gammes de produits commercialisés : Cidres ; Jus de pommes ou de poires ;  Cidres de glace ;  Vinaigre de cidre ; Pommeau de Normandie / apéritif ; Calvados / eau-de-vie de cidre

 

CIDRE SIMON

Simon VALIN
28 Imp. de la Jonc Marinière
76280 Heuqueville
07 68 84 40 29

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en trois siècles

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Concernant le verger du Quesnay à Pissy-Pôville,  planté déjà au moins en 1832, il a vu sa superficie doubler en 1988  ce qui est un exemple assez remarquable en un seul endroit.

 

EARL SAINT JOSEPH

Pierre LAMBARD
740 Le Quesnay
76360 Pissy-Pôville
02 35 91 51 08

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Concernant le verger de la Chesnaie à Ouainville, la masure a toujours été plantée depuis le 19e siècle.

La Ferme de la Chesnaie est une exploitation familiale située à Ouainville, entre Cany-Barville et Fécamp. Elle s'étend sur environ 100 hectares de Surface Agricole Utile, cultivant du maïs, du lin, des betteraves, du blé et des prairies. Nous élevons également 130 vaches laitières et produisons entre 7 000 et 8 000 bouteilles de Cidre Fermier destinées à la vente, aussi bien pour les particuliers que pour les professionnels. Nos pommes proviennent de notre verger ainsi que de producteurs locaux, proches de la ferme.

La production de cidre a été lancée à la fin des années 90, par mon oncle Christophe LESUEUR puis mon père Bertrand COUTURIER.

Jusqu'à présent, nous ne produisions qu’un cidre brut, en fermentation naturelle et non filtré. Cette année, nous élargissons notre gamme avec un cidre doux en bouteille de 75cl, un cidre brut en 33cl et du jus de pomme. Nous proposons nos produits à la vente directe à la ferme, ainsi que sur quelques marchés pour les particuliers. Nous travaillons également avec des restaurants, bars et épiceries du pays de Caux.

 

"La Ferme de la Chesnaie
La Chesnaie est une ferme familiale située en Normandie entre Dieppe et Le Havre. 

La ferme se compose d'environ 100 hectares de Surface Agricole Utile (Mais, Lin, Betteraves, blé & prairies). De plus, la Ferme compte environ 130 vaches laitières à son actif. Enfin, nous produisons entre 7000 et 8000 bouteilles de Cidre Fermier Brut par an, destinées à la vente.

Notre Cidre Fermier Brut est réalisé avec des pommes ramassées à la main au cœur de nos vergers Normands.

- L'agriculture, une passion familiale -"

GAEC DE LA CHESNAIE

Ferme Couturier
380 Impasse de la Chesnaie
76450 Ouainville
06 03 61 54 63

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

---------------------------------------------------------------------------------------------
Concernant le verger du clos-verger des Coudreaux de Villequier, les vergers ont toujours existé depuis au moins le début du 19e siècle avec une perte de pommiers entre 1978 et 2015 et depuis 10 années d'importantes plantations ont vu le jour.

M. Craquelin a répondu à mon questionnaire ainsi : 

Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ? Dieppe et Fleury-sur Andelle

Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ? les clos masures et les champs de lin

Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ? la fete du hareng, les marchés au bestiaux , le ramassage des pommes

Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ? Goderville

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ? clos masure

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ? le hêtre les poiriers de caux et pommiers à cidre ( la bedan en particulier )

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ? la besson
 
Comment décririez-vous votre propre cidre ? frais et désalterant, parfums de réglisse belle acidité
 
Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  en quelle circonstance ? 4/5 ans la besson que j'allais chercher à la barrique pour le soupé quand mes parents étaient à la traite.
EARL DES COUDREAUX

François-Xavier CRAQUELIN
Hameau des Coudréaux
76490 Rives-en-Seine
02 35 95 20 54

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- 
Concernant le verger de Cidre Les Calètes :

Luc Pollet et François Hariel
 
𝙇𝙀𝙎 𝘾𝘼𝙇𝙀𝙏𝙀𝙎,  Cidre, jus de pommes et apéritif de pomme
𝗣𝗿𝗼𝗱𝘂𝗰𝘁𝗲𝘂𝗿𝘀 𝗟𝘂𝗰 𝗣𝗼𝗹𝗹𝗲𝘁 𝗲𝘁 𝗙𝗿𝗮𝗻𝗰𝗼𝗶𝘀 𝗛𝗮𝗿𝗶𝗲𝗹, 𝘈𝘭𝘭𝘰𝘶𝘷𝘪𝘭𝘭𝘦 𝘉𝘦𝘭𝘭𝘦𝘧𝘰𝘴𝘴𝘦, 𝘗𝘢𝘺𝘴 𝘥𝘦 𝘊𝘢𝘶𝘹, 𝘕𝘰𝘳𝘮𝘢𝘯𝘥𝘪𝘦
 
LES CALETES

Luc POLLET et François HARIEL
8 Rte du Manoir
76190 Allouville-Bellefosse
Instagram

à l'endroit du verger qui s'est créé vers 1985-1989 par M. Vittecoq à Auzouville-Auberbosc

Concernant le verger de la mare aux pommes à Carville-Pot-de-Fer, la masure a toujours connu des pommiers  depuis le 19e siècle dans la cour mais depuis au moins depuis 2018-2020 deux vergers ont vu le jour à l'extérieur de la masure.

