Citrouille, potiron ou betterave fourragère ou sucrière pour les illuminations du 31 octobre...en pays de Caux !
En pays de Caux la tradition des betteraves creusées et illuminées avaient cours bien avant que les américains nous innondent de leurs fameuses citrouilles creusées et illuminées qui ont finalement détrôné nos betteraves fourragères anglo-normandes et du nord-est de la France (presque définitivement au début du 21e siècle).
C'est sans compter sur l'Alsace qui revisite cette tradition germanique s'étant propagée également en pays de Caux - comme le rapportent les études consultées - chez nous par les peuples anglo-saxons et norois suite probablement aux raids dits barbares ou germaniques depuis le 4e siècle.
Les grands bretons et les irlandais auraient répandus en Bretagne la tradition des gros navets creusés et illuminés au 31 octobre comme nous rappelle les exploitants de la ferme d'Epaville, en pointe de Caux.
Intrigué par une animation prévue à la fin du mois d'Octobre organisée à la ferme d'Epaville, je me suis interrogé sur le retour d'une tradition intégrant des betteraves sucrières cultivées dans leur exploitation.
Retour de tradition en pays de Caux des betteraves creusées et illuminées
en forme de tête de mort comme celle creusée ci-dessus par mes soins.
La betterave fourragère pour les lumières du 31 octobre.
Tradition cauchoise depuis le 5e siècle apportée par les "Germains" comme le rapporte Sébastien Günther, voir la carte ci-dessous, éditée par ses soins.
"Deux heures d’atelier à la ferme pendant lesquelles vous serez immergés dans la maison d’autrefois pour y évoquer les origines de la fête d’Halloween. Vous irez ensuite sous le hangar près du bois afin de réaliser en famille votre lanterne d’Halloween à partir de betteraves sucrières. Ce sera l’occasion d’aborder le thème des cultures, de la betterave, des circuits courts et du sucre…
Pour que la visite soit encore plus mémorable, venez déguisés !
À partir de 4 ans – accompagné d’un adulte
Sur réservation uniquement : ferme-epaville.com rubrique découvrir et s’amuser, ferme de découverte"
in : https://www.lehavre-etretat-tourisme.com/fr/fiche/montivilliers/atelier-halloween--les-betteraves-sucrieres_TFOFMANOR076V523K7C/
La tradition des betteraves fourragères creusées et illuminées en pays de Normandie viendrait d'Alsace et du nord et l'est restée longtemps notamment dans le pays de Caux jusqu'à ce qu'elle soit supplantée et délaissée au profit des citrouilles après-guerre.
Cette proposition insolite avec des betteraves sucrières à la ferme d'Epaville m'a remémorré un fait qui dans les années 1980, m'avait été rapporté par "Mémé Dudu" âgée de plus de 80 ans, elle-même originaire d'Hautôt-le-Vatois, avant qu'elle s'installe avec son mari à Alvimare en 1925 - A leur retraite elle quitta Alvimare pour Yvetot, à la toute fin des années 1960.
Vers la fin des années 1980, c'est à cette période qu'elle me le raconta, évoquant des souvenirs autour d'une tasse de tisane à la mauve : dans le pays de Caux il y avait une tradition des betteraves fourragères creusées et illuminées, tradition vécue au temps où elle habitait Alvimare àpartir des années 1925, son mari exerçant le métier de bourrelier spécialisé en aménagement de cariole à chevaux.
Elle me racontait que des betteraves était creusées pour y loger de petites bougies le soir du 31 octobre au moment de la Toussaint.
C'est la seule personne cauchoise qui m'a conté cela. Elle m'a confié cela - comme elle me racontait bien d'autres souvenirs - car à la vue des citrouilles et potirons allumés au 31 octobre à Halloween, elle rigolait bien de voir tout ce nouveau folkore sachant qu'elle me disait qu'on inventait rien de nouveau asteu. Elle déplorait que la tradition des betteraves fourragères, creusées et éclairées par des bougies avait malheureusement disparu au profit des potirons et citrouilles.
Les betteraves choisiés pour laeur grande dimension étaient creusées par la base pour qu'elle trouve une assise stable, pour mettre la bougie à l'interieur ou creusées latéralement selon leur taille et volume.
Ces betteraves étaient placées au bord de la nationale Rouen-Le Havre à Alvimare.
Recherchant des informations tout azimut, lisant un article de Simone Morgenthaler sur cette tradition alsacienne je me suis dit que cette tradition raontée par la mémé "Dudu" venait peut-être finalement de l'est de la France !
N'étant plus le seul cauchois à évoquer cette supposée tradition, j'ai cherché à me documenter davantage.
Voici ma synthèse :
" L'article fort bien documenté de Simone Morgenthaler, rappelle une ancienne tradition alsacienne de betteraves fourragères creusées en forme de crânes, appelées «Totekëpf ou « ùskelischti Dìrlìpse » », qui étaient illuminées par des bougies et placées sur les rebords de fenêtres pour créer une atmosphère étrange. Cette coutume, aujourd'hui disparue, a été remplacée outre-Atlantique par celle des citrouilles, popularisée par Halloween.
Simone Morgenthaler, en cherchant à raviver cette tradition en Alsace, a découvert grâce à Sébastien Günther, spécialiste de l'histoire mérovingienne, que cette pratique n'était pas tellement d'origine celtique mais plutôt germanique.
Sébastien Günther apporte des éclaircissements sur les « Rünbengeister » (esprits dans les navets) qui étaient répandus dans les régions germanophones (Allemagne, Autriche, Suisse, etc.) et dans certaines zones comme les îles britanniques, avant d'être adaptées en citrouilles en Amérique pour Halloween. Günther souligne que cette tradition est absente des territoires celtiques et correspond davantage à l'aire culturelle germanique. Il explique que les Germains, arrivés en Alsace vers 406, ont conservé leurs traditions tout en vivant en parallèle des populations celto-romaines, déjà influencées par Rome et le christianisme.