 

" La Mare aux Pommes est une cidrerie en terre de Caux, terroir privilégié des vergers à pommes. Nous produisons et transformons des pommes pour offrir des produits fermiers, normands et bio.”

“Une Histoire de Passion et de Transmission, Portée par des Valeurs Authentiques.”
Les origines de l'exploitation se situent en 1909 quand Louis et Marie posent les bases de la ferme familiale en polyculture élevage. Les premiers pommiers sont plantés dans un terroir unique : Le Pays de Caux

 

“À La Mare aux Pommes, nos valeurs ne sont pas qu’un discours : elles s’expriment dans chaque pomme que nous cultivons, chaque produit que nous créons, et chaque moment partagé autour de nos cidres, jus ou eaux de vie.”

EARL DELAMARE

Grégoire DELAMARE
201 Rue du Calvaire
76560 Carville-Pot-de-Fer
06 78 77 51 15

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

 

Concernant le verger à Octeville, la parcelle a toujours conservé ses pommiers au moins depuis 1800 qui était auparavant un labour. 

"C'est à Octeville-sur-mer, au cœur du Pays de Caux, que se situe la ferme Hérault où la famille est implantée depuis 5 générations. Floriane vous accueille et vous propose son cidre fermier artisanal, produit sans pesticides. Notre verger regroupe une vingtaine de variétés de pommes à cidre, ce qui lui confère un goût unique. Nous produisons un cidre brut, non pasteurisé. La prise de mousse se fait naturellement après la mise en bouteille. C'est ce qui caractérise les cidres fermiers "bouchés", à la différence des cidres "gazéifiés"."

 

ROCHE FLORIANE

Floriane ROCHE
47 Rte de Montivilliers
76930 Octeville-sur-Mer
06 30 88 26 90

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en trois siècles

Concernant les vergers de Flamanville on peut noter le présence des vergers dans les masures jusqu'en 1832 qui se sont étendus un peu entre 1832 et 1955 puis la parcelle a été remplacée par des labours de 1973 à 1994. Ensuite le verger a repris le triple du terrain perdu jusqu'à aujourd'hui.

"Producteur de produits cidricoles depuis des années avec les pommes de mon verger bio, je serai heureux de vous faire découvrir les saveurs du Pays de Caux.

Les pommes sont cultivées dans le verger jouxtant le magasin.
Productions de la ferme : Jus de pommes, cidre, pommeau, eau de vie, vinaigre de cidre
Productions labellisées Agriculture biologique : Pommes

Voici le cidre bio et le cru fermier du Pays de Caux par excellence et comme on l’aime. Benoît Lemercier compte parmi les cidriers de la terre. Son exploitation est née, en 1987, en lieu et place de ce qui était à l’époque, une ancienne production laitière avec une basse-cour plantée de vieux pommiers haute tige. Affilié au syndicat de promotion des cidres de Haute-Normandie, récompensé à la Saint-Jean des Cidres, ce producteur-récoltant traditionnel (certifié Ecocert) prépare à la ferme de doux nectars tout ce qu’il y a de plus naturel. Du cidre donc mais également de l’apéritif normand, jus de pommes et eau de vie. Vente à la ferme sur rendez-vous. Sait-on jamais si vous passez par là ?" [Lemercier, 2025]

LEMERCIER BENOIT

Benoît LEMERCIER
8 Rue des Chaumières
76970 Flamanville
02 35 96 85 70

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

Concernant le verger du clos de Bennetot  les pommiers ont toujours été présents ce que montre les cartes anciennes du début du 19e siècle avec une perte de pommiers entre les années 1978 et 2020 sur une des deux masures de chaque côté de la route.

"C'est aux confins de notre territoire caussiterrien, dans un écrin de verdure, que Richard FOUQUE produit du cidre, des jus de pommes, et du vinaigre. Ce fils d'agriculteur a toujours rêvé de fabriquer ses produits dans la pure tradition normande, au sein de son propre clos masure. Il s'est donc installé à Bennetot en l'an 2000, a replanté des pommiers et loué une dizaine de vergers dans un rayon de 10 kms. Sa production de pommes, est dite « naturelle » : il n'utilise aucun pesticide ou autres additifs. Chaque année, ses pommes, dont il extrait le jus à l'aide d'un pressoir bois,  sont ramassées à la main. Vous l'aurez compris, un cidre caussiterrien à déguster !"
Richard Fouqué 1080, Route de Bos Bennetot 76640 Terres-de-Caux - richard.fouque@orange.fr

- Vente à la ferme : Ouvert tous les après-midi de la semaine pendant la période estivale et les vacances Ouvert le matin sauf mercredi, samedi et dimanche matin - Sur les marchés :  . Veules-les-Roses (mercredi matin) : Rue de la Plage.  . Fécamp (samedi matin) : Place Bigot.  . Luneray (dimanche matin) : près de l'église. - Magasins : . Ferme fontaine à Sausseuzemare-en-Caux . La petite surface à Harfleur . Chez Manon Legrand, Ferme éternellement bio à Saint-Arnoult . Jérôme Sousa-Mariano à Beuzeville-la-guérard . Le petit canon à Fontaine-le-dun - Divers restaurants sur la côte.  

FOUQUE RICHARD

Richard FOUQUE
1080 Rte de Boos
76640 Terres-de-Caux
02 35 10 50 71

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

Concernant le verger de Bretteville-Grand-Caux, la masure de l'écomusée du cidre a toujours été plantée de pommiers mais il est à observer entre 1978 et 2008 une perte de pommiers. Depuis 2008, de nouveaux pommiers ont été plantés.

"Installé dans une ferme typique du Pays de Caux, je produis du cidre et organise des visites de la cidrerie et du clos masure. Je suis la 4ème génération sur cette ferme familiale." [Godefroy, 2025]

Vincent GODEFROY

Production de cidre 
"Nous produisons plus de 70 000 bouteilles de cidres par an. On peut retrouver 4 cidres différents, le doux, le demi-sec, le brut et l'extra brut." [Godefroy, 2025]


Producteur transformateur, 1315 route de Goderville - 76110 BRETTEVILLE-DU-GRAND-CAUX
Ferme familiale cidricole typique du Pays de Caux, Gammes de produits commercialisés :
Cidres ; Poirés ; Jus de pommes ou de poires ; Cidres rosés ; Cidres de glace ; Vinaigre de cidre ; Pommeau de Normandie / apéritif ; Calvados / eau-de-vie de cidre. 

"L'écomusée de la pomme et du cidre
Plongez dans l'univers du cidre et des pommes en Normandie, avec des activités variées et des produits locaux à découvrir dans notre clos-masure typique du pays de Caux." 
[Godefroy, 2025]

GODEFROY VINCENT

Vincent GODEFROY
1315 Rte de Goderville
76110 Bretteville du Grand Caux
02 35 27 41 09

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
Concernant le verger de Contremoulins, le verger de la masure  a vu une perte de pommiers sur plusieurs décennies que M. Navarre compense à d'autres endroits à Contremoulins, Valmont et Bosville.

 

"Entreprise artisanale créée en 2000, notre cidrerie traditionnelle par amour du terroir et du savoir-faire, vous offre une visite du lieu de fabrication au clos masure.
Au fil du temps, grâce à une transmission orale, la cidrerie des Hautes Falaises est heureuse vous faire découvrir la fabrication du cidre, du ramassage des pommes à la mise en bouteilles.
Le propriétaire vous fera déguster différents cidres gratuitement. Endroit très respectueux de l’environnement.
En constante évolution avec l’amour des traditions et le respect du terroir ; parce que les bulles ça stimule !"
Cidrerie des Hautes Falaises

Jean-Louis NAVARRE
3 Route de Colleville
76400 Contremoulins
06 70 99 54 55

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en trois siècles

Concernant le verger de Cidre Mousse :


La Cidrerie Mousse est implantée de Criquetôt l’Esneval à Allouville-Bellefosse, Normanville, La Vaupalière, Mont Saint Aignan, Bois Guillaume, Isneauville, Franqueville Saint Pierre et Rouen.

 

Elle est le magnifique bâtiment cidricole de Manue et Gilles, le verger, les vergers glanés de la pointe de Caux à l’est de Rouen et la cave des arsins.

 

Elle est née de l’histoire affective de ma famille Franc comtoise où on pouvait déjà boire le moût en fontaine du pressoir d’Eugène.

 

C’est des pommes choisies au sol à la main dans des vergers et prés vergers haute-tige nichés au sein de clos masures, de fermes laitières ou allaitantes ou de villes.

 

Elles sont conservées à l’abri en attendant le froid de novembre et d’être triées à nouveau une à une puis broyées dans un grugeoir et pressées à l’aide d’un pressoir à cage.

 

Les moûts obtenus sont goûtés, scrutés, soutirés pour obtenir une fermentation lente de 3 à 6 mois du cœur de l’automne au printemps.

 

Et une prise de mousse qui prend son temps."

 

MOUSSARD FRANCOIS-XAVIER

François-Xavier MOUSSARD
21 Rue des Arsins
76000 Rouen
02 32 76 17 67

à l'endroit de l'actuel verger qui a évolué en deux siècles

Voici le questionnaire à la "Rousseau, Proust, Flaubert, Maupassant, Ernaux, Bussi"

à propos du pays de Caux, du cidre... que j'ai imaginé pour l'adresser aux cauchois et aux horsains.

Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ?

Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ?

Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ?

Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ?

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ?

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ?

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ?
 
Comment décririez-vous votre propre cidre ?
 
Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  en quelle circonstance ?

 

Concernant les réponses d’Annie Ernaux à propos du questionnaire :

Quels sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ?

Je n'ai qu'une vision très vague des frontières du Pays de Caux.Il s'étend le  long de la Seine entre Rouen et Le Havre, du Havre à Dieppe, le long de la Manche.A l'est, je ne sais pas. Dans mon imaginaire, le pays de Caux est le territoire des contes et romans de Maupassant et celui de mon enfance, de mes ascendants.

Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ?

Les paysages qui me viennent en pensée sont les falaises en premier, puis les grands "fossés" (talus) plantés de hêtres. Des paysages sévères sous un ciel tourmenté.

 

Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ?

Parmi les coutumes, je citerai les foires, la Saint-Romain à Rouen, la Saint-Luc à Yvetot, et  les "assemblées" dans les villages, disparues, que j'ai connues un peu. On y mangeait des "douillons" ou chaussons aux pommes. 

 

Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ?

Aucun village ne représente pour moi spécifiquement le pays de Caux, lequel est consubstantiel à ma jeunesse dans sa totalité. Je me souviens avoir  eu cependant des préférences: Villequier, Duclair, Héricourt en Caux, Les Petites Dalles.

 

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ?

Je n'ai connu que le nom de cour jusqu'à une époque récente.

 

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ?

J'associe les pommiers, bien sûr, et ensuite les hêtres, au Pays de Caux.

 

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ?