Une carte montre que cette coutume était présente dans les régions germanophones et absente de l'ancienne Gaule, sauf dans des zones comme l'Alsace, la Moselle et les Flandres françaises. En effet sur la carte de Sébastien Günther transmise par Simone Morgenthaler, elle indique les cercles rouges où les betteraves taillées existent ou ont existé. On se rend bien compte dit-elle qu’il semble y avoir un lien avec les régions germanophones, et de son absence de l’ancienne Gaule. Ce que je peux remarquer à ce titre c’est le cercle situé entre le Cotentin et le pays de Caux (les calètes de la Gaule Belgica), hormis l’Alsace et la Moselle qui a été tantôt prussienne, allemande et française) et hormis les Flandres françaises de l’ancienne Gaule Belgica, la France n’a pas eu depuis cette tradition des betteraves fourragères creusées.
A ce propos et dans ce contexte socio culturel et historique je rapporte une anecdote mentionnant le dire d’une octogénaire du pays de Caux, en Normandie. Elle évoquait une tradition similaire de lumières le 31 octobre. C’est ainsi que durant près de 40 ans, cherchant d’autres témoignages cauchois suggérant une influence culturelle ancestrale, j’ai découvert cette histoire racontée par Simone Morgenthaler traduisant la trace d’une influence germanique plutôt que celte en Normandie du pays de Caux au Bessin.
Ainsi en dépit des idées reçues la tradition des betteraves creusées est une coutume germanique ancienne, quoique proche mais très distincte des pratiques celtiques, qui a influencé les célébrations modernes d'Halloween. Elle témoigne des interactions culturelles entre Germains et Celto-Romains dans l'histoire européenne y compris en pays de Caux de l’ancienne Gaule Belgica puis romaine qui subirent les raids (invasions ou migrations) dites « barbares » ou « germaniques », depuis la fin du 3e siècle.
Pour prolonger la lecture vous pouvez consulter le lien suivant de cet ouvrage : HISTOIRE DES INSTITUTIONS POLITIQUES DE L'ANCIENNE France - L'INVASION GERMANIQUE – LE ROYAUME DES FRANCS PAR NUMA DENIS FUSTEL DE COULANGES - Membre de l'Institut (Académie des Sciences morales) - Professeur d'histoire en Sorbonne PARIS - HACHETTE - 1922
In : https://mediterranee-antique.fr/Fichiers_PdF/DEF/Fustel%20de%20Coulanges/HPIAF_2_Inv_Germ.pdf
Et découvrirt l’article numérique de Simone Morgenthaler
In -https://www.simonemorgenthaler.com/lorigine-des-betteraves-creusees-en-crane-et-eclaires-dune-bougie-2/"
Voir carte d'implantation de la tradition où l'on voit un cercle sur le pays de Caux, entre pays de Caux et pays Bessin.
Ces éléments établis, et croyant au départ cette histoire véritable racontée par Mémé Dudu mais jamais entendue par ailleurs, je crois maintenant qu'il faille la faire connaître aux cauchois et aux normands - selon la carte de Sébastien Günther.
- Est-ce à voir avec cette tradition perdue, faut-il encore rappeler que beaucoup d'Alsaciens ont quitté l'Alsace à différentes périodes de notre histoire commune y compris à vouloir rejoindre l'Amérique par le port du Havre entre 1815 et 1870 pour tenter de rejoindre NewYork :
Si l’on considère la période dans son ensemble, il est incontestable que les Alsaciens, les mosellans majoritairement, s’embarquaient au Havre. Ils feront quelques exceptions à cette règle. Ces exceptions sont datées, nettement circonscrites dans le temps comme nous le rapporte Nicole Fouché dans un ouvrage publié avec le concours du Conseil régional d'Alsace et du Conseil scientifique de l'Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne) en 2020.
In : https://books.openedition.org/psorbonne/49333
Les Alsaciens en pays de Caux : Cette migration via Le Havre a peut-être laissé à quai des alsaciens en pays de Caux et alentour avec leurs traditions : il est vrai qu'en pays de Caux beaucoup de fêtes villageoises au 20e siècle se célébraient autour d'une bonne choucroute. A Yvetot dans les années 60, par exemple, la charcuterie Deneuve vendait grandement de la bonne choucroute parmi ses produits dits de Charcuterie fine, Cuisine et Spécialités rue Pasteur (souvenir, souvenir) et sur Rouen, Bonsecours, le Havre, beaucoup d'établisssements alsaciens dispensaient la culture alsacienne (soirée bière et soirée choucroute). N'assiste-t-on pas encore dans des fêtes villageoises à la fameuse "soirée choucroute" en pays de Caux, en pays d'Auge...
Nous pourrons regarder autrement une tradition oubliée mais qui pourrait renaître comme le tente - à partir de la betterave sucrière - la ferme d'Epaville et qui sait si elle pourrait renaitre avec la véritable betterave fourragère en pays de Caux.
In : https://www.simonemorgenthaler.com/lorigine-des-betteraves-creusees-en-crane-et-eclaires-dune-bougie-2/"
Remerciements à Simone Morgenthaler, à Sébastien Günther, pour leurs archives et leurs témoignages, et à "Mémé Dudu" de m'avoir conté cette histoire du temps jadis en pays de Caux et de rétablir une vérité d'haloween dont l'origine ne serait pas américaine mais européenne : "Rendre à César, ce qui lui appartient" N'est-il pas !