Comment décririez-vous votre propre cidre ? (celui de votre père)

Le cidre et le pays de Caux étaient indissociables. Mon père a "brassé" jusqu'en 1956, avec son pressoir, entraîné par un moteur. Il remplissait les barriques du cellier et l'on vendait le cidre aux clients de l'épicerie, lesquels apportaient leurs bouteilles que ma mère courait remplir à la chantepleure - prononcée "champleure" .

 

Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ? en quelle circonstance ?

Je n'ai aucun souvenir de ma première gorgée de cidre. De fait, quand j'étais enfant, mes parents m'ont donné à boire le plus souvent de l'eau minérale avec un peu de grenadine, ce que je préférais au cidre, dont il faut se souvenir qu'il était alors très "raide" et déconseillé par les médecins. C'est beaucoup plus tard que j'ai apprécié le "cidre bouché", plus alcoolisé et pétillant.

 

Concernant les réponses de Constant Lecoeur à propos du questionnaire :

Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ? 

La pointe ouest du département et les limites est excluant l’agglomération de Rouen, jusqu’aux limites des vallées menant à Dieppe.

Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ? 

Succession de villages et de hameaux sur un plateau avec valleuses (sans cours d’eau permanent) et vallées enherbées ou boisées

Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ? 

Fête des rois (seule fête chômée du Pays de Caux), Fête de la Chandeleur (candeleux avec renouvellement des gages), Procession des rogations (3 jours avant l’Ascension), Fête de la moisson, le « pluaisé » (moitié de la moisson), Le « caudais » (fin de la moisson)

Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ? 

Varengeville (village avec hameaux et très plantés sur « fossés » en bord de mer et avec valleuse)

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ? 

La cour par rapport à la plaine. Le clos-masure inventé récemment par les géographes

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ? 

Le hêtre qui est droit et magnifique, puis le chêne qui a souvent le bourgeon terminal attaqué d’où l’arbre rarement droit, le frêne au feuillage plus tardif, les alignements de pommiers et de poiriers quand ces derniers subsistent.

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ? 

Bien sûr le cidre (la boisson du quotidien et le bouché pour le dimanche et les fêtes), le calva avec la frottinette (pour les grands froids et contre les maux de gorge)
 
Comment décririez-vous votre propre cidre ?
 

Plutôt coloré et légèrement amer
 
Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  En quelle circonstance ?
 

Enfant, nous n’y avons pas droit. Ma première gorgée de cidre bouché devait être pour ma 1ère communion. Je n’avais pas encore droit au vin…

Concernant les réponses du producteur indépendant Michel Ameline du Hameau de la Roquette à Ganzeville :

 

Quels sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ?

Je situerais la limite est au niveau de l'entrée dans le Pays de Bray, avec une ligne grosso modo nord-sud passant un peu à l'est de Frichemesnil. Et pour le nord-est le "Petit Caux" me semble constituer la frontière.

Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ?

Ben... les pommiers “haute tige” sous lesquels peuvent paître sans trop de dégâts les vaches, dans des cours de ferme entourées de doubles rangées de hêtres sur talus (nos fameux "fossés"). Et aussi la proximité de La Manche, surplombée de hautes falaises de craie que semblent trancher horizontalement des plans réguliers de silex. (En mode plus réduit ces falaises en surplomb de l'eau apparaissent aussi ça et là en bordure de la Seine.)

D'une façon plus générale il y a lieu de préciser que tous les éléments cités précédemment s'inscrivent dans un ensemble constitué par un plateau culminant à environ 120 mètres d'altitude et dans lequel de nombreux petits cours d'eau ont creusé au fil du temps de sinueuses et verdoyantes vallées et valleuses.

Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ?

La fête de fin de moisson que l'on nomme "caodé", par exemple. La "fête des rois", aussi (toujours célébrée chaque année à "L'Archelle" d'Hattenville).

Et puis, sur la côte, les célébrations liées aux croyances religieuses et à la pêche (Saint-Pierre des marins, fêtes du hareng, par exemple). Par ailleurs une coutume qui consistait pour chacun des convives, à la fin de grands repas de famille, à se lever à son tour pour chanter SA chanson (ou en raconter "une bien bonne") a malheureusement laissé la place, dans une large mesure, à une sorte de chacun chez soi (si ce n'est chacun pour soi) rythmé par les sollicitations des "étranges lucarnes", ordinateurs, téléphones portables etc...

Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ?

Mon “hameau cauchois par excellence” serait sans doute Bondeville (partie la plus peuplée de la commune de Sainte-Hélène-Bondeville, près de Fécamp, où j'ai passé la plupart des vacances de mon enfance). Mais c'est, par définition, tout à fait personnel et il est à parier qu'un très grand nombre d'autres hameaux et villages pourraient se prétendre très représentatifs également de notre Pays de Caux.

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ?

L'expression "cour masure" me semble bien représentative de notre habitat rural.

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ?

Avant tout le pommier et le hêtre (que j'ai déjà mentionnés dans ma réponse à la question 2), bien sûr. J'en ajouterais volontiers un troisième pour m'en tenir à ceux qui me semblent les plus caractéristiques : Ce grand poirier qui nous donne les fameuses "péyes dé co" !

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ?

Après un très long temps d'hésitation je dirais... le cidre

Comment décririez-vous votre propre cidre ?

Je le dirais d'aspect plutôt ambré, rarement aussi pétillant que je le souhaiterais MAIS assurément "dret de goût"... quand il veut bien être réussi, "forchément".

Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ? en quelle circonstance ?

j'ai tendance à “croire me souvenir” qu'il avait l'excellent goût (quoiqu'un peu acide, sans doute) de la transgression, que j'avais autour d'une dizaine d'années et que c'était à la chantepleure, dans le cellier (ou plutôt "à la chaontpleuese, daon l'chélié").

 

Concernant la réponse de Maurice Renard de la Société Centrale d'Agriculture de la Seine-Maritime

Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ?
la mer à l'ouest,Bellencombre Cailly à l'est, Rouen Yvetot au sud
Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ?
les haies doubles ou triples et les terres de la plaine limoneuse


Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ?
l'habitat dans les masures

Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ?
Gonzeville

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ?
clos masure

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ?
les chênes et les hêtre

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ?
le cidre
 

Comment décririez-vous votre propre cidre ?
brut et mousseux
 

Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  en quelle circonstance ?
dés 4 ans dans le Pays d'AUGE

Concernant la réponse de Michel Bussi, écrivain :

Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux?

La Manche au nord, la Seine ou Sud, la Bresle au Nord et le pays de Bray à l’est.


Quels éléments du paysage retenez-vous?  

Les vallées des fleuves (durdent, saane, dun etc…) qui entaillent le plateau cauchois, sous forme souvent de routes enfoncées dans des talus plantés.


Quelle coutume s'y rattache selon vous ?

Des campagnes traditionnellement ouvrières, avec une influence religieuse modérée. Une vie rude en contraste à la richesse patrimoniale de la région, et à la présence, dès le XIXème surtout, de horsains apportant la richesse, et magnifiant les paysages (résidents secondaires, propriétaires de manoirs, artistes occupant le Caux maritime etc…). l’innovation et le développement vient d’ailleurs ! Les cauchois sont des terriens, malgré la proximité maritime. La mer est peu accessible.


Masure, cour ou clos-masure?

Clos-Masure !


Quel arbre peut-on associer au pays de Caux?

L’ hêtre (et son insoutenable légèreté…)


Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux?

Le calvados, le cidre et la Bénédictine

Concernant la réponse de Michel Lerond, auteur : 

Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ?

Pas si simple... Pour les personnes extérieures à la région, je dis que le Pays de Caux c'est le triangle Rouen-Dieppe-Le Havre, ce qui est bien sûr approximatif mais situe bien les choses. Quant aux limites est et nord-est, c'est le Pays de Bray, mais qui lui-même a des limites un peu floues, selon que l'on parle de Bray géologique, bien circonscrit, ou le Bray administratif, plus large et débordant parfois un peu sur le Pays de Caux...

 

Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ?

Bien sûr les talus plantés des cour-masures.

 

Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ?

Je ne suis pas sûr qu'il en reste vraiment.

 

Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ?

Alors là, je donne ma langue au chat !

 

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ?

Plutôt cour-masure, mais aussi clos-masure... quand il le faut.

 

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ?

Le hêtre bien sûr, sur les talus.

 

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ?

Et hop, un coup de cidre !

 

Comment décririez-vous votre propre cidre ?

Je ne suis pas producteur et petit buveur.

 

Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  en quelle circonstance ?

Peut-être vers 7 ou 8 ans ??

Concernant la réponse de François Evrard :
 
Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ?
En gros, les limites du 76
 
Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ?
Falaires cayeuses, belles demeures, plateau + quelques vallées et valseuses, clos-masures, vaches
 
Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ?
?
 
Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ?
Touffreville-la-Corbeline (à cause du nom)
 
Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ?
Clos-masure
 
Quels arbres associez-vous au pays de Caux ?
Pommier, chêne...
 
Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ?
Calva, cidre
 
Comment décririez-vous votre propre cidre ?
Brut rugueux ou demi-sec. J'aime les arômes de terroir mais aussi ceux plus fruités
 
Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ? en quelle circonstance ?
À huit ans (en 1967), un copain de classe m'invite un jeudi après-midi. On joue, on goûte et je partage avec lui sa cruche de boisson. Je retourne chez moi et j'ai le souvenir que ma mère n'était pas très contente de me voir revenir... dans un certain état.
 
Concernant la réponse de Colette Corblin, horsène - qui vient du delors - du Lot mais qui est restée vivre en pays de Caux depuis tout ce temps.
 
 
"les limites est et nord-est (pour moi en gros l’arrêt est vers Neufchatel!!
 
Les éléments typiques du pays de Caux restent déterminés par mon arrivée en 1958 à Notre Dame du Bec  : des fermes basses, sombres, d’immenses terres labourées, de la boue dans les chemins…pas très gais quoi !
Mais la côte et les falaises Superbes!
 
Les coutumes , aucune idée …et le reste non plus !
 
L’arbre c’est le hêtre pour moi .
 
Le cidre bien sûr, je préfère celui d’autrefois, de Moyaux.
 
Mon premier souvenir de cidre date très précisément de 1958 : ma mère prenant sa classe à la rentrée de septembre à ND du Bec. Nous attendions notre conteneur d’affaires (lits, table etc) avant d’entrer dans le logement vide de l’instituteur précédent, dans la mairie école à côté de l’église; charmant logement, la fenêtre de ma petite chambre ouvrait sur …le cimetière luisant sous la pluie.
Nous étions à l’hôtel  à Montivilliers. Et un soir que nous mangions, l'accorte patron nous a offert et fait découvrir le CIDRE !
Seulement en bon farceur, il a demandé à mon père d’ouvrir la bouteille.
Et bien sûr le cidre a fusé partout aux alentours. Cela a bien fait rire , mais nous avons apprécié ce breuvage sauvage. Une fois installés à l’école, j’allais régulièrement chercher du cidre à la tireuse de l’épicerie, jusqu’au moment où mes parents ont arrêté en raison des dommages intestinaux.
Voilà mon souvenir du premier cidre !"
Concernant ma réponse :
 
Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ?
j'ai toujours pensé que vers le Nord-Est  c'était  après Les Hayons, plus à l'est : Bosc-Bordel
et du côté de l'Andelle à Mesnil Raoul, Boos.
 
Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ?
près de la mer ; les valleuses sèches, les marais des vallées, les ondulations du plateau, l'abrupter des falaises prenant les teintes du sous sol à meme le pan de falaises,  comme à Varengeville ; 
à l'intérieur les mornes plaines, les masures  (talus et fossés) et les boscs ainsi les vallées encaissées et verdoyantes de la Saane, de la Durdent, de la Scie, de la Valmont, du Cailly, de l'Austreberthe... les colombiers, les mares, les maisons en brique et silex, les chaumières et maisons à pan de bois ainsi que les manoirs de brique et de silex blanc et noir (Manoir d'Auffay près de Oherville, le manoir d'Ango...)
 
Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ?
 
Jadis les courses de vélo, la fête du village, l'assemblaye ;  les crèpes, les boulloches et les douillons ; les concours de domino et de coinchée ; la fête des moissons et les fêtes de la pomme et l'odeur de la presse  en ville ou dans la ferme et le village, la fête du hareng...
 
Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ?
 
Bourg : Doudeville, Allouville-Bellefosse, Criquetot-l'Esneval, Saint-Laurent-en-Caux
Bourg balnéaire : Yport, Vaucottes, Veules-les-Roses , grandes et Petites Dalles
Ville et gros bourg  : Yvetot, Montville, Cailly, Luneray, Goderville, Valmont, Le Bourg-Dun
 
Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ?
 
J'ai d'abord dit cour puis la cour-masure et désormais cour et/ou masure
 
Quels arbres associez-vous au pays de Caux ?
 
Pommier, l'épine, le hêtre et l'orme
 
Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ?
 
Le cidre, la besson ;  la goutte, la rinchette, un canard, le coup de pied au cul, le gloria et la boisson chaude, la "foutinette"  se composant d'eau chaude, de sucre et d'eau-de-vie de cidre... 
 
Comment décririez-vous votre propre cidre ?
 
Celui que faisait mon père le goût entre celui de M.Navarre et de M. Lambart : du brut, bien brut idéal un peu rèche avec tout mets et plats-dessert et spécialités du pays de Caux (volaille, mouton, pâtés, viande en daube)
 
Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ? en quelle circonstance ?
 
Après le lait de mon enfance, ce fut très tôt la "besson" (l'ordinaire, tiré à la barrique dans le cellier de la maison à Hautôt-Saint-Sulpice) puis le cidre bouché un peu plus tard à Yvetot.
Je garde encore la sensation d'un cidre doux puis virant vinaigre plus la saison avançait vers l'été : on n'avait pas encore l'eau potable en 1964 à Hautôt. Pour attendre le cidre nouveau, on allait ravitailler à la source d'Héricourt-en-Caux sur la route de Grainville-la-Teinturière à la Fontaine Saint Mellon. Arrivé à Yvetot en 1964 on a eu l'eau au robinet et le dimanche on buvait du cidre bouché avant de goûter aussi au vin de la Loire grâce à un voisin. 
 
« D’ordinaire on buvait de la bêsson qu’on allait tire à la barrique au cellier à Hautot-Saint-Sulpice. Plus grand à Yvetot, je buvais du cidre bouché aux repas de fête - le « cid'qui toq » en cauchois - le cidre qui toque la tête, qui étourdi, disait ma mère Anne-Marie. A Noël on mettait le cidre en bouteille et le reste du cidre nouveau de la barrique on le buvait comme cidre de la soif à Hautot. Ce cidre brut avait une robe jaunâtre à orangée, de nature légère mais complexe, très peu sucré et très sec, légèrement acidulé en bouche avec une petite pointe d'amertume. » [Levaillant Pascal, 2022] 
 
 

Concernant les réponses de  Dominique Leroux à propos du questionnaire : un cauchois installé en pays de Bray à la Cidrerie Petit Clos.

Dominique Leroux a été au service du laboratoire NEOLAIT nutrition animale. Ses travaux ce sont concentrés sur le vinaigre de cidre, sa fabrication...., les moyens pour concentrer la partie nutritionnelle de la pomme.

 

Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ? 

La limite naturemme est la vallée de la Varenne - St Saens

Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ? 

les clos masures, les églises en pierre silex grès


Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ? 

Le bien manger, le dialecte cauchois


Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ? 

Chaque village a sa spécificité - Yvetot et ses coutumes sont des trésors d'architecture de bon sens

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ? 

clos masure

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ? 

Le hêtre de talus, le pommier à cidre

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ? 

Le cidre
 
Comment décririez-vous votre propre cidre ?
 

Le cidre cauchois est plus amer que celui du pays de Bray plus acidulé, celui du pays d'Auge plus corsé
 
Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  En quelle circonstance ?
 

J'en ai bu toute mon enfance, de la barrique à la bouteille. C'est toujours un régal.

dominique LEROUX
CIDRERIE PETIT CLOS
48 route de la forêt
76 390 LE CAULE SAINTE BEUVE
TEL 0235936652 port 06 30 69 20 85
www.cidreriepetitclos.fr

Concernant les réponses de Jean-Marc Vasse à propos du questionnaire : 

Jean Marc Vasse est  notamment Délégué Général de l'Interprofession Horticole française (Paris) ; Maire de la commune de Terres de Caux ; Premier Conseiller communautaire délégué Caux Seine Agglo ; Président de l'agence Caux Seine Développement.

 

Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ? 


La vallée de la Scie, ou la vallée de la Varenne

Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ? 

Les clos masure de rideaux d’arbres (chênes, hêtres) et de haies cauchoises


Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ? 

Le brassage des pommes, la distillation pour le Calva, les concours aux bestiaux,

Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ? 

Il y en a tant : ce devrait être l’objet d’un jeu à la manière du village préféré des francais !

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ? 

Clos-masure.

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ? 

Le hêtre, fagus. Fagus  le Faye ( Lieu planté de hêtres) Fauville, Auffay, etc.

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ? 

Le cidre, le poiré
 
Comment décririez-vous votre propre cidre ?
 

« du gros cidre »
 
Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  En quelle circonstance ?
 

Alors, enfant, dans le cellier de mon grand-père, directement à la barique.

 
Concernant les réponses de Anna Schmitt à propos du questionnaire : 
 
Anna Schmitt a été directrice d'un établissement pour personnes en situation de handicap à Canteleu. Elle a fondé un Comité du cidre  avec les résidents et d'autres cantiliens amateurs de cidre. 

Cette activité du cidre au centre Handas, Canteleu de 1989 à 2009 a été encadrée par Anna Schmitt, ancienne directrice de Handas entre 1986 et 2010.

 
Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ? 
 
Les contours du Pays de Caux sont les falaises, puis la mer et les prairies
 
Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ? 
 
Les éléments que je retiens sont surtout les champs à perte de vue, la floraison du lin, les lieux dits avec leur entourage d'arbre
 
Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ? 
 
La coutume qui se rattache au Pays de Caux sont la sorcellerie et le rebouteux
 
Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ? 
 
Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ? 
Je dis cour
 
Quels arbres associez-vous au pays de Caux ? 
 
L'arbre : le pommier en fleur
 
Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ? 
 
La boisson : le cidre mais aussi ce qu'il nomme la boisson du cidre mélangé à de l'eau 
 
Comment décririez-vous votre propre cidre ? 
 
A une époque , on fabriquait du cidre avec les résidants du foyer Handas qui s'améliorait au fur et à mesure du temps de la fabrication.
 
Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  En quelle circonstance ? 
 
La première fois que j'ai bu du cidre, j'avais 6 ans et je venais avec mes parents en vacances chez Mme CAVELIER qui louait une ferme à ST LEONARD. Nous étions des petits Lorrains qui ne connaissaient que les mines de charbon. Avec mon frère, on se mettait sous le tonneau et on ouvrait le robinet tout doucement puis après on allait roupiller dans les foins, des souvenirs merveilleux. 
 

Concernant les réponses de Michel Bonmartel à propos du questionnaire : 

Michel Bonmartel est l'yvetotais qui m'a fait découvrir la thèse de Michel Traversat.

Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ? 
Le contour le plus court est le meilleur 

Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ? 

Les talus plantés de hêtres sont les éléments les plus marquants du paysage


Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ? 

Je n'ai pas d'idées de coutues précises


Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ? 

Veauville-Les-Quelle représente bien le pays de Caux

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ? 

Avant la création de Clos Masure je disais Corps de ferme

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ? 

Le hêtre est l'arbre du pays de Caux



Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ? 

Le cidre évidemment 
Comment décririez-vous votre propre cidre ?
 

"le mine était le meilleur" 
Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  En quelle circonstance ?
 

Je bois du cidre depuis toujours

Le 30 Mars 2025

 
 

Concernant les réponses d'Isabelle Kaanen  à propos du questionnaire : 

Isabelle Kaanen Vandenbulcke est née en 1955, est française d'origine belge. Elle est l'auteur du Chemin de la ferme (1985) et du Ciel rouge (1998). Historienne auteur du "Chemin de la Ferme" et d'un roman historique sur l'exode des Belges pendant la Première Guerre mondiale.

Quelles sont pour vous les contours du pays de Caux à l’est et au nord-est ?

Longtemps le pays de Caux s’est étendu jusqu’à la Bresle. Mais, à l’est de la Béthune, la contrée offrait un paysage différent, une économie autre, et une culture originale. On peut parler de « Grand Caux » rayonnant autour d’Yvetôt et du « Petit Caux » au Nord-Est du département.


Quels éléments du paysage du pays de Caux retenez-vous ?

Un touriste au mois de juin ne peut qu’être impressionné par  les chaumières avec un faîtage d’iris, par les cavées bordées de hauts talus, et sans nul doute par les champs de lin en fleur. Ajoutons les falaises, le cours de  la Veules, quelques jolies églises, le charme opère.
 

Quelles coutumes se rattachent au pays de Caux selon vous ?

Les marnières, parfois les primevères plantées sur les hauts talus...
Le parler, des surnoms attribués au jeu de dominos... et l’accent un peu traînant


Quel village ou hameau représente le mieux le pays de Caux ?

Le village d’Ermenouville...

Dites-vous masure, cour, cour-masure ou clos-masure ?

Tout est selon le contexte. Un clos masure m’indique une identité agricole, la masure, une maison à colombage.

J’emploie plutôt le terme clos-masure que cour – masure.

Quels arbres associez-vous au pays de Caux ?

Le chêne , le hêtre, l’orme... mais j’ai connu un pays de Caux autrefois avec des charmes le long des chemins.

Quel breuvage peut-on associer au pays de Caux ?

Il fut un temps où l’on y buvait de la bière, voire de l’eau rougie, du poiré...Au XIXe, le cidre est devenu la boisson quotidienne dans les fermes, le calvados ou l’eau de vie pour la rincette du café .

Aujourd’hui, y-a-t-il un breuvage véritablement associé au Pays de Caux... ? Peut-être encore le cidre.
 
Comment décririez-vous votre propre cidre ?

J’aime le cidre mais n’en fais pas.
 

Quel est votre souvenir de votre première gorgée de cidre, à quel âge ?  en quelle circonstance ?

Lorsque j’étais très jeune, quelqu’un  de la maison allait tirer le cidre à la futaille, le midi, mais la boisson n’était pas pour les enfants.  Il fallait attendre l’âge de la communion dite « solennelle » pour en goûter, je crois. Du reste, lors des fêtes de famille, au  « vin d’honneur »,  une bouteille de cidre « bouché » - maison trônait  toujours sur les tables.

Autre souvenir, le gaulage et le ramassage des pommes à cidre, les jeudis après-midi d’octobre ou novembre et durant les vacances de la Toussaint. Les grands sacs remplis étaient emportés à la cidrerie.

En guise de conclusion provisoire, force est de constater une volonté de faire revivre la tradition du breuvage normand et cauchois à la pomme par des productions variées non exclusivement focalisées sur un cidre bouché, pétillant du "brut" au "demi-sec" ou "doux". Les producteurs conservent une production traditionelle maintenant un cidre cauchois de terroir néanmoins la gamme des produits augmente.

Il faut voir là une volonté de  satisfaire le plus large public et davantage de  consommateurs face à la montée en puissance de vins toujours plus qualitatifs, des bières de cru, de plus en plus implantés localement en pays de Caux,y compris à voir venir le retour de la cervoise qui se produit dans la Somme, celle qui a été un des motifs de la remplacer au 15e siècle par le cidre du pays de Caux.

L'appelation AOP cidre du pays de Caux serait surement un gage de perrenité d'une activité cidricole cauchoise. Les consommateurs ont une appetance grandissante sur des produits de terroir. Ces produits mériteraient d'être proposés sur les tables des restaurants car enn pays de Caux il n'est pas rare de se voir proposer des cidres venus d'ailleurs qui pour la plupart on déjà obtenus le sésame d'une appaelation AOP, AOC, pour certains d'entre-eux.

Sur un autre plan,  certains s'inquiètent de l'état de la qualité d'eau que le consommateur peut consommer d'ordinaire soit au robinet soit en eau minétrale en bouteille.

En effet comme l'eau est une ressource précieuse pouvant se rarefier du fait du réchauffement climatique, de la pollution qui pénétre en profondeur jusqu'aux nappes phréatiques, compte tenu de l'augmentation de la demande en eau potable et de la croisance démographique, qui sait si d'autres alternatives  devront être privilégiées pour économiser cette ressource vitale et précieuse avec le recours aux boissons que l'humain fabriquait depuis l'antiquité : cervoise, vin,  bière, cidre !

Consommateurs, citoyens et décideurs devront  surement prendre à l'avenir des options différentes et appropriées afin d'accéder pour le plus grand nombre à des boissons potables saines et hygièniques car si l'eau courante devient impropre à la consommation humaine et animale du fait de contamination dépassant les seuils respectables ce sera une question à traiter au plan national comme au plan international. 

Force est de constater que les problématiques liées aux eaux brutes , aux eaux dites grises, aux eaux-vannes, aux eaux usées traitées urbaines, aux eaux de pluie, aux eaux pluviales sont nombreuses et potentiellement inquiétantes pour nous tous. A des côuts  prohibitifs pour maintenir une consommation d'eau potable, faudra-t-il revenir à l'usage des boissons traditionnelles ayant eu cours depuis l'antiquité?

Le cidre  normand, comme le cidre breton,  ont été une alternative qui s'est maintenue durant presque un millénaire et qui  sait si demain on ne devra pas replanter  massivement des pommiers, poiriers en Normandie mais où? 

Il faudrait alors s'interroger sur la necessité de recréer des masures, des closages et des cours à cette fin.

La pomme, le jus de pomme, le cidre  continueront-ils de contribuer à notre salut pour assouvir un besoin vital : la soif ! ? c'est à dire s'hydrater et compenser nos pertes en eau. 

L'avenir nous le dira

2005 :

« « Gastronomie, soupe à l’oseille cauchoise, salade cauchoise, crevettes au cidre, matelote d’anguilles de Caudebec-en-Caux, Pot-au-feu de gigot d’Yvetot, […] » [De Saint-Jean, 2005]


 In : René Dumesnil, La Seine normande, Gens et pays de chez nous, Edit J.De Gigord, Paris, année 1935, p.99.

In : le cidre du pays de Caux - Le sol, contrées, terres, exposition - Francis Yard, poète normand - Le cidre, étude historique documentaire et pratique par Francis Yard, Rouen, Editions Point de vues, 2009 :

In : Jehan Le Povremoyne, Les noces diaboliques, Sotteville-lès-Rouen, Les éditions A. Allais, 1974, p. 39.

In : Poires et Pommes, fruits de pressoir, Parcs Naturels Régionaux de Brotonne et de Normandie-Maine, 1982, p.28.

In : Le Viquet, Vive la pomme, trimestriel, 1987.

 

Partager cet article
Repost